Avant chaque échéance gouvernementale, les hommes politiques brandissent la “menace” d’un gouvernement de “technocrates”. Une classe politique qui concède, hypothétiquement, son monopole sur la vie publique et sur le présent et l’avenir de tout un peuple dont elle a gâché le passé, et qui menace les Libanais de confier des responsabilités techniques à des techniciens! En cas de blocage politique, nous nous dirigeons, nous menacent-ils à chaque fois, vers un gouvernement de technocrates. Par défaut.
Au Liban, l’homme public (ou la femme publique) venu aux affaires par un concours de circonstances pour le moins hasardeux et opportuniste, parachuté en politique par accident ou par hérédité, incompétent lui-même par définition, “menace” les Libanais de laisser faire, pour une fois, des experts et des spécialistes. L’expérience récente montre en tout cas que même un outsider de la politique, dès qu’il rentre dans le moule, perd sa technicité et devient homme/femme politique. Et la déception est d’autant plus grande, que les espoirs d’une évolution positive du système sont légitimes…
Un rapide screening laisse supposer que les faux “technocrates” des dernières années, qui ont aussitôt revêtu l’uniforme de l’homme politique pédant et stérile, sont de vrais losers dans leurs spécialisations d’origine… Souvent donc, un mauvais juriste fait un bon ministre, un médecin peu porté sur la médecine devient un bon député, un homme d’affaires en perte de vitesse trouve dans la politique un regain d’activités…
Les Libanais méritent pourtant de bons et authentiques technocrates. Ils existent. Mais la classe politique n’a besoin d’eux que pour remplir les secondes rangées… Aussi, faut-il le préciser, un technocrate est, par définition, “un responsable qui exerce un pouvoir politique en faisant prévaloir les aspects techniques”. C’est un “haut fonctionnaire qui utilise ses compétences techniques pour acquérir et exercer un pouvoir politique”. Il n’est jamais loin de la politique, c’est vrai. Mais, au Liban, il a tendance à se jeter, très vite, dans les bras d’une classe politique décadente, surtout lorsqu’il s’agit d’un vrai-faux technocrate, celui dont mon dictionnaire dit qu’il porte un sens “souvent péjoratif”.
Fadi Assaf
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