L’honneur Perdu De Michel Kilo, Phare Éteint De La Révolution Syrienne

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Par René Naba | 25/06/2014

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I -La déflagration mentale de l’opposition off-shore syrienne

Paris – Par touches successives, la descente aux abîmes de l’humiliation et du déshonneur a jalonné le conflit syrien. Exclusivement du côté arabe, sans contrepartie israélienne. D’abord, sans surprise, du royaume saoudien, le centre mondial de l’obscurantisme,  avec le saoudien Ayad al Karni, qui émet, le premier, une fatwa pour l’assassinat du président syrien Bachar Al-Assad, prioritairement à un israélien, comme si la fonction primordiale d’un dignitaire religieux, fut il saoudien, est de préconiser le meurtre et non la repentance ou la résilience.  Une pulsion mortifère qui aboutira à l’assassinat du fils du Grand Mufti de Damas, Cheikh Ahmad Hassoun, de même que  le chef des Oulémas du pays du Levant Cheikh Mouhammad Said Ramadan Al Bouti.

A -Bourhane Ghalioune et sa première mesure symbolique au pouvoir.

Puis, ce fut au tour du petit génie de la diplomatie néo conservatrice française, Bourhane Ghalioune, dont la première proclamation officielle en tant que premier chef de l’opposition syrienne off-shore, a porté sur la première mesure symbolique qu’il prendrait au début de son mandat présidentiel, à savoir la rupture des relations stratégiques avec le Hezbollah et de la relation spéciale de la Syrie avec l’Iran (1).

Emanant d’un universitaire supposé maîtriser la géopolitique, cette déclaration a plongé dans une profonde consternation ses tuteurs français en ce qu’elle a révélé prématurément les objectifs sous-jacents de la campagne de Syrie. Consigné dans le protocole de Doha, la plateforme politique de l’opposition, signée en Novembre 2012, sous la pression du Qatar, cet engagement prévoyait en outre de recourir à la négociation politique pour récupérer le plateau du Golan occupé par Israël depuis 1967. Autrement dit, un enterrement discret du contentieux syro-israélien en ce qu’il implique la renonciation à la guerre et la reconnaissance d’Israël, sans préjuger du résultat final des négociations syro-israéliennes. Un schéma identique au processus israélo-palestinien avec ses aléas identiquement dilatoires.

Signe d’une désorientation mentale, cet ancien militant de la gauche radicale expulsé de son pays pour avoir émis des critiques sur la pratique religieuse dans les pays arabes, se livrera, avec jubilation, au dogme néoconservateur, s’engageant à rompre avec l’Iran et à couper les voies de ravitaillement du Hezbollah Libanais. Invraisemblable posture qui renvoie dans l’imaginaire arabe au destin funeste d’Ahmad Chalabi, l’ancien chef de file de l’opposition irakienne pro américaine, rejeté dans les poubelles de l’Histoire une fois son forfait accompli. Une abdication qui lui vaudra d’ailleurs un volet de bois vert de la part de certaines des plus importantes figures de l’opposition syrienne et arabe. «Il n’est pas permis de sacrifier l’unité des révolutionnaires de Syrie pour la tranquillité de Hilary Clinton», secrétaire d’état américain, lui assénera Haîtham Manna, une des figures les plus respectées de l’opposition syrienne, dans un libelle intitulé «Conseils gratuits pour une politique étrangère» paru le 10 décembre 2011 dans le journal libanais «As Safir», tandis que le chroniqueur d’Al Qods Al Arabi, Rachad Abou Chawar, s’étonnait que sa priorité porte sur le châtiment des deux pôles victorieux de la résistance à l’hégémonie israélo-américaine.

B – Kamal Al Labwani: 3eme cas de fêlure mentale

Troisième cas de fêlure mentale, Kamal Al Labwani mettra sur la place publique une ahurissante proposition, inédite dans les annales du conflit syro-israélien: Proposer à Israël de bombarder Damas, en contrepartie d’une flexibilité de l’opposition syrienne sur le statut du Golan. «Israël est la meilleure chance des Syriens Il a la capacité militaire d’aider l’opposition syrienne et l’intérêt stratégique pour le faire. Israël est capable de modifier l’opinion internationale. Si vous voulez vous lier d’amitié avec les Syriens, envoyez-leur un signe d’amitié. Je vous le dis, mon peuple est prêt», a-t-il déclaré à un journal israélien (3), vivant sans le savoir une pathologie passée dans l’histoire comme étant «le complexe des exilés de Coblence», du nom de ses exilés monarchistes français qui ont rallié les ennemis de la France pour abattre la révolution. Un sort funeste que connaîtront le mouvement des Moudjahidine Khalq, principal mouvement d’opposition iranien, anciennement de sensibilité marxiste, qui ralliera tour à tour l’Irakien Saddam Hussein contre l’Iran, puis le mouvement djihadiste en Syrie contre Bachar al Assad; un sort funeste que connaitront les supplétifs israéliens du sud Liban, sous l‘autorité des officiers supérieurs maronites Saad Haddad et Antoine Lahad.

Autrement dit, cet ancien prisonnier d’opinion syrien adopté par Amnesty International a proposé à son ennemi de brader le territoire national de son propre pays pour prix de sa propulsion au pouvoir sans se rendre compte des dégâts d’une telle forfaiture sur la crédibilité et de l’opposition et de son auteur, compromettant toute possibilité de son accession au pouvoir. Ce novateur dans la trahison semble ignorer les répliques que ce genre de démarches génèrent habituellement dans les pays arabes et dont d’illustres prédécesseurs ont en payé le prix, du roi Abdallah 1 er de Jordanie, à l’égyptien Anouar el Sadate. Proposer au pays le plus nuisible au sien de brader une partie du territoire national en contrepartie de bombarder son propre pays pour lui ouvrir les portes du pouvoir sans être désavoué, donne la mesure de la déliquescence morale de ceux qui se posent en relève politique de la Syrie, qui se révèlent, en fin de compte, des mercenaires de leurs commanditaires islamo-atlantistes.

II -Michel Kilo-Ehud Barack, même combat?

De son parcours de militant, son statut de prisonnier politique sous le régime syrien, son patriotisme bien ancré, son expérience affirmée des luttes politiques, de même que son ancrage sur le terrain et son assise populaire… Tout destinait Michel Kilo à devenir le phare d’une révolution qu’il devait éclairer de son expertise et de ses sacrifices, à l’effet de lui conférer l’éclat dont l’avait privé le terne duo supplétif de l’administration française, les binationaux Bourhane Ghalioune-Basma Kodmani. Cela est si vrai que, sentant la menace sur leur leadership, le tandem, en concertation avec leur tutelle, privera de parole Michel Kilo, lors de son premier passage à Paris, aux premières lueurs de la révolution, en une belle illustration des principes démocratiques que la France professe pour les autres, dont elle s’affranchit aisément dès lors qu’il s’agit de satisfaire ses appétits de domination. Tout destinait ce chrétien syrien communiste à rallier le camp de l’opposition démocratique, et non l’opposition commanditée pétro monarchique. Tout, son intégrité, sa sobriété, son expertise, son prestige, sa légitimité.

La “Weinberg Founders Conference» du 8 Mai 2014.

Tout, sauf que le diable se niche dans les détails. Sa jonction avec Firas Tlass, le fils de l’ancien ministre de la défense, dont il bénéficiera de sa bienveillance matérielle, sa commensalité nouvelle avec Bandar Ben Sultan, du temps de la splendeur du chef du djihad mondial, dont il empruntait régulièrement le jet privé pour des consultations dinatoires, tous ses reniements successifs le conduiront à sa participation au «Weinberg Founders Conference», fatale à sa réputation. Fatale à son destin.

En marge de son entretien avec John Kerry, le secrétaire d’état américain, dans la foulée du colloque organisé le 8 mai 2014 par le Washington Institute, une émanation de l’AIPACC, le plus influent lobby juif américain, Michel Kilo aurait fait passer un message à Ehud Barack visant à le sonder sur la possibilité d’une intervention militaire israélienne contre la Syrie. Mais l’ancien premier ministre israélien aurait décliné la requête invoquant les éventuelles complications régionales qu’une telle opération pourrait susciter, selon un document confidentiel rédigé sur la base d’un relevé d’observations pris par un des participants au colloque de l‘AIPACC et dont l’auteur de ce texte en a pris connaissance. Ehud Barack aurait toutefois suggéré à l’opposant syrien de soulever cette possibilité, via les instances européennes, d’abord le Conseil européen puis le Parlement européen, en vue d’y faire une recommandation à la Commission Européenne, sous prétexte de guerre contre le terrorisme. A charge pour Israël de faire un dérapage contrôlé par le bombardement des centres du pouvoir à Damas, en le présentant comme un dommage collatéral inhérent à ce genre d’opérations. Chapeau l’artiste.

Un relevé officiel des observations de ce colloque figure en annexe documentaire de ce texte, expurgé toutefois de l’échange Michel Kilo-Ehud Barack.

En compagnie d’Ahmad Jarba, le président de la coalition islamo atlantiste, Michel Kilo a été reçu par un responsable du Pentagone, préalablement à leur audience par le président Barack Obama. Le haut-gradé américain, selon ces mêmes informations, aurait remonté les bretelles aux deux opposants syriens, leur reprochant leur piètre performance sur le terrain, leur argumentation politique fallacieuse et leurs estimations fantaisistes quant aux rapports de force tant vis-à-vis de Damas que de l’opposition djihadiste. Il leur a signifié le refus de l’administration de fournir des armes qui pourrait bénéficier ultérieurement aux formations djihadistes.

Que le Golan, que l’un des opposants syriens se hâte de vouloir offrir sur un plateau à Israël pour un plat de lentilles, le Golan, ce fameux Front sud dont le chef-lieu, Quneitra, a été libéré par l’armée syrienne dans la guerre d’octobre 1973, soit devenu, dans ce contexte, la nouvelle place forte de l’opposition armée, relève-t-il du hasard ou de la préméditation? Pour combattre Israël ou pour combattre Damas avec le soutien israélien, dans une opération à double détente visant à couper les voies du ravitaillement du Hezbollah vers le sud Liban limitrophe? Pour qu’une riposte gouvernementale syrienne justifie une réplique israélienne au prétexte de la violation du cessez-le feu? Avec en corollaire une intervention occidentale au prétexte de mettre fin à une belligérance israélo-arabe? Qu’un tel projet ait pu prendre corps donne, en tout cas, la mesure de la perversion mentale de l’opposition off-shore et de la dégénérescence djihadiste.

http://www.renenaba.com/rapport-syrie-brookings-doha-center-report/

Aucune confirmation officielle de cette information n’a pu être obtenue, mais le fait est que trois semaines après le sacre de Washington de Michel Kilo, «l’Union Démocratique de Syrie», dont il est membre, a annoncé sa prise de distance avec lui. Dans un communiqué paru le 31 Mai 2014, soit une semaine après son retour à Paris et sa participation au colloque du lobby juif américain, le Bureau exécutif y dénonce son comportement putschiste «fondé sur l’éradication et la marginalisation de ses contestataires». Il l’accuse de «s’être emparé du bureau de Gaziantep (Turquie)» pour en faire son bureau central et se livrer à de la «corruption» pour rallier le plus grand nombre des membres de cette formation. L’intégralité de ce communiqué publié dans le quotidien «Sourya Al Yom» (La Syrie aujourd’hui), organe de «l’Union Démocratique de Syrie», figure en annexe documentaire de ce texte.

La démission de Sadr Eddine Bayanouni de la coalition de l’opposition off-shore.

La prise de distance de son propre parti à l’égard de Michel Kilo s’est accompagnée de la démission de Sadr Eddine Bayanouni, un des dirigeants des Frères Musulmans, en signe de protestation contre le message de félicitations adressé par la coalition islamo-atlantiste au nouveau président égyptien Abdel Fattah Sissi, indice de la désarticulation de cette opposition. Ahmad Jarba, le chef de la coalition, appartient à la même confédération tribale que le Roi d’Abdallah d’Arabie, la tribu Al Chammar, alors que M. Bayanouni est solidaire de son confrère saoudien Mohamad Morsi, évincé du pouvoir avec l’aide saoudienne.

Quoiqu’il en soit, le passage de Michel Kilo sous les fourches caudines de l’AIPACC lui a valu adoubement de la presse occidentale, particulièrement française, dont il sera le commentateur médiatique exclusif, du côté de l’opposition off-shore syrienne, des élections présidentielles syriennes, le 3 juin 2014, où pas moins trois grands médias lui réserveront leurs colonnes.

Une exposition médiatique qui signera sa promotion comme nouvelle bouée de sauvetage de la diplomatie française en plein naufrage, en même temps que la disgrâce des anciens oracles de l’opposition off-shore, ceux-là même qui lui avaient barré la voie à son arrivée à Paris au début du soulèvement syrien. Alors Michel Kilo, «l’ultime combat d’un laïc» comme tend à le promouvoir l’hebdomadaire français Marianne ou le dernier avatar d’un renégat? Visiblement ni Marianne, ni le Journal Le Monde, ni même le site Rue 89 habituellement plus circonspect face aux envolées atlantistes de Laurent Fabius n’étaient au courant de la déconfiture de l’ancienne idole des démocrates syriens. Le chef du desk Moyen Orient du journal de déférence publiait le 2 mai un entretien de Michel Kilo, sans la moindre interrogation, ni la moindre allusion, à son désaveu par son parti. Ah Les avantages du journalisme en chambre.http://www.marianne.net/Michel-Kilo-l-ultime-combat-des-laiques-syriens_a238483.html,

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/06/02/syrie-c-est-comme-si-hitler-avait-organise-une-election-en-1944_4430532_3218.html

http://rue89.nouvelobs.com/2014/06/03/syrie-pourquoi-bachar-el-assad-organise-mascarade-electorale-252658

Ah quelle dérive. Que n’a-t-il interrogé ses nouveaux amis français sur les raisons de l’ostracisme dont ils frappent les opposants démocratiques syriens résidant en France depuis le début de la guerre de Syrie et qui sont généralement crédités, dans les sondages confidentiels américains, des meilleurs taux d’adhésion de la part de la population syrienne? En raison de leur refus d’allégeance à l‘ordre islamo-atlantiste? De leur refus de la posture supplétive, chère aux Français depuis la guerre d’Algérie? De leur refus de la prébende? S’est-il enquis auprès d’eux des raisons qui ont conduit le Quai d’Orsay, sous l’impulsion de Laurent Fabius, à harceler la Suisse pour entraver la tenue sur son territoire du premier congrès de l’opposition démocratique syrienne, le 31 janvier 2013?

Pourquoi avoir adhéré à l’opposition off-shore cautionnant ainsi indirectement son parrainage par trois des personnalités françaises les plus hostiles aux intérêts à long terme du Monde arabe, Bernard Henry Lévy, Bernard Kouchner et Laurent Fabius?

Fermer les yeux sur le nouveau jeu de bonneteau de la diplomatie française, en remplaçant un Kouchner Boy’s, Eric Chevallier, l’ancien cornac de l’opposition islamo atlantiste, par un autre Kouchner Boy’s, Serge telle, l’ancien directeur adjoint du cabinet du ministre transfuge socialiste de la mandature Nicolas Sarkozy qui apparait avec François Hollande comme les deux plus philo-sionistes présidents de la V me République Française (4).

Pourquoi faire alliance à un pays qui se distingue surtout par sa force de nuisance? S’arrimer à un tel piton que le journal qui abrite «l’œil borgne sur la Syrie», sonne le tocsin: «La crise dans laquelle se débat la France semble sans fin et sans fond. Rien ni personne ne paraît en mesure de l’enrayer. Ni de répondre à ces questions, devenues lancinantes: jusqu’à quel point le crédit et l’autorité des principaux acteurs publics peuvent-ils s’effondrer sans ébranler le système politique lui-même? Jusqu’où la défiance et l’exaspération peuvent-elles enfler sans provoquer une crispation majeure?  «A première vue, les apparences sont sauves. Le président préside, engage une vaste réforme des collectivités territoriales, négocie à Bruxelles et reçoit les grands de ce monde pour commémorer le débarquement du 6 juin 1944. Quant au gouvernement, il gouverne, met la dernière main à ses arbitrages budgétaires, amorce le débat sur la réforme pénale et ouvre le chantier de la dépendance. Chacun, pourtant, sait bien ce que cette façade ne masque plus: l’impuissance du pouvoir, la déliquescence de l’opposition, l’évanescence des règles du jeu politique.

http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/06/03/crise-politique-ou-crise-de-regime_4430965_3232.html

Que n’a-t-il œuvré, Michel Kilo, à la mise sur pied qu’une opposition prestigieuse constituée de ses émules, tels le philosophe contestataire Jalal Sadek Al Azm, Riad Seif ou Haytham Manna, un authentique militant des Droits de l’homme de la première heure et responsable pour la diaspora syrienne du «Comité de Coordination nationale pour le changement démocratique» (opposition syrienne non armée).

Plutôt que de se vautrer dans la fange d’une opposition magmatique polymorphe et mercenaire, que n’a-t-il élargi l’éventail du recrutement à la pépinière de talents de la diaspora, tels l’astrophysicienne Rim Turkmani (Royal College-Londres) ou le polytechnicien Samir Aîta, directeur de la version arabe du mensuel français «Le Monde diplomatique» ou encore le distingué diplomate Ayad Al Arfi? Ou enfin puisé dans cette flopée de spécialistes fédérés en France au sein de deux associations -Association France Syrie et Association France Moyen Orient- comprenant près de trois mille membres de professions libérales (du Genothon à la radiologie, à la chirurgie viscérale), dont l’intégrité morale et la rigueur intellectuelle sont infiniment supérieures à la cohorte de cloportes de l’opposition off-shore et de leurs aboyeurs islamophilistes, dont le huis clos suffocant avec les médias français a stérilisé le débat, en exaspérant le narcissisme des uns et la fatuité des autres, le narcissisme et la fatuité des uns et des autres. Le cours de la révolution aurait changé et la face de la Syrie avec, faisant de ce pays aux traditions démocratiques ancrées de son opposition, un exemple pour les autres pays arabes.

Michel Kilo est un être mal latéralisé. Il confond sa gauche et sa droite et la droite de l’extrême droite.

Non Michel Kilo, au nom de toute l’ancienne et grande admiration que nombreux, jadis, vous portaient, «l’ennemi de mon ennemi n’est jamais mon ami». Que ne reprenez-vous vos esprits. Ressaisissez-vous et revenez aux fondamentaux du combat politique.

Vos amitiés nouvelles de Bandar Ben Sultan à Ehud Barack, à Firas Tlass, le fils d’un de vos anciens geôliers, enrichi dans le commerce avec l’armée de votre tortionnaire, constituent autant de variations sur le même thème du reniement, la marque de votre déflagration mentale. Ah quelle interminable descente aux enfers.

À la pénombre de sa vie, tout un chacun se préoccupe généralement de sa sortie de l’histoire, prenant bien soin de veiller toujours à se regarder en face, les yeux dans les yeux, dans le miroir de sa vie, le matin à son réveil. Et non de songer au pouvoir, en se rasant, y compris au prix d’une forfaiture. Référez-vous à Samir Geagea, un des fossoyeurs de la guerre libanaise. Interrogez-le sur ce qu’il lui en coute d’avoir été le harki des Israéliens, ce qu’il en a couté leur égarement aux Maronites.

Ah la trahison des clercs, cette génération de «gauche mutante», de Samir Kassir à Samir Frangieh, en passant par Elias Atallah, Hazem Saghieh, Hanine Ghaddar, Bourhane Ghalioune et Michel Kilo, le plus important vivier de transfuges du militantisme révolutionnaire vers le conservatisme contemporain le plus rigide, phénomène marquant de l‘époque contemporaine, à l’origine des déconvenues du combat démocratique arabe.

Ah ces «bourgeois de Calais des temps modernes», qui se livrent à leurs bourreaux, corps et âmes, poings menottés et pieds liés, tant libanais que syriens, en concurrence avec ceux du Maghreb, -(Ferhat Mehenni, chef du fantomatique gouvernement kabyle en exil, et son ministre des affaires étrangères, Lyazid Abid, Boualem Sansal (Algérie), Hassan Chalghoumi (Tunisie) et Nadia El Fanni (Tunisie)-, dont l’un, Mosbah Al Ahdab (sunnite de Tripoli), qui rêve de se rendre en train de Beyrouth au Caire, via Tel Aviv, feint d’ignorer que ce train-là sera le train de la reddition et de la mort; L’autre, Samy Gemayel (maronite du Mont Liban), qui meurt d’envie de signer un nouveau traité de paix avec Israël, en un pitoyable remake du chef d’œuvre de son père, feignant lui aussi d’ignorer le traitement de laquais que lui ont réservé les Israéliens à son père et à son oncle, Bachir. Ah le fameux entretien houleux de Menahem Begin avec Bachir Gemayel, à Herzliya, dans la foulée de l’invasion israélienne du Liban. Ah quelle humiliation. A vous vacciner à jamais contre le syndrome de la trahison.

Ah la trahison des clercs. De tous les crimes, celui-ci se situe au sommet de la hiérarchie dans l‘ordre de l’ignominie et de l’infamie, en ce qu’il s’agit tout à la fois d’une insulte à l’intelligence et d’un crime contre l’esprit; d’un crime contre l’espérance, et partant, un crime contre l’âme d’une nation. De votre fait Michel, et, du fait de vos semblables, vos faux-frères dans l’ordre de la vénalité et de la veulerie.

Au terme de quatre ans de dérives et de reniements, l’opposition off-shore syrienne apparaît comme une catacombe jonchée de cadavres rongés par la vanité et la cupidité. Un vaste cimetière des illusions perdues. Halte à cet interminable délire.

Michel Kilo, renoncez à la gangrène commanditaire et rejoignez le camp des hommes libres, le camp des démocrates, si désormais minoritaire dans le Monde arabe, pour y mener, simultanément, le combat contre les tyrans arabes et contre la tyrannie de la pensée occidentale. Pour y mener conjointement le combat pour la démocratie. Le combat du dernier quart d’heure. Celui que l’on mène le dos au mur, en compagnie des fidèles résolus, à la volonté trempée dans l’acier de la conviction, pour y retourner le sort de la bataille. Pour l’honneur des Arabes et leur dignité d’homme.

Références

1 – DéclarationdeBourhane Ghalioune au Wall Street Journal: «Au pouvoir, je romprai les relations de la Syrie avec l’Iran le Hezbollah et le Hamas». http://www.alquds.co.uk/index.asp?fname=today\02z498.htm&arc=data\2011\12\12-02\02z498.htm

2- Article de Haytham Manna: Conseils gratuits pour une politique étrangère» : Il n’est pas permis de sacrifier l’unité des révolutionnaires syriens pour la tranquillité de Clinton (Hillary Clinton, à l’époque secrétaire d’état) http://www.assafir.com/Article.aspx?EditionId=2023&ChannelId=47985&ArticleId=920&Author= https://www.renenaba.com/la-bataille-de-syrie-et-la-capture-par-liran-dun-drone-americain-sophistique/

3 – Kamal Al Labwani: déclaration à un journal israélien sur une nécessaire intervention israélienne.http://fr.timesofisrael.com/le-golan-en-echange-dune-aide-militaire-israelienne/http://koide9enisrael.blogspot.fr/2014/05/kamal-labwani-israel-est-notre-dernier.html

4- Serge Telle, en charge de la Méditerranée, passe pour être le nouveau responsable des contacts arabes de la diplomatie socialiste: un Kouchner Boy’s à l’instar d’ Eric Chevallier, l’ancien cornac de l’opposition off-shore. Il débute sa carrière en poste à l’ambassade de France à Dar-Es-Salam (1982-1984), puis à la mission permanente de la France auprès des Nations unies à New York, où il est en charge des dossiers relatifs aux droits de l’homme et aux questions humanitaires (1984-1988). De 1988 à 1992, il devient conseiller diplomatique de Bernard Kouchner, ministre de la Santé et de l’Action humanitaire. Il est ensuite détaché au Foreign and Commonwealth Office à Londres, chargé des questions balkaniques, avant d’être mis à la disposition de l’Organisation des Nations unies à Genève, comme chef du service de la coordination des opérations humanitaires (1993-1997). En 1997, il est appelé par Lionel Jospin pour devenir conseiller diplomatique au cabinet du Premier ministre. En janvier 2006, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire auprès de la Principauté. En mai 2007, il est appelé par Bernard Kouchner comme directeur-adjoint de son cabinet au Ministère des Affaires étrangères.

ReneNaba
René Naba | Journaliste, Ecrivain, En partenariat avec https;//www.Madaniya.info Français d’origine libanaise, jouissant d’une double culture franco arabe, natif d’Afrique, juriste de formation et journaliste de profession ayant opéré pendant 40 ans au Moyen Orient, en Afrique du Nord et en Europe, l’auteur dont l’expérience internationale s’articule sur trois continents (Afrique Europe Asie) a été la première personne d’origine arabe à exercer, bien avant la diversité, des responsabilités journalistiques sur le Monde arabo-musulman au sein d’une grande entreprise de presse française de dimension mondiale.

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