Le Premier ministre désigné du Liban, Nawaf Salam, a lancé un appel aux blocs parlementaires pour qu’ils soumettent les curriculum vitae des candidats qu’ils proposent pour les postes ministériels du futur gouvernement. Selon des rapports médiatiques, cette démarche vise à instaurer une nouvelle approche dans la gestion gouvernementale, éloignée des pratiques habituelles fortement influencées par les partis politiques.
Des critères de sélection rigoureux
D’après le quotidien Al-Liwaa, des sources informées ont précisé que Nawaf Salam a établi des critères stricts pour le choix des ministres. Tout d’abord, les candidats ne doivent pas être affiliés à un parti politique. Cette exigence souligne la volonté de Salam de former un gouvernement technocratique, indépendant des clivages partisans qui ont marqué la scène politique libanaise ces dernières décennies.
En outre, les candidats proposés ne doivent pas avoir occupé de postes ministériels dans les trois derniers gouvernements. Cette règle vise à renouveler les figures politiques, dans un contexte où de nombreuses personnalités associées à l’ancien système sont critiquées pour leur rôle dans la crise actuelle.
Enfin, les candidats devront s’engager à ne pas se présenter aux élections législatives de 2026. Cette condition vise à éviter tout conflit d’intérêts et à garantir que les ministres se concentrent pleinement sur leurs responsabilités gouvernementales plutôt que sur des ambitions électorales.
Une tentative de réformer le système politique
La démarche de Nawaf Salam reflète une tentative audacieuse de réforme au sein du système politique libanais. Le pays est depuis longtemps gouverné par un équilibre délicat entre différentes factions confessionnelles et politiques, un modèle qui a souvent conduit à la paralysie institutionnelle et au népotisme.
Les critères annoncés par Salam traduisent un effort pour rompre avec ce modèle et introduire une nouvelle génération de responsables. Cependant, ces exigences risquent de poser des défis, notamment face à l’opposition probable de certains blocs parlementaires qui préfèrent maintenir leur influence dans les processus de prise de décision.
Une situation politique complexe
La désignation de Nawaf Salam en tant que Premier ministre intervient dans un contexte de crise profonde au Liban. Le pays est confronté à une dégradation économique sans précédent depuis 2019, marquée par un effondrement de la monnaie nationale, une inflation galopante et une pauvreté croissante. Les institutions publiques, paralysées par des rivalités politiques, peinent à répondre aux besoins de la population.
Les efforts pour former un gouvernement efficace ont été entravés à plusieurs reprises par les divisions entre les différentes factions politiques. La dernière tentative de Salam de constituer un gouvernement inclusif, mais indépendant, pourrait être un tournant dans la gouvernance du pays, bien que les défis restent immenses.
Réactions des blocs parlementaires
Pour l’instant, les réactions des blocs parlementaires aux critères imposés par Salam sont mitigées. Certains acteurs politiques, en particulier ceux qui soutiennent une réforme du système, pourraient voir cette démarche comme une opportunité de rétablir la confiance dans les institutions. Cependant, d’autres pourraient s’y opposer, arguant que les critères excluent des figures clés ayant une expérience précieuse.
Le rejet potentiel des candidats proposés par certains blocs pourrait également entraîner des retards dans la formation du gouvernement, un scénario déjà bien connu au Liban. Le pays a connu de longues périodes de vacance gouvernementale par le passé, ce qui a exacerbé les crises économiques et sociales.
Les attentes de la population
Alors que les débats politiques se poursuivent, la population libanaise reste sceptique quant à la capacité de la classe politique à mettre en œuvre de véritables réformes. Les manifestations de 2019 avaient clairement exprimé un rejet massif du système confessionnel et des pratiques de corruption. Cependant, peu de progrès ont été réalisés depuis lors.
La démarche de Nawaf Salam, si elle réussit, pourrait marquer une étape importante dans la réponse aux attentes populaires. En excluant les figures partisanes et en insistant sur l’intégrité et l’indépendance des ministres, Salam cherche à répondre aux appels des Libanais en faveur d’un gouvernement plus transparent et plus efficace.
Un pari risqué
Bien que l’initiative de Nawaf Salam soit saluée par certains comme une tentative sérieuse de réformer le système politique libanais, elle comporte des risques. Les forces politiques qui dominent le parlement pourraient s’opposer à ses critères, ce qui compromettrait la formation rapide d’un gouvernement. De plus, même si un cabinet indépendant est formé, il devra faire face à un parlement majoritairement composé de figures issues du système traditionnel.
La question reste de savoir si Salam pourra obtenir le soutien nécessaire pour concrétiser sa vision. Une chose est certaine : le Liban se trouve à un moment critique, où des décisions audacieuses sont nécessaires pour sortir le pays de l’impasse actuelle.