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Le rôle d’Oman comme médiateur entre Washington et Téhéran

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Le sultanat d’Oman se positionne une fois de plus comme un îlot de stabilité dans un Moyen-Orient en ébullition. Alors que les bombardements israéliens ravagent Gaza et que les frappes menacent de s’étendre au Liban, Mascate s’impose comme un médiateur clé entre les États-Unis et l’Iran. Fidèle à sa tradition de neutralité, le sultanat orchestre des pourparlers cruciaux dans un climat de tensions extrêmes. Entre ambitions diplomatiques, enjeux énergétiques et défis régionaux, Oman joue un rôle discret mais stratégique, cherchant à désamorcer une confrontation qui pourrait embraser le Golfe.

Une tradition de neutralité ancrée dans l’histoire

Oman cultive depuis des décennies une posture unique au Moyen-Orient. Sous le règne du sultan Qabus, de 1970 à 2020, le pays a forgé une diplomatie équilibrée, évitant les alignments rigides qui caractérisent ses voisins du Golfe. Son successeur, Haitham ben Tarek, poursuit cette lignée depuis janvier 2020, renforçant la réputation de Mascate comme terre de dialogue. En 2015, Oman a facilité les premières discussions secrètes entre Washington et Téhéran, prélude à l’accord nucléaire de Vienne. Aujourd’hui, cette neutralité historique lui confère une légitimité intacte.

Le sultanat maintient des relations cordiales avec des puissances aux intérêts divergents. Il commerce avec l’Arabie saoudite tout en dialoguant avec l’Iran, son voisin d’en face via le détroit d’Ormuz. Cette approche pragmatique, ancrée dans une volonté de préserver sa souveraineté, fait d’Oman un rare point de convergence dans une région fracturée. En avril 2025, alors que Gaza compte des centaines de morts sous les frappes israéliennes et que le Sud-Liban subit 50 raids depuis mars, Mascate offre une plateforme apaisée pour des négociations explosives.

Cette position n’est pas un luxe, mais une nécessité. Bordé par l’Arabie saoudite, les Émirats et le Yémen en guerre, Oman mise sur la stabilité régionale pour protéger ses 4,5 millions d’habitants et son économie dépendante des hydrocarbures. Sa neutralité devient ainsi un outil stratégique, au service d’une diplomatie régionale en quête de solutions.

Désamorcer une escalade militaire imminente

Les pourparlers organisés à Mascate visent un objectif prioritaire : éviter une confrontation directe entre les États-Unis et l’Iran. Depuis la réélection de Donald Trump en novembre 2024, Washington maintient sa politique de « pression maximale » sur Téhéran, renforçant les sanctions et déployant des forces navales dans le Golfe. L’Iran, de son côté, soutient ses alliés – Hezbollah au Liban, Houthis au Yémen – tout en poursuivant son programme nucléaire, défiant les mises en garde américaines.

Le risque d’escalade atteint un pic en avril 2025. Les frappes israéliennes sur Gaza, intensifiées depuis mars, tuent des centaines de civils et menacent de s’étendre au Liban, où le Hezbollah reste actif malgré ses pertes de 2024. Une guerre ouverte impliquant l’Iran et les États-Unis pourrait paralyser le détroit d’Ormuz, par où transite 20 % du pétrole mondial. Oman, conscient de cette menace, pousse pour une désescalade urgente.

Les émissaires omanais transmettent un message clair à Téhéran : un conflit armé ruinerait l’économie régionale, fermant les voies maritimes et plongeant le Golfe dans le chaos. Ils rappellent à Washington que la stabilité sert aussi ses intérêts, évitant un engagement militaire coûteux. Mascate s’appuie sur son expérience : en 2019, le sultanat a négocié la libération de marins américains capturés par l’Iran, prouvant sa capacité à apaiser les crises.

Un front diplomatique élargi

Oman ne se limite pas à un tête-à-tête entre les deux belligérants. Depuis mars 2025, Mascate consulte activement les Européens pour bâtir un soutien international. La France, impliquée au Liban, voit dans ces efforts une chance de réduire les tensions qui fragilisent Beyrouth. Le Royaume-Uni et l’Allemagne, partenaires de l’accord nucléaire de 2015, appuient également cette initiative, espérant un cadre élargi pour stabiliser la région.

Les pays du Golfe, bien que divisés, saluent discrètement le rôle d’Oman. L’Arabie saoudite, en froid avec l’Iran, préfère une médiation à une guerre qui menacerait ses champs pétroliers. Les Émirats, plus hawkish, restent prudents mais ne s’opposent pas. Cette convergence, rare dans le Conseil de coopération du Golfe (CCG), renforce la légitimité de Mascate.

Les États-Unis, eux, valorisent la neutralité omanaise. Après des mois de rhétorique belliqueuse, l’administration Trump accepte Mascate comme terrain neutre, évitant les soupçons d’un dialogue biaisé. Cette confiance mutuelle fait d’Oman un pivot incontournable dans une région au bord du précipice.

Les enjeux énergétiques au cœur des discussions

L’énergie domine les arrière-pensées des pourparlers. Le Golfe fournit 30 % du pétrole mondial, et toute perturbation – guerre, blocus – ferait flamber les prix, affectant les marchés de Londres à Shanghai. En 2025, la hausse des tensions a déjà poussé le baril Brent à 90 dollars, contre 75 dollars en janvier. Oman, producteur modeste avec 1 million de barils par jour, dépend de ces exportations pour 70 % de ses revenus publics.

Mascate insiste auprès de l’Iran : un conflit fermerait le détroit d’Ormuz, coupant ses propres exportations et celles de ses voisins. Pour les États-Unis, elle souligne que la stabilité énergétique évite une crise économique mondiale, un argument qui résonne à Washington face aux élections de mi-mandat en 2026. Cette convergence d’intérêts économiques devient un levier pour la diplomatie omanaise.

Le sultanat y voit aussi une opportunité. En facilitant un accord, Oman espère attirer des investissements étrangers dans ses champs gaziers de Khazzan et ses projets d’énergie verte. La Chine et l’Inde, grands importateurs de pétrole gulfique, suivent de près ces négociations, prêtes à renforcer leurs partenariats avec un Mascate stabilisateur.

Une médiation soutenue mais fragile

La démarche d’Oman bénéficie d’un appui régional discret. Les monarchies du Golfe, malgré leurs différends avec l’Iran, préfèrent une solution négociée à une guerre coûteuse. L’Arabie saoudite, engagée dans une détente fragile avec Téhéran depuis 2023, soutient cette voie sans s’impliquer directement. Le Qatar, habitué des médiations, voit en Oman un complément à ses propres efforts.

La France joue un rôle actif. Après avoir accueilli Joseph Aoun, président libanais, le 28 mars 2025, Paris mise sur Oman pour apaiser le Liban, où 50 frappes israéliennes depuis mars menacent la paix. Cette convergence internationale renforce la crédibilité de Mascate, mais ne garantit pas le succès.

Les États-Unis apprécient la discrétion omanaise. Contrairement à des terrains comme Genève ou Doha, Mascate évite les projecteurs, favorisant des échanges directs. Cette approche, rodée lors des pourparlers de 2015, crée un climat de confiance essentiel dans un dialogue miné par la méfiance.

Une mission à haut risque

Malgré ces atouts, la tâche reste ardue. Les États-Unis exigent un gel du programme nucléaire iranien et un retrait de son soutien au Hezbollah et aux Houthis. L’Iran, lui, réclame la levée des sanctions et des garanties contre une agression israélienne. Ces lignes rouges, quasi inconciliables, testent les limites de la diplomatie omanaise.

Un échec n’est pas exclu. Si les pourparlers capotent, la crédibilité de Mascate pourrait en pâtir, affaiblissant son statut de médiateur. Une escalade militaire – frappes américaines sur l’Iran ou riposte iranienne dans le Golfe – ruinerait des années d’efforts. Oman, vulnérable à un conflit à ses portes, joue gros dans cette entreprise.

Pourtant, Mascate reste optimiste. Le sultanat privilégie une approche graduelle, visant des avancées partielles – un cessez-le-feu prolongé, des concessions économiques – plutôt qu’un grand accord. Cette stratégie, patiemment construite, mise sur le temps pour rapprocher des ennemis irréductibles.

Perspectives pour Oman et la région

Un succès, même modeste, consoliderait le rôle d’Oman. Une réduction des tensions attirerait les investisseurs, doppant des projets comme le port de Duqm ou les énergies renouvelables, où Mascate vise 30 % de sa production d’ici 2030. Le sultanat deviendrait un modèle de stabilité dans un Golfe turbulent.

Un échec, en revanche, exposerait Oman à des retombées économiques et sécuritaires. Une guerre dans le détroit d’Ormuz stopperait ses exportations, plongeant son PIB dans le rouge. Politiquement, un revers pourrait fragiliser Haitham ben Tarek, confronté à des attentes internes croissantes.

Pour l’heure, Oman avance avec prudence. Sa neutralité, arme discrète mais puissante, offre une lueur d’espoir dans une région où la guerre semble toujours plus proche que la paix. Les pourparlers de Mascate, entre ambition et incertitude, pourraient redéfinir les équilibres du Moyen-Orient.

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Newsdesk Libnanews
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