Un message fort des États-Unis en faveur de l’armée libanaise
Le sénateur américain Ronnie Jackson, représentant du Texas, s’est rendu à Beyrouth dans un contexte où la stabilité sécuritaire du Liban est menacée par la montée des tensions internes et régionales. Il a rencontré le président Joseph Aoun au palais de Baabda, en présence de l’ambassadrice américaine Lisa Johnson, pour discuter du rôle essentiel que doit jouer l’armée libanaise dans la préservation de la souveraineté nationale.
Lors de cette rencontre, Ronnie Jackson a insisté sur la nécessité de consolider l’armée libanaise en tant que seule force légitime capable d’assurer la stabilité du pays. Il a déclaré que « seule une armée libanaise forte peut garantir la stabilité du Liban », une affirmation qui s’inscrit dans la stratégie américaine visant à limiter l’influence des groupes armés opérant en dehors du cadre étatique, en particulier le Hezbollah.
Une rencontre sous haute tension dans un Liban en crise
Les discussions entre Ronnie Jackson et Joseph Aoun ont mis en lumière les défis sécuritaires et économiquesauxquels l’armée libanaise est confrontée. Le président libanais a souligné l’urgence de renforcer les capacités militaires du pays, rappelant que la sécurité nationale ne peut reposer sur des forces parallèles, mais doit être garantie par des institutions officielles et unifiées.
Nawaf Salam, le Premier ministre libanais, s’est également entretenu avec la délégation américaine. Il a insisté sur la nécessité d’un soutien international stable et conditionné à des réformes structurelles, afin d’éviter que l’armée libanaise ne dépende de financements irréguliers ou d’influences politiques internes qui en affaibliraient l’efficacité.
Le commandement des Forces armées libanaises a présenté un rapport détaillant les difficultés actuelles de l’armée, notamment la réduction des salaires et des moyens matériels en raison de la crise économique qui frappe durement le pays. Les responsables militaires ont exprimé leur préoccupation face à la montée de l’instabilité, soulignant que l’armée peine à répondre aux défis sécuritaires posés par la prolifération des armes non contrôlées et la persistance de groupes paramilitaires puissants.
Un avertissement indirect au Hezbollah et à l’Iran
La déclaration du sénateur américain a été interprétée comme un message clair envoyé au Hezbollah. En réaffirmant le principe d’une armée nationale forte et autonome, Ronnie Jackson a indirectement mis en question le rôle militaire du Hezbollah, qui maintient une force armée indépendante sous prétexte de défendre le Liban contre Israël.
Cette visite intervient alors que les États-Unis cherchent à contrer l’influence iranienne au Liban, en s’appuyant sur l’affaiblissement du Hezbollah après la guerre contre Israël et la chute du régime de Bachar al-Assad en Syrie. Washington considère que le Hezbollah profite de la faiblesse des institutions libanaises pour imposer son influence et que le seul moyen d’y remédier est de renforcer les forces armées nationales.
Joseph Aoun, bien que soucieux de préserver un équilibre entre les différentes forces politiques du pays, a reconnu la nécessité d’une restructuration du système de défense, afin d’éviter que le Liban ne devienne un terrain d’affrontement pour des forces extérieures aux intérêts divergents.
Une aide militaire conditionnée à des réformes profondes
Le soutien américain à l’armée libanaise n’est pas inconditionnel. Lors de cette visite, Ronnie Jackson a souligné que les aides financières et matérielles de Washington seraient soumises à des réformes structurelles garantissant une gestion transparente et efficace des ressources allouées.
Le Congrès américain débat actuellement de nouvelles subventions militaires pour le Liban, mais certains responsables à Washington plaident pour un renforcement des conditions d’octroi de cette aide. Ils souhaitent s’assurer que les équipements et fonds alloués à l’armée ne soient ni détournés ni utilisés d’une manière qui pourrait bénéficier indirectement aux groupes armés opérant en dehors de l’État.
Les responsables libanais ont assuré à la délégation américaine que des mesures de contrôle accrues seraient mises en place pour garantir la bonne gestion des aides militaires. Nawaf Salam a déclaré que le gouvernement travaillait à une plus grande indépendance des forces armées, soulignant que le pays ne pouvait plus continuer à dépendre d’acteurs extérieurs pour assurer sa sécurité.
Un contexte régional tendu et une stratégie américaine assumée
La visite de Ronnie Jackson s’inscrit dans un plan plus large des États-Unis pour remodeler les rapports de force au Liban. Washington cherche à consolider les institutions officielles afin de réduire l’influence des factions paramilitaires et des puissances étrangères, notamment l’Iran.
Le contexte régional reste explosif après la guerre entre Israël et le Hezbollah, qui a laissé une grande partie du sud du Liban en ruines et exacerbé les tensions avec les États-Unis et les pays du Golfe. Les Américains considèrent que la seule issue pour le Liban est de renforcer l’armée nationale pour éviter une nouvelle montée en puissance des groupes armés, qui pourrait à terme déstabiliser encore davantage la région.
L’armée libanaise peut-elle réellement s’imposer face aux défis actuels ?
L’objectif affiché par les États-Unis de renforcer l’armée libanaise est ambitieux, mais il soulève plusieurs interrogations. Les forces armées souffrent d’un manque criant de ressources, conséquence directe de la crise économique et de la corruption endémique qui affaiblit les institutions du pays.
La capacité de l’armée à prendre le relais des forces paramilitaires dépendra en grande partie des réformes internes et du soutien international, mais aussi de la capacité du gouvernement libanais à naviguer entre les exigences américaines et les tensions internes.
Si Washington mise sur une montée en puissance progressive de l’armée libanaise, cette stratégie pourrait se heurter à des résistances de la part de factions politiques qui considèrent que les forces officielles ne sont pas encore prêtes à assurer seules la défense du pays.
Le Hezbollah, qui observe avec méfiance ce renforcement des liens entre Beyrouth et Washington, pourrait chercher à bloquer certains volets de cette coopération militaire, notamment en s’appuyant sur ses alliés au sein du gouvernement et du Parlement.