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Qui dirigera la Banque du Liban ? Un poste sous haute tension

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Un processus marqué par les luttes d’influence

Le gouvernement de Nawaf Salam a entamé un vaste processus de nominations administratives qui concerne plusieurs institutions clés du pays. La Banque du Liban, le ministère de la Justice, l’administration fiscale et plusieurs directions stratégiques figurent parmi les secteurs où des postes doivent être renouvelés. Ces désignations, loin d’être de simples formalités, sont au cœur d’intenses tractations politiques qui exacerbent les rivalités entre les principaux blocs parlementaires.

Selon Ad Diyar (26 février 2025), les forces politiques cherchent à s’assurer des postes stratégiques dans ces institutions, chacune tentant de placer ses candidats pour préserver son influence sur les décisions économiques et judiciaires. La logique de quotas confessionnels, pourtant régulièrement critiquée, continue de structurer les débats et de bloquer toute réforme profonde du processus de nomination. D’un côté, le Hezbollah et Amal réclament le maintien des équilibres actuels, arguant que tout changement remettrait en cause les bases du consensus national. De l’autre, des partis comme les Forces libanaises et certains blocs réformateurs estiment que la situation actuelle alimente le clientélisme et l’inefficacité de l’administration publique.

Les tensions se sont cristallisées autour de la nomination du gouverneur de la Banque du Liban, un poste stratégique dans un pays en crise monétaire. Al Bina’ (26 février 2025) rapporte que sept candidats sont en lice pour cette fonction, chacun bénéficiant de soutiens politiques variés et incarnant des orientations économiques différentes. La sélection du prochain gouverneur ne se joue donc pas uniquement sur des critères de compétence, mais reflète les rapports de force entre les puissances locales et les acteurs internationaux.

Les sept candidats à la tête de la Banque du LibanKarim Saïd est issu d’une grande famille politique libanaise. Frère de Fares Saïd, ancien député connu pour ses positions souverainistes, il est perçu comme un homme d’affaires influent ayant des liens avec plusieurs grands investisseurs libanais. Son profil rassure les milieux financiers locaux, qui y voient une garantie de stabilité. Cependant, son manque d’expérience dans les institutions monétaires suscite des doutes sur sa capacité à gérer une crise aussi profonde que celle qui frappe actuellement le Liban.Samir Assaf, ancien banquier international, possède un réseau étendu dans les cercles économiques européens et est reconnu pour son expertise en finance mondiale. Ancien dirigeant de HSBC, il est considéré comme proche du président français et des milieux diplomatiques occidentaux, qui voient en lui un candidat capable de rétablir la crédibilité du Liban auprès des institutions financières internationales. Toutefois, son passé de technocrate expatrié soulève des critiques parmi certains partis politiques libanais, qui redoutent qu’il ne défende davantage les intérêts des créanciers étrangers que ceux de l’économie nationale.Kamil Abou Sleiman bénéficie du soutien des Forces libanaises et du camp chrétien de Maarab. Ancien ministre du Travail sous le gouvernement Hariri, il est reconnu pour son approche réformiste et son engagement en faveur d’une transparence accrue dans la gestion des finances publiques. Son expérience dans le secteur juridique et bancaire joue en sa faveur, mais son affiliation partisane pourrait limiter sa capacité à fédérer un large consensus.Mansour Bteich a déjà occupé des fonctions ministérielles, notamment au ministère de l’Économie, où il s’est illustré par des mesures de soutien aux petites et moyennes entreprises. Proche du Courant Patriotique Libre, il est vu comme un candidat aligné sur les intérêts de ce parti, notamment en ce qui concerne la défense des prérogatives économiques des institutions étatiques. Son profil suscite l’opposition des blocs sunnites et des réformateurs, qui craignent une continuité avec les pratiques de l’ancienne gouvernance.Firas Abi Nassif est le favori du Premier ministre Nawaf Salam. Ancien président du groupe Kulna Irada, il s’est imposé ces dernières années comme une figure montante du courant réformiste libanais. Son expertise en gestion financière et son engagement en faveur de l’indépendance de la Banque du Liban sont salués par plusieurs acteurs de la société civile, mais son manque d’appuis politiques solides pourrait jouer en sa défaveur dans les tractations finales.

Carlos Abou Joudeh, juriste de renom, est un autre candidat soutenu par Nawaf Salam. Spécialiste du droit financier, il a travaillé sur plusieurs dossiers sensibles liés à la restructuration du secteur bancaire libanais. Son approche pragmatique et sa proximité avec certains groupes de pression économiques en font un candidat crédible pour gérer les relations avec les institutions financières internationales. Cependant, son manque d’expérience dans la gestion des politiques monétaires est un point faible qui pourrait peser dans la balance.

Jihad Azour est un ancien ministre des Finances et un technocrate reconnu à l’échelle régionale. Actuel directeur pour le Moyen-Orient et l’Asie au Fonds monétaire international, il est vu comme un candidat privilégié par les bailleurs de fonds internationaux, notamment le FMI. Son expertise en restructuration économique est un atout, mais sa proximité avec les institutions occidentales suscite des réticences parmi certains partis libanais, qui craignent qu’il ne favorise une politique d’austérité brutale au détriment des classes populaires.

Tous ces candidats incarnent des visions différentes pour l’avenir financier du pays, et leur nomination dépendra de l’équilibre des forces entre les différentes factions politiques. Les tractations en cours montrent que cette décision dépasse le cadre purement économique et revêt une forte dimension géopolitique.

Un blocage institutionnel persistant

Les nominations à la Banque du Liban ne sont qu’un volet des tensions qui entourent la répartition des hauts postes administratifs. Selon Al Sharq Al Awsat (26 février 2025), les discussions s’enlisent également au sein du gouvernement concernant le renouvellement des cadres dans les secteurs de la justice et des finances. Le ministère de la Justice fait face à une forte pression pour revoir la composition des magistrats et des procureurs en charge des dossiers sensibles, notamment ceux liés à la corruption et aux crimes financiers.

Les forces politiques continuent de s’opposer sur la meilleure manière de procéder. Le Hezbollah et Amal cherchent à consolider leur présence au sein des institutions judiciaires, arguant que les nominations doivent respecter l’équilibre confessionnel traditionnel. De leur côté, les partis réformateurs et certaines formations chrétiennes, comme les Forces libanaises, demandent une refonte du processus de nomination, afin de garantir une plus grande indépendance des magistrats vis-à-vis des influences politiques.

Le Premier ministre Nawaf Salam tente d’arbitrer ces conflits, mais sa marge de manœuvre reste limitée. Les rapports de force au sein du Parlement bloquent toute réforme ambitieuse, et les tensions entre les différentes factions empêchent un consensus rapide. Cette situation risque de paralyser le fonctionnement de l’État, retardant des décisions cruciales pour la stabilité du pays.

Les désignations des hauts fonctionnaires s’annoncent donc comme une nouvelle épreuve pour le gouvernement. Chaque nomination devient un enjeu de pouvoir entre les partis, révélant l’ampleur des divisions qui minent l’administration libanaise et compliquent la sortie de crise.

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Newsdesk Libnanews
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