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Les obligations : une analyse sous l’angle des options financières

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Les obligations sont souvent perçues comme des instruments financiers simples, promettant un remboursement à une date donnée avec un intérêt fixe. Cependant, lorsqu’elles sont émises par des entités en difficulté, comme l’État libanais, leur nature économique se rapproche davantage de celle des options financières. Cette perspective permet d’analyser leurs prix et comportements d’une manière différente, en tenant compte des dynamiques de risque, de volatilité et de probabilité de remboursement.

Une Obligation Comme Une Option : Les Fondements De L’Équivalence

Pour comprendre l’équivalence entre une obligation et une option, il faut se concentrer sur leurs caractéristiques communes. Une obligation représente un droit pour l’investisseur de recevoir un montant futur fixe (principal + intérêts). Cependant, dans des situations de détresse financière, ce remboursement devient incertain, et son prix sur le marché secondaire reflète alors une probabilité de remboursement plutôt qu’une valeur certaine.

En termes d’options, l’investisseur qui achète une obligation agit comme s’il achetait une option d’achat sur un actif sous-jacent : la capacité de l’émetteur à honorer sa dette. Le strike price correspond à la valeur nominale de l’obligation (principal + intérêts). Le prix actuel de l’obligation sur le marché devient alors une prime d’option, qui reflète la perception du marché quant à la probabilité de remboursement.

La Prime De L’Obligation Et Le Strike Price

Le prix d’une obligation est directement influencé par la probabilité perçue que l’émetteur rembourse ses dettes. Si cette probabilité est élevée, le prix de l’obligation se rapproche de sa valeur nominale. En revanche, si cette probabilité est faible, le prix chute, parfois drastiquement, comme c’est le cas des eurobonds libanais, actuellement échangés à une fraction de leur valeur nominale. En termes d’options, cela correspond à une situation où le prix de l’actif sous-jacent (la capacité de remboursement) est bien inférieur au strike price. L’obligation devient alors une option dite out-of-the-money (OTM), c’est-à-dire une option qui n’a pas de valeur intrinsèque, mais qui conserve une valeur spéculative liée à la possibilité d’un remboursement futur.

Le Delta De L’Obligation

Le delta est une mesure clé dans la théorie des options, exprimant la sensibilité du prix de l’option par rapport à une variation du prix de l’actif sous-jacent. Appliqué aux obligations, le delta mesure la sensibilité du prix de l’obligation aux changements dans la perception de la capacité de remboursement de l’émetteur. Dans le cas des eurobonds libanais, le delta est faible, car même des annonces positives (comme des réformes budgétaires potentielles) n’ont qu’un impact limité sur les prix. Les investisseurs restent sceptiques quant à la capacité réelle des dirigeants à restructurer l’État, ce qui réduit le potentiel de hausse du prix des obligations, même en cas de nouvelles favorables.

Volatilité et Temps jusqu’à l’échéance

Deux autres variables clés influencent la valeur des obligations interprétées comme des options : la volatilité et le temps jusqu’à l’échéance.

La volatilité, dans ce contexte, représente les incertitudes politiques, économiques et sociales qui affectent la capacité de remboursement. Une volatilité élevée augmente la prime d’une option, car elle élargit la gamme des scénarios possibles, y compris celui d’un remboursement inespéré. Cependant, dans le cas des obligations libanaises, cette volatilité est perçue comme un risque pur, ce qui entraîne une décote importante.

Le temps jusqu’à l’échéance joue également un rôle crucial. Plus la date de remboursement approche sans réforme structurelle, moins les investisseurs accordent de valeur à l’obligation. En termes d’options, cela correspond à la diminution de la valeur temps, une composante essentielle de la prime d’une option.

L’obligation comme une option Out-Of-The-Money

Les obligations émises par des entités en difficulté, comme l’État libanais, peuvent être assimilées à des options out-of-the-money. Cela signifie que le prix actuel de l’actif sous-jacent (la capacité de remboursement) est inférieur au strike price (le montant à rembourser). Ces obligations conservent une faible valeur sur le marché, car elles intègrent une probabilité, bien que faible, d’un remboursement futur si des réformes ou des aides internationales venaient à changer la donne.

Les implications de cette analyse

Cette approche met en lumière la nature spéculative des obligations en détresse. Les investisseurs qui les achètent parient sur un retournement improbable mais potentiellement lucratif. Dans le cas des eurobonds libanais, leur faible prix reflète non seulement la gravité de la crise économique, mais aussi l’incapacité des dirigeants à entreprendre des réformes crédibles. Sans restructuration budgétaire et réduction des déficits structurels, ces obligations resteront des options presque sans valeur, avec une probabilité très faible d’être remboursées.

Conclusion

Analyser les obligations en difficulté sous l’angle des options financières offre une perspective riche pour comprendre leur dynamique de prix. Cette approche permet de mieux saisir les interactions complexes entre probabilité de remboursement, volatilité des marchés, et perception du risque par les investisseurs. Dans le cas du Liban, l’absence de volonté politique pour restructurer l’État maintient ces instruments financiers dans une position proche d’une option out-of-the-money, reflétant une probabilité faible, mais non nulle, de remboursement. Seule une transformation radicale du système économique et politique pourrait changer cette équation défavorable.

À Titre d’exemple

Le Republic of Lebanon Bond à échéance en 2037 est un titre de créance souverain libanais émis en dollars américains, offrant un coupon de 7,25 %. Le montant total émis s’élève à 750 millions de dollars américains. 

Depuis le défaut de paiement de la dette souveraine libanaise en 2020, les obligations libanaises, y compris celles à échéance en 2037, se négocient à des prix très inférieurs à leur valeur nominale. Actuellement, ces obligations se négocient autour de 9 cents pour 1 dollars de nominal, reflétant une forte incertitude quant à la capacité du Liban à restructurer sa dette et à restaurer sa stabilité économique. 

Il est important de noter que ces obligations sont considérées comme des investissements à haut risque en raison de l’instabilité politique et économique persistante au Liban. Les investisseurs doivent être conscients de la possibilité de pertes importantes et de l’incertitude entourant la restructuration de la dette souveraine libanaise.

Pour obtenir des informations actualisées sur les prix et les rendements de ces obligations, il est recommandé de consulter des plateformes financières ( Bourse du Luxembourg ou de Berlin) spécialisées ou de contacter un conseiller financier.

Analyse: le strike price ou prix d’exercice est de 100% du nominal et le prix est de 9% c’est à dire qu’il y a un écart de 91% pour arriver au strike price. Cette obligation a une échéance dans 12 ans et le marché estime la probabilité actuellement à 9% de chance d’arriver au strike price d’ici 12 ans 2037. En termes d’analyse en termes d’option financiere cette obligation peut donc se comparer à une option very out of the money avec donc aucune valeur intreseque. Le prix de 9% estimé est donc basé juste sur une probabibilité qui dépend de la volatilité et du temps restant d’ici à échéance. Son delta est tres faible car l’option est trop out of the money. Si la probabilité de restructuration de la dette et du budget de l’Etat d’aggrandit alors le prix de cette obligation pourra prendre de la valeur. Mais tant que les choses sont bloquées pour toute restructuration alors la probabilité restera faible, le marché pensant que la probabilité de restructuration est faible ou ne pourrait se faire .

Conclusion: l’investissement est minime actuellement et la perte maximale est de 9% soit 100% du capital que vous investissez dans cette obligation. Le potentiel à’la hausse est grand si la volonté de l’elite politique et financiere accepte les restructurations simultanées nécessaires du budget de l’Etat et de la dette.

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Bernard Raymond Jabre
Bernard Raymond Jabre
Bernard Raymond Jabre, Etudes scolaires à Jamhour puis à l’Ecole Gerson à Paris, continua ses études d’économie et de gestion licence et maitrise à Paris -Dauphine où il se spécialise dans le Master « Marchés Financiers Internationaux et Gestion des Risques » de l’Université de Paris - Dauphine 1989. Par la suite , Il se spécialise dans la gestion des risques des dérivés des marchés actions notamment dans les obligations convertibles en actions et le marché des options chez Morgan Stanley Londres 1988 , et à la société de Bourse Fauchier- Magnan - Paris 1989 à 1991, puis il revint au Liban en 1992 pour aider à reconstruire l’affaire familiale la Brasserie Almaza qu’il dirigea 11 ans , puis il fonda en 2003 une société de gestion Aleph Asset Management dont il est actionnaire à 100% analyste et gérant de portefeuille , de trésorerie et de risques financiers internationaux jusqu’à nos jours.

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