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Écoles en ruine, professeurs en fuite : l’éducation au Liban au bord du gouffre

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Le Liban, longtemps considéré comme un centre éducatif majeur au Moyen-Orient, voit aujourd’hui son système éducatif s’effondrer sous le poids de la crise économique et politique. Écoles publiques en ruine, enseignants sous-payés, fuite des talents et privatisation croissante sont autant de défis qui menacent l’avenir de millions d’élèves. Face à cet effondrement, quelles solutions peuvent être envisagées pour sauver l’éducation libanaise ?

La dégradation des infrastructures scolaires

Depuis le début de la crise économique en 2019, les infrastructures scolaires libanaises se sont détériorées à un rythme alarmant. Faute de financements publics, de nombreuses écoles publiques fonctionnent avec des bâtiments délabrés, sans électricité ni accès à l’eau potable. Selon le ministère de l’Éducation, plus de 40 % des établissements scolaires publics nécessitent des rénovations urgentes pour assurer des conditions d’apprentissage minimales aux élèves.

Dans certaines régions rurales, les écoles n’ont même plus les moyens de fournir des manuels scolaires, obligeant les enseignants à utiliser des supports obsolètes datant parfois de plus d’une décennie. Les coupures d’électricité, qui peuvent durer jusqu’à 20 heures par jour, empêchent la tenue régulière des cours, obligeant les écoles à raccourcir les horaires ou à suspendre certaines matières nécessitant du matériel spécifique, comme l’informatique ou les sciences. Selon l’UNICEF, plus de 700 000 élèves libanais ont été affectés par des interruptions de scolarité en 2023.

Le manque d’infrastructures adéquates a également un impact sur la sécurité des élèves. Plusieurs incidents ont été signalés, notamment l’effondrement de toits dans des écoles mal entretenues. En 2022, un rapport du Centre de recherche et de développement pédagogiques (CRDP) indiquait que 15 % des établissements scolaires présentaient un risque structurel nécessitant des travaux immédiats.

Une fuite des enseignants aggravée par la crise économique

L’un des aspects les plus alarmants de cette crise est l’exode des enseignants qualifiés. Avec la dévaluation massive de la livre libanaise, les salaires des enseignants se sont effondrés. Un enseignant du secteur public qui gagnait l’équivalent de 1 500 dollars en 2018 perçoit aujourd’hui moins de 100 dollars, une somme insuffisante pour couvrir les besoins élémentaires.

Conséquence directe, une grande partie du corps enseignant cherche à émigrer vers l’Europe ou les pays du Golfe, où les salaires sont bien plus attractifs. Selon une enquête de l’Université Américaine de Beyrouth (AUB), plus de 60 % des enseignants interrogés ont exprimé leur intention de quitter le Liban d’ici deux ans si la situation ne s’améliore pas. Cet exode prive les élèves libanais de professeurs qualifiés et expérimentés, compromettant encore davantage la qualité de l’enseignement.

Le ministère de l’Éducation tente de limiter les départs en proposant des aides financières ponctuelles, mais celles-ci restent dérisoires par rapport à l’ampleur du problème. En 2023, moins de 20 % des enseignants ont reçu des compensations monétaires en dollars, ce qui ne suffit pas à endiguer la fuite des talents.

L’impact de la privatisation sur l’éducation

Face à l’effondrement du secteur public, l’enseignement privé s’est imposé comme une alternative, mais à un coût prohibitif pour la majorité des familles. Les frais de scolarité dans les écoles privées ont explosé, certains établissements exigeant des paiements en dollars frais, rendant l’éducation hors de portée pour une grande partie de la population.

Les écoles de renom, autrefois accessibles aux classes moyennes, sont devenues réservées aux élites financières. Dans ce contexte, l’écart entre les élèves issus de milieux favorisés et ceux issus de familles modestes ne cesse de se creuser. La privatisation progressive de l’éducation pose également un risque d’exclusion pour des milliers d’enfants qui, faute de moyens, sont contraints d’abandonner leur scolarité. Selon une étude de l’UNESCO, le taux d’abandon scolaire dans les écoles publiques libanaises a augmenté de 30 % entre 2020 et 2023.

Les enseignants du privé ne sont pas mieux lotis. Malgré des frais de scolarité élevés, les salaires restent faibles et les contrats précaires. De nombreux établissements privés ont licencié des enseignants ou réduit leurs heures de travail pour compenser la baisse du nombre d’élèves inscrits.

Des réformes nécessaires pour sauver le système éducatif

Pour éviter l’effondrement total du système éducatif libanais, des réformes structurelles doivent être mises en place de toute urgence. Parmi les mesures envisagées figurent une augmentation des financements publics pour la réhabilitation des infrastructures scolaires, la mise en place de subventions pour les familles les plus démunies, ainsi qu’un programme d’incitation financière pour retenir les enseignants.

Le ministère de l’Éducation, avec l’appui d’organisations internationales comme l’UNESCO, envisage de créer un fonds spécial pour la modernisation des écoles publiques. Toutefois, l’ampleur des besoins dépasse largement les financements actuellement disponibles. De nombreuses voix s’élèvent pour réclamer une refonte du système éducatif et une meilleure gestion des ressources allouées.

Selon un rapport de la Banque mondiale, le Liban devrait investir au moins 500 millions de dollars d’ici 2027 pour rétablir un niveau éducatif acceptable, mais les fonds actuellement alloués ne dépassent pas 100 millions.

Quel avenir pour l’éducation au Liban ?

Si aucune réforme concrète n’est mise en place rapidement, le Liban risque de voir une génération entière sacrifiée sur l’autel de la crise économique. L’analphabétisme, qui avait quasiment disparu dans le pays, pourrait refaire surface, et l’accès à un enseignement de qualité deviendrait un privilège réservé à une minorité.

Les prochaines années seront cruciales pour déterminer l’avenir du système éducatif libanais. Une mobilisation nationale et internationale est nécessaire pour garantir à chaque enfant un accès à une éducation décente, condition essentielle pour le développement futur du pays. L’UNICEF appelle à une intervention rapide pour éviter un effondrement total du secteur éducatif et prévenir la perte d’une génération entière d’élèves.

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Newsdesk Libnanews
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