Le Premier Ministre Hassan Diab a annoncé la démission de son gouvernement à l’issue d’une réunion de ce dernier au Grand Sérail.

Les ministres du gouvernement Hassan Diab auront donc à charge d’expédier les affaires courantes jusqu’à la nomination d’un nouveau gouvernement.

Dans une allocution télévisée, le Premier Ministre sortant a dénoncé ses adversaires politiques qui utilisent tous les moyens pour nuire à l’action de son gouvernement désormais démissionnaire, dénonçant la corruption chronique, plus grande que l’état. L’un de ces modèles de corruption a explosé dans le port de Beyrouth, accuse-t-il, accusant ses adversaires de ne se préoccuper que d’effectuer des discours populistes.

“Certains n’ont pas correctement interprété la révolution du 17 octobre, cette révolution était contre eux”, déclare Hassan Diab, allusion à certains hommes politiques qui espèrent revenir au pouvoir suite à cette démission.

Nous faisons face à une tragédie majeure, et les forces politiques qui souhaitent oeuvrer pour l’intérêt du pays étaient supposées coopérer mais certains vivent dans un moment différent et leurs seuls soucis est à régler des scores politiques et à détruire ce qui reste de l’état.

Le désormais ancien Premier Ministre a accusé ses adversaires d’avoir utilisé toutes leurs armes, fabriqué des faits, d’avoir menti à la population, face à la menace que ce gouvernement mette fin à leurs carrières politiques.

Tous les ministres de ce gouvernement ont offert tout ce qu’ils pouvaient offrir, sans avoir d’intérêt politique. Nous avons porté la demande du Peuple pour le changement.

Une classe politique résiste par tous les moyens même les sales pour empêcher tout changement, dénonce Hassan Diab, qui estime qu’ils savaient que son gouvernement représentait une menace pour eux.

Nous devons désormais prendre du recul pour tenir avec le peuple, souligne ensuite le Premier ministre sortant avant d’annoncer la démission de son gouvernement.

Et maintenant, on va où ?

Soumis à d’importantes pressions en vue d’éviter des élections législatives anticipées pourtant réclamées par la rue libanaise depuis le mois d’octobre 2019 et suite à la démission de certains de ses ministres et à la menace d’autres ministres de les suivre, le gouvernement Hassan Diab, en place depuis le 17 janvier 2020, a donc été également emporté par l’explosion du Port de Beyrouth.

Plusieurs ministres ont déjà annoncé leurs départs, le ministre de l’environnement Demianos Kattar puis de l’information Manal Abdel Samad, puis aujourd’hui le ministre des télécommunications Talal Hamad et de la justice Marie Claude Najm, même si elle s’était présentée au conseil des ministres. D’autres démissions sont évoquées, comme celle du Ministre des Finances, Ghazi Wazni, arrivé au Grand Sérail, la lettre de démission à sa main, celle du ministre de l’économie Raoul Nehmé qui s’était précédemment entretenu avec le Président de la République, celle du ministre de la défense Zeina Akar et de l’intérieur Mohammed Fahmi.

Cette démission intervient enfin alors que la proposition d’écourter le mandat du Parlement, proposition du Premier Ministre ferait face à d’importants blocages politiques, notamment de la part du Président de la Chambre des Députés, Nabih Berri qui souhaiterait plutôt un changement de gouvernement.

De source gouvernementale, on critique également le manque de possibilité pour mener les réformes nécessaires et au banc des accusés, le président du parlement Nabih Berri, l’instance elle-même et la commission parlementaire des finances et du budget présidée par le député Ibrahim Kanaan. Ces sources rappellent ainsi que ces derniers se seraient opposés à l’audit de la Banque du Liban ou encore au chiffrage des pertes du secteur financier, des préalables pourtant demandés par le FMI pour le déblocage d’une aide financière urgence.

Le Premier Ministre Hassan Diab avait demandé à ses ministres de suspendre leurs démissions dans l’attente de la publication des résultats préliminaires de l’enquête concernant l’explosion du Port de Beyrouth, le 4 août 2020.

Pour l’heure, le ministère de la santé indique que 158 personnes sont décédées, plus de 60 personnes toujours portées disparues et plus de 6 000 personnes ont été blessées selon un bilan toujours provisoire dans l’explosion qui a ravagé le port de Beyrouth et une grande partie de la capitale libanaise. 300 000 personnes seraient également sans logement des suites de cet explosion.

La piste d’une explosion accidentelle de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium à l’intérieur d’un entrepôt du port de Beyrouth, saisis en 2014 à bord d’un navire poubelle, le Rhosus battant pavillon moldave, est pour le moment privilégiée par les autorités libanaises. Cette explosion équivaudrait à celle de 600 tonnes de TNT ou encore à un tremblement de terre de 3.3 sur l’échelle de Richter.
Elle aurait ainsi causé un cratère de 210 mètres de long sur 43 mètres de profondeur, indique le dimanche 9 août une source sécuritaire citant les propos d’experts français présents sur place.

Cette enquête devrait ainsi déterminer les responsabilités de toutes les parties prenantes à ce drame.

À la crise économique et de gouvernance, se rajoute désormais la crise politique

Cette démission du gouvernement Diab risque de plonger le Liban dans le chaos, alors que le temps manque aujourd’hui pour la mise en place des réformes exigées par la communauté internationale afin de débloquer l’aide économique nécessaire face à une récession qui a débuté dès 2018.

Alors que le silo à blé du port de Beyrouth et ses 17 000 tonnes de blé ont disparu par l’explosion, certains redoutent désormais que le retard traditionnel dans la constitution du prochain gouvernement amène à une crise sociale majeure au Pays des Cèdres.

Des sources internationales indiquent que le secteur financier libanais n’est plus en mesure aujourd’hui de financer les importations nécessaires pour le Liban et devrait prochainement s’effondrer dans sa grande totalité.