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Les divisions internes libanaises : un levier stratégique pour Israël

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Le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, entré en vigueur le 27 novembre 2024, a instauré une trêve fragile au Sud-Liban, sous la supervision des États-Unis, de la France et de la FINUL. Cependant, loin de n’être qu’un simple accord militaire, ce cessez-le-feu s’inscrit dans un contexte régional complexe où les dynamiques internes libanaises jouent un rôle déterminant. Selon un article publié le 24 mars 2025 par Al Quds Al Arabi, des sources israéliennes affirment que le gouvernement de Benjamin Netanyahu cherche à exploiter les divisions institutionnelles et politiques au Liban pour obtenir des avancées diplomatiques, en s’appuyant sur la menace militaire comme levier. Cette stratégie, confortée par une surveillance étroite des déclarations divergentes des leaders libanais, met en lumière la perception extérieure de la faiblesse structurelle du Liban comme un atout pour Israël. Voici une analyse détaillée et factuelle de cette situation, jusqu’au 24 mars 2025.

Contexte du cessez-le-feu et fragilité libanaise

L’accord de novembre 2024 visait à mettre fin à plus d’un an de conflit transfrontalier, marqué par deux mois de guerre ouverte entre Israël et le Hezbollah. Il prévoyait un arrêt des hostilités pendant 60 jours, un retrait progressif des forces israéliennes du Sud-Liban, le repositionnement du Hezbollah au nord du fleuve Litani, et le déploiement de l’armée libanaise dans la zone frontalière. Cependant, dès les premiers jours, des violations israéliennes (frappes aériennes, survols de drones, refus d’évacuation totale) ont révélé les limites de l’accord, tandis que la capacité du Liban à imposer son autorité restait entravée par ses divisions internes. Le pays, plongé dans une crise économique depuis 2019, avec une monnaie dévaluée de plus de 95 % et un taux de pauvreté dépassant 80 %, souffre également d’un vide politique chronique. L’élection de Joseph Aoun comme président en novembre 2024, après deux ans de vacance, n’a pas suffi à unifier un paysage politique fragmenté entre factions pro-Hezbollah, anti-Hezbollah et neutres.

Les divisions internes : une mosaïque d’intérêts

Le Liban est historiquement marqué par une fragmentation confessionnelle et politique, exacerbée par la guerre civile (1975-1990) et les ingérences étrangères. Depuis novembre 2024, ces divisions se manifestent dans les divergences sur la gestion du cessez-le-feu : le Hezbollah, soutenu par l’Iran, insiste sur une posture défensive face à Israël et rejette toute négociation directe avec Tel Aviv ; le président Joseph Aoun et le Premier ministre Najib Mikati appellent à renforcer la souveraineté étatique via l’armée libanaise, tout en restant prudents sur une confrontation avec le Hezbollah ; les partis chrétiens, comme les Forces libanaises de Samir Geagea, exigent le désarmement du Hezbollah comme préalable à toute stabilisation ; les factions sunnites et druzes, dirigées par des figures comme Walid Joumblatt, oscillent entre neutralité et pressions pour un dialogue régional. Ces divergences, amplifiées par des déclarations publiques contradictoires, offrent un tableau d’incohérence que les services de renseignement israéliens, selon Al Quds Al Arabi, analysent minutieusement.

La stratégie israélienne selon Al Quds Al Arabi

L’article du 24 mars 2025 cite des sources israéliennes anonymes affirmant que le gouvernement Netanyahu voit dans cette désunion une opportunité stratégique. Plutôt que de viser une guerre totale, Israël chercherait à exploiter ces fractures pour : obtenir des concessions diplomatiques, comme une reconnaissance implicite de sa suprématie militaire ou une démarcation favorable de la frontière maritime et terrestre ; maintenir une pression militaire constante (1 100 violations recensées depuis novembre 2024) pour forcer le Liban à négocier sous contrainte ; affaiblir le Hezbollah en isolant ses soutiens internes, notamment au sein du mouvement chiite Amal et de certaines franges de l’élite politique. Cette approche s’appuie sur une menace militaire crédible : Tsahal reste déployée dans environ 60 localités au Sud-Liban, malgré les termes de l’accord, et multiplie les frappes ciblées (comme celle du 17 mars 2025 à Yohmor el-Chakif, tuant deux personnes).

Une surveillance israélienne des déclarations libanaises

Al Quds Al Arabi précise que les services de renseignement israéliens (Mossad et Aman) suivent de près les prises de position des leaders libanais. Par exemple, le 9 janvier 2025, Joseph Aoun a promis de renforcer le monopole de l’État sur les armes, une déclaration perçue comme un défi au Hezbollah, mais nuancée par Mikati, qui a appelé à une « retenue collective » face à Israël. De son côté, Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah, a menacé le 24 janvier 2025 de reprendre les hostilités si Tsahal ne quittait pas le Sud-Liban, tandis que Geagea exigeait une application stricte de la résolution 1559 (désarmement des milices). Ces dissonances, relayées par les médias et les réseaux sociaux, permettent à Israël d’évaluer les lignes de fracture et d’adapter sa stratégie, notamment en ciblant des zones où l’armée libanaise peine à s’imposer face au Hezbollah.

Cohésion institutionnelle : un levier perçu à l’extérieur

La lecture régionale proposée par Al Quds Al Arabi souligne que la cohésion institutionnelle libanaise est vue comme un levier stratégique par Israël. Une classe politique unie et une armée libanaise forte pourraient contraindre Israël à respecter pleinement le cessez-le-feu et à évacuer le Sud-Liban. Or, la réalité est inverse : le Hezbollah conserve une autonomie militaire, l’armée libanaise dépend du soutien international (États-Unis, France), et les institutions restent paralysées par des rivalités. Cette faiblesse est exploitée par Netanyahu, qui, selon des analystes israéliens cités par le journal, mise sur une « guerre d’usure diplomatique » pour imposer ses conditions sans relancer un conflit ouvert. Le refus israélien de céder cinq positions stratégiques au-delà du 18 février 2025, malgré les pressions du comité tripartite, illustre cette logique.

Réactions et implications régionales

Cette stratégie israélienne n’est pas sans écho dans la région. L’Iran, principal soutien du Hezbollah, a renforcé son aide logistique depuis novembre 2024, selon des rapports de l’Observatoire syrien des droits de l’homme, pour contrer l’influence israélienne. La Syrie, bien que fragilisée, facilite les transferts d’armes via sa frontière avec le Liban, tandis que les États-Unis et la France tentent de maintenir le comité tripartite comme un rempart contre l’escalade. Cependant, la perception d’un Liban divisé profite à Israël, qui peut justifier ses actions militaires comme une réponse à l’incapacité de Beyrouth à contrôler le Hezbollah. Le 22 mars 2025, l’interception de cinq roquettes tirées depuis le Liban, suivie de frappes israéliennes, a renforcé cette narrative.

Analyse critique

La thèse d’Al Quds Al Arabi est étayée par les faits : les divisions libanaises limitent la capacité du pays à présenter un front uni, offrant à Israël une marge de manœuvre stratégique. Cependant, cette approche comporte des risques pour Netanyahu. Une pression excessive pourrait pousser le Hezbollah à rompre la trêve, comme suggéré par les tirs de roquettes du 22 mars, ou radicaliser les factions libanaises anti-israéliennes. De plus, elle dépend de la tolérance internationale : la FINUL et le Liban ont déposé des plaintes répétées à l’ONU, et la France a accusé Israël de « contourner » le comité tripartite dès décembre 2024. À long terme, exploiter les divisions libanaises pourrait stabiliser la domination israélienne dans la région, mais au prix d’une paix durable.

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Newsdesk Libnanews
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