L’imbroglio de la présidentielle libanaise

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Une confusion totale règne sur la présidentielle libanaise. De nombreuses questions se posent. La plupart d’entre elles restent sans réponses. C’est que le Liban n’est pas un pays comme les autres. Il a ses particularités qui expliqueraient pourquoi rien ne fonctionne comme cela se fait dans d’autres pays. Les questions que je me pose et que je rappelle à mes concitoyens éclairciront nos lanternes. Ces questions, je les jette pêle-mêle comme elles se sont présentées à mon esprit.

Pourquoi avoir attendu plus de deux ans et demi pour finalement s’entendre sur la candidature du Général Aoun ? Comment les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite vont-ils accepter de voir un Général allié de la Syrie, de l’Iran et de la Russie occuper le poste de Président de la République libanaise ? Est-ce à cause de l’élection présidentielle aux USA que les Américains ont vu leur rôle faiblir dans le choix du futur Président libanais ? Quelle va être la politique du futur Président des Etats-Unis concernant le Liban ? Va-t-il facilement accepter d’avaler la couleuvre ? C’est à voir. Et l’Arabie Saoudite ? Acceptera-t-elle de voir son rôle amoindri au Liban ? Comment admettra-t-elle de voir les sunnites mis le dos au mur par des chiites de plus en plus puissants ? Et le Président maronite devra-t-il être toujours balloté entre ces deux communautés, composantes essentielles du Liban ? Ou bien sera-t-il appelé à servir de trait d’union entre elles pour sauvegarder l’unité de la Nation ? Comment notre Président agira-t-il pour empêcher que la tension entre l’Iran et l’Arabie Saoudite ne se traduise en conflit intercommunautaire entre les sunnites et les chiites ?

Quel rôle pourrait jouer un chef du gouvernement sunnite face à l’étouffante puissance chiite ? Parviendra-t-il à former un gouvernement ? La politique de ce gouvernement sera-t-elle alignée sur la politique du bloc de la Russie, de l’Iran et de la Syrie ? Ou bien sur la politique des USA, de l’Europe et de l’Arabie Saoudite ? Le Chef du gouvernement pourra-t-il concilier ces deux politiques ? Quel est le rôle du Président de la République dans tout cela ? Sera-t-il un simple spectateur ou bien aura-t-il son mot à dire ? Les Russes envisagent-ils d’installer une base militaire au Liban comme ils sont en train de le faire en Syrie pour défendre leurs intérêts ?
Quelle serait la réponse des autorités libanaises ? Vont-elles accepter de rejoindre tel bloc contre tel autre bloc ?

S’il est élu Président, le Général, formé à l’école militaire, ne pourra agir que conformément aux intérêts du Liban. Acceptera-t-il toujours de se conformer au rôle qui lui est imparti par les puissances qui appuient sa candidature ? J’en doute fort si certains points de ce rôle vont contre ses convictions personnelles concernant la pérennité du Liban et l’avenir de la Nation. Dans ce cas, comment réagiraient les puissances qui se sentiraient abuser par le Général- Président ? Auraient-elles la même réaction qu’elles ont eue quand le Président élu Bachir Gemayel s’est rebiffé contre tout ce qui allait conte l’indépendance et l’unité du Liban ? S’étant senties trahies, elles ont participé à l’élimination physique de ce Président patriote. Les partisans du Général ont peur de voir le futur Président connaitre le même sort que feu Président Bachir. C’est pourquoi toutes les précautions sont prises pour empêcher pareille tragédie.

Une fois élu, le Président Aoun aura à affronter pas mal de problèmes. La présence des déplacés syriens au Liban, le renforcement de l’Armée libanaise, son armement par les occidentaux ou par l’axe Russo-Iranien, la dualité des armes, les relations avec les Américains et l’Arabie Saoudite, ennemis jurés du Hezbollah, la politique étrangère du Liban, les zizanies entre les différents représentants de la classe politique libanaise, les intérêts personnels et financiers de cette classe politique, les nominations, la formation du gouvernement, les magouilles de toutes sortes, la corruption, les ministres habitués durant deux ans et demi à se comporter chacun comme Président de la République, le système politique qui se bloque facilement parce que certains de ses articles peuvent être interprétés de façons différentes, la loi électorale, la paralysie du Parlement, le comportement unilatéral de certaines composantes de la société qui n’est pas toujours conforme à la politique étrangère du Liban, la nomination du futur chef du gouvernement et des ministres, la politique du nouveau gouvernement, le rôle des partis politiques, les problèmes économiques, l’endettement de l’Etat, la politique financière, l’eau, l’électricité, les besoins essentiels des gens de la rue, l’éducation nationale, les impôts, les dépenses improductives, le respect de la constitution, le bon fonctionnement du système politique, les prérogatives du Président de la République. Et j’en passe…

Comme quoi il n’y a pas à se faire trop d’illusions. Nous ne devons pas crier victoire trop facilement. Beaucoup de problèmes attendent le futur Président de la République. En militaire endurci, acceptera-t-il de composer avec cette classe politique qui se partage toujours le gâteau ou bien aura-t-il la possibilité de donner des ordres à suivre puis discuter après les ordres donnés ? Certains crieraient au viol de la démocratie. Bref le Président du Liban aura-t-il les moyens de sa politique ? J’en doute et c’est vraiment dommage et pour le Liban et pour son Président.

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