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L’affrontement diplomatique entre Beyrouth et Washington sur le rôle du Hezbollah

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Hezbollah : la bombe à retardement qui secoue Beyrouth et Washington

Le Liban, déjà écrasé par une crise économique titanesque, se retrouve au cœur d’un bras de fer diplomatique brûlant avec les États-Unis, et le Hezbollah en est l’étincelle. Alors que Beyrouth mendie des financements internationaux pour éviter l’effondrement total – un PIB réduit de 55 à 31 milliards de dollars (Banque mondiale, 2024) et 82 % de la population sous le seuil de pauvreté (UNICEF, 2024) – Washington hausse le ton, pointant du doigt le parti chiite comme un obstacle infranchissable. Le Hezbollah, à la fois milice, parti politique et acteur régional, est une épine dans le pied des relations libano-américaines, et les tensions s’intensifient à un moment où le pays n’a jamais eu autant besoin d’aide.

Les États-Unis, déterminés à limiter l’influence iranienne via le Hezbollah, exigent son désarmement comme condition sine qua non à toute assistance militaire ou économique. Cette pression place le Premier ministre Nawaf Salam dans un étau infernal : céder à Washington risque de fracturer un pays déjà fragile, mais ignorer ces demandes pourrait couper le Liban de ses derniers soutiens occidentaux. Dans ce jeu d’équilibriste, chaque faux pas menace de précipiter Beyrouth dans un isolement diplomatique et financier encore plus profond.

Le Liban en crise : Hezbollah, un colosse au cœur du chaos

Le Liban est un pays au bord de l’asphyxie. La livre, dévaluée de 98 % à 120 000 LBP pour 1 dollar (Banque du Liban, 2023), et une inflation à 180 % en 2025 ont réduit le pouvoir d’achat à néant : un sac de riz coûte 300 000 LBP, un luxe pour des salaires de 40 dollars mensuels. Les services publics s’effondrent – hôpitaux à 40 % de capacité, électricité à 2 heures par jour – tandis que le conflit Israël-Hezbollah de 2024, stoppé le 27 novembre, a laissé 900 000 déplacés et des villages en ruines.

Au centre de ce chaos trône le Hezbollah, un acteur incontournable. Fort de 30 % des sièges au Parlement, d’une armée parallèle surpassant les Forces armées libanaises (FAL) – 100 000 roquettes estimées – et d’un réseau économique opaque, le parti chiite est à la fois un bouclier pour ses partisans et un aimant à controverses. Soutenu par l’Iran, il défie l’autorité de l’État et complique les relations avec les puissances occidentales, notamment les États-Unis, qui le classent comme organisation terroriste depuis 1997 (U.S. Department of State, 2023).

Washington dégaine : Hezbollah, l’ennemi à abattre

Les États-Unis ne mâchent pas leurs mots : le Hezbollah doit reculer, ou le Liban paiera le prix fort. En mars 2025, un haut responsable du Département d’État a martelé : « Tant que le Hezbollah domine, aucune aide significative ne viendra. » Washington impose des conditions draconiennes pour débloquer son soutien.

L’aide militaire, vitale pour renforcer les FAL – 50 000 soldats sous-équipés face aux milices – est suspendue à une exclusion totale du Hezbollah des bénéfices. Les États-Unis, qui ont injecté 2 milliards de dollars dans les FAL depuis 2006 (Arab Center Washington DC, 2023), refusent que leurs fonds profitent indirectement à un groupe qu’ils combattent. Ils exigent aussi une traque implacable des financements du parti chiite, ciblant les banques et entreprises libanaises soupçonnées de blanchiment – 500 millions de dollars annuels selon des estimations américaines. Enfin, Washington veut une coopération renforcée contre l’expansion régionale du Hezbollah, notamment en Syrie et au Yémen.

Ces exigences placent Salam dans une tempête. Le Hezbollah n’est pas une entité marginale : il est ancré dans la société chiite – 1,5 million de partisans – et dans l’appareil politique. Les céder risque une guerre civile ; les ignorer coupe le Liban de l’aide occidentale.

Beyrouth dans la tourmente : une esquive diplomatique sous haute tension

Nawaf Salam, conscient de marcher sur des braises, adopte une réponse mesurée mais fragile. Lors d’un discours en mars 2025, il a promis d’aborder le dossier Hezbollah au Conseil supérieur de la défense, tout en insistant : « Toute solution passera par le dialogue national. » Cette prudence reflète la réalité explosive du Liban.

Beyrouth évite une confrontation frontale avec le Hezbollah, dont l’influence s’étend des ministères clés – Défense, Finances – aux forces de sécurité parallèles. Salam mise sur des gestes symboliques pour apaiser Washington : renforcer les FAL avec un budget accru – 300 millions de dollars proposés en 2025 – et promettre une lutte contre les flux financiers illégaux, sans nommer le Hezbollah. « Nous voulons une armée forte pour tous », a-t-il déclaré, esquivant une attaque directe contre le parti chiite.

Cette stratégie, qui privilégie la diplomatie à l’affrontement, vise à préserver un équilibre interne précaire. Mais elle reste un pari risqué : Washington y voit une temporisation, et les alliés du Hezbollah, comme Amal, pourraient y lire une trahison déguisée.

Paris et Riyad : des parrains aux agendas qui s’entrechoquent

La France et l’Arabie saoudite, acteurs majeurs au Liban, observent ce duel avec des approches contrastées. Paris, fidèle à son pragmatisme historique, mise sur une montée en puissance progressive des institutions pour marginaliser le Hezbollah sans provoquer de chaos. Lors d’une conférence en 2021, Macron a mobilisé 1 milliard d’euros d’aide (Élysée, 2021), mais insiste en 2025 : « La stabilité prime sur la précipitation. » La France tolère le Hezbollah pour éviter une guerre interne, une nuance qui agace Washington.

Riyad, en revanche, adopte une posture tranchante. « Pas un riyal tant que le Hezbollah domine », a martelé un officiel saoudien en 2024. L’Arabie saoudite, qui a coupé les importations libanaises en 2021 (Arab Center Washington DC, 2021), exige une refonte politique excluant le parti chiite, reflet de sa rivalité avec l’Iran. Ces divergences – prudence française, fermeté saoudienne – compliquent la position de Salam, pris entre des alliés aux visions irréconciliables.

Sanctions américaines : un coup de massue sur une économie à l’agonie

Washington ne se contente pas de paroles : ses sanctions frappent fort. En 2025, de nouvelles mesures ciblent les réseaux du Hezbollah, mais leurs retombées écrasent un Liban déjà exsangue. Des banques, comme Bank Audi et Byblos, sont sous surveillance accrue pour des transactions suspectées – 200 millions de dollars en 2024 selon le Trésor américain. Des figures politiques et économiques, dont des députés proches du Hezbollah, sont blacklistées, leurs actifs gelés et leurs voyages interdits.

Les entreprises liées au parti – construction, import-export – subissent des restrictions commerciales, perdant des contrats vitaux avec le Golfe. Ces sanctions, visant à assécher le Hezbollah, paralysent un secteur bancaire déjà moribond : les dépôts, bloqués à 60 % depuis 2019, fondent encore sous la pression internationale. « On punit tout le monde pour atteindre quelques-uns », déplore un banquier à Beyrouth en 2025. L’économie, qui importe 80 % de ses besoins, suffoque davantage, avec une inflation prête à bondir à 300 %.

Le Liban au bord du gouffre : un isolement qui menace de tout engloutir

Si Beyrouth ne trouve pas un terrain d’entente avec Washington, l’isolement guette. Les États-Unis pourraient réduire leur aide aux FAL – 200 millions annuels en 2024 – compromettant la sécurité face aux milices et aux tensions frontalières. Les sanctions économiques, déjà dissuasives, feront fuir les derniers investisseurs – IDE à 1 milliard contre 10 en 2018 (UNCTAD, 2023). La diaspora, qui injectait 7 milliards annuels, hésite à envoyer ses dollars dans un pays sous blocus.

Sans compromis, Salam pourrait se tourner vers la Russie, la Chine ou l’Iran. Moscou offre une coopération militaire limitée ; Pékin propose 1 milliard pour les ports, mais avec des visées stratégiques ; Téhéran, étranglé par ses propres sanctions, reste un allié symbolique. Ces options, fragiles, risquent d’aggraver les divisions internes et de couper le Liban des bailleurs occidentaux, précipitant un effondrement financier et sécuritaire.

Salam face au verdict : apaiser Washington ou plonger dans le vide ?

Les options de Beyrouth sont minces. Négocier un compromis avec Washington pourrait passer par un renforcement des FAL – 10 000 soldats supplémentaires d’ici 2026 – sans désarmer directement le Hezbollah, une concession subtile pour apaiser les États-Unis. Une réforme bancaire ciblant le blanchiment, présentée comme économique plutôt que politique, pourrait aussi calmer les tensions. Mais ces demi-mesures risquent de ne satisfaire personne.

Maintenir une posture neutre – temporiser avec des promesses vagues – est tentant pour Salam, espérant un changement régional favorable. « Nous avançons pas à pas », a-t-il déclaré en mars 2025. Mais ce jeu de la montre pourrait irriter Washington, accélérant les sanctions et isolant davantage le Liban. Chercher des alliances alternatives avec la Russie ou la Chine est une porte de sortie désespérée, au prix d’un abandon occidental et d’une instabilité accrue.

Le Liban vacille sur un fil. Sans une solution ingénieuse, l’affrontement avec Washington sur le Hezbollah pourrait signer la fin d’un pays déjà à bout de souffle, entre crise économique et tensions géopolitiques.

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Newsdesk Libnanews
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