Selon le bilan de la Banque du Liban (BDL), les réserves de change ont atteint 10,53 milliards de dollars à la fin du mois de février 2025, enregistrant une augmentation de 2,4 millions de dollars au cours des deux dernières semaines du mois. Cette évolution intervient dans un contexte où la banque centrale libanaise a officiellement adopté, depuis le 1er février 2024, un taux de change de 89 500 livres libanaises (LBP) pour un dollar américain.
Évolution des actifs et réallocation des réserves
Le total des actifs de la BDL a enregistré une baisse annuelle de 0,03 %, atteignant 93,31 milliards de dollars à la mi-février 2025. Parallèlement, le compte or, représentant 28,28 % des actifs totaux de la BDL, a connu une progression notable de 40,78 % sur un an, s’élevant à 26,4 milliards de dollars à la fin du mois de février.
Dans le cadre d’une réorganisation comptable, la BDL a modifié la classification de ses actifs étrangers. Elle a remplacé la rubrique « actifs étrangers » par « réserves de change », ne retenant ainsi que les actifs étrangers liquides détenus par des non-résidents. En conséquence, d’autres actifs considérés comme illiquides ou détenus par des résidents ont été reclassés dans le portefeuille de titres ou dans les prêts au secteur financier local. Plus précisément, les obligations d’État libanaises libellées en dollars (Eurobonds) et évaluées à 4,85 milliards de dollars ont été transférées vers le portefeuille de titres, tandis que 298,8 millions de dollars ont été reclassés en prêts au secteur financier.
Après ajustement pour ces reclassements, les réserves de change de la BDL, qui représentent 11,28 % du total de ses actifs, ont augmenté de 9,3 % sur un an pour atteindre 10,53 milliards de dollars en février 2025.
Analyse des passifs de la banque centrale
Du côté du passif, les dépôts du secteur financier, qui constituent 91,03 % des engagements de la BDL, ont reculé de 2,40 % sur un an pour s’établir à 84,94 milliards de dollars à la fin du mois de février 2025. Il est à noter que plus de 90 % de ces dépôts sont libellés en dollars américains.
En revanche, les dépôts du secteur public, représentant 6,83 % des passifs de la BDL, ont enregistré une hausse significative de 43,42 % en glissement annuel, atteignant 6,4 milliards de dollars.
Par ailleurs, la monnaie en circulation hors de la BDL, représentant 1,02 % du total des engagements, a connu une forte progression de 49,68 % pour s’élever à 950 millions de dollars à la fin du mois de février 2025. Cette augmentation coïncide avec la révision du taux de change officiel à 89 500 LBP/USD. Il est intéressant de noter que cette expansion de la masse monétaire en circulation a été accompagnée d’une augmentation quasi équivalente des réserves de change, soit environ 1 milliard de dollars sur la même période.
Impact des réformes comptables sur la transparence des réserves
La clarification comptable opérée par la BDL vise à offrir une lecture plus transparente de la liquidité réelle des réserves en devises. En excluant les actifs étrangers illiquides et les obligations souveraines libanaises du calcul des réserves de change, la banque centrale cherche à refléter plus fidèlement ses ressources immédiatement disponibles. Cette initiative est d’autant plus pertinente que la crise économique prolongée au Liban a engendré une méfiance accrue quant à la gestion des réserves officielles.
En consolidant ses réserves de change à 10,53 milliards de dollars et en maintenant un taux de change officiel à 89 500 LBP/USD, la BDL tente de stabiliser un marché des changes marqué par une forte volatilité ces dernières années. Toutefois, la baisse des dépôts du secteur financier pourrait indiquer une défiance persistante envers le système bancaire libanais, rendant le défi de la stabilisation encore plus complexe.
Perspectives économiques et implications monétaires
L’augmentation des réserves de change, bien que modeste en février 2025, s’inscrit dans un contexte où le Liban cherche à renforcer sa crédibilité financière et à préserver la stabilité monétaire. La hausse des dépôts du secteur public pourrait être interprétée comme un signe de consolidation budgétaire, tandis que la contraction des dépôts du secteur financier illustre les défis persistants liés à la confiance dans le système bancaire.
Dans les mois à venir, l’évolution des réserves de change dépendra de plusieurs facteurs :
- Les entrées de devises issues des remises de la diaspora
- Les interventions de la BDL sur le marché des changes
- L’évolution des négociations avec les créanciers internationaux sur la restructuration de la dette
- L’impact des réformes économiques sur le climat des affaires et l’investissement étranger
Dans l’immédiat, la hausse de 2,4 millions de dollars en fin de mois peut sembler marginale, mais elle reflète une tendance plus large de stabilisation progressive, bien que fragile, du bilan de la Banque du Liban.
Données essentielles sur la Banque du Liban (BDL)
- Fondation : 1963
- Siège : Beyrouth, Liban
- Total des actifs (février 2025) : 93,31 milliards de dollars
- Réserves de change (février 2025) : 10,53 milliards de dollars
- Taux de change officiel : 89 500 LBP/USD
- Principaux engagements : Dépôts du secteur financier (91,03 % du passif)
Données essentielles sur les Eurobonds libanais
- Valeur de marché transférée en portefeuille de titres : 4,85 milliards de dollars
- Prêts au secteur financier reclassés : 298,8 millions de dollars