« Trois Capuches » annonçant trois chutes de neige, ou lorsque les traditions libanaises façonnent la météo
La Nature a toujours été l’alliée de l’homme, et nos aïeuls se fiaient à elle afin de prévoir le temps qu’il fera. Ainsi procédaient les météorologues d’antan. Il suffisait à nos ancêtres d’observer le ciel, sa couleur, la forme des nuages, la disposition des étoiles, le cycle de la lune, et même le vol des oiseaux ou le comportement de certains animaux ou insectes, pour déterminer le temps qu’il fera.
Cette étude du ciel à travers les éléments de la nature ne fait pas complètement partie du passé, puisque les sages dans les villages de la montagne libanaise conservent ce savoir ancestral. Cependant, avec le développement de la météorologie moderne, les jeunes générations accueillent, le plus souvent incrédules, ces sagesses des grands-parents. En dépit du changement climatique susceptible de bouleverser ces convictions, les gourous de nos hameaux du Liban continuent à croire fermement à ces disciplines séculaires.
A la lumière de ces traditions, les deux premiers mois de l’année sont les plus redoutés quant au mauvais temps. Ainsi, une multitude de croyances et de proverbes populaires ont été conçus dans nos villages afin de décrire la période hivernale. Les pêcheurs par exemple, redoutent les quarantaines débutant le 20 janvier, parce que la pêche s’interrompt durant quarante jours lorsque les températures diminuent, et que les poissons stagnent dans les profondeurs marines afin de préserver leur température.
Cependant, une tradition quasi méconnue aujourd’hui, tirant ses origines des coutumes monastiques, et observée comme une certitude, annonce trois importantes chutes de neige entre janvier et février. Cette tradition est désignée par « La tradition des trois capuches » (Tlet Allousset-ثلاث ألّوسات). Pourquoi une telle appellation ?
Premièrement, parce qu’entre janvier et mars, l’Eglise commémore trois fêtes de saints personnages principaux dans son histoire : Saint Antoine le Grand, père de la vie monastique, le 17 janvier, Saint Ephrem fêté le 28 janvier ou bien Saint Syméon le vieillard, le 3 février, et Saint Maroun, fondateur du maronitisme, le 9 février. (Concernant la deuxième capuche, selon les régions, le Saint désigné diffère, bien que la logique veuille que ce soit Saint Ephrem, un moine portant une capuche plutôt que le vieillard du Nouveau Testament). Deuxièmement, parce la capuche du moine ressemble à la forme d’un sommet enneigé. Troisièmement, même si le froid n’est pas très apprécié par les Libanais, mais la neige a toujours été une grâce que Dieu envoie, alimentant les sources naturelles au sein de la terre.
Côté météo moderne, des tempêtes sont annoncées pour les prochains jours avec de fortes chutes de neige qui risquent de se répéter après une dizaine de jours. Coïncidence ou pas, nos sages dans nos beaux villages répéteront fièrement que leurs traditions certifiées ne peuvent mentir, confirmant celle des « Trois capuches ». Mettez-vous bien au chaud ces prochains jours, et n’oubliez jamais nos belles traditions libanaises, parce que, d’après un bel adage bien de chez nous, « celui qui ne sait pas d’où il vient, ne saura jamais où il va ».
Par Marie-Josée Rizkallah