Un avion de la MEA à l'aéroport international de Beyrouth.
Un avion de la MEA à l'aéroport international de Beyrouth.

Mohammad Ziad Al Ouf, directeur de la sécurité du port de Beyrouth s’est envolé via l’aéroport international de Beyrouth dès sa libération sur décision du procureur de la république, apprend-on ce matin. Il devrait arriver dans les prochaines heures aux USA. Cependant des familles des victimes aux Etats-Unis envisagent de porter plainte contre lui dès son arrivée.

Devant pourtant faire l’objet d’une interdiction de sortie du territoire, certaines sources accusent le procureur de la république, le juge Ghassan Oweidat, d’avoir retardé la publication des décisions judiciaires relatives à cela tout en ayant ordonné la libération de toutes les personnes soupçonnées d”être impliquées dans l’affaire de l’explosion du port de Beyrouth

Par ailleurs, on apprend de source médiatique toujours que l’ambassadrice américaine au Liban Dorothy Shea avait également demandé par le passé la libération de Mohammad Ziad Al Ouf qui détient aussi la nationalité américaine. Elle avait informé le juge Bitar qu’il y a un débat au Congrès américain sur la possibilité d’accuser les autorités libanaises, en particulier les autorités judiciaires, de détenir la liberté d’Al-Awf et de le considérer comme un otage, qu’il y a un débat au Congrès américain sur la possibilité d’accuser les autorités libanaises, en particulier les autorités judiciaires, de détenir la liberté d’Al-Awf et de le considérer comme un otage.

Cette information intervient alors que le conseil supérieur de la magistrature devrait se réunir aujourd’hui sous la présidence du juge Souheil Abboud. Cette instance, suite au bras-de-fer entre le juge en charge de l’enquête et le procureur de la république, pourrait démettre le juge Bitar et nommer un nouvel enquêteur, une procédure dénoncée par les familles des victimes qui y voient la main des partis politiques et des intérêts impliqués dans le dossier.

our rappel, le procureur de la république avait pris cette décision alors qu’il fait lui-même parti des personnes mises en examen par le juge d’instruction, le juge Tarek Bitar en charge du dossier. Ce dernier avait décidé de poursuivre les procédures judiciaires qui avaient été gelées plus de 13 mois suite au recours présentés par des anciens ministres des finances, Ali Hassan Khalil, des travaux publics Ghazi Zoaiter dont la soeur est l’épouse du procureur de la république, devant la cour de cassation, se basant sur une étude judiciaire. Celle-ci notait que la cour de cassation lui serait d’importance inférieure, lui-même étant nommé par le conseil supérieur de la magistrature. 

Il avait, dans la foulée, mis en examen le directeur actuel de la sureté générale, le général Abbas Ibrahim, son homologue de la sécurité de l’état, le général Tony Saliba et le procureur de la république, le juge Ghassan Oweidat, estimant que ces derniers avaient été informés de la dangerosité des matériaux stockés dans le hangar 12 sans prendre des mesures nécessaires pour éviter le drame. 

Parallèlement à sa décision de faire libérer les détenus, le procureur de la république a estimé que les décisions du juge Tarek Bitar ne devraient pas être appliquées et porté plainte contre lui.

L’explosion du port de Beyrouth

La piste d’une explosion accidentelle, le 4 août 2020, de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium à l’intérieur d’un entrepôt du port de Beyrouth, saisies en 2014 à bord d’un navire poubelle, le Rhosus battant pavillon moldave, est pour le moment privilégiée par les autorités libanaises. Cette explosion équivaudrait à celle de 600 tonnes de TNT ou encore à un tremblement de terre de 3.3 sur l’échelle de Richter.
Elle aurait ainsi causé un cratère de 110 mètres de long sur 43 mètres de profondeur, indique, le dimanche 9 août, une source sécuritaire citant les propos d’experts français présents sur place.

S’exprimant dans les colonnes du Washington Post dans son édition du 7 septembre 2020, le Procureur de la République, le juge Ghassan olOweidat, a révélé qu’outre les 2750 tonnes de nitrate d’ammonium, du kérosène, du gazoil, 25 tonnes de feux d’artifices et détonateurs à usage pour les mines se trouvaient également présents dans ce même entrepôt.

La présence de ces produits aurait ainsi pu entretenir le feu et lui permettre d’atteindre les températures permettant l’explosion du nitrate d’ammonium, soulignent certains experts.

Le port de Beyrouth, un espace où la corruption était généralisée

Le refus des autorités libanaises à la mise en place d’une enquête internationale serait lié à la crainte de voir l’ampleur de la corruption touchant la principale porte du Liban et où seraient impliqués la quasi-totalité des partis politiques libanais, y compris certains qui réclament aujourd’hui cette enquête, notent certaines sources médiatiques, sous le couvert d’une autorité temporaire de gestion du port de Beyrouth dont les nominations se faisaient selon des lignes sectaires officiellement.

Mis quasiment en cause en raison de sa proximité par rapport à l’ancien directeur du port de Beyrouth Hassan Koraytem en place depuis plus de 20 ans, Saad Hariri dément aujourd’hui tout lien direct avec ce dernier.

Sur place, les opérateurs notent que le transit des marchandises donne souvent lieu à un racket. Ainsi, pour pouvoir sortir des marchandises du port de Beyrouth, d’importants dessous de table doivent être fréquemment payés.

D’autres notent que certaines cargaisons ne sont pas vérifiées. Des marchandises sont également sous-facturées afin de ne pas payer les taxes pourtant dûes à un état en crise financière.

L’enquête sur les responsables impliqués dans l’explosion

Pour l’heure, 33 personnes seraient actuellement mises en examen. Parmi eux, le directeur du port de Beyrouth, Hassan Koraytem, ainsi que le directeur des services de la douane libanaise Badri Daher, tous 2 mis en examen par le juge d’instruction Fadi Sawwan, en charge de l’enquête.

Au total, plusieurs responsables sécuritaires et du port de Beyrouth ont ainsi été arrêtés.

Certaines sources soulignent que les différents partis politiques libanais s’étaient partagés les revenus du port de Beyrouth , rendant difficile actuellement de connaitre les responsabilités de chacun dans cette explosion.

Plusieurs partis politiques, de la majorité comme de l’opposition, souhaiteraient également conclure de manière rapide l’enquête étant impliqués dans différents trafics qui ont lieu depuis ou vers le port de Beyrouth. Ils souhaiteraient ainsi éviter à ce qu’on puisse découvrir le degré d’implication de chacun et des violations sécuritaires nécessaires à la poursuite de ses trafics. 

Aussi, des responsables sécuritaires avaient prévenu les autorités politiques à plusieurs reprises au cours des dernières années, les autorités judiciaires n’ont pas décidé de la mise en oeuvre des mesures de transfert nécessaires de la cargaison.

Certaines sources proches du dossier soulignent également la responsabilité de plusieurs administrations dans le port de Beyrouth, d’autant que de hauts responsables étaient informés du danger posé par le stockage de manière inadéquate de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium depuis 2014.

Si le rapport du FBI n’a pas pu conclure sur l’origine de l’explosion et évoque une piste à priori accidentelle sur base des informations fournies par les autorités libanaises, le Liban reste dans l’attente des résultats des enquêtes parallèles menées par la France et la Grande Bretagne.

Le 10 décembre, le juge Fadi Sawwan met en examen le premier ministre sortant Hassan Diab, l’ancien ministre des finances Ali Hassan Khalil et les anciens ministres des transport Ghazi Zeiter, tous 2 membres du bloc parlementaire du mouvement Amal et Youssef Finianos.

Les 2 anciens ministres Ali Hassan Khalil et Ghazi Zoeitar, par ailleurs proches du président de la chambre Nabih Berri, avaient alors refusé de se rendre auprès du juge, estimant jouir d’une immunité parlementaire. Cependant, cette immunité a fait l’objet d’une controverse, le barreau de Beyrouth jugeant qu’elle ne peut s’appliquer dans le cadre de cette affaire

Ces derniers obtiennent alors le renvoi du juge en février 2021, la cour de cassation, saisie par 2 anciens ministres, l’ancien ministre des finances Ali Hassan Khalil et l’ancien ministre des transports Ghazi Zoaiter, ayant décidé que le magistrat avait motivé sa décision alors que son domicile est situé dans le quartier d’Ashrafieh également endommagé par l’explosion. Il était donc partie prenante dans cette affaire.

Le juge Tarek Bitar a alors été nommé dès le 19 février. Son nom ayant déjà été proposé en août dernier dans le cadre de la même procédure. Il avait cependant à l’époque refusé de devenir le juge d’investigation dans le dossier du drame du 4 août dernier, au prétexte d’une charge de travail importante.

Début juin, le nouveau juge a indiqué que 3 hypothèses ont été examinées après que les experts français aient révélé le contenu d’un rapport préliminaire, celle d’une erreur humaine suite à un travail de soudage qui a déclenché un incendie, d’un incendie intentionnel ou encore une explosion suite au tir d’une roquette. 

Selon le juge, l’une de ces hypothèses serait écartée à plus de 80% suite à la réception du rapport des experts français qui est finalement parvenu au Liban. 

Restent donc 2 hypothèses qui font actuellement l’objet d’études approfondies. Certaines sources indiquent qu’il s’agirait des hypothèses d’un incendie volontaire ou accidentel.

Début juillet, le juge Tarek Bitar demande la levée de l’immunité parlementaire d’un certain nombre de responsables dont l’ancien ministre des finances, Ali Hassan Khalil et de l’ancien ministre des travaux public, Ghazi Zeaiter, 2 proches du président de la chambre des députés Nabih Berri ainsi que de l’ancien ministres de l’intérieur Nouhad Machnouk, tous soupçonnés d’avoir été mis au courant de la présence de substances dangereuses. Il a également demandé la permission d’interroger un certain nombre d’anciens responsables et de responsables actuels des services de sécurité dont le directeur de la sureté générale, le général Abbas Ibrahim ou encore de l’ancien commandant de l’armée libanaise, le général Jean Kahwaji.

Ce vendredi 9 juillet, le bureau du parlement et la commission parlementaire de l’administration et de la justice auraient reporté la décision concernant la levée de l’immunité des parlementaires visés, demandant plus d’information à ce sujet.

Le même jour, le ministre de l’intérieur Mohammed Fahmi a refusé de permettre l’interrogatoire du général Abbas Ibrahim amenant le juge Tarek Bitar à déposer un recours devant la cour de cassation.

Des le 11 octobre 2021, le juge Tarek Bitar publie un mandat d’arrêt à l’encontre d’Ali Hassan Khalil après que celui-ci ne se soit pas produit devant lui. Ce mandat d’arrêt mènera à des manifestations devant le palais de justice, le 14 octobre 2021, et aux fameux incidents de Tayyouneh, les pires incidents à caractère sectaire depuis la fin de la guerre civile entre chrétiens et chiites. Le mouvement Amal et le Hezbollah, coorganisateur de la manifestation, accuseront alors des snipers des Forces Libanaises d’avoir fait feu sur eux.

Le juge Tarek Bitar écarté?

Le mardi 6 septembre 2022, on apprend que le haut conseil de la magistrature a décidé d’écarter le juge d’instruction en charge de l’enquête portant sur l’explosion de 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium dans l’enceinte du port de Beyrouth, le 4 août 2020 et cela sans trop de vagues.

Coup de théâtre, le 23 janvier 2023, s’appuyant sur une étude juridique et cela après avoir été gelée durant 13 mois, le juge Tarek Bitar décide de reprendre les procédures liées à son enquête, mettant en examen, le directeur de la sureté générale, le général Abbas Ibrahim, et son collègue, le directeur de la sécurité de l’état, le général Tony Saliba, tous 2 accusés d’avoir été informés de la présence du nitrate d’ammonium.
Parallèlement, le parquet indique ne pas être tenu d’appliquer les décisions du juge Bitar, estimant donc ne pas pouvoir incarcérer de nouvelles personnes ou encore libérer des personnes détenus au stade actuel.

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