Depuis 2019, le Liban connaît un exode sans précédent, marqué par le départ massif de jeunes diplômés et de professionnels qualifiés. En l’espace de quatre ans, plus de 300 000 Libanais diplômés ont quitté le pays, cherchant des opportunités économiques et une meilleure qualité de vie ailleurs. Les médecins sont parmi les plus touchés, avec 40 % d’entre eux ayant déjà quitté le Liban pour exercer à l’étranger. Face à l’effondrement économique, l’instabilité politique et la détérioration des services publics, cette migration massive vide progressivement le pays de ses forces vives, menaçant l’avenir du marché du travail et des infrastructures publiques.
Les Libanais qui quittent le pays : profils et motivations
Cette vague migratoire concerne particulièrement les jeunes diplômés, les professionnels qualifiés et les familles de la classe moyenne.
1. Les jeunes diplômés : un exode des talents
Le chômage des jeunes atteint 40 % chez les moins de 35 ans, tandis que les salaires en livres libanaises sont devenus dérisoires en raison de l’hyperinflation. Sans perspective de carrière stable, les jeunes Libanais cherchent des opportunités ailleurs. Les médecins et ingénieurs partent en Europe, au Canada ou dans les pays du Golfe, où ils trouvent des conditions de travail décentes et des rémunérations attractives. Les étudiants libanais poursuivant leurs études à l’étranger ne reviennent plus, préférant construire leur avenir dans des pays économiquement stables. Les jeunes entrepreneurs fuient un environnement asphyxiant, où les banques bloquent l’accès aux capitaux et la corruption empêche toute innovation. Cette fuite des cerveaux fragilise encore plus la compétitivité et l’innovation au Liban.
2. Les travailleurs qualifiés : des départs massifs vers le Golfe et l’Europe
Certains secteurs professionnels sont dévastés par l’émigration, en particulier la santé, l’enseignement et l’ingénierie. 40 % des médecins ont déjà quitté le Liban, laissant les hôpitaux en sous-effectif et augmentant les difficultés d’accès aux soins pour la population. Les enseignants et professeurs universitaires quittent massivement le pays, car leurs salaires ne leur permettent plus de subvenir à leurs besoins. Les ingénieurs et informaticiens sont recrutés en masse par l’Europe et le Canada, où les entreprises leur offrent des conditions de travail bien meilleures. Ce départ massif affaiblit des secteurs entiers, mettant en péril la continuité des services essentielscomme la santé et l’éducation.
3. Les familles de la classe moyenne : l’exode économique
La classe moyenne libanaise, autrefois un pilier de la société, est en voie de disparition. L’hyperinflation et la chute du pouvoir d’achat poussent de nombreuses familles à quitter le pays. Les familles partent principalement vers l’Europe et l’Amérique du Nord, cherchant un environnement stable pour élever leurs enfants. Les commerçants et entrepreneurs ferment boutique et s’exilent, faute de clients et de conditions économiques viables.
Les destinations privilégiées par les Libanais
Les Libanais s’installent dans diverses régions du monde, en fonction de leurs qualifications et des opportunités économiques.
- Les pays du Golfe (Émirats, Qatar, Arabie saoudite, Koweït) : destination privilégiée pour les médecins, ingénieurs et enseignants.
- L’Europe (France, Allemagne, Royaume-Uni) : attire les étudiants, les chercheurs et les travailleurs qualifiés.
- Le Canada et les États-Unis : destination prisée par les familles cherchant une installation définitive.
- L’Afrique et l’Amérique latine : accueillent certains commerçants et entrepreneurs libanais, notamment dans des marchés où la diaspora libanaise est bien implantée.
L’impact économique et social de cette migration
1. Une perte massive de compétences et de talents
Avec 300 000 diplômés et 40 % des médecins partis en quatre ans, le pays se vide de ses forces vives.
- Les hôpitaux souffrent d’un manque de médecins et d’infirmiers, ce qui affecte la qualité des soins médicaux.
- Les écoles et universités sont privées de leurs meilleurs professeurs, réduisant le niveau d’éducation des générations futures.
- L’absence de chercheurs et d’ingénieurs bloque toute relance économique, empêchant le pays d’innover et d’attirer des investissements.
2. Un affaiblissement du marché du travail
Avec de moins en moins d’actifs, le Liban dépend désormais des envois de fonds de la diaspora. Les entreprises locales ont du mal à recruter, car les talents fuient. Les salaires en livres libanaises sont en chute libre, renforçant les inégalités entre ceux qui reçoivent des dollars de l’étranger et ceux qui restent.
3. Un déséquilibre générationnel qui fragilise l’avenir
Le vieillissement de la population s’accélère, tandis que les jeunes quittent massivement le pays. Cette tendance augmente les besoins en soins de santé et en aides sociales, alors même que le pays est en faillite financière. Sans renouvellement de la population active, la croissance économique devient impossible, enfermant le Liban dans un cercle vicieux de déclin et de dépendance aux capitaux étrangers.
Que peut faire le Liban pour freiner l’émigration massive ?
Pour éviter une catastrophe économique et sociale, des réformes urgentes sont nécessaires.
- Relancer l’économie et stabiliser la monnaie : restaurer la confiance dans le système bancaire et attirer des investissements étrangers pour créer des emplois.
- Améliorer les conditions de travail et les salaires : revaloriser les rémunérations des enseignants, médecins et fonctionnaires, offrir des avantages fiscaux aux entrepreneurs.
- Créer des incitations pour le retour des expatriés : mettre en place des programmes de réintégration pour les Libanais qualifiés, développer des partenariats entre l’État et la diaspora pour investir dans le pays.