vendredi, mars 28, 2025

Les derniers articles

Articles liés

Liban/Chypre : Des réfugiés syriens bloqués ou renvoyés de force en Syrie

- Advertisement -

L’UE devrait réexaminer son financement du contrôle des frontières libanaises et renforcer la surveillance du respect des droits humains

Le Liban et Chypre, deux acteurs majeurs de la Méditerranée, sont sous le feu des critiques de Human Rights Watch (HRW) pour leurs actions contre les réfugiés syriens qui tentent de rejoindre l’Europe. Dans un récent rapport, HRW met en lumière des violations graves des droits humains, où des réfugiés sont bloqués ou refoulés vers la Syrie, un pays où ils risquent persécution et torture.

Ce rapport de 90 pages, intitulé « Je ne peux ni rentrer chez moi, ni rester ici, ni partir : Des réfugiés syriens refoulés par Chypre et expulsés par le Liban », dénonce une coopération inquiétante entre les autorités libanaises et chypriotes. Les réfugiés syriens, après avoir fui leur pays pour échapper aux dangers, se retrouvent pris au piège dans un cycle où ils sont empêchés de partir ou renvoyés de force.

Les refoulements au Liban et les expulsions en Syrie

Le rapport s’appuie sur les témoignages de 16 réfugiés syriens ayant tenté de quitter le Liban entre août 2021 et septembre 2023. Ces personnes, cherchant désespérément à rejoindre l’Europe, se sont heurtées à la dure réalité de la politique migratoire libanaise et chypriote. La marine libanaise, avec l’aide de l’Union européenne, a renforcé le contrôle des frontières, empêchant les départs illégaux, tandis que les autorités chypriotes, de leur côté, renvoient au Liban les bateaux interceptés, sans prendre en compte le statut de réfugié de leurs passagers.

Une fois ramenés au Liban, beaucoup de ces réfugiés sont expulsés vers la Syrie. Un cas emblématique est celui d’une femme syrienne de 44 ans, interceptée en mer par les garde-côtes chypriotes. Après un refoulement brutal et violent, elle et sa famille ont été livrées à l’armée libanaise, puis forcées de passer en Syrie où elles ont été détenues pendant neuf jours par des soldats syriens.

Des violations flagrantes des droits humains

Le principe de non-refoulement, qui interdit de renvoyer des réfugiés vers un pays où ils risquent persécution ou torture, est un pilier du droit international que le Liban et Chypre sont accusés de violer. Le Liban, tout comme Chypre, est également signataire de conventions internationales comme la Convention contre la torture et la Convention européenne des droits de l’homme, qui interdisent ces pratiques.

Ces refoulements collectifs et expulsions sommaires, documentés par HRW, témoignent de la gravité de la situation. Les enfants ne sont pas épargnés : des mineurs non accompagnés ont été menottés et renvoyés de force. L’un des cas concerne un adolescent de 15 ans qui, après avoir atteint Chypre, a été ramené au Liban, puis expulsé vers la Syrie, sans assistance ni protection.

L’implication de l’Union européenne

L’Union européenne joue un rôle clé dans cette crise, ayant fourni au Liban plus de 16,7 millions d’euros entre 2020 et 2023 pour financer des projets de contrôle des frontières. En mai 2024, l’UE a même annoncé une nouvelle aide d’un milliard d’euros pour soutenir les forces de sécurité libanaises jusqu’en 2027. Ce financement, destiné en partie à renforcer la gestion des frontières, soulève des questions éthiques. Human Rights Watch appelle l’UE à réévaluer son soutien au Liban et à établir des mécanismes indépendants pour superviser l’usage de ces fonds et garantir le respect des droits humains.

La situation critique des réfugiés au Liban

Le Liban accueille plus de 1,5 million de réfugiés syriens, ce qui en fait le pays avec la plus grande population de réfugiés par habitant au monde. Cependant, la crise socioéconomique qui ravage le Liban depuis plusieurs années rend la situation intenable pour les réfugiés, poussant nombre d’entre eux à chercher désespérément une sortie vers l’Europe.

Les autorités libanaises, notamment la Direction générale de la Sûreté générale (DGSG), ont intensifié leurs efforts pour empêcher ces départs. Entre janvier 2022 et août 2024, 821 Syriens ont été interceptés alors qu’ils tentaient de quitter le pays par bateau. Ces opérations se sont souvent soldées par des expulsions brutales vers la Syrie, parfois avec l’assistance de la force de maintien de la paix de l’ONU au Liban.

Une crise humanitaire et juridique

Pour HRW, la situation actuelle est une crise humanitaire majeure, alimentée par des violations systématiques des droits des réfugiés. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) continue de maintenir que la Syrie n’est pas un pays sûr pour le retour des réfugiés, et condamne ces expulsions forcées.

HRW demande à l’UE et à la communauté internationale de renforcer la surveillance de l’utilisation des fonds alloués au Liban pour la gestion de la migration et de mettre en place des mécanismes de protection efficaces.

Nadia Hardman, chercheuse de HRW, souligne : « L’UE récompense depuis longtemps le Liban pour ses efforts visant à empêcher des migrants d’atteindre l’Europe, en finançant des projets de gestion de la migration. Au lieu de sous-traiter des abus, l’UE et les autres bailleurs de fonds devraient immédiatement créer des mécanismes indépendants qui seraient chargés de superviser directement le respect des droits humains par le Liban, lors des opérations de contrôle de ses frontières. »

Cette situation, combinée aux politiques migratoires de plus en plus restrictives de l’Europe, enferme les réfugiés dans un cercle vicieux de violence, de précarité et de violations des droits humains.

- Advertisement -
Newsdesk Libnanews
Newsdesk Libnanewshttps://libnanews.com
Libnanews est un site d'informations en français sur le Liban né d'une initiative citoyenne et présent sur la toile depuis 2006. Notre site est un média citoyen basé à l’étranger, et formé uniquement de jeunes bénévoles de divers horizons politiques, œuvrant ensemble pour la promotion d’une information factuelle neutre, refusant tout financement d’un parti quelconque, pour préserver sa crédibilité dans le secteur de l’information.

A lire aussi