Le Liban est confronté à une crise économique sans précédent, aggravée par une culture enracinée de l’impunité en matière de crimes financiers. Cette situation est particulièrement manifeste dans les tentatives actuelles de certaines figures influentes, soutenues par des médias proches du secteur bancaire, de limiter les enquêtes concernant les proches de Riyad Salameh, ancien gouverneur de la Banque du Liban (BdL) à seulement 40 millions de dollars de commission au lieu des 8 milliards de dollars disparus on ne sait encore comment. Ces actions traduisent un effort évident de protéger ceux qui ont profité du système, rendant ainsi toute tentative de restauration de la confiance publique dans le système bancaire quasi impossible, tant que les mêmes acteurs demeurent aux commandes.
Un bouclier protecteur pour les élites financières et politiques
Depuis l’effondrement financier de 2019, les accusations se sont multipliées contre les institutions financières et les élites politiques, accusées d’avoir détourné d’importantes sommes d’argent à l’étranger tout en imposant des contrôles stricts sur les comptes des déposants ordinaires. Riyad Salameh, en tant qu’architecte des politiques financières controversées de la BdL, a longtemps été au centre des critiques. Pourtant, au lieu d’une enquête transparente et impartiale, certains groupes médiatiques, apparemment liés à des intérêts financiers et bancaires, cherchent à circonscrire le champ des enquêtes, protégeant ainsi les complices potentiels et les proches de Salameh.
Cette stratégie vise non seulement à limiter la portée de la justice, mais aussi à empêcher la mise en lumière des liens complexes entre la BdL, les banques, les changeurs agréés, et une élite politique et économique qui a bénéficié du système pendant des décennies. Les programmes lancés par la BdL dans les années 2010, censés stabiliser l’économie, ont en réalité enrichi une poignée d’entrepreneurs et de politiciens, créant un cercle vicieux où les mêmes personnes continuent de profiter des failles du système.
Ces personnes agissent des menaces qui ressemblent étrangement à celles qui ont justement mis en place la culture de l’impunité bénéficiant à nos criminels de la guerre civile, les amenant au pouvoir à la fin de la guerre civile. Face à simplement une demande à ce que justice soit rendue, ils menacent la population de crise économique qui se prolonge, de chaos, voire même de guerre civile une nouvelle fois, via des médias qui leurs sont acquis. Et pourtant, cela est loin d’être le cas. Au contraire, seule la justice pourra amener à la restauration de la confiance envers un système qu’ils ont gangréné.
Les banques et changeurs agréés : des acteurs au cœur du scandale
Les banques libanaises, autrefois considérées comme le pilier de l’économie du pays, ont largement contribué à la crise actuelle en s’engageant dans des pratiques financières douteuses, telles que le détournement de fonds publics et la rétention illégale des dépôts en devises étrangères. Ces pratiques, réalisées sous la supervision de la BdL, n’ont fait qu’aggraver la situation, surtout après l’effondrement de la livre libanaise et la crise de liquidités.
Les changeurs agréés par la BdL sont également dans le collimateur, accusés d’avoir profité de la dévaluation de la monnaie pour manipuler le marché des devises. Alors que les citoyens ordinaires étaient limités dans leurs retraits de fonds, ces changeurs, en collusion avec des personnalités influentes, ont pu accumuler des richesses en spéculant sur les taux de change.
Une confiance impossible avec les mêmes acteurs aux commandes
Dans ce contexte de crise et de méfiance généralisée, il est illusoire d’espérer restaurer la confiance dans le système bancaire et financier si les mêmes acteurs responsables des dérives financières restent aux commandes. Ceux qui ont contribué à la ruine de l’économie libanaise cherchent aujourd’hui à se réinventer en bloquant les enquêtes, en protégeant leurs alliés, et en s’assurant qu’ils échappent à la justice.
Or, la restauration de la confiance passe nécessairement par des réformes structurelles profondes, un renouvellement des dirigeants dans les secteurs bancaire et politique, ainsi qu’une enquête judiciaire transparente et sans compromis. Toute tentative d’étouffer ces enquêtes ne ferait que renforcer le sentiment d’impunité qui a mené le Liban à cette situation désastreuse.
Accusations contre les proches de la BdL et les bénéficiaires des programmes des années 2010
Les réformes économiques menées par la BdL dans les années 2010, souvent vantées comme des solutions pour stabiliser l’économie libanaise, se sont avérées être des sources de profits massifs pour une minorité. De nombreux entrepreneurs et politiciens ont tiré parti de ces programmes pour renforcer leurs propres richesses, laissant la majorité des Libanais souffrir des conséquences des politiques économiques désastreuses. Les enquêtes judiciaires devraient s’étendre non seulement aux banques, mais aussi aux changeurs agréés et aux hommes politiques du cercle proche de la BdL, qui ont contribué à maintenir un système basé sur la corruption et l’enrichissement personnel.
Vers une justice financière : fin de l’impunité ou perpétuation du système ?
Il est crucial que la société libanaise exige une véritable transparence et que les responsables de ces crimes financiers soient jugés.
Toutefois, cela ne peut fonctionner que si une réelle volonté politique de réforme existe. La culture de l’impunité doit prendre fin si le Liban veut espérer un avenir meilleur et redonner confiance à sa population. Il est temps de briser le cycle de protection des élites, de mettre en lumière les pratiques corrompues, et de rendre justice à des millions de Libanais trahis par un système qu’ils ne peuvent plus soutenir et ainsi bâtir enfin cet état de droit auquel tout le monde aspire.