Un changement politique porteur d’attentes économiques
Le début de l’année 2025 a marqué une inflexion politique majeure pour le Liban avec l’élection d’un nouveau président, la nomination d’un Premier ministre et la formation d’un gouvernement d’experts. Cette transition, perçue comme prometteuse, a ravivé les espoirs d’une relance économique structurée. Dans ce contexte, cinq grandes priorités macroéconomiques ont été définies comme axes de travail pour la nouvelle ère présidentielle, visant à stabiliser les fondamentaux et à reconstruire la confiance des investisseurs.
1. Croissance et création d’emplois : redynamiser une économie paralysée
La première priorité consiste à stimuler une croissance inclusive capable de générer des emplois durables. L’économie libanaise a subi une contraction cumulée de plus de 50 % entre 2018 et 2022. En 2024, le PIB réel a stagné à environ +0,5 %, tandis que le taux de chômage demeure élevé, affectant plus de 30 % des jeunes actifs.
Une relance du secteur productif, notamment industriel et agricole, est envisagée comme moteur de l’emploi, avec un soutien accru à l’investissement, à l’innovation et à la simplification des procédures administratives pour les PME.
2. Ajustement externe : réduire le déséquilibre de la balance des paiements
La seconde priorité vise à rééquilibrer les comptes extérieurs, caractérisés par un déficit commercial chronique (14,2 milliards de dollars en 2024, soit 50 % du PIB). L’objectif est d’augmenter les exportations, d’encourager la substitution aux importations et d’attirer des investissements directs étrangers via un environnement plus stable et prévisible.
L’amélioration de la logistique commerciale, la réhabilitation des ports et aéroports et l’établissement d’accords commerciaux régionaux figurent parmi les leviers envisagés.
3. Stabilité monétaire et renforcement des réserves : restaurer la crédibilité
Troisième pilier stratégique : assurer la stabilité de la monnaie nationale. Après avoir fortement chuté, la livre libanaise est restée stable autour de 89 600–89 700 livres pour un dollar au cours du T1 2025. La Banque du Liban (BDL) a reconstitué ses réserves de change à hauteur de 11,071 milliards de dollars mi-avril 2025 (+936 millions depuis décembre 2024).
Cette dynamique reste fragile sans ancrage institutionnel. La mise en œuvre d’un cadre monétaire clair, d’une transparence accrue sur les données financières et d’une coopération renforcée avec le Fonds monétaire international (FMI) est essentielle pour renforcer la résilience monétaire.
4. Réformes fiscales et ajustement budgétaire : vers une viabilité des finances publiques
Le déficit public prévu pour 2025 s’élève à 196 millions de dollars, en baisse par rapport aux années précédentes, mais les dépenses courantes absorbent toujours plus de 90 % du budget. Le poids croissant des recettes fiscales, notamment la TVA (+86,9 %) et l’impôt sur le revenu (+135,3 %), risque d’étouffer la consommation et les entreprises si ces hausses ne sont pas accompagnées d’un élargissement de l’assiette fiscale et d’une lutte contre l’économie informelle.
L’élaboration d’un cadre budgétaire pluriannuel, l’optimisation des dépenses et l’accroissement de la transparence dans la gestion publique sont des impératifs pour restaurer la crédibilité budgétaire.
| Indicateur budgétaire | Budget 2025 (en millions USD) |
|---|---|
| Recettes totales | 4 582 |
| Dépenses totales | 4 779 |
| Déficit | -196 |
| Dépenses d’investissement | 468 |
| Poids du déficit / PIB | -1,1 % |
5. Restructuration du secteur bancaire : assainir le système financier
Dernière priorité, mais non des moindres : la restructuration du secteur bancaire, pilier de la crise depuis 2019. La perte de 187 millions de dollars de fonds propres entre décembre 2024 et février 2025 souligne l’urgence de mettre en place un cadre législatif de résolution. Le projet de loi adopté en avril 2025 (cf. article 23) doit être complété par des outils opérationnels : audits externes, recapitalisation, protection des dépôts, traitement équitable des créanciers.
La création d’une autorité indépendante de restructuration est une condition-clé pour restaurer la confiance dans le système financier, attractivité indispensable à tout redémarrage économique.
