dimanche, mai 18, 2025

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FocusLiban: Détresse psychologique et exode, comment le stress économique détruit la jeunesse

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Les chiffres sont implacables : les consultations en psychiatrie et psychothérapie ont augmenté de plus de 40 % au Liban depuis le début de la crise économique. Ce chiffre, issu des rapports des hôpitaux publics et cliniques privées, illustre une détérioration brutale de la santé mentale des jeunes Libanais, victimes directes de l’effondrement du pays. « Nous voyons une explosion des cas d’anxiété sévère, de dépression profonde et de troubles du stress post-traumatique », témoigne un psychiatre de l’hôpital universitaire Rafic Hariri. « Beaucoup de jeunes consultent pour la première fois, souvent poussés par un sentiment de désespoir total. »

L’impact du stress économique sur la jeunesse se mesure également par la saturation des services psychiatriques. Dans plusieurs hôpitaux publics, les délais d’attente pour obtenir un rendez-vous avec un psychiatre ont doublé en un an. « Avant, nous pouvions voir un patient en crise sous 48 heures. Aujourd’hui, il faut attendre jusqu’à trois semaines, voire un mois dans certains établissements », alerte une psychologue clinicienne à Beyrouth. « Entre-temps, leur état se dégrade. Certains jeunes finissent par s’automutiler ou sombrer dans des addictions. »

Les unités psychiatriques des hôpitaux publics ont également enregistré une hausse de 30 % des hospitalisations pour troubles graves, notamment les tentatives de suicide. Dans un pays où les infrastructures de santé sont déjà fragilisées par la crise économique et la dévaluation de la livre libanaise, cette surcharge des services de psychiatrie crée une situation alarmante. « Nous avons dû refuser plusieurs admissions par manque de lits et de personnel qualifié »,confie un responsable médical. « Le système est à bout de souffle. »

Le coût des soins est un autre facteur aggravant. Les consultations privées en psychiatrie, qui représentaient une option pour les classes moyennes, sont désormais hors de portée pour la majorité des jeunes Libanais. « Une séance coûte entre 50 et 100 dollars, alors qu’un salaire moyen ne dépasse plus 100 dollars par mois », explique un étudiant en psychologie. « Beaucoup abandonnent leur suivi faute de moyens. »

Pour illustrer l’ampleur du phénomène, voici l’évolution du nombre de consultations psychiatriques au Liban au cours des dernières années :

AnnéeNombre de consultations en psychiatrieAugmentation par rapport à l’année précédente
202012 500
202117 400+39 %
202224 300+40 %
202334 200+41 %
202448 000+40 %

Ces chiffres montrent une tendance inquiétante et continue, signe que la crise ne fait qu’empirer la détresse psychologique des jeunes. « Nous n’avons jamais vu de telles statistiques en dehors des périodes de guerre »,souligne un expert en santé mentale​.

Fuir le pays pour survivre : la détresse des jeunes Libanais face à un avenir incertain

« Rester au Liban, c’est se condamner à vivre sans espoir. » Cette phrase revient comme un refrain chez une majorité de jeunes Libanais qui, faute de perspectives, cherchent par tous les moyens à quitter le pays. L’exode de la jeunesse, déjà amorcé depuis la crise de 2019, atteint aujourd’hui un niveau alarmant. Les demandes de visas pour l’Europe et les pays du Golfe ont bondi de 65 % en deux ans, un record qui témoigne d’un malaise profond​.

« J’ai terminé mes études, mais je ne trouve aucun emploi stable. Mon seul espoir est de partir à Dubaï ou au Canada, même si cela signifie tout recommencer à zéro. » Ce témoignage d’un ingénieur diplômé de l’Université Saint-Joseph illustre la frustration d’une génération sacrifiée par l’effondrement économique. Selon une enquête menée par un institut de recherche basé à Beyrouth, 73 % des jeunes Libanais de 18 à 35 ans déclarent vouloir quitter le pays définitivement. Les principales raisons invoquées sont l’absence de travail, l’instabilité politique et l’impossibilité d’envisager un avenir serein.

Le phénomène touche toutes les catégories sociales, des diplômés des meilleures universités aux jeunes travailleurs du secteur informel. « Mon salaire de 5 millions de livres libanaises ne me permet même plus de payer un plein d’essence », explique un jeune pharmacien. « J’ai essayé de résister, mais maintenant, je veux partir en Allemagne où des amis ont trouvé du travail. »

Les ambassades étrangères sont submergées de demandes. « Nous avons triplé le nombre de rendez-vous pour les visas d’études et de travail, mais la demande reste largement supérieure à notre capacité de traitement »,explique un employé du consulat français à Beyrouth. « Beaucoup de candidats sont prêts à accepter n’importe quel poste, même sous-qualifié, juste pour quitter le pays. »

Cette fuite massive a un impact direct sur l’économie et le tissu social du Liban. Les hôpitaux, les écoles et les entreprises souffrent d’une pénurie de personnel qualifié, de nombreux professionnels ayant choisi l’exil pour améliorer leurs conditions de vie. « Nous avons perdu plus de 50 % de nos médecins et infirmiers en quatre ans »,alerte un directeur d’hôpital. « Si cette tendance continue, nous ne pourrons plus assurer des soins de qualité. »

« Ceux qui restent souffrent en silence », ajoute un sociologue. « La détresse psychologique de ceux qui ne peuvent pas partir est encore plus forte. Ils se sentent piégés, incapables d’échapper à une situation qui les dépasse. »

Ce sentiment d’enfermement entraîne une augmentation des addictions, notamment à l’alcool et aux drogues, ainsi qu’une montée inquiétante des tentatives de suicide chez les jeunes. « Chaque semaine, nous recevons plusieurs jeunes qui ont fait une tentative désespérée », confie un médecin urgentiste. « Le stress économique tue autant que la crise elle-même. »

Les organisations internationales commencent à s’inquiéter de l’ampleur du phénomène. Le Liban pourrait perdre une partie importante de sa population active, ce qui ralentirait encore plus toute tentative de relance économique. « Si nous ne trouvons pas de solutions rapidement, le pays va se vider de ses forces vives », prévient un économiste. « Nous sommes face à une hémorragie humaine qui menace la survie même du Liban en tant que nation. ».

L’impact psychologique du stress économique sur la jeunesse libanaise : une génération sacrifiée

« Ce n’est pas seulement une crise financière, c’est une crise existentielle. » Psychiatres et sociologues s’accordent à dire que la situation que traverse le Liban va bien au-delà des chiffres économiques. Le stress économique, combiné à l’instabilité politique et à l’effondrement des institutions, a plongé une partie de la jeunesse libanaise dans une détresse psychologique profonde.

Les hôpitaux psychiatriques et les cliniques spécialisées enregistrent une hausse spectaculaire des cas de dépression sévère, de troubles anxieux et de stress post-traumatique. « Nous avons vu des jeunes qui n’avaient jamais consulté auparavant sombrer dans des crises de panique, des insomnies chroniques, et parfois des épisodes psychotiques liés à l’angoisse du lendemain. » Un psychothérapeute basé à Beyrouth explique que la majorité de ses patients âgés de 20 à 35 ans expriment une même peur : celle de ne jamais pouvoir construire un avenir stable dans leur propre pays.

L’un des phénomènes les plus inquiétants est l’augmentation des idées suicidaires chez les jeunes« Nous avons connu une hausse de 30 % des tentatives de suicide en 2024 par rapport à l’année précédente », alerte une association de prévention du suicide. La ligne d’écoute pour les jeunes en détresse a multiplié par trois ses appels en moins d’un an. « Ce qui frappe, c’est que beaucoup d’appels viennent de jeunes diplômés, autrefois pleins d’espoir, qui ne voient plus aucune issue. »

Le poids du quotidien devient insupportable pour certains. « J’ai 26 ans, je vis encore chez mes parents, je travaille 10 heures par jour pour un salaire qui ne couvre même pas mes dépenses de base », témoigne un graphiste. « Chaque matin, je me demande pourquoi je continue. »

Les troubles du sommeil et l’épuisement mental sont aussi en forte progression. « Nous recevons de plus en plus de jeunes qui souffrent d’insomnies liées au stress, avec des symptômes physiques : migraines chroniques, palpitations, troubles digestifs. Leur corps est en état d’alerte permanent. » Un médecin généraliste décrit des cas où des patients consultent pour des douleurs inexpliquées qui sont en réalité des manifestations psychosomatiques du stress économique.

Les répercussions de cette crise sur la société libanaise seront durables. Une génération entière se retrouve brisée, incapable de se projeter dans l’avenir, hésitant entre la fuite et la résignation. « Ceux qui restent ont perdu confiance en l’État et en l’idée même d’une reconstruction possible du pays. » Les sociologues parlent d’un effondrement du lien social, où chacun se bat pour sa propre survie dans un environnement hostile. « L’entraide et la solidarité, qui faisaient partie de l’identité libanaise, sont en train de disparaître sous l’effet de la précarité généralisée. »

Des solutions insuffisantes face à une détresse généralisée« Nous faisons tout ce que nous pouvons, mais nous ne pouvons pas compenser l’effondrement d’un pays entier. » Les associations de soutien psychologique et les initiatives locales se multiplient pour tenter de répondre à l’urgence de la crise mentale des jeunes Libanais. Pourtant, les moyens manquent et la demande explose, laissant des milliers de jeunes sans aide réelle.Les ONG et les hôpitaux universitaires ont mis en place des cellules de soutien psychologique gratuites, accessibles aux jeunes en détresse. « Nous avons ouvert des permanences où les jeunes peuvent parler à un psychologue gratuitement, mais les listes d’attente s’allongent. Nous avons trop peu de professionnels disponibles. » Un responsable d’une clinique de Beyrouth affirme que chaque psychologue reçoit aujourd’hui trois fois plus de patients qu’en 2020.L’un des principaux freins à une prise en charge efficace reste le manque de financement du secteur de la santé mentale« Le budget de l’État pour la psychiatrie a été réduit à presque rien. Nous dépendons de dons et d’initiatives privées. » Une directrice d’association explique que sans soutien gouvernemental, les programmes de santé mentale risquent d’être rapidement interrompus.Face à l’explosion des cas de troubles anxieux et dépressifs, certaines universités ont instauré des espaces d’écoute pour leurs étudiants. Un professeur de psychologie détaille : « Nos jeunes sont sous une pression immense, entre la précarité, la peur de l’avenir et la difficulté à émigrer. Nous avons essayé de mettre en place des groupes de parole, mais cela ne suffit pas. » L’objectif est d’offrir un soutien minimal pour éviter que les étudiants les plus vulnérables ne sombrent dans l’isolement et le désespoir.Les tentatives de soutien ne se limitent pas aux soins psychologiques. Des campagnes de sensibilisation sur le stress économique et la dépression ont été lancées sur les réseaux sociaux, tentant de briser le tabou qui entoure encore la santé mentale au Liban. « Beaucoup de jeunes n’osent pas parler de leurs souffrances, de peur d’être jugés. Nous voulons leur faire comprendre qu’ils ne sont pas seuls. »Mais ces initiatives restent minimales face à l’ampleur du problème« Nous avons besoin d’une politique nationale de santé mentale, pas juste de solutions temporaires. » Un psychiatre estime que le gouvernement doit prendre des mesures structurelles, comme subventionner les soins psychologiques et intégrer des programmes de soutien mental dans les écoles et les universités.En parallèle, certains jeunes tentent de s’en sortir par eux-mêmes, en créant des communautés de soutien informelles. Des groupes d’entraide émergent, où les jeunes partagent leurs expériences et leurs stratégies pour faire face à la crise. « Nous avons créé un réseau où chacun peut parler librement et trouver du réconfort. C’est parfois la seule chose qui nous empêche de craquer. »Pourtant, malgré ces initiatives, les jeunes Libanais restent piégés dans un cercle vicieuxL’absence de stabilité politique et économique rend toute amélioration durable difficile, et l’exode massif vide le pays de ses forces vives, réduisant encore les perspectives d’un redressement national. « On essaie de survivre jour après jour, mais combien de temps pourra-t-on tenir ainsi ? »L’avenir de la jeunesse libanaise reste incertain. Tant que la crise économique persiste, la souffrance psychologique ne pourra que s’aggraver. Sans un sursaut politique et social, le Liban risque de perdre une génération entière.

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