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Les gouverneurs locaux face à l’incapacité du gouvernement : une gestion en roue libre ?

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Un pouvoir central paralysé, des régions livrées à elles-mêmes

Depuis plusieurs années, la crise politique au Liban s’intensifie, avec des gouvernements incapables de tenir leurs promesses ou d’adopter des réformes nécessaires à la stabilisation du pays. Cette paralysie institutionnelle, combinée à une crise économique et sociale sans précédent, a un impact direct sur la gestion des régions, où les gouverneurs se retrouvent à devoir gérer des urgences locales sans directives précises ni soutien du gouvernement central.

L’absence d’un pouvoir exécutif efficace empêche toute prise de décision à grande échelle, ce qui laisse les gouverneurs locaux livrés à eux-mêmes pour assurer des services essentiels tels que l’électricité, l’eau potable, la gestion des déchets et les infrastructures publiques. Les municipalités se retrouvent dans une situation critique, avec des budgets réduits au strict minimum, des fonctionnaires impayés et une population de plus en plus dépendante des aides extérieures.

Les conséquences de cette paralysie sont visibles au quotidien : des coupures d’électricité prolongées, une absence de gestion des déchets dans plusieurs régions, des écoles publiques en état de délabrement avancé et une inflation galopante qui réduit le pouvoir d’achat des citoyens. La population, qui dépendait autrefois de l’État pour des services de base, doit désormais se tourner vers des initiatives locales, des financements étrangers ou encore des aides apportées par la diaspora libanaise.

Des gouverneurs sous pression, des solutions locales limitées

Face à l’inaction du gouvernement central, plusieurs gouverneurs ont pris des initiatives pour tenter de stabiliser la situation dans leurs régions respectives. Certains ont cherché à nouer des accords avec des ONG internationales ou des agences de développement pour assurer la continuité des services publics. Des municipalités ont mis en place des réseaux autonomes d’approvisionnement en électricité, principalement basés sur des générateurs privés et des systèmes solaires financés par des organismes étrangers.

Dans certaines zones, les administrations locales ont cherché à réorganiser la collecte des déchets en confiant la gestion à des entreprises privées, mais cette approche a souvent été freinée par des blocages bureaucratiques, la corruption et l’absence d’un cadre légal clair. La gestion des infrastructures routières, des hôpitaux et des écoles est également au point mort dans plusieurs régions, en raison de l’absence de financements de l’État et de la faiblesse des ressources locales.

Dans la capitale, certaines municipalités ont tenté de sécuriser l’approvisionnement en eau potable en développant des partenariats avec des acteurs privés et des institutions internationales. Cependant, ces initiatives restent limitées, car elles ne permettent pas de garantir un accès équitable aux ressources pour l’ensemble de la population. De plus, sans un soutien institutionnel du gouvernement central, ces solutions restent des mesures temporaires qui ne peuvent être pérennisées à long terme.

Un système administratif vétuste et inefficace

Le Liban souffre d’un système administratif complexe et inefficace, qui repose sur des institutions fragiles et un cadre bureaucratique lourd. Chaque décision prise par un gouverneur local doit passer par plusieurs niveaux d’approbation, ce qui ralentit considérablement la mise en œuvre des réformes et des initiatives de développement. L’État libanais fonctionne sur un modèle de centralisation excessive, qui empêche les collectivités locales d’avoir une autonomie réelle pour répondre aux besoins de leur population.

Cette centralisation est aggravée par la corruption et les intérêts politiques divergents, qui bloquent toute tentative de modernisation de l’administration publique. Les postes administratifs sont souvent attribués selon des affiliations politiques et confessionnelles plutôt que sur la base de la compétence, ce qui ralentit encore plus la prise de décision et la mise en place des projets.

Le cadre juridique actuel ne permet pas aux municipalités d’avoir une gestion indépendante de leurs ressources, ce qui les oblige à dépendre de financements aléatoires en provenance du gouvernement central. Ce dernier, en raison de la crise économique, ne parvient plus à allouer les fonds nécessaires, ce qui place les gouverneurs locaux dans une situation d’attente permanente.

Une population abandonnée et de plus en plus méfiante

Le désengagement de l’État et l’inefficacité des institutions locales ont un impact direct sur la population, qui se sent abandonnée et livrée à elle-même. La perte de confiance envers les institutions est généralisée, et de plus en plus de citoyens se tournent vers des réseaux parallèles pour subvenir à leurs besoins. La solidarité entre familles, les initiatives communautaires et les aides envoyées par la diaspora sont devenues des piliers essentiels pour la survie d’une grande partie de la population.

Les manifestations se multiplient dans plusieurs régions du pays, avec des revendications qui vont au-delà des simples problèmes économiques. La population réclame une refonte totale du système politique, une meilleure gouvernance locale et une gestion plus transparente des ressources publiques. Cependant, la réponse du pouvoir central reste limitée, et toute tentative de réforme se heurte à des résistances politiques et confessionnelles profondément ancrées dans le pays.

Dans certaines villes, des mouvements citoyens émergent pour tenter de prendre en main des services publics abandonnés par les autorités locales. Des associations organisent des campagnes de nettoyage des rues, des distributions alimentaires et des collectes de fonds pour rénover des écoles et des hôpitaux délabrés. Ces initiatives témoignent de la résilience de la population, mais aussi de l’ampleur du vide laissé par un État en faillite institutionnelle.

Quel avenir pour la gouvernance locale au Liban ?

Si l’incapacité du gouvernement central à gérer la crise persiste, les gouverneurs et maires devront prendre des décisions plus autonomes pour assurer la continuité des services de base. Certains experts estiment qu’une transition vers une forme de décentralisation pourrait être envisagée, permettant aux municipalités d’avoir plus de pouvoir et de ressources pour répondre aux besoins de la population.

Cependant, une telle réforme nécessiterait des modifications législatives importantes et une volonté politique qui fait actuellement défaut. Le risque est que la crise actuelle continue d’affaiblir l’État libanais, entraînant une gouvernance locale de plus en plus fragmentée et dépendante d’acteurs externes.

Sans intervention rapide et efficace, le pays risque de voir émerger des gouvernances parallèles, où des factions politiques, des milices ou des acteurs étrangers prennent le contrôle de certaines régions en l’absence d’un État capable de garantir la stabilité et la sécurité.

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Newsdesk Libnanews
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