Un scandale d’espionnage ébranle l’Ukraine. Oleh Kulinich, ex-patron du renseignement intérieur en Crimée, s’apprête à affronter la justice à Kiev, accusé d’avoir vendu des secrets au Kremlin. En ce 20 mars 2025, cette affaire de haute trahison, l’une des plus explosives depuis le début de la guerre, révèle des ramifications internationales qui laissent pantois. Une équipe israélienne de renseignement privé et un avocat américain, aux connexions troubles, se retrouvent au cœur du dossier. Leurs rôles soulèvent une question brûlante : pour qui travaillent-ils vraiment ? Russie, Ukraine ou une tierce partie ? On démêle les fils de cette intrigue aux enjeux colossaux.
Oleh Kulinich : de l’ombre à la lumière
Oleh Kulinich n’a rien d’un second couteau. Jusqu’à son arrestation en juillet 2022, il dirigeait le département Crimée du SBU, le service de sécurité intérieure ukrainien. Un poste névralgique dans une région annexée par la Russie en 2014 et théâtre d’affrontements constants. Mais les soupçons ont fini par le rattraper. Des documents sensibles atterrissaient à Moscou, des opérations ukrainiennes échouaient avec une précision suspecte : le contre-espionnage a serré la vis. L’accusation ne plaisante pas : haute trahison, passible de la prison à vie. Kulinich aurait livré des informations sur des positions militaires, des agents infiltrés et des plans stratégiques, sapant l’effort de guerre de Kyiv.
Son CV intrigue autant qu’il dérange. Nommé en 2020 par Volodymyr Zelensky, il s’était imposé comme un homme de confiance, discret mais efficace. Avant l’annexion, il opérait déjà en Crimée, une période trouble où les loyautés vacillaient face à l’avancée russe. Certains le voyaient comme un patriote, d’autres murmuraient sur ses contacts douteux avec des intermédiaires proches de Moscou. Lors de son arrestation, des écoutes téléphoniques ont capté des échanges codés avec des officiers russes, et des comptes offshore ont révélé des versements suspects – plusieurs centaines de milliers de dollars entre 2020 et 2022. Kulinich clame son innocence, criant au complot politique. Mais les preuves s’amoncellent, et son procès, prévu pour avril, s’annonce comme un choc.
Une défense qui brouille les pistes
Alors que le jugement approche, la défense de Kulinich prend une tournure spectaculaire. Un avocat américain, figure connue des cercles conservateurs à Washington, prend les commandes. Ce juriste, habitué des dossiers sulfureux, a déjà défendu des personnalités controversées aux États-Unis, mêlant plaidoiries agressives et campagnes médiatiques. Sa stratégie ? Retourner l’opinion contre Zelensky, en dépeignant Kulinich comme un pion sacrifié dans une guerre interne au SBU. Il accuse Kyiv de fabriquer des preuves pour masquer ses échecs face à la Russie, un discours qui trouve écho dans certains médias occidentaux.
Mais l’avocat ne vient pas seul. Une équipe israélienne de renseignement privé, basée à Tel-Aviv, entre dans la danse. Ces experts, souvent d’anciens agents du Mossad ou d’unités d’élite, excellent dans la collecte de données et les opérations clandestines. Leur mission ici semble claire : fournir des rapports pour discréditer l’accusation. Ils avancent que les écoutes ont été manipulées, que les témoins ont été soudoyés, et que les transferts d’argent sont des montages. Leurs analyses alimentent une offensive médiatique, avec des articles suggérant une « purge » dans le renseignement ukrainien, relayés par des sites conservateurs aux États-Unis et ailleurs.
La connexion israélienne : pour qui roulent-ils ?
L’implication de cette équipe israélienne soulève une question cruciale : pour qui travaillent-ils ? La réponse n’est pas nette. En surface, leur action profite à Kulinich – et donc, par extension, à Moscou. Si l’ancien chef du SBU est une taupe du Kremlin, les disculper revient à protéger un actif russe précieux. Des sources proches de l’enquête ukrainienne pointent des commanditaires potentiels : des oligarques russes ou des intermédiaires liés au FSB, qui auraient engagé ces privés pour brouiller les pistes. Leur travail fragilise le SBU et sème le doute sur la légitimité de Kyiv, un objectif qui colle parfaitement à la stratégie de déstabilisation russe.
Pourtant, d’autres hypothèses circulent. Agissent-ils pour une faction ukrainienne dissidente, cherchant à faire tomber Zelensky ou à régler des comptes au sein du renseignement ? Peu probable. Leur collaboration étroite avec l’avocat américain, qui attaque frontalement le gouvernement ukrainien, contredit cette idée. Une troisième piste émerge : une tierce partie, ni russe ni ukrainienne, pourrait tirer les ficelles. Ces équipes israéliennes travaillent souvent pour des clients privés – entreprises, oligarques, voire États – motivés par le profit ou des agendas stratégiques. Mais sans preuve sur leurs payeurs, cette option reste floue.
Israël, officiellement, n’a rien à voir là-dedans. Depuis 2022, l’État hébreu marche sur une corde raide : aide humanitaire à l’Ukraine, mais pas d’armes, pour ne pas froisser Moscou, dont la présence en Syrie reste un enjeu sécuritaire majeur. Ces privés, eux, opèrent hors des canaux officiels, guidés par leurs contrats. Leur expertise est redoutable : ils maîtrisent l’analyse de données massives, les cyber-opérations et la guerre psychologique. Dans ce dossier, leur inclinaison semble pencher vers les intérêts russes, mais l’opacité de leurs liens laisse la porte ouverte à d’autres interprétations.
L’avocat américain : un relais politique ?
L’avocat américain ajoute une couche de mystère. Ses connexions avec des cercles trumpistes – des figures qui, depuis janvier 2025, prônent un désengagement américain en Ukraine – suggèrent un agenda plus large. L’administration Trump, revenue au pouvoir, oscille entre un soutien de façade à Kyiv et une réticence à gonfler l’aide militaire. Défendre Kulinich pourrait servir à miner Zelensky, accusé par ces milieux de corruption et d’incompétence. Lors de conférences de presse, l’avocat dénonce un « procès spectacle » et appelle à une enquête internationale sur le SBU, un discours qui résonne avec les critiques de certains républicains aux États-Unis.
Son alliance avec l’équipe israélienne intrigue les observateurs. Leur collaboration pourrait remonter à des contrats passés, peut-être liés à des oligarques russes exilés ou à des entreprises jouant sur les deux tableaux dans ce conflit. Une rumeur court : des fonds russes, blanchis via des intermédiaires, financeraient cette opération pour protéger Kulinich. Si ce dernier parle, il pourrait exposer des réseaux entiers à Moscou – officiers du FSB, agents doubles, circuits financiers. Pour l’instant, ce ne sont que des conjectures, mais elles alimentent les spéculations.
Un coup dur pour l’Ukraine
Pour Kyiv, l’affaire Kulinich est un désastre. Elle met à nu les failles d’un renseignement rongé par les infiltrations et les luttes de pouvoir. Le SBU, déjà sous le feu des critiques pour son incapacité à contrer les sabotages russes – usines détruites, lignes ferroviaires visées –, doit frapper fort. Condamner Kulinich prouverait que l’État ne tolère pas les traîtres, même au sommet. Mais un procès bancal, sapé par les manœuvres de la défense, pourrait ruiner sa crédibilité, en pleine guerre où chaque faille est exploitée par Moscou.
La connexion israélienne complique encore les choses. L’Ukraine, qui a longtemps espéré un soutien militaire d’Israël – comme le système antimissile Dôme de fer –, n’a reçu que des aides symboliques. L’implication de ces privés, même sans lien officiel avec Tel-Aviv, risque de tendre les relations. Côté américain, l’avocat trumpiste ravive les frictions avec une administration partagée sur l’Ukraine : certains veulent punir Moscou, d’autres préfèrent un repli stratégique face à la montée de la Chine.
Un procès à haut risque
Le procès de Kulinich, attendu en avril, sera un moment de vérité. Les preuves – écoutes, relevés bancaires, témoignages d’agents – devront résister à une défense qui joue sur tous les fronts : juridique, médiatique, international. L’équipe israélienne et l’avocat américain pourraient encore lâcher des révélations, exposant des réseaux d’influence ou semant le chaos dans l’accusation. En ce 20 mars 2025, l’affaire dépasse le simple cas d’une taupe. Elle met en lumière les jeux troubles d’acteurs étrangers dans une guerre où l’Ukraine, coincée entre ses alliés et ses ennemis, joue sa survie.