Deux frappes ciblées en pleine trêve
Le 7 mai 2025, l’armée israélienne a mené deux frappes distinctes sur le territoire libanais, visant et tuant deux figures de premier plan des mouvements armés opérant dans le pays. La première attaque, à Kfar Rumman, a tué Adnan Mohammad Sadeq Harb, responsable logistique du Hezbollah dans la formation Badr. La seconde, à l’aube du lendemain à Saïda, a visé et éliminé Khaled Ahmed al-Ahmed, haut cadre du Hamas.
Ces deux opérations, menées par des drones ou des missiles guidés, interviennent malgré la trêve conclue le 27 novembre 2024 entre Israël et le Hezbollah. Elles soulignent la fragilité de l’accord, pourtant conçu pour mettre un terme à plus d’un an d’escalade militaire.
Le Hezbollah frappé à Kfar Rumman
Adnan Mohammad Sadeq Harb a été tué alors qu’il circulait dans une voiture sur la route reliant Kfar Rumman à Nabatiyé. Selon l’armée israélienne, Harb était le chef du soutien logistique de la formation Badr, un groupe actif au sud du fleuve Litani. Il aurait facilité le transfert d’armes et œuvré à la reconstitution d’infrastructures militaires.
Le communiqué de Tsahal accuse Harb de violer les termes de la trêve en maintenant des activités militaires au sud du Litani. L’attaque a également fait trois blessés, selon le ministère libanais de la Santé.
Un responsable du Hamas éliminé à Saïda
Quelques heures plus tard, une autre frappe a visé un véhicule à Saïda, tuant Khaled Ahmed al-Ahmed, présenté par Israël comme le chef des opérations de la brigade occidentale du Hamas au Liban. Le mouvement palestinien a confirmé sa mort et promis de continuer « la voie de la résistance ». Israël affirme que ce responsable était impliqué dans le trafic d’armes et la planification d’attaques à partir du territoire libanais.
Le Liban crie à la violation de la souveraineté
Ces frappes ont immédiatement suscité des réactions à Beyrouth. Le gouvernement libanais a dénoncé une « grave violation » de la souveraineté nationale et a convoqué une réunion du Haut Conseil de Défense. Un communiqué publié à l’issue de la réunion a rappelé que le Liban « respecte scrupuleusement les engagements pris dans le cadre de la trêve » et a exhorté la communauté internationale à exiger le retrait israélien des cinq positions militaires encore occupées.
Israël maintient des positions militaires dans le Sud : une occupation prolongée
Malgré l’engagement pris dans le cadre de la trêve de novembre 2024 de se retirer entièrement du territoire libanais au sud du Litani, Israël maintient toujours une présence militaire dans cinq positions qu’il qualifie de “stratégiques”, situées à proximité de la frontière.
Selon des sources militaires libanaises, ces positions se trouvent notamment :
- Près de Kfar Chouba et des Fermes de Chebaa
- À proximité des localités de Rmeich, Blida, Aitaroun et Adaisseh
Ces implantations, souvent constituées de postes de surveillance renforcés par des chars et de l’artillerie légère, sont activement contestées par le gouvernement libanais qui y voit une occupation illégale en violation de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU.
Le ministère libanais des Affaires étrangères a saisi à plusieurs reprises les Nations unies pour demander :
- Le retrait total et immédiat des troupes israéliennes
- La confirmation sur le terrain par la FINUL des zones toujours sous contrôle israélien
- La mise en œuvre de sanctions diplomatiques en cas de refus d’Israël de respecter l’accord
Du côté israélien, les autorités affirment que ces positions sont temporaires et maintenues “tant que des menaces actives existent” dans la zone frontalière, pointant notamment des mouvements logistiques supposés du Hezbollah.
La trêve de novembre 2024 de plus en plus menacée
L’accord conclu le 27 novembre 2024 prévoyait :
- Le retrait du Hezbollah au nord du fleuve Litani, à 30 km de la frontière
- Le démantèlement des installations militaires au sud
- Le retrait total d’Israël du sud du Liban, sauf pour cinq positions dites « stratégiques »
Mais depuis sa signature, Israël a continué à mener des frappes ciblées, principalement contre le Hezbollah, mais aussi, désormais, contre le Hamas. En retour, le Hezbollah n’a pas revendiqué de ripostes, indiquant qu’il entendait préserver le calme relatif instauré par la trêve.
Pressions sur le Hamas par les autorités libanaises
La présence du Hamas sur le territoire libanais fait l’objet de critiques croissantes à Beyrouth. Le 1er mai, le Haut Conseil de Défense avait publiquement mis en garde le mouvement palestinien contre toute tentative d’utiliser le Liban pour attaquer Israël. Quelques jours plus tard, plusieurs Palestiniens ont été remis aux autorités, soupçonnés d’avoir tiré des roquettes depuis le sud en mars 2025.
Cette posture reflète la volonté du gouvernement libanais de dissocier l’État des actions de groupes armés non étatiques. Le président Joseph Aoun et le Premier ministre Nawaf Salam ont exprimé leur détermination à respecter les obligations internationales.
Israël poursuit sa politique d’éliminations ciblées
L’État hébreu justifie ses frappes comme des opérations préventives contre des menaces persistantes. Les deux hommes tués cette semaine sont présentés comme ayant un rôle actif dans la logistique, les transferts d’armes et la préparation d’attaques.
Le mode opératoire de ces frappes, fondé sur l’usage de drones et de missiles guidés de précision, confirme l’intensification des opérations spéciales israéliennes sur le sol libanais depuis la fin des hostilités ouvertes en octobre 2024.
Violations massives de l’espace aérien libanais depuis la trêve
Malgré la signature de l’accord, Israël multiplie les violations de l’espace aérien libanais, principalement à des fins de reconnaissance ou d’attaques ciblées.
📊 Statistiques officielles (sources : ONU, FINUL, AFP)
Période | Nombre de violations aériennes |
---|---|
27 novembre 2024 – 20 février 2025 | 1 331 |
21 octobre – 26 novembre 2024 | 1 295 |
Total (5 mois) | 2 626 |
Ces chiffres documentés par les rapports du Conseil de sécurité des Nations unies et la FINUL révèlent une moyenne de 20 à 25 survols non autorisés par jour, notamment dans les régions de la Békaa, du Liban-Sud et autour de Saïda.