Diagnostic d’un problème structurel
Les autorités publiques ont dressé un constat sans détour sur les causes profondes des inondations récurrentes qui frappent chaque automne plusieurs régions du pays. Le ministre des Travaux publics et des Transports, Fayyaz Ressamni, a détaillé un plan d’action articulé autour de la réhabilitation des infrastructures hydrauliques et du renforcement de la coordination entre les institutions concernées. Selon son exposé, les débordements des dernières années trouvent leur origine dans quatre facteurs principaux : l’insuffisance des réseaux d’évacuation, l’urbanisation rapide et désordonnée, le manque d’entretien des canaux et la dégradation des systèmes de drainage dans les zones urbaines et périurbaines.
Le ministère constate que les ouvrages construits il y a plusieurs décennies ne répondent plus aux besoins actuels. Les précipitations plus intenses, la densification du bâti et l’absence de planification urbaine ont aggravé les points de rupture, notamment le long des axes côtiers et des entrées de la capitale. Les canalisations sont souvent obstruées par les déchets ou endommagées par des travaux non coordonnés. Cette combinaison d’obstacles explique la répétition des sinistres, avec des inondations touchant aussi bien les quartiers résidentiels que les infrastructures routières.
Révision des cahiers des charges et contrôle des marchés
Le ministre a annoncé un renforcement des cahiers des charges imposés aux entreprises de travaux publics. Désormais, chaque contrat devra inclure des clauses spécifiques de maintenance préventive et de contrôle post-exécution. L’objectif est de garantir la durabilité des ouvrages et d’éviter les réparations récurrentes. Les équipes techniques du ministère ont été chargées d’inspecter les projets en cours et de dresser un rapport d’évaluation avant la saison des pluies.
Les marchés publics en cours de signature seront soumis à un nouveau dispositif de suivi. Ce mécanisme prévoit des visites de terrain, la vérification des matériaux utilisés et l’évaluation des délais d’exécution. Les entreprises jugées défaillantes ou retardataires feront l’objet de sanctions administratives, allant du retrait du marché à l’exclusion temporaire des appels d’offres. Ce contrôle accru vise à rétablir la confiance dans la commande publique et à garantir une utilisation rigoureuse des fonds alloués aux infrastructures.
Coopération avec le Conseil du Développement et de la Reconstruction
Le plan d’action repose sur une coordination directe avec le Conseil du Développement et de la Reconstruction, chargé des grands projets d’infrastructure. Les deux institutions se sont accordées pour mutualiser les données topographiques, harmoniser les schémas d’écoulement et établir un calendrier unifié des interventions. Le ministère souhaite éviter les chevauchements de chantiers et améliorer la cohérence des investissements.
Le Conseil a pour mission d’intégrer les zones à risque dans ses plans directeurs et de proposer des priorités selon la vulnérabilité des territoires. Les premières zones ciblées sont les abords de la capitale, les vallées du Mont-Liban et les axes reliant les grandes agglomérations côtières. Les équipes techniques doivent procéder à un recensement des points noirs d’ici la fin du mois, afin de hiérarchiser les travaux avant le début des pluies.
Responsabilités partagées et coordination municipale
Le ministre a insisté sur la notion de responsabilité partagée. Il a rappelé que la prévention des inondations ne relève pas exclusivement de l’État central, mais également des municipalités et des citoyens. Les collectivités locales sont invitées à intensifier le nettoyage des canalisations, à éliminer les dépôts illégaux de gravats et à interdire le branchement sauvage des réseaux domestiques sur les conduites pluviales.
Les municipalités seront tenues de transmettre des rapports mensuels d’entretien au ministère, accompagnés de preuves photographiques et de relevés techniques.
Les citoyens sont appelés à coopérer en respectant les consignes de propreté et en signalant les obstructions constatées dans leur voisinage. Des campagnes d’information sont prévues pour rappeler les gestes simples susceptibles d’éviter les débordements : ne pas jeter de déchets dans les bouches d’égout, vérifier les conduits domestiques et dégager les accès aux cours d’eau.
Modernisation des réseaux et priorités techniques
Le ministère des Travaux publics a identifié les tronçons les plus critiques du réseau de drainage. Une première phase de travaux concerne la réfection des conduites principales, le remplacement des grilles d’évacuation et la création de bassins de rétention temporaires. Ces ouvrages doivent absorber les flux excédentaires lors des pluies torrentielles et réduire la pression sur les canaux existants.
Des équipes techniques spécialisées ont été mobilisées pour cartographier les défaillances et proposer des solutions adaptées à la topographie. L’accent est mis sur la capitale et ses environs, où les zones basses accumulent les eaux de ruissellement provenant des hauteurs du Mont-Liban.
Les études préliminaires ont également mis en évidence la nécessité d’entretenir les rivières secondaires et les cours d’eau intermittents, souvent négligés dans les programmes d’assainissement. Le ministère prévoit de réhabiliter les lits des rivières en retirant les dépôts et en consolidant les berges, afin de prévenir les débordements.
Gouvernance des projets et suivi financier
Pour éviter les retards observés lors des précédents exercices, un comité interinstitutionnel sera mis en place. Il réunira les représentants du ministère, du Conseil du Développement et de la Reconstruction, des gouvernorats et de la Cour des comptes. Ce comité aura pour mission de suivre l’avancement des projets, d’évaluer les coûts et de contrôler la conformité des travaux aux normes environnementales.
Le financement sera assuré par des crédits déjà votés dans le budget d’investissement, complétés par des redéploiements internes. Les priorités seront données aux chantiers ayant un impact direct sur la sécurité des habitants. Le ministre a précisé que « chaque ouvrage doit être conçu pour durer et non pour être réparé à chaque hiver ». Cette phrase, largement relayée, traduit la volonté d’instaurer une culture de maintenance durable dans le secteur public.
Une approche intégrée de la prévention
La stratégie présentée repose sur une approche intégrée combinant ingénierie, gouvernance et sensibilisation. Elle considère la lutte contre les inondations comme un enjeu d’aménagement du territoire. Les plans d’urbanisme doivent intégrer les contraintes hydrologiques, en interdisant la construction sur les zones inondables et en réservant des couloirs d’évacuation pour les eaux pluviales.
Le ministère envisage de réviser la réglementation en matière de permis de construire, afin d’y inclure des obligations de drainage et de gestion des eaux à la parcelle. Les nouveaux projets immobiliers devront comporter des dispositifs de rétention, tandis que les zones industrielles seront soumises à des inspections régulières.
Suivi avant la saison des pluies
Les services du ministère ont déjà lancé une série d’opérations de nettoyage préventif dans les principales artères. Les canalisations sont inspectées, les trappes relevées et les dépôts retirés. Les autorités locales ont reçu la consigne d’achever ces travaux avant la fin du mois, afin de garantir la fluidité du réseau avant la première vague de pluies. Des inspections conjointes avec la Défense civile et les forces de sécurité sont prévues pour vérifier les points à risque et anticiper les interventions d’urgence.
L’objectif annoncé est de réduire significativement le nombre d’incidents enregistrés durant la saison hivernale et de démontrer que la coordination entre les institutions peut produire des résultats concrets. Cette initiative s’inscrit dans une volonté plus large de renforcer la résilience urbaine et de faire de la prévention des inondations une composante de la politique publique d’infrastructure.



