Lancement de nouveaux projets solaires et éoliens
Le ministère libanais de l’Énergie a confirmé pour la période 2025-2026 l’approbation de plusieurs projets d’énergie renouvelable représentant une capacité totale de 750 mégawatts (MW), répartis entre solaire photovoltaïque et éolien. Ces projets, confiés à des producteurs indépendants d’électricité (IPP), devraient être opérationnels dès le second semestre 2026. Il s’agit de la première phase concrète du plan national de transition énergétique, élaboré en collaboration avec l’Union européenne et soutenu par la Banque mondiale. Le gouvernement table sur un objectif de 30 % d’électricité issue de sources renouvelables d’ici 2030, contre moins de 10 % actuellement.
Détail des appels d’offres et capacités allouées
L’appel d’offres de 2023, dont les résultats ont été entérinés début 2025, prévoit l’attribution de 11 projets solaires d’une capacité totale de 500 MW, répartis sur six gouvernorats. Trois projets éoliens supplémentaires (Akkar, Hermel, et Tyr) viendront s’ajouter pour 250 MW. Les entreprises sélectionnées bénéficieront d’un tarif d’achat garanti sur 20 ans (Power Purchase Agreement), indexé en partie sur le taux de change parallèle du marché. Les investissements attendus pour cette première vague s’élèvent à 950 millions USD. Les fonds seront majoritairement privés, avec des garanties de paiement offertes par la Banque mondiale via un mécanisme de risk-sharing structuré.
Répartition géographique des projets (capacité estimée)
Région | Technologie | Capacité prévue |
---|---|---|
Bekaa | Solaire PV | 180 MW |
Akkar | Éolien | 120 MW |
Mont Liban | Solaire PV | 80 MW |
Hermel | Éolien | 80 MW |
Liban Sud | Solaire PV | 90 MW |
Nabatieh | Solaire PV | 70 MW |
Tyr | Éolien | 50 MW |
Source : Ministère de l’Énergie, Byblos Research
Un cadre réglementaire encore instable
Malgré l’engagement formel de l’État et l’appui de bailleurs internationaux, la réglementation du secteur reste incomplète. La loi n°462 sur la libéralisation du secteur de l’électricité, adoptée en 2002 mais jamais appliquée, doit encore être amendée pour intégrer les spécificités des énergies renouvelables. La Lebanese Electricity Regulatory Authority (LERA), en théorie indépendante, n’est toujours pas opérationnelle. Cette absence de régulateur actif crée une incertitude sur la fixation des tarifs, le traitement des différends contractuels et la connexion au réseau public opéré par Électricité du Liban (EDL).
Dépendance structurelle aux énergies fossiles
Le Liban continue de produire plus de 90 % de son électricité à partir de fioul lourd et de diesel. Les centrales thermiques vétustes, dont celle de Zouk et Jiyeh, ne fonctionnent qu’à capacité réduite faute d’approvisionnement. La production nationale plafonne à environ 1 200 MW, alors que la demande dépasse 3 200 MW en période de pointe. Cette situation oblige les citoyens et entreprises à se tourner massivement vers les générateurs privés, responsables de fortes émissions polluantes et de coûts mensuels élevés. La transition vers des énergies propres est donc autant une réponse environnementale qu’une nécessité économique.
Retard sur les objectifs de 2030
Le Plan d’action national pour les énergies renouvelables (PANER), adopté en 2021, fixait un objectif de 3 000 MW de capacité verte installée d’ici 2030. À ce jour, moins de 500 MW ont été effectivement mis en service, en grande majorité par des installations solaires privées sur les toits d’habitations et d’entreprises. L’implémentation des projets IPP publics doit combler ce retard, mais la lenteur administrative, l’instabilité politique et les délais de raccordement au réseau national continuent de freiner le déploiement. Le taux effectif de pénétration des renouvelables dans la consommation électrique reste inférieur à 8 %.
Financement international et risques de change
Les projets annoncés s’appuient fortement sur des financements internationaux : 350 millions USD en prêts concessionnels via la Banque mondiale et l’Agence française de développement, et 200 millions USD de garanties partielles pour couvrir le risque de non-paiement par l’État. Toutefois, le cadre de convertibilité monétaire reste problématique. Le manque de réserves en devises de la BdL et la dualité persistante des taux de change exposent les IPP à des risques significatifs, même avec l’adossement de contrats en USD. Le succès de ces investissements dépendra de la capacité des autorités à stabiliser le marché monétaire et à garantir la viabilité financière d’EDL.
Progrès, mais gouvernance incertaine
La mise en route de ces projets représente un progrès inédit dans l’histoire énergétique du Liban. Pour la première fois, un processus d’attribution compétitif et transparent a été mené à son terme. Néanmoins, les retards systémiques du pays, la faiblesse institutionnelle du ministère de l’Énergie et l’absence d’organe régulateur limitent encore la crédibilité à long terme du secteur. Plusieurs projets pilotes antérieurs (comme le parc éolien de Qaraoun ou les fermes solaires de Kfarsghab) n’ont jamais été achevés en raison d’obstacles administratifs et d’arbitrages politiques.
Données de contexte sur Électricité du Liban (EDL)
Électricité du Liban est l’organisme public en charge de la production, du transport et de la distribution d’électricité au Liban. Il dessert officiellement 1,1 million d’abonnés, mais les coupures récurrentes limitent son service effectif à moins de 6 heures par jour dans de nombreuses régions. Son déficit structurel dépasse les 1,5 milliard USD par an. La part des renouvelables dans sa production reste marginale. EDL n’a pas de plan de redressement financier autonome approuvé à ce jour.