À la suite des frappes israéliennes qui ont visé les quartiers sud de Beyrouth jeudi soir, le Hezbollah a publié un communiqué condamnant l’intensité des bombardements et précisant le bilan matériel. Parallèlement, l’un de ses parlementaires, Ali Ammar, a appelé les partis libanais à transformer leurs condamnations en initiatives diplomatiques concrètes. Ces déclarations s’inscrivent dans une stratégie politique visant à renforcer le rôle de l’État tout en réaffirmant le positionnement du Hezbollah dans la scène intérieure.
Évaluation des destructions : un signal politique
Dans un communiqué diffusé vendredi matin, le Hezbollah a indiqué que « neuf immeubles avaient été complètement détruits » et que « des dizaines d’autres avaient subi des dommages importants ». Cette évaluation est intervenue après une nuit de bombardements dans les zones densément peuplées de la banlieue sud de Beyrouth, secteur historiquement favorable au mouvement chiite.
Le Hezbollah n’a pas évoqué de pertes humaines dans ce bilan, mais a souligné l’ampleur matérielle des frappes. Le parti n’a pas non plus revendiqué de riposte directe, se concentrant sur une communication orientée vers la dénonciation politique et la solidarité communautaire.
Ce choix d’un bilan détaillé mais sans réponse militaire immédiate témoigne d’une volonté d’ancrer l’incident dans une logique de pression politique plus que dans une logique de confrontation militaire immédiate.
Appel à la responsabilité politique nationale
Dans une déclaration parallèle, le député Ali Ammar, membre du bloc parlementaire du Hezbollah, a appelé l’ensemble des forces politiques libanaises à agir. Il a exhorté les partis qui ont condamné les frappes israéliennes à traduire leurs paroles en actes diplomatiques.
Cette position vise à relancer la mobilisation politique interne sur la scène internationale, en dépassant le stade de la dénonciation verbale. L’objectif affiché est de construire un front libanais uni capable d’interpeller les puissances étrangères et les instances onusiennes sur les violations du cessez-le-feu.
L’interpellation d’Ali Ammar renforce la ligne du Hezbollah selon laquelle la réponse à l’agression israélienne doit passer par les institutions libanaises, en particulier le gouvernement et la diplomatie. Le mouvement cherche ainsi à éviter une rupture du cessez-le-feu tout en déplaçant le rapport de force sur le terrain politique.
Insistance sur le rôle de l’armée libanaise
Le communiqué du Hezbollah n’a pas abordé directement la question de la reprise des hostilités. Toutefois, dans un contexte où l’armée libanaise a menacé de suspendre sa participation au mécanisme de supervision en cas de nouvelles violations israéliennes, le silence du Hezbollah sur ce point prend un relief particulier.
Le ministère des Affaires étrangères français a rappelé que le démantèlement des sites militaires non autorisés relève de la compétence de l’armée libanaise, en coordination avec les forces de la FINUL. En réponse implicite, les responsables du Hezbollah ont évité toute mention de cette disposition, préférant insister sur les violations israéliennes et la nécessité d’une réponse politique.
Cette omission permet au Hezbollah de maintenir un discours de conformité indirecte au cessez-le-feu, tout en contournant la question du désarmement exigé par l’accord.
Cadrage du conflit dans une perspective nationale
En évitant toute revendication militaire immédiate et en appelant à une réponse institutionnelle, le Hezbollah tente de repositionner sa communication dans une perspective nationale. Le discours d’Ali Ammar valorise le rôle du Liban en tant qu’État souverain, capable de négocier et d’imposer le respect de ses engagements sans recourir à l’escalade armée.
Cette posture s’inscrit dans une stratégie d’ancrage dans l’appareil étatique, tout en maintenant la rhétorique de la résistance. Le mouvement tente ainsi de limiter sa vulnérabilité après les pertes subies lors de la guerre de septembre-novembre 2024, marquées notamment par la mort de plusieurs de ses cadres dirigeants.
Le repositionnement discursif du Hezbollah met en lumière une volonté de revaloriser le cadre multilatéral sans renoncer à sa légitimité de mouvement armé.