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Le secteur de la construction au Liban chute de 28 % au T1 2025, signal d’un blocage structurel persistant

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Chute brutale des permis de construire

Selon les données du Conseil de l’Ordre des Ingénieurs de Beyrouth et du Nord, le nombre de permis de construire délivrés au Liban a diminué de 28 % au cours du premier trimestre 2025 par rapport à la même période de 2024. Entre janvier et mars, seuls 1 708 permis ont été accordés, contre 2 373 permis un an plus tôt. Il s’agit du niveau le plus bas enregistré depuis plus d’une décennie, à l’exception de la période de confinement du printemps 2020. Ce recul confirme le ralentissement profond de l’activité immobilière, alors que le pays entre dans sa sixième année de crise financière sans programme de relance.

Surface bâtie en forte diminution

La surface totale autorisée a également baissé de manière significative, s’établissant à 864 197 m² sur la période, contre 1,29 million de m² au premier trimestre 2024, soit une contraction de 33 %. La baisse affecte toutes les catégories de projets, notamment les immeubles résidentiels, qui représentaient historiquement plus de 75 % des surfaces construites au Liban. Les projets commerciaux, industriels ou touristiques sont presque à l’arrêt, du fait du gel de l’investissement privé et de l’absence d’accès au crédit bancaire.

Encadré – Permis de construire au T1 2025

IndicateurT1 2024T1 2025Variation
Nombre de permis délivrés2 3731 708-28 %
Surface bâtie autorisée (m²)1 290 000864 197-33 %
Surface moyenne par permis (m²)543506-6,8 %

Source : Ordre des Ingénieurs, Byblos Research

Baisse généralisée sur tout le territoire

La baisse touche l’ensemble du territoire libanais. Le Mont-Liban, habituellement la région la plus active, enregistre une chute de 26 %, tandis que la Békaa subit un recul de 31 %, et le Sud du Liban de 35 %. Dans la Békaa-Ouest et Rachaya, le nombre de permis a chuté de plus de 40 %, illustrant la raréfaction des initiatives de construction même dans les zones rurales. Cette dynamique reflète à la fois l’attentisme des promoteurs, le gel des financements et le désengagement des expatriés autrefois moteurs du marché immobilier résidentiel.

Absence de crédit hypothécaire et désengagement bancaire

Le crédit hypothécaire est pratiquement inexistant. Les banques commerciales ont interrompu toute offre de prêt immobilier depuis fin 2019. La Banque de l’Habitat, unique institution publique active dans ce domaine, opère de manière restreinte, avec des plafonds de prêts très inférieurs au coût de construction réel. Sans financement, la plupart des nouveaux projets résidentiels sont soit auto-financés par les particuliers, soit bloqués en phase de planification. Le nombre de chantiers réellement actifs est bien inférieur au nombre de permis délivrés, certains restant sans suite faute de ressources.

Surabondance du stock existant

Le ralentissement de la construction s’explique également par la saturation du stock immobilier invendu. Dans les grandes villes comme Beyrouth, Jounieh, ou Saida, plusieurs milliers d’appartements neufs restent inoccupés. Les prix nominaux ont peu baissé, mais le volume des transactions est à un niveau historiquement bas. Le marché secondaire souffre de l’absence de liquidité, de l’effondrement du pouvoir d’achat et du flou juridique autour de la valorisation réelle des actifs immobiliers.

Dérive des coûts de construction

Les coûts de construction ont fortement augmenté depuis 2020, en raison de la dépréciation de la livre libanaise, de l’indexation de nombreux matériaux sur le dollar, et de l’absence d’accès au crédit fournisseur. Le coût moyen au mètre carré pour un projet résidentiel de standing moyen à Beyrouth dépasse aujourd’hui 800 USD/m², contre environ 450 USD en 2018. Les coûts de main-d’œuvre ont également augmenté, notamment pour les corps d’état spécialisés, tandis que la TVA continue d’être appliquée en livres à un taux figé, créant des écarts administratifs importants.

Données de contexte sur le secteur de la construction au Liban

Le secteur de la construction représentait historiquement jusqu’à 15 % du PIB libanais avant 2019, avec plus de 150 000 emplois directs et indirects. Depuis 2020, l’activité a chuté de plus de 70 %. À fin 2024 :

  • Nombre total d’entreprises actives dans le BTP : 3 500 (contre 7 800 en 2017)
  • Nombre de chantiers actifs à Beyrouth : < 300
  • Investissements immobiliers annuels : < 500 millions USD
  • Prix de vente moyen au m² à Beyrouth : 1 250 USD (en baisse de 22 % depuis 2020)
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