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L’explosion de la pauvreté au Liban : comment survivre dans un pays en crise ?

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Effets sociaux et économiques de la pauvreté croissante

État des lieux de la pauvreté au Liban

Le Liban traverse l’une des pires crises économiques de son histoire moderne, avec une pauvreté qui touche aujourd’hui plus de 80 % de la population. L’effondrement du système bancaire, la dévaluation massive de la livre libanaise et la hausse vertigineuse des prix des biens de première nécessité ont conduit à une détérioration sans précédent des conditions de vie​.

Les classes moyennes, autrefois un pilier de la société libanaise, ont pratiquement disparu. Aujourd’hui, même les familles qui avaient auparavant un niveau de vie stable peinent à payer leurs factures, accéder aux soins médicaux ou assurer une éducation de qualité à leurs enfants. Dans les zones rurales, la situation est encore plus dramatique, avec une insécurité alimentaire croissante​.

Les files d’attente devant les boulangeries sont devenues une scène quotidienne, avec des citoyens qui doivent patienter des heures pour obtenir du pain subventionné. L’inflation alimentaire a dépassé les 300 % en 2025, rendant les denrées de base inaccessibles pour une grande partie de la population​.

Les mécanismes de survie des citoyens

Face à l’effondrement économique et à l’incapacité de l’État à fournir une assistance sociale suffisante, les Libanais ont développé des stratégies d’adaptation pour survivre au quotidien. Ces mécanismes de résilience, bien que témoignant de la capacité d’adaptation de la population, ne sauraient constituer une solution durable sans une stabilisation économique à long terme.

Le troc et l’économie informelle : contourner un système financier défaillant

Avec l’hyperinflation et la dévaluation continue de la livre libanaise, le troc est devenu une alternative essentielle pour de nombreuses familles. L’économie informelle a pris une ampleur considérable, permettant aux citoyens d’échanger des produits et des services sans passer par une monnaie devenue instable et peu fiable​.

  • Les groupes d’échange sur les réseaux sociaux se sont multipliés, offrant aux familles un moyen de troquer des vêtements contre de la nourriture, des médicaments contre des services, ou encore des outils contre des produits alimentaires.
  • Les marchés locaux voient de plus en plus d’échanges directs entre producteurs et consommateurs, court-circuitant ainsi les circuits de distribution classiques où les prix sont fortement impactés par l’inflation et la spéculation.
  • Les professions de services s’adaptent : des enseignants donnent des cours particuliers en échange de denrées alimentaires, des artisans réparent des équipements domestiques contre des produits de première nécessité.

Cependant, cette économie parallèle, bien qu’indispensable dans l’immédiat, pose un problème structurel à long terme. Elle affaiblit encore davantage le rôle de l’État en contournant les taxes et régulations, ce qui complique les perspectives de rétablissement du système économique formel​.

L’exode des jeunes diplômés : une fuite des compétences sans précédent

Le Liban a toujours compté sur sa diaspora comme un levier économique, mais la situation actuelle a provoqué un exode massif des jeunes diplômés, bien plus rapide et incontrôlé que par le passé. Incapables de trouver un emploi dans un marché du travail en ruine, ils choisissent de quitter le pays en quête d’opportunités à l’étranger​.

  • Les professions les plus touchées : médecins, ingénieurs, enseignants, et techniciens qualifiés sont parmi les plus enclins à l’émigration, ce qui affaiblit encore davantage les infrastructures locales déjà en crise.
  • Les transferts de fonds de la diaspora représentent désormais plus de 40 % du PIB, un chiffre en hausse constante. Les familles restées au Liban dépendent de plus en plus de l’argent envoyé par leurs proches installés en Europe, en Amérique du Nord et dans les pays du Golfe​.
  • Un problème à long terme : si ces remises de fonds constituent une bouée de sauvetage à court terme, elles ne remplacent pas un tissu économique national fonctionnel. De plus, la perte des talents qualifiés empêche toute perspective de redressement durable.

Les économistes alertent sur les conséquences désastreuses de cette fuite des compétences : en vidant le Liban de sa main-d’œuvre qualifiée, le pays risque de s’enliser encore plus dans la dépendance aux aides internationales et aux transferts de fonds extérieurs​.

L’auto-suffisance alimentaire : un retour forcé à l’agriculture de subsistance

Face à la flambée des prix des produits alimentaires, de nombreuses familles se tournent vers l’agriculture de survie. La réhabilitation des terres agricoles et l’élevage à petite échelle sont devenus une nécessité pour échapper à la spéculation et aux pénuries​.

  • Cultiver son propre jardin : dans les villes comme dans les campagnes, de plus en plus de familles utilisent leurs balcons, toits et petits terrains pour faire pousser des légumes et des herbes essentielles.
  • Retour à l’élevage domestique : certaines familles élèvent désormais des poules, chèvres ou lapins pour garantir une source de protéines abordable.
  • Coopératives agricoles locales : dans les zones rurales, des agriculteurs se regroupent pour partager semences, outils et connaissances afin de produire de manière plus efficace.

Cependant, cette auto-suffisance reste limitée à certaines catégories de la population. Les habitants des grandes villes, où l’accès à la terre est réduit, n’ont pas cette possibilité et restent à la merci des fluctuations des prix du marché​.

Le recours aux ONG et aux initiatives communautaires : dernier filet de sécurité

Avec un État totalement défaillant, ce sont les ONG locales et internationales qui assurent une grande partie des services de base pour la population la plus vulnérable​.

  • Aide alimentaire : des organisations comme la Banque alimentaire libanaise distribuent quotidiennement des paniers de nourriture à des milliers de familles.
  • Soins médicaux gratuits : des cliniques mobiles, souvent financées par des ONG internationales, permettent aux citoyens d’accéder à des soins de base alors que les hôpitaux publics sont en faillite.
  • Éducation alternative : certaines écoles communautaires offrent un enseignement gratuit ou à prix réduit pour éviter que la crise ne prive une génération entière d’éducation.
  • Soutien psychologique et social : des associations mettent en place des programmes de soutien pour les familles en détresse, notamment en matière de santé mentale.

Toutefois, ces efforts restent insuffisants face à l’ampleur de la crise. Le nombre de familles ayant besoin d’assistance dépasse largement les capacités des ONG, dont les financements internationaux s’amenuisent​.

L’action du gouvernement et des ONG

Le gouvernement libanais, confronté à une crise budgétaire sans précédent, est dans l’incapacité d’assurer des aides sociales suffisantes. Les subventions sur le carburant et les denrées alimentaires ont été progressivement supprimées, plongeant encore plus de familles dans la précarité​.

Face à cet abandon, les ONG ont pris le relais. Parmi les actions les plus notables :

  • La Banque alimentaire libanaise, qui distribue des paniers de nourriture à des milliers de familles chaque mois.
  • Les cliniques mobiles, mises en place par des associations locales pour offrir des soins médicaux aux populations isolées.
  • Les programmes de micro-financement, permettant à certaines familles de lancer de petits commerces pour subvenir à leurs besoins​.

Malgré ces efforts, l’ampleur de la crise dépasse largement les capacités des organisations humanitaires. La demande d’aide explose, tandis que les financements internationaux s’amenuisent. Les experts estiment que sans une stabilisation économique rapide, le Liban pourrait connaître un effondrement social complet​.

Quelles solutions pour une sortie de crise ?

Face à la montée alarmante de la pauvreté au Liban, plusieurs pistes sont envisagées pour tenter de stabiliser la situation et éviter un effondrement social total. Ces solutions nécessitent des réformes profondes, une volonté politique forte et, dans certains cas, un soutien international massif.

La mise en place d’un revenu universel d’urgence : un filet de sécurité temporaire

Dans un contexte où plus de 80 % des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté, l’instauration d’un revenu universel d’urgence est une mesure de plus en plus discutée par les économistes et les organisations internationales. L’idée est d’attribuer une aide financière directe et temporaire aux familles les plus vulnérables, afin de leur permettre de subvenir à leurs besoins essentiels : alimentation, logement et santé​.

  • Exemples de modèles similaires : D’autres pays en crise, comme l’Argentine ou le Venezuela, ont mis en place des programmes similaires pour éviter un effondrement social total.
  • Impact attendu : Une telle mesure permettrait de relancer légèrement la consommation intérieure, donnant un minimum de respiration à l’économie locale.
  • Financement nécessaire : Ce programme ne pourrait être viable qu’avec un soutien financier international, notamment du FMI, de la Banque mondiale et des bailleurs de fonds étrangers​.

Cependant, cette mesure est loin d’être une solution durable. Sans réformes économiques profondes, ce revenu universel resterait une aide temporaire incapable d’inverser la dynamique économique négative​.

Une réforme structurelle de l’économie : relancer l’agriculture et l’industrie locale

L’un des plus grands problèmes du Liban est sa dépendance excessive aux importations, qui représente plus de 85 % des produits de consommation. La crise actuelle a révélé l’urgence de relancer la production locale, notamment dans les secteurs agricole et industriel​.

  1. Réhabilitation du secteur agricole :
    • Encourager la production locale de céréales, légumes et fruits pour réduire la dépendance alimentaire.
    • Fournir des subventions et équipements agricoles aux petits producteurs pour dynamiser le secteur.
    • Mettre en place un système de stockage stratégique pour éviter les pénuries alimentaires.
  2. Redynamisation de l’industrie locale :
    • Encourager la réouverture d’usines pour produire des biens de consommation essentiels.
    • Incitations fiscales pour attirer les investissements dans des secteurs stratégiques comme l’énergie renouvelable, la transformation agroalimentaire et la pharmaceutique.
    • Développer des coopératives industrielles et agricoles pour mutualiser les ressources et réduire les coûts de production​.

Le principal obstacle à cette réforme est le manque de financements et l’instabilité politique, qui freinent les investissements nécessaires à un redémarrage du tissu économique​.

Une taxation des plus grandes fortunes : un levier fiscal pour la justice sociale

Avec une économie en chute libre, plusieurs économistes plaident pour une imposition exceptionnelle sur les grandes fortunes libanaises afin de financer des programmes d’aide sociale​.

  • Une répartition inégale des richesses : Malgré la crise, une partie de l’élite économique continue de prospérer, notamment grâce aux fonds placés à l’étranger et aux secteurs de l’import-export qui bénéficient de la dévaluation de la livre libanaise.
  • Une contribution des plus riches : Une taxe exceptionnelle sur les fortunes supérieures à un certain seuil permettrait de générer des revenus immédiats pour financer des mesures d’urgence.
  • Les résistances attendues : Cette réforme se heurte cependant à l’opposition des élites politiques et financières, qui refusent toute augmentation de la fiscalité et disposent de leviers pour contourner les nouvelles taxes​.

En l’état actuel, la mise en place d’une taxation sur les grandes fortunes nécessiterait un fort soutien populaire et une pression internationale pour être appliquée​.

Une intervention plus forte des institutions internationales : conditionner l’aide aux réformes

Le FMI et la Banque mondiale pourraient jouer un rôle crucial dans la sortie de crise, mais ils conditionnent leur aide à l’adoption de réformes strictes​.

  • Réformes exigées par le FMI :
    • Restructuration du secteur bancaire pour restaurer la confiance.
    • Réduction des dépenses publiques inefficaces et lutte contre la corruption.
    • Libéralisation partielle de certains secteurs pour attirer des investissements étrangers.
  • Aide de la Banque mondiale :
    • Financement de projets d’infrastructure essentiels (électricité, routes, hôpitaux).
    • Soutien aux programmes sociaux ciblés pour éviter une crise humanitaire.

Le problème est que ces réformes rencontrent une forte opposition des élites politiques, qui refusent les conditions imposées par ces institutions, préférant maintenir leur contrôle sur l’économie nationale​.

Le renforcement des initiatives communautaires : une alternative locale

En parallèle des solutions étatiques et internationales, les initiatives locales et communautaires ont prouvé leur efficacité dans la gestion de la crise. Encourager ces dynamiques pourrait renforcer la résilience sociale face à l’effondrement de l’État​.

  • Développement des coopératives agricoles et commerciales : Mutualiser les ressources permet de garantir des prix plus bas et une meilleure distribution des produits essentiels.
  • Soutien aux petites entreprises locales : Offrir des financements aux artisans, commerçants et entrepreneurs permettrait de dynamiser l’emploi et de réduire la dépendance aux aides extérieures.
  • Expansion des réseaux d’aide alimentaire et de santé : Encourager les initiatives locales en matière d’aide sociale peut compléter les carences de l’État.

Cependant, ces initiatives restent limitées en raison du manque de financements et de soutien institutionnel, et ne peuvent pas se substituer à des réformes économiques globales​.

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