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Morgan Ortagus à Beyrouth : une déclaration qui embrase la scène politique libanaise

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Morgan Ortagus et sa déclaration sur l’exclusion du Hezbollah : quelles réactions politiques ?

Une déclaration qui attise les tensions politiques

Morgan Ortagus, émissaire américaine au Moyen-Orient, a provoqué une tempête politique lors de sa visite à Beyrouth en affirmant que les États-Unis ne soutiendraient aucun gouvernement où le Hezbollah serait représenté​. Cette déclaration, faite lors d’une conférence de presse au palais présidentiel après une rencontre avec le président Joseph Aoun, a immédiatement suscité des réactions vives au sein du paysage politique libanais.

Ortagus a explicitement félicité Israël pour son rôle dans l’affaiblissement du Hezbollah, affirmant que « l’influence du parti doit être totalement éradiquée des institutions gouvernementales libanaises »​. Elle a insisté sur le fait que la politique américaine au Liban visait à « renforcer les forces démocratiques et à empêcher tout élément lié au Hezbollah de prendre part à la gestion du pays »​.

Le Hezbollah et ses alliés ont rapidement dénoncé une ingérence étrangère inacceptable et une tentative de dictée politique par Washington. Un haut responsable du mouvement chiite a déclaré que «cette tentative de marginaliser le Hezbollah dans les affaires gouvernementales libanaises est une atteinte directe à la souveraineté nationale»​. Al Akhbar (08/02/2025) a également rapporté que certains membres du gouvernement intérimaire avaient exprimé leur réprobation face à ces pressions internationales, estimant qu’elles pourraient exacerber la crise politique plutôt que d’y apporter une solution​.

Le Hezbollah et ses alliés montent au créneau

Morgan Ortagus a déclenché une vague de condamnations de la part des figures politiques et des formations alliées au Hezbollah, qui ont perçu ses propos comme une ingérence directe dans les affaires internes libanaises. Le Hezbollah a publié un communiqué dans lequel il affirme que « les États-Unis tentent d’imposer un gouvernement qui leur est favorable au Liban, en excluant délibérément une composante essentielle du pays »​.

Le président du Parlement, Nabih Berri, a lui aussi exprimé son indignation, dénonçant une tentative flagrante de marginalisation politique. Il a rappelé que le Hezbollah, en tant que parti élu par une partie significative de la population libanaise, « ne peut être arbitrairement écarté sous prétexte d’exigences étrangères »​.

Le Courant Patriotique Libre (CPL), dirigé par Gebran Bassil, a également condamné la déclaration d’Ortagus, estimant que « ces pressions américaines n’ont qu’un seul but : aggraver la crise politique en dressant un camp contre un autre »​. Le parti a mis en garde contre une politique de division imposée par l’extérieur, qui « ne servirait que les intérêts de puissances étrangères, au détriment de la stabilité du Liban »​.

Un responsable du mouvement Amal, proche du Hezbollah, a averti que « tout gouvernement formé sans le tandem chiite serait voué à l’échec et à la paralysie »​. Il a ajouté que « les États-Unis ne peuvent pas dicter aux Libanais qui doit les représenter », soulignant que toute tentative d’exclusion provoquerait une escalade politique et institutionnelle​.

Manifestations et réactions populaires

La déclaration de Morgan Ortagus, affirmant que les États-Unis ne soutiendraient aucun gouvernement où le Hezbollah serait représenté, a provoqué une vague de protestations dans plusieurs régions du Liban. Dès l’annonce de ses propos, des manifestations spontanées ont éclaté à Beyrouth et dans le sud du pays, principalement dans les bastions du Hezbollah, où des milliers de personnes ont exprimé leur rejet des ingérences américaines​.

Dans la banlieue sud de Beyrouth, des manifestants ont bloqué plusieurs axes routiers, scandant des slogans contre les tentatives américaines de marginaliser une composante politique du pays​. Un des slogans repris par la foule était « Washington hors du Liban », tandis que des drapeaux américains ont été brûlés en signe de protestation​.

Blocus routiers et escalade des tensions

Dans le quartier de Dahiyeh à Beyrouth, bastion du Hezbollah, plusieurs routes principales ont été bloquées par des groupes de jeunes manifestants, qui ont allumé des pneus en feu pour empêcher la circulation​. Des affrontements sporadiques ont eu lieu entre des manifestants et les forces de l’ordre, qui ont tenté de rouvrir les voies en dispersant les foules.

Au sud du Liban, notamment à Sour et Nabatiyeh, des cortèges de voitures arborant les drapeaux du Hezbollah et du mouvement Amal ont circulé en klaxonnant, exprimant leur refus d’une politique imposée par Washington​. Certains manifestants ont affirmé que la déclaration d’Ortagus représentait une tentative de dictée étrangère sur la politique libanaise et que la souveraineté du pays était en jeu​.

Une inquiétude croissante sur un risque d’escalade

Les tensions provoquées par ces manifestations inquiètent les milieux politiques et diplomatiques. Un haut responsable du Courant Patriotique Libre a mis en garde contre une possible détérioration de la situation sécuritaire, affirmant que « des décisions prises sous pression étrangère risquent d’enflammer la rue »​.

Dans les cercles sécuritaires, des craintes de débordements existent, alors que certains analystes politiques redoutent une confrontation entre les partisans du Hezbollah et les forces libanaises si la crise venait à s’intensifier​. Un politologue cité par Al Quds (08/02/2025) a averti que « l’exclusion d’une force politique majeure du paysage gouvernemental pourrait mener à un cycle d’instabilité et de paralysie institutionnelle »​.

Le gouvernement libanais sous pression

Face aux tensions accrues et au blocage gouvernemental persistant, le président Joseph Aoun a tenté d’adopter un ton modéré, appelant à la préservation de l’indépendance du Liban dans la formation du gouvernement. Lors d’une rencontre avec les dirigeants politiques, il a affirmé que «les décisions concernant la formation du gouvernement doivent être prises en fonction des intérêts du Liban, et non sous pression d’acteurs extérieurs»​.

Cependant, cette déclaration a été perçue comme une position d’équilibriste visant à ménager à la fois les puissances occidentales, qui souhaitent exclure le Hezbollah du gouvernement, et les forces internes qui refusent toute marginalisation du parti chiite​. La Maison Blanche aurait même exprimé son agacement face à ce qu’elle considère comme une attitude ambiguë du président libanais​.

Dans ce contexte, Aoun tente de jouer le rôle d’intermédiaire entre Nawaf Salam, qui subit les pressions américaines et saoudiennes pour écarter le Hezbollah, et Nabih Berri, qui insiste pour maintenir l’équilibre confessionnel dans le gouvernement​. Cette posture, bien que prudente, ne semble pas être suffisante pour débloquer la situation.

La médiation française : un compromis fragile

Face aux tensions persistantes, la France a tenté d’apporter une solution intermédiaire en proposant la nomination d’un ministre chiite neutre, qui ne serait ni affilié au Hezbollah ni désigné directement par les forces occidentales​. Cette option a été envisagée comme un moyen d’éviter une confrontation directe entre Washington et le Hezbollah, tout en permettant la formation rapide d’un gouvernement pour faire face à la crise économique​.

Selon des sources diplomatiques françaises, «Paris a engagé des discussions discrètes avec l’ensemble des acteurs politiques libanais afin de trouver un terrain d’entente»​. Toutefois, cette initiative s’est heurtée à des refus catégoriquesLe Hezbollah considère qu’un ministre soi-disant neutre ne serait qu’un cheval de Troie pour exclure son influence du gouvernement​. De leur côté, les États-Unis et l’Arabie saoudite estiment qu’un ministre chiite, même sans affiliation officielle, resterait sous l’influence du Hezbollah et de ses alliés​.

Dans ce contexte, le Premier ministre désigné Nawaf Salam se trouve dans une impasse : il ne peut ni satisfaire les exigences américaines sans provoquer une crise interne, ni composer avec le Hezbollah sans perdre le soutien des bailleurs de fonds occidentaux et arabes​.

Un Liban toujours en crise et sans solution immédiate

Le blocage politique actuel risque de plonger le Liban dans une période de vide institutionnel prolongé, alors que la pression populaire grandit et que l’économie continue de s’effondrer​. Les banques libanaises, déjà fragilisées, alertent sur les risques d’une nouvelle dévaluation de la livre libanaise, qui pourrait entraîner une explosion sociale​.

L’échec des négociations pourrait forcer Nawaf Salam à renoncer à sa mission, plongeant le pays dans une nouvelle incertitude​. En l’absence de compromis, le Liban pourrait voir ses relations avec ses partenaires économiques se détériorer, alors que la population continue de subir une inflation galopante et une pauvreté croissante​.

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Newsdesk Libnanews
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