Crédit photo le journal libanais Al Akhbar : « A Bas Riad le voleur. A bas le règne du Dollar ». Banderole des manifestants libanais Jeudi 24 octobre 2019 houspillant Riad Salameh, gouverneur de la Banque du Liban. «Riad, le voleur». A bas le règne de la Banque centrale libanaise et le Liban renaitra

La session consacrée à l’interrogatoire du gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé a été reporté après que celui-ci ne se soit pas, comme attendu, présenté devant le juge d’instruction Nicolas Mansour, en charge de son dossier.

Seul était présent son avocat qui a présenté au juge “une défense préliminaire”.

Pour rappel, le gouverneur de la Banque du Liban, qui s’est depuis retranché dans un appartement situé au dernier étage de la banque centrale, est accusé de détournement de fonds et a été inculpé, avec son frère, Raja, par la procureur du Mont Liban.

La session de ce jeudi aurait dû être consacrée à une confrontation avec son frère Raja après que celui-ci ait avoué les faits qui lui sont reprochés.

Ils sont tous 2 accusés d’avoir détourné 326 millions de dollars sous couvert de commissions via la vente d’Eurobonds de la Banque du Liban. Cependant, ces montants auraient été transférés à un compte au nom de Raja Salamé en Suisse. La semaine dernière, plusieurs dirigeants de banque dont le président de l’Association des Banques du Liban Salim Sfeir ont vu leurs biens et ceux de leurs établissements gelés sur décision de la procureur du Mont Liban dans le cadre du même dossier.

Parmi les autres dirigeants de banque visés par une nouvelle plainte déposée par le groupe “People want to reform the Regime”, fin du mois de février, ceux de la Banque Audi Samir Hanna, de la SGBL Antoun Sehnaoui propriétaire aussi d’un nouveau site d’information francophone entre autre, de Saad Azhari pour la Blom Bank et de l’ancienne ministre de l’intérieur Raya Hassan, dirigeante de la Bank Med dont la famille de l’ancien premier ministre Rafic Hariri est le principal actionnaire. 

Selon les termes du contrat, Forry Estate recevait ainsi une commission des 3/8ème des 1% commissions sur l’achat des certificats de dépôts de l’état via la Banque du Liban par les banques privées entre 2004 et 2014. Ces montants qui atteignaient ainsi ensuite plusieurs millions de dollars étaient reversés et redistribués, selon les aveux même de Riad Salamé, en connaissance de la commission centrale de la Banque du Liban. 

Cependant, le contrat signé par la Banque du Liban avec les banques locales ne stipule pas le nom de Forry Associates, ce qui amène les experts judiciaires à s’interroger sur les versements effectués au bénéfice de cette entreprise et transférés en connaissance de cause par 6 banques locales à l’étranger. 

Ce lundi 28 mars, les autorités judiciaires françaises, allemandes et luxembourgeoises ont indiqué avoir gelé l’équivalent de 120 millions d’euros issues d’une filière de blanchiment d’argent en provenance du Liban, sans donner plus de détails. “Cinq biens en Allemagne et en France ont été saisis ainsi que plusieurs comptes bancaires”, indique la dépêche sans donner plus de détails.

Ainsi, en novembre dernier, la justice française, suisse auxquelles s’est jointe la justice luxembougeoise mais également libanaise soupçonnait que ces biens qui ont été perquisitionnés – dont un appartement situé avenue des Champs Elysée et loué par la BdL, appartenant à Anna Kozakova, qui autre que la mère de la fille depuis reconnue par Riad Salamé – avaient été achetés via 300 millions de dollars détournés de la Banque du Liban au profit d’une société appartenant aux frères Salamé. 

En Suisse, des commissions à hauteur de 247 millions de dollars auraient été ainsi versées le 6 avril 2002 en retour sur le compte personnel de Raja Salamé. 207 millions auraient été ensuite versés aux bénéficiaires de comptes dans les banques Bankmed, la Banque Misr Liban, le Crédit Libanais, la Banque Audi et la Banque Saradar au titre de “dépenses personnelles”. Le gouverneur de la BdL lui-même aurait reçu plus de 7 millions de dollars en provenance du compte HSBC de Forry Associates. Le 5 avril 2012, Riad Salamé aurait demandé à la banque zurichoise de transférer des obligations du trésor libanais à hauteur de 153 millions de dollars à la Banque Audi Suisse à Beyrouth “avec une signature personnelle”, entrainant les autorités suisses à surveiller les mouvements de ces comptes, confirmant selon les enquêteurs leurs soupçons concernant des détournements de fonds.  

Quant au gouverneur de la BdL, qui est aussi convoqué par le juge Nicolas Mansour en charge du pendant libanais de l’enquête, il se défend de tout détournement de fonds, indiquant avoir mandaté le cabinet BDO Semaan, Gholam & Co, un cabinet fortement décrédilisé au Liban puisqu’il a certifié des comptes de la BdL sur les dires du gouverneur de la Banque du Liban ou encore des comptes de banques privées alors qu’elles sont en quasi-faillite aujourd’hui.  S’il est aujourd’hui inculpé au Liban pour détournement de fonds, le gouverneur de la Banque du Liban semble toujours jouir du soutien du premier ministre Najib Mikati et d’une partie de la classe politique ainsi que des institutions financières dont beaucoup sont considérées comme étant corrompues au prétexte “qu’on ne change pas un général en pleine bataille”. La révélation de ces affaires intervient en effet alors que le Liban tente de négocier avec le Fonds Monétaire International et d’obtenir le déblocage d’une aide économique pour faire face à la crise financière qu’il traverse. Cependant, les observateurs estiment qu’il est désormais difficile pour le FMI de négocier face à un homme soupçonné de détournements de fonds publics en dépit du soutien de Najib Mikati ou encore d’une grande partie de l’établissement financier qui a été longtemps en lien avec lui et dont une partie des dirigeants est aussi soupçonnée de fraude financière suite aux opérations qu’il a mis en place.

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