Les éditions du 20 mai 2025 des principaux journaux libanais — Al Akhbar, An-Nahar, Al Joumhouriya, Nida’ Al Watan, Ad-Diyar, Al Bina’, Al Liwa’ et Al Sharq — ont été largement dominées par deux dynamiques majeures : la guerre en cours à Gaza et les conséquences des élections municipales au Liban, notamment à Beyrouth et Zahleh. Ces événements sont perçus comme des révélateurs d’équilibres politiques en mutation, autant sur le plan régional qu’interne.
Guerre à Gaza : extension du conflit et durcissement des fronts
La couverture du conflit à Gaza occupe les premières pages de nombreux titres. Al Bina’ (20 mai 2025) fait état d’une « bataille terrestre ratée » pour l’armée israélienne dans la bande de Gaza, notamment à Khan Younès, où l’opération de capture d’un chef de la résistance s’est soldée par l’échec de l’armée et la mort d’un officier israélien. Le quotidien souligne la montée en puissance des ripostes coordonnées des forces palestiniennes et l’élargissement du conflit par l’implication des Houthis au Yémen. Ces derniers ont ajouté le port de Haïfa à leur liste de cibles stratégiques après Tel Aviv et Eilat, illustrant la régionalisation du conflit.
Dans le même temps, Ad-Diyar (20 mai 2025) insiste sur la déstabilisation interne en Israël, où le soutien populaire au gouvernement Netanyahou se fissure. L’armée israélienne est désormais accusée d’enlisement, tandis que les appels à un cessez-le-feu se multiplient sur la scène internationale. Le journal rapporte que 92 % des infrastructures résidentielles à Gaza ont été endommagées ou détruites, selon l’UNRWA. Cette destruction massive est associée à des accusations de « nettoyage ethnique » et de « génocide », des termes employés par les rédactions de Al Akhbar (20 mai 2025) et Al Bina’ (20 mai 2025).
Le bloc occidental apparaît divisé. Al Bina’ (20 mai 2025) mentionne les pressions croissantes de l’opinion publique en Europe et aux États-Unis pour exiger une trêve humanitaire immédiate. L’Union européenne envisage pour la première fois une révision de son partenariat avec Israël. Sur la scène diplomatique, le président américain Trump a échangé avec Vladimir Poutine dans un contexte de repositionnement stratégique, selon Al Bina’ (20 mai 2025), alors même que Washington semble perdre de son influence face aux avancées iraniennes dans la région.
La visite de Joseph Aoun au Caire : affirmation diplomatique
En parallèle de cette actualité explosive, la visite du président libanais Joseph Aoun au Caire occupe une place centrale dans Al Joumhouriya (20 mai 2025), Al Liwa’ (20 mai 2025) et Al Sharq (20 mai 2025). À l’issue de son entretien avec Abdel Fattah al-Sissi, les deux chefs d’État ont insisté sur « la nécessité d’un retrait immédiat d’Israël des territoires libanais occupés », sur le respect du cessez-le-feu en vigueur (résolution 1701) et sur le soutien à la reconstruction du Liban.
Al Joumhouriya (20 mai 2025) souligne que la visite n’a pas seulement abordé la question palestinienne, mais aussi les perspectives économiques, avec un accent sur la coopération énergétique. Le président Aoun a réaffirmé la neutralité du Liban tout en appelant au renforcement des alliances avec les pays arabes « historiquement alliés ».
Al Liwa’ (20 mai 2025) insiste quant à lui sur la portée symbolique du déplacement, qui marque une volonté de repositionnement diplomatique du Liban. Joseph Aoun a rappelé que « le respect de la souveraineté nationale et la stabilité régionale passent par l’application du droit international », faisant ainsi écho aux tensions autour de Gaza.
Municipales à Beyrouth et Zahleh : nouveaux rapports de force
Sur le plan intérieur, les journaux livrent une analyse détaillée des élections municipales, perçues comme une préfiguration des législatives de 2026. À Zahleh, la victoire de la liste « Qalb Zahleh » soutenue par les Forces libanaises constitue un basculement politique notable. Al Akhbar (20 mai 2025) décrit un succès net pour la formation de Samir Geagea, qui s’impose avec plus de 14 300 voix contre 7 886 pour la liste adverse dirigée par l’ancien maire Assaad Zgheib.
Le journal met en évidence l’échec des tentatives de coalition menées par des figures influentes telles que Myriam Skaff, Michel Daher et César Maalouf, tous incapables de former une alliance durable. Selon Al Akhbar (20 mai 2025), le retrait du soutien du Courant patriotique libre a été décisif dans la défaite de Zgheib. Les divisions internes au sein du camp anti-Forces libanaises ont amplifié la dynamique de victoire pour la liste adverse.
À Beyrouth, les résultats sont plus contrastés. Ad-Diyar (20 mai 2025) note que la liste « Beyrouth Bithibak », appuyée par le tandem chiite, a empêché la liste « Beyrouth Bitajama’na », soutenue par les Forces libanaises et d’autres partis, de réaliser une percée décisive. Le général Mahmoud Jammal a ainsi été élu en battant le candidat chrétien orthodoxe soutenu par le métropolite Élias Aude. La répartition finale reste sensible : 13 musulmans pour 11 chrétiens, un équilibre présenté comme « fragile mais maintenu » selon Al Sharq (20 mai 2025).
L’évolution de la participation est également soulignée par Nida’ Al Watan (20 mai 2025), qui observe un net recul des forces issues de la société civile. Leur score à Beyrouth passe de 26 000 à 10 000 voix. À l’inverse, dans les zones druzes, leur audience reste stable, en dépit des victoires du Parti socialiste progressiste.
Interprétations politiques et perspectives
Ces élections, dans leur déroulement et leurs résultats, traduisent selon An-Nahar (20 mai 2025) une recomposition politique profonde. Le journal note un recul du Courant patriotique libre, une montée en puissance des Forces libanaises dans les bastions chrétiens, et une consolidation de l’axe chiite dans les régions à majorité chiite. Pour Al Joumhouriya (20 mai 2025), la victoire de Mahmoud Jammal marque la capacité du tandem Hezbollah-Amal à maintenir une influence forte même en l’absence du courant du Futur, retiré de la compétition électorale.
La dimension régionale de ces municipales n’est pas négligée. Ad-Diyar (20 mai 2025) insiste sur le fait que les résultats dans le Beka’a et à Beyrouth envoient des « messages politiques importants », notamment à l’égard des parrains régionaux et internationaux du Liban. L’écho donné à ces élections dans les chancelleries étrangères suggère une lecture géopolitique des rapports de force locaux.
Politique locale : recomposition des équilibres internes à travers les élections municipales et les postures partisanes
Les éditions libanaises du 20 mai 2025 révèlent une intense activité politique intérieure marquée par la tenue des élections municipales, l’effritement de certaines alliances traditionnelles et la reconfiguration des forces sur le terrain. Plusieurs journaux – notamment Al Akhbar, Ad-Diyar, An-Nahar, Al Joumhouriya et Al Sharq – reviennent en détail sur les résultats, les dynamiques communautaires et les stratégies partisanes déployées, en particulier à Zahleh, Beyrouth et dans la région du Beka’a.
Zahleh : victoire des Forces libanaises et implosion des alliances adverses
Dans la ville de Zahleh, la liste soutenue par les Forces libanaises, « Qalb Zahleh », a remporté une victoire électorale significative. Selon Al Akhbar (20 mai 2025), le candidat de cette formation, Salim Ghazaleh, a obtenu 14 341 voix, surpassant largement Assaad Zgheib, soutenu par une coalition hétérogène, qui a recueilli 7 886 voix. Ce résultat est interprété comme une démonstration de force des Forces libanaises, qui ont progressé de 3 000 voix par rapport aux élections législatives précédentes, dans un contexte marqué par la faiblesse organisationnelle de leurs adversaires.
Le même journal rapporte que la liste opposée comprenait une série d’acteurs politiques notables tels que Myriam Skaff, Michel Daher, César Maalouf, et l’ancien député Nicolas Fattouche. Ces figures, malgré leur notoriété locale, n’ont pas su fédérer un électorat cohérent, en grande partie à cause de leur incapacité à s’entendre sur une stratégie commune. Le retrait du soutien du Courant patriotique libre à cette coalition, en raison d’un désaccord avec Assaad Zgheib, a également pesé lourd dans la défaite.
Ad-Diyar (20 mai 2025) souligne que cette victoire consolide l’assise des Forces libanaises dans les bastions chrétiens et s’inscrit dans une logique de préparation stratégique aux législatives de 2026. La déroute de la coalition rivale est décrite comme une sanction contre les figures traditionnelles perçues comme responsables de l’échec du développement local.
Beyrouth : tensions autour de la représentation communautaire et percée du tandem chiite
Dans la capitale, les résultats municipaux ont mis en évidence un nouvel équilibre communautaire. La liste « Beyrouth Bithibak », appuyée par le tandem chiite, a réussi à sécuriser 13 sièges musulmans contre 11 sièges chrétiens. Selon Al Sharq (20 mai 2025), cette répartition, bien que techniquement conforme aux exigences de la parité confessionnelle, suscite des inquiétudes quant à la solidité de l’équilibre communautaire.
La liste « Beyrouth Bitajama’na », portée par les Forces libanaises et d’autres formations centristes, a échoué à réaliser une percée significative. La défaite symbolique de son candidat orthodoxe, Élie Andria, au profit du général Mahmoud Jammal, soutenu par le tandem chiite, a été particulièrement commentée. Al Liwa’ (20 mai 2025) rapporte que cette substitution pourrait avoir des répercussions sur la cohésion du conseil municipal, d’autant que le métropolite Élias Aude s’était impliqué personnellement dans la désignation de ce candidat.
Ad-Diyar (20 mai 2025) ajoute que les 19 000 voix obtenues par le tandem chiite à Beyrouth constituent une base électorale consolidée qui compense l’absence du Courant du Futur. Ce réalignement confirme l’émergence du tandem comme principal acteur dans la représentation sunnite, en particulier après le retrait de Saad Hariri de la vie politique active.
Beka’a et Baalbek-Hermel : affirmation du pouvoir chiite et effacement des rivaux
Dans la région du Beka’a et à Baalbek-Hermel, les résultats des municipales confirment la domination électorale du tandem Hezbollah-Amal. Ad-Diyar (20 mai 2025) rapporte que les listes soutenues par ce duo ont dépassé de plus de 6 400 voix leurs adversaires dans plusieurs localités stratégiques. La municipalité de Baalbek, en particulier, a été solidement reconquise.
Les résultats dans la municipalité de Ras Baalbek montrent toutefois une exception : la victoire du Courant patriotique libre, qui y a remporté une municipalité face aux Forces libanaises, selon les données publiées dans Al Akhbar (20 mai 2025). Ce résultat isolé ne remet cependant pas en cause la prédominance du tandem chiite, qui maintient une influence prépondérante dans l’ensemble de la région.
Les rédactions soulignent également que cette mainmise s’accompagne d’un repositionnement stratégique. Nida’ Al Watan (20 mai 2025) évoque une dynamique de transition dans laquelle le tandem chercherait à renforcer son ancrage institutionnel tout en affichant une image plus « civique », en particulier à travers des listes locales indépendantes sur le papier mais contrôlées en coulisse.
L’effondrement du vote protestataire et des indépendants
L’ensemble des journaux s’accorde à reconnaître le recul significatif des forces issues de la société civile. À Beyrouth, le nombre de voix obtenues par les listes indépendantes est passé de 26 000 en 2022 à seulement 10 000 en 2025, selon les chiffres rapportés par Ad-Diyar (20 mai 2025). Le journal y voit la conséquence d’un désenchantement croissant envers les promesses non tenues du changement post-2019.
An-Nahar (20 mai 2025) souligne que cette désaffection électorale n’est pas uniforme : dans les zones druzes, les forces protestataires conservent une certaine audience, bien que dominées par le Parti socialiste progressiste, qui a remporté la majorité des sièges. Cette résilience locale ne suffit toutefois pas à inverser la tendance générale au déclin.
Positionnement du Courant patriotique libre : marginalisation et absence stratégique
Le Courant patriotique libre semble avoir perdu de son influence électorale et stratégique. À Zahleh, son retrait explicite du soutien à Assaad Zgheib a été déterminant dans la victoire des Forces libanaises, selon Al Akhbar (20 mai 2025). À Beyrouth, le parti n’a pas activé sa machine électorale et a laissé ses sympathisants libres de leur vote, ce qui a contribué à son invisibilité dans le scrutin.
Les divergences internes, les conflits de leadership et les critiques sur l’absence de vision stratégique sont largement évoqués dans la presse. Al Liwa’ (20 mai 2025) rapporte les propos d’un cadre du parti évoquant un « recentrage sur les enjeux de gouvernance » avant 2026, ce qui pourrait être interprété comme un aveu d’échec organisationnel à court terme.
Diplomatie : affirmation égyptienne, repositionnement libanais et lignes de fracture régionales
Les journaux libanais du 20 mai 2025 accordent une place importante à la diplomatie régionale, en particulier dans le sillage de la visite officielle du président libanais Joseph Aoun au Caire. Cette rencontre bilatérale avec son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi cristallise les enjeux d’un repositionnement diplomatique libanais sur fond de guerre à Gaza, d’épreuves économiques persistantes et de fragilité institutionnelle. La tonalité des articles publiés par Al Joumhouriya, An-Nahar, Al Liwa’, Ad-Diyar et Al Sharq met en évidence une stratégie diplomatique articulée autour de la recherche de stabilité, de soutien économique et d’affirmation de souveraineté.
Une visite à fort contenu symbolique et politique
Selon Al Joumhouriya (20 mai 2025), la visite de Joseph Aoun au Caire s’inscrit dans un effort méthodique pour « réactiver les relations extérieures » du Liban. L’entretien entre Aoun et al-Sissi, tenu au palais présidentiel d’Al-Ittihadiya, a été qualifié de « chaleureux » et de « stratégique » par les sources diplomatiques citées dans le quotidien. Le président égyptien y a réaffirmé son attachement à la stabilité du Liban, tout en condamnant « sans ambiguïté les violations israéliennes de la souveraineté libanaise ».
Al Liwa’ (20 mai 2025) abonde dans ce sens, soulignant que cette rencontre « remet l’Égypte au centre de la diplomatie levantine », en insistant sur son rôle traditionnel de médiateur régional. Joseph Aoun, toujours selon ce journal, aurait plaidé pour un appui technique égyptien dans la relance des projets d’infrastructure, notamment dans les secteurs de l’énergie et de la reconstruction urbaine.
Ad-Diyar (20 mai 2025) note que cette visite s’est accompagnée d’une série de discussions techniques entre les délégations ministérielles des deux pays. Des dossiers concrets ont été abordés : réhabilitation du réseau électrique libanais, projets conjoints d’assainissement des eaux usées, et facilitation des échanges commerciaux agricoles. Le journal insiste sur la volonté de Beyrouth de « traduire la coopération arabe en plans d’action tangibles ».
Gaza comme catalyseur du dialogue stratégique
La question palestinienne, et plus particulièrement la guerre en cours à Gaza, a constitué un fil conducteur des discussions bilatérales. Al Sharq (20 mai 2025) indique que le président Aoun a salué le rôle de l’Égypte dans la médiation entre Israël et les factions palestiniennes. Il aurait également affirmé que « la paix régionale passe par une solution politique juste à la question palestinienne », en référence implicite à la reprise de négociations de paix sous l’égide arabe.
Dans son compte rendu, An-Nahar (20 mai 2025) précise que les deux chefs d’État ont exprimé une convergence totale de vues sur la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat à Gaza. Joseph Aoun aurait qualifié la situation humanitaire dans l’enclave de « catastrophe aux dimensions régionales », appelant à une « mobilisation internationale et arabe pour l’acheminement de l’aide ».
Selon les analyses d’Al Joumhouriya (20 mai 2025), cette position vise à repositionner le Liban comme acteur diplomatique équilibré, capable de tenir une ligne modérée en temps de crise. Il ne s’agit pas uniquement d’un geste humanitaire, mais d’un levier pour réintégrer les circuits de décision régionaux dont le Liban avait été partiellement exclu ces dernières années.
Redéploiement stratégique dans un Proche-Orient fragmenté
L’ensemble des sources évoque une tentative concertée de la présidence libanaise pour « réhabiliter le statut diplomatique du Liban », selon les termes d’Ad-Diyar (20 mai 2025). Ce redéploiement s’inscrit dans un contexte régional où l’Égypte cherche elle-même à réaffirmer son influence face aux pôles concurrentiels que représentent la Turquie, l’Iran et les monarchies du Golfe.
Al Sharq (20 mai 2025) met en lumière la volonté commune de Beyrouth et du Caire de renforcer la « voie arabe », en opposition aux dynamiques de fragmentation régionale. Ce journal note que le soutien explicite du président Aoun à la feuille de route égyptienne sur la sécurité collective en Méditerranée orientale constitue un signal diplomatique fort.
Le journal Al Liwa’ (20 mai 2025) insiste sur le fait que l’Égypte voit dans le Liban un partenaire stratégique pour maintenir une interface ouverte entre le Machrek et les grandes puissances arabes. La rhétorique du président al-Sissi, lors de la conférence de presse conjointe, est particulièrement révélatrice : « Nous soutenons sans réserve l’application intégrale de la résolution 1701 du Conseil de sécurité et le retrait d’Israël de tous les territoires libanais occupés. »
Impacts internes et résonances politiques
Le déplacement présidentiel a également suscité des échos politiques à l’intérieur du pays. Al Joumhouriya (20 mai 2025) rapporte que plusieurs formations politiques ont salué l’initiative de Joseph Aoun, considérant qu’elle redonne un souffle à la diplomatie présidentielle, longtemps atone sous ses prédécesseurs. Le positionnement équilibré adopté par Aoun, évitant les provocations tout en défendant les intérêts libanais, est perçu comme un facteur de cohésion nationale dans un paysage profondément fragmenté.
Pour autant, Ad-Diyar (20 mai 2025) nuance cette appréciation en rappelant que le président n’a pas abordé publiquement les dossiers sensibles tels que les armes du Hezbollah ou l’application du principe de neutralité. Le quotidien estime que cette prudence, bien que diplomatiquement habile, pourrait alimenter des tensions avec les partis qui réclament une clarification sur ces sujets.
An-Nahar (20 mai 2025), quant à lui, souligne que l’accent mis par Aoun sur la reconstruction, la relance de l’économie et la stabilité institutionnelle constitue une tentative de repositionner la présidence comme acteur central dans la gestion des crises. Le journal insiste cependant sur l’importance de traduire ces déclarations en actes concrets.
Un levier diplomatique à géométrie variable
Au-delà de la relation bilatérale, les journaux s’interrogent sur la capacité du Liban à capitaliser sur cet élan diplomatique. Al Liwa’ (20 mai 2025) prévient que sans soutien parlementaire et sans coalition gouvernementale solide, les engagements pris au Caire risquent de rester lettre morte. La faiblesse institutionnelle du pays pourrait entraver la mise en œuvre des accords évoqués.
De son côté, Al Sharq (20 mai 2025) note que l’activation de la « commission bilatérale libano-égyptienne », annoncée à l’issue de la visite, pourrait permettre de sortir du formalisme diplomatique habituel. Cette commission serait chargée de suivre les projets conjoints dans les domaines de l’énergie, de la santé, de l’éducation et de la sécurité alimentaire.
Politique internationale : conflit israélo-palestinien, repositionnements stratégiques et diplomatie fragmentée
Le traitement de l’actualité internationale dans les éditions libanaises du 20 mai 2025 se concentre presque exclusivement sur les développements du conflit israélo-palestinien et ses répercussions géopolitiques mondiales. Les journaux Al Bina’, Ad-Diyar, Al Sharq, Al Joumhouriya et An-Nahar analysent les dynamiques militaires à Gaza, les tensions croissantes au sein du système international et les repositionnements d’États majeurs comme les États-Unis, la Russie, l’Iran et le Yémen. Cette séquence internationale est présentée comme un tournant structurel dans les rapports de force régionaux.
L’escalade à Gaza : une guerre totale à forte résonance régionale
Le conflit en cours entre Israël et les groupes armés palestiniens dans la bande de Gaza occupe une place centrale. Al Bina’ (20 mai 2025) rapporte une série d’opérations militaires israéliennes terrestres ayant échoué, notamment dans la zone de Khan Younès. Une tentative d’enlèvement d’un cadre de la résistance a été contrecarrée au prix de pertes humaines côté israélien. Le journal évoque une « opération avortée » comme preuve de la résilience tactique des factions palestiniennes.
Al Bina’ indique également que les Forces de la résistance ont accru leurs capacités offensives. Des sources proches des factions palestiniennes citées par le journal affirment avoir infligé des pertes significatives aux troupes israéliennes à travers des embuscades et des attaques ciblées. Ces opérations, combinées à une intensification des frappes aériennes israéliennes, ont conduit à une dévastation croissante dans la bande de Gaza.
Selon Ad-Diyar (20 mai 2025), l’impact humanitaire est catastrophique. En se basant sur des données onusiennes, le journal indique que 92 % des logements à Gaza sont soit détruits, soit inhabitables. Plus de 436 000 unités d’habitation ont été affectées, alors que les services essentiels — collecte des déchets, évacuation des corps, assistance médicale — sont paralysés. La même source mentionne que les ONG alertent sur une crise sanitaire imminente en raison des dizaines de millions de tonnes de débris non évacués.
L’implication du Yémen et l’élargissement du front anti-israélien
Une évolution notable mentionnée par Al Bina’ (20 mai 2025) concerne l’entrée du Yémen dans le conflit par le biais de tirs de missiles et de drones visant des infrastructures israéliennes. Le port de Haïfa a été ajouté à la liste des cibles, aux côtés de celui d’Eilat et de l’aéroport Ben Gourion. Le journal présente cette extension du conflit comme une tentative délibérée de la part des Houthis de créer un front régional autour de la question palestinienne.
Ce développement inquiète plusieurs chancelleries internationales. Al Sharq (20 mai 2025) souligne que la réponse militaire israélienne pourrait s’intensifier si les menaces provenant du Yémen devaient se concrétiser davantage. Le quotidien rapporte que Tel Aviv envisage un élargissement de ses opérations à des cibles en dehors de Gaza si la pression militaire continue de s’exercer depuis plusieurs fronts.
Cette régionalisation du conflit constitue une rupture par rapport aux affrontements antérieurs. An-Nahar (20 mai 2025) rappelle que l’un des enjeux majeurs réside désormais dans la capacité d’Israël à contenir le conflit sans ouvrir plusieurs fronts simultanément, une configuration que ses forces armées redoutent historiquement.
La diplomatie internationale : appels au cessez-le-feu et repositionnements politiques
Le conflit a généré des réactions diplomatiques variées. Ad-Diyar (20 mai 2025) rapporte que l’Union européenne a lancé pour la première fois un avertissement à Israël concernant le respect des accords de partenariat. Des discussions sont en cours au sein de la Commission européenne pour conditionner les aides et les coopérations futures à des engagements concrets en matière de droit humanitaire.
Aux États-Unis, la posture officielle demeure celle du soutien à Israël, mais plusieurs journaux — notamment Al Bina’ (20 mai 2025) — relaient des signaux de plus en plus ambigus en provenance de Washington. Des tensions internes seraient perceptibles au sein de l’administration Trump, où une frange plus réaliste appelle à une désescalade rapide, face à la pression de l’opinion publique et de certains alliés démocrates.
Un appel conjoint à un cessez-le-feu a été lancé par plusieurs ONG et par des parlementaires progressistes américains, relayé notamment dans Al Sharq (20 mai 2025). Le journal rapporte également que des manifestations se sont tenues dans plusieurs capitales européennes pour dénoncer les frappes israéliennes et appeler à une levée immédiate du blocus sur Gaza.
Un axe Moscou-Téhéran en consolidation
Al Bina’ (20 mai 2025) signale également un rapprochement diplomatique entre la Russie et l’Iran, perçu comme une réaction stratégique à la posture américaine au Proche-Orient. Une coordination renforcée serait en cours sur les questions de Gaza, mais aussi sur les dossiers syriens et nucléaires. La même source mentionne un entretien téléphonique entre Donald Trump et Vladimir Poutine, consacré à la stabilisation régionale.
Selon les analyses publiées dans le même journal, la Russie cherche à renforcer son image de médiateur global capable de dialoguer avec toutes les parties. Elle mise sur une diplomatie d’équilibre dans un contexte d’affaiblissement relatif de l’influence américaine.
Du côté de l’Iran, les objectifs sont davantage orientés vers le renforcement du « croissant chiite », avec le soutien actif aux factions armées de Gaza. Al Bina’ (20 mai 2025) indique que des envois d’armes et d’équipements auraient été facilités à travers des canaux non étatiques opérant depuis le sud de l’Irak et la Syrie.
Une crise de légitimité du système multilatéral
An-Nahar (20 mai 2025) s’inquiète de la paralysie des institutions internationales. Le journal déplore le manque de réactions fermes de la part du Conseil de sécurité des Nations unies, qui n’a pas pu adopter de résolution contraignante depuis le début de la crise. Le rôle de la Croix-Rouge et des agences onusiennes sur le terrain est également présenté comme marginalisé, faute d’accès humanitaire garanti.
Ad-Diyar (20 mai 2025) va plus loin en qualifiant la situation actuelle de « basculement du droit international », évoquant une « défaillance structurelle du système onusien ». Le journal cite des diplomates anonymes affirmant que « les règles du jeu sont en train de changer » au profit d’une logique de rapport de force.
Économie : incertitudes structurelles, dépendance financière et pistes de relance inégalement structurées
La presse libanaise du 20 mai 2025 — notamment Ad-Diyar, Al Sharq, Al Liwa’, Al Akhbar et An-Nahar — met en lumière un paysage économique marqué par l’instabilité, les réformes inachevées, les tensions liées à la gestion des dépôts bancaires et une incertitude persistante quant aux leviers de redressement. Plusieurs articles font état de mesures ponctuelles, d’initiatives gouvernementales isolées et de négociations non finalisées. En dépit de certaines annonces optimistes, le sentiment général reste dominé par le doute sur la capacité de l’État à restaurer la confiance et à relancer l’économie réelle.
Gestion des dépôts bancaires : défi de la transparence et opposition sociale croissante
Un sujet revient avec insistance dans plusieurs titres : la question de la gestion des dépôts des épargnants et les responsabilités de la Banque centrale. Al Sharq (20 mai 2025) publie une tribune signée par Chawki Abou Chdid qui s’insurge contre la présentation erronée des pertes bancaires comme une « fuite comptable ». Il soutient que les sommes déposées par les épargnants ont été prêtées à l’État et doivent donc être considérées comme une dette publique contractuelle et non comme une perte privée.
Cette prise de position rejoint d’autres éditoriaux exprimant une exaspération croissante face à l’inaction du gouvernement. Al Liwa’ (20 mai 2025) dénonce l’absence de mécanismes clairs de remboursement, l’opacité des mesures transitoires et le flou entretenu autour du « bail-in » envisagé par certaines autorités. Le journal rappelle que cette stratégie consiste à faire supporter aux déposants les pertes bancaires au lieu de les mutualiser par l’État, ce qui pourrait accentuer la fracture sociale.
Al Akhbar (20 mai 2025) évoque un éventuel ajustement à venir des plafonds de retrait mensuels, une mesure qui serait à l’étude au sein du ministère des Finances sous la pression du gouverneur par intérim. L’objectif serait d’assouplir progressivement les restrictions sans déclencher un mouvement massif de retraits. Toutefois, selon des sources internes citées par le journal, cette approche reste « politiquement risquée » tant que le plan de restructuration bancaire n’est pas ratifié par le Parlement.
Budget et réformes : flou politique et pressions internationales
La question budgétaire reste également au cœur des préoccupations. Ad-Diyar (20 mai 2025) signale que le gouvernement travaille toujours à finaliser un projet de loi de finances pour 2025, alors que l’exercice en cours est déjà largement entamé. Le journal rappelle que le Fonds monétaire international continue de conditionner toute aide future à une série de réformes structurelles, dont l’unification des taux de change, la réforme de l’administration publique et le redéploiement des subventions.
Or, aucune de ces mesures ne semble progresser de manière tangible. Al Liwa’ (20 mai 2025) note que le ministère des Finances reste paralysé par des tensions entre technocrates et représentants politiques, chacun craignant de porter le poids des décisions impopulaires. Le journal évoque également les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre du recensement fiscal électronique, censé accroître les recettes sans augmenter la pression fiscale sur les plus vulnérables.
Al Sharq (20 mai 2025) se montre plus critique encore, qualifiant les efforts de réforme d’ »écran de fumée » destiné à apaiser les bailleurs internationaux sans volonté réelle de mise en œuvre. Le journal pointe du doigt l’absence de suivi sur les audits des institutions publiques, les retards dans la restructuration de la dette et l’inexistence d’un plan de relance macroéconomique coordonné.
Secteurs productifs : blocages chroniques et dépendance à l’importation
Sur le plan sectoriel, l’analyse de la situation reste pessimiste. Al Akhbar (20 mai 2025) dresse un constat sévère du déséquilibre commercial persistant. L’économie libanaise reste massivement tournée vers l’importation, avec une faible capacité de production locale, y compris dans des secteurs stratégiques comme l’agroalimentaire ou les matériaux de construction.
An-Nahar (20 mai 2025) consacre un article à la faiblesse de l’investissement privé. Malgré une libéralisation apparente de certains circuits, l’insécurité juridique et le manque de garanties freinent l’engagement des entreprises nationales et étrangères. Plusieurs projets de zones franches et de partenariats public-privé restent à l’arrêt faute d’arbitrages politiques.
Le journal rappelle que l’infrastructure économique libanaise — réseaux routiers, système énergétique, ports — demeure dans un état critique. Il note également que les coupures de courant paralysent toujours l’industrie légère, en dépit de l’importation de générateurs supplémentaires financés par des aides extérieures. La crise énergétique reste ainsi l’un des principaux obstacles à la reprise.
Dialogue social et chômage : absence de pilotage politique
Les conséquences sociales de cette crise économique sont rapportées de manière récurrente. Ad-Diyar (20 mai 2025) indique que le taux de chômage avoisinerait les 30 % selon des estimations non officielles, en l’absence de statistiques actualisées de la part du ministère du Travail. Le secteur informel représente une part croissante de l’économie réelle, notamment dans les régions rurales, où les transferts de la diaspora constituent la principale source de revenus.
An-Nahar (20 mai 2025) rapporte que plusieurs syndicats ont déposé des préavis de grève dans le secteur public, en particulier dans l’éducation et la santé, protestant contre la stagnation des salaires et l’absence de mécanismes d’indexation. Le journal souligne que le gouvernement reste sourd à ces revendications, préférant des mesures ponctuelles d’ajustement (comme les primes en dollars) à une réforme globale du statut de la fonction publique.
Al Liwa’ (20 mai 2025) met en lumière les conséquences de cette gestion fragmentée : perte de confiance dans les institutions, montée de la colère populaire, et risque de résurgence de mouvements de contestation semblables à ceux de 2019.
Initiatives de relance partielle : exemples isolés
En dépit de ce climat général, quelques initiatives de relance ont été signalées. Al Sharq (20 mai 2025) mentionne un projet de rénovation du port de Beyrouth, mené en partenariat avec un consortium européen. Ce projet viserait à moderniser les installations logistiques, à condition que les litiges fonciers soient tranchés.
An-Nahar (20 mai 2025) rapporte également un projet pilote de microcrédit dans la région du Akkar, financé par une fondation allemande. L’objectif est de soutenir les petites exploitations agricoles par des prêts à taux réduits, accompagnés de formations à la gestion. Bien que saluée par les acteurs locaux, cette initiative reste marginale face à l’ampleur des besoins.
Justice : pressions politiques, lenteurs judiciaires et dossiers sensibles en suspens
Les publications libanaises du 20 mai 2025 – en particulier Al Akhbar, An-Nahar, Al Joumhouriya et Ad-Diyar – accordent une place secondaire mais significative à la question judiciaire, en se focalisant sur des dossiers emblématiques de corruption, de sanctions internationales, de conflits de compétence et d’entraves institutionnelles. Cette couverture laisse entrevoir une justice fragilisée par les interférences politiques, le manque de moyens et une polarisation croissante autour de certains juges.
Sanctions internationales et controverses autour du Hezbollah
Un des sujets marquants concerne la réaction du Liban à des sanctions étrangères visant des membres du Hezbollah. An-Nahar (20 mai 2025) évoque l’inscription récente par le département du Trésor américain d’un député chiite sur la liste des entités suspectées de financement d’activités illicites. Selon le journal, ces sanctions auraient été relayées dans les milieux diplomatiques européens et alimenteraient des tensions entre Beyrouth et Washington.
Al Akhbar (20 mai 2025) critique la stratégie américaine, y voyant une tentative de délégitimation du Parlement libanais par l’extérieur. Le journal dénonce un « chantage judiciaire déguisé » et affirme que de telles mesures ne reposent sur aucun fondement légal selon le droit libanais. Cette posture est interprétée par certains analystes comme un symptôme des relations diplomatiques dégradées entre le Liban et certains partenaires occidentaux.
Ad-Diyar (20 mai 2025) adopte une lecture différente. Le journal considère que l’absence de réaction formelle du gouvernement libanais témoigne d’un « gêne institutionnel » et d’une volonté d’éviter une escalade. Il signale cependant que des consultations informelles ont eu lieu entre le ministère de la Justice et le ministère des Affaires étrangères pour évaluer les suites à donner, notamment en matière de coopération judiciaire.
Affaires de corruption et blocages procéduraux
Le traitement des affaires de corruption fait également l’objet de plusieurs articles, bien que les noms des dossiers varient selon les titres. Al Joumhouriya (20 mai 2025) fait état de l’enlisement d’une instruction concernant des détournements de fonds dans une entreprise publique d’électricité. L’affaire, initialement ouverte en 2023, impliquerait plusieurs responsables administratifs et aurait été freinée par des recours multiples et des désistements de témoins.
Le journal rapporte que le juge d’instruction chargé du dossier aurait été l’objet de pressions, ce qui a conduit à une demande de protection formulée auprès du Conseil supérieur de la magistrature. Aucune réponse officielle n’a encore été communiquée, et l’enquête semble au point mort. Le journal insiste sur la difficulté à faire progresser des affaires impliquant des figures proches de partis politiques puissants.
De son côté, An-Nahar (20 mai 2025) mentionne une affaire distincte portant sur la surfacturation de travaux publics dans la région du Chouf. Le dossier, qui remonte à 2019, a été réactivé récemment à la suite de nouvelles révélations apportées par un audit indépendant. Le journal s’interroge sur les raisons pour lesquelles les procureurs concernés n’ont pas encore procédé à des inculpations, alors que les preuves documentaires sont jugées « suffisamment solides » par les experts.
Tensions au sein du pouvoir judiciaire
Plusieurs journaux évoquent un climat de malaise au sein de l’appareil judiciaire. Ad-Diyar (20 mai 2025) fait état de dissensions internes au Conseil supérieur de la magistrature autour des nominations récentes de juges, en particulier dans le pôle financier. Ces tensions seraient exacerbées par des divergences sur les profils jugés « trop politisés » ou « trop indépendants », selon les courants représentés au sein du Conseil.
Al Akhbar (20 mai 2025) va plus loin en évoquant une « stratégie d’assèchement des marges judiciaires » par les responsables politiques, visant à neutraliser les juges perçus comme hostiles à certains clans. Le journal évoque en particulier des pressions exercées sur un juge de la Bekaa ayant ouvert un dossier de confiscation foncière illégale par un promoteur proche d’un ancien ministre.
Dans le même esprit, An-Nahar (20 mai 2025) publie une tribune appelant à « restaurer l’autonomie fonctionnelle de la justice » et à garantir l’indépendance des enquêtes. L’auteur y dénonce la multiplication des injonctions informelles, la récurrence des obstructions procédurales et la faiblesse des garanties accordées aux magistrats dans l’exercice de leurs fonctions.
Lenteurs et surcharge : les symptômes structurels d’une justice asphyxiée
Le thème de la lenteur judiciaire est abondamment traité dans Al Joumhouriya (20 mai 2025), qui consacre un article à la situation des tribunaux civils à Beyrouth. Le journal rapporte que plusieurs dossiers civils restent pendants depuis plus de cinq ans, notamment en matière de succession et de droit foncier. Les retards seraient liés à un sous-effectif chronique, à une infrastructure obsolète et à des procédures administratives mal numérisées.
Ad-Diyar (20 mai 2025) souligne que le nombre de juges en exercice reste largement en-deçà des besoins, surtout dans les juridictions du Nord et de la Békaa. Le journal indique qu’un plan de recrutement avait été proposé en 2022, mais que sa mise en œuvre a été suspendue faute de financement et en raison des objections d’un groupe parlementaire invoquant des motifs budgétaires.
Cette situation contribue à l’érosion de la confiance des justiciables dans les institutions. An-Nahar (20 mai 2025) note que les recours à la médiation informelle et à l’arbitrage privé sont en augmentation, en particulier dans les litiges commerciaux. Cette tendance pourrait, à terme, affaiblir encore davantage l’autorité du pouvoir judiciaire.
Société : recompositions communautaires, fatigue sociale et fractures territoriales après les municipales
La couverture sociétale des journaux libanais du 20 mai 2025 — en particulier dans Al Akhbar, Ad-Diyar, Al Liwa’, Al Sharq et An-Nahar — fait largement écho aux élections municipales qui viennent de se dérouler, en tant que révélateur de dynamiques sociales, communautaires et identitaires. Les articles mettent en lumière les tensions locales, l’évolution de l’engagement citoyen, la démobilisation des mouvements de la société civile et la persistance des clivages territoriaux, tout en abordant de manière secondaire certaines problématiques structurelles comme l’accès aux services publics, les inégalités d’aménagement et la précarité croissante.
Participation électorale : entre résignation et clientélisme
Plusieurs titres soulignent la faible mobilisation électorale dans de nombreuses régions. An-Nahar (20 mai 2025) rapporte que, malgré un cadre légal rénové, la participation s’est effondrée par rapport aux élections précédentes, notamment dans les grandes villes. À Beyrouth, seules 28 % des personnes inscrites se sont rendues aux urnes, contre plus de 40 % en 2016. Cette abstention est interprétée par le journal comme un « reflet de la désillusion » face aux promesses non tenues de 2019.
Al Sharq (20 mai 2025) s’attarde sur les témoignages de plusieurs électeurs beyrouthins qui disent ne plus croire en l’efficacité du vote, en raison de la reconduction quasi mécanique des listes partisanes. Le journal souligne également la réapparition de pratiques clientélistes dans certains quartiers, où des bons alimentaires et des aides médicales ont été distribués dans les jours précédant le scrutin.
Dans les régions périphériques, la situation est contrastée. Ad-Diyar (20 mai 2025) observe que la participation reste élevée dans les zones rurales du Sud et de la Békaa, où l’adhésion communautaire et l’appartenance tribale jouent un rôle décisif. Le journal mentionne que certaines municipalités ont vu leur taux de participation dépasser les 60 %, notamment dans les villages à majorité chiite ou druze. Cette disparité est interprétée comme un signe de la résilience des structures communautaires traditionnelles.
Déclin de la société civile et recomposition des mouvements contestataires
Le recul des forces issues de la société civile est l’un des éléments les plus commentés. Al Akhbar (20 mai 2025) constate que les listes indépendantes, portées par les réseaux nés du soulèvement de 2019, ont enregistré des scores marginaux, sauf dans certains quartiers de la montagne. À Beyrouth, leur nombre de voix est passé de 26 000 à moins de 10 000 en trois ans, signe d’une désaffection massive.
Al Liwa’ (20 mai 2025) analyse cette chute comme une conséquence de la dispersion des candidatures et de l’incapacité à construire une vision commune. Le journal rappelle que plusieurs groupes de la société civile s’étaient déjà désolidarisés lors des législatives de 2022, et que les divergences idéologiques et stratégiques persistent. Cette fragmentation interne, combinée à l’offensive narrative des partis traditionnels accusant ces mouvements de « favoriser l’anarchie », aurait achevé de détourner les électeurs.
An-Nahar (20 mai 2025) publie le témoignage d’une militante qui explique avoir quitté son collectif après avoir « perdu foi dans la possibilité de changement pacifique ». Cette fatigue militante est partagée par de nombreux anciens activistes, qui dénoncent l’instrumentalisation de leurs revendications par des acteurs politiques.
Identité communautaire et nouvelles géographies électorales
Les élections municipales ont également mis en lumière la forte polarisation communautaire. Ad-Diyar (20 mai 2025) décrit comment certaines localités ont vu s’affronter des listes explicitement confessionnelles, parfois soutenues par des autorités religieuses locales. À Tripoli, des tensions ont éclaté dans plusieurs bureaux de vote autour de la répartition des sièges entre courants sunnites concurrents. À Zahlé, la rivalité entre listes chrétiennes, notamment celles portées par les Forces libanaises et le Courant patriotique libre, a renforcé une segmentation du vote selon les quartiers.
Dans le même registre, Al Akhbar (20 mai 2025) met en évidence la consolidation du tandem chiite dans les zones où l’opposition politique est absente ou marginale. Le journal note que dans de nombreuses municipalités du Sud et de la Békaa, les élections se sont déroulées sans réelle compétition, les listes soutenues par le Hezbollah et Amal ayant obtenu la majorité sans contestation.
Cette homogénéisation politique est analysée comme un symptôme d’ »autonomie communautaire renforcée », avec un risque de voir émerger des entités locales fonctionnant en dehors des institutions centrales. An-Nahar (20 mai 2025) évoque le risque d’ »archipélisation du Liban » où chaque région développerait ses propres normes de gouvernance.
Services publics, précarité et insécurité sociale
Plusieurs articles font état de l’effondrement des services publics, en particulier dans les domaines de la santé, de l’eau potable et de l’électricité. Al Liwa’ (20 mai 2025) publie une enquête sur la situation dans plusieurs quartiers de la banlieue sud de Beyrouth, où les coupures de courant atteignent jusqu’à 20 heures par jour. Les générateurs privés, devenus indispensables, imposent des tarifs prohibitifs aux habitants, dont beaucoup vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Ad-Diyar (20 mai 2025) souligne que la situation est encore plus critique dans les régions du Akkar et de Hermel, où l’absence d’infrastructure oblige les habitants à s’approvisionner en eau à l’aide de camions-citernes. Cette précarité a conduit à une recrudescence des maladies hydriques, sans que les autorités sanitaires locales ne disposent de moyens suffisants pour répondre.
Dans le secteur éducatif, An-Nahar (20 mai 2025) rapporte que plusieurs écoles publiques de la Békaa ont fermé temporairement faute de professeurs, dont beaucoup n’ont pas perçu leurs salaires depuis plusieurs mois. Des associations locales tentent de maintenir un service minimal, mais les décrochages scolaires se multiplient.
Urbanisation inégalitaire et déséquilibres territoriaux
L’urbanisation désordonnée fait aussi l’objet d’analyses critiques. Al Sharq (20 mai 2025) revient sur les effets de la densification dans certaines zones périurbaines, notamment à Jdeideh, Jal el-Dib et Bourj Hammoud, où la pression foncière et la spéculation immobilière ont provoqué une hausse des loyers de plus de 40 % en un an. Le journal rapporte que des familles entières ont été contraintes de quitter leur logement faute de pouvoir payer leurs loyers.
Al Akhbar (20 mai 2025) évoque le développement anarchique des nouvelles constructions, en l’absence de planification urbaine cohérente. Le journal cite plusieurs experts en urbanisme qui alertent sur le risque d’un « effondrement systémique » des infrastructures urbaines si aucune régulation n’est mise en place. Le phénomène des bâtiments illégaux, souvent érigés sans permis dans des zones à risque, est en pleine expansion.
Culture : initiatives littéraires, hommages éditoriaux et événements discrets dans un paysage en recomposition
Le traitement de l’actualité culturelle dans la presse libanaise du 20 mai 2025 — en particulier dans Al Sharq, Al Liwa’, Nida’ Al Watan et Ad-Diyar — se caractérise par une couverture parcellaire mais significative d’initiatives éditoriales, d’hommages rendus à des figures de l’édition et d’événements littéraires localisés. Ces articles, bien que peu nombreux, traduisent une vitalité persistante dans certains cercles intellectuels, malgré les difficultés économiques et le désintérêt des autorités publiques.
Le monde de l’édition en deuil : disparition d’une pionnière
L’événement le plus largement relayé est le décès de Samira Assi, figure historique de l’édition libanaise. Dans Al Sharq (20 mai 2025), un long hommage signé par Aouni Kaaki revient sur le parcours de celle qui a dirigé pendant plusieurs décennies une des principales maisons d’édition du pays. Le texte retrace la trajectoire de cette femme qui, après la mort de son père, avait repris les rênes de l’entreprise familiale dans un contexte de guerre civile.
Selon le journal, Samira Assi a non seulement développé le rayonnement régional de sa maison d’édition, mais elle a également ouvert le marché du livre libanais aux autres pays arabes. Présidente de l’Union des éditeurs libanais pendant plusieurs mandats, elle est créditée de plusieurs réformes importantes visant à améliorer les droits des auteurs et la visibilité du livre libanais dans les foires internationales.
Ad-Diyar (20 mai 2025) salue aussi son engagement pour la promotion de la lecture dans les écoles publiques, à travers des campagnes de dons d’ouvrages et des partenariats avec des bibliothèques municipales. Le décès de cette figure, selon le journal, marque « la fin d’une époque » où les éditeurs étaient aussi des acteurs civiques.
Signatures littéraires et agenda éditorial local
Quelques événements littéraires sont signalés dans les pages culturelles, bien que leur couverture reste modeste. Al Liwa’ (20 mai 2025) mentionne une séance de signature organisée dans une librairie de Verdun à l’occasion de la sortie du recueil de nouvelles d’un auteur émergent. Le journal insiste sur le fait que, malgré la crise économique, certaines maisons continuent de publier et de promouvoir des œuvres d’auteurs locaux, parfois en autoédition ou avec des tirages très réduits.
Nida’ Al Watan (20 mai 2025) signale la tenue discrète d’un débat autour du roman libanais contemporain dans un café littéraire de Badaro, avec la participation d’enseignants universitaires. Les échanges ont porté sur la manière dont la fiction libanaise s’empare de la question de l’effondrement de l’État et des crises identitaires. Ce type d’événement, organisé sans soutien public, témoigne selon le journal de la « capacité de résistance symbolique de la culture dans un pays en crise ».
Ad-Diyar (20 mai 2025) évoque également la reprise progressive de certaines activités culturelles dans le Chouf, notamment des ateliers d’écriture et des lectures publiques animées par des bénévoles. Le journal note que ces initiatives, souvent pilotées par des jeunes enseignants ou des écrivains en herbe, ne bénéficient d’aucun relais médiatique mais attirent un public fidèle.
Art visuel et musique : mentions marginales
Les arts visuels et la musique sont peu abordés dans les éditions du jour. Seule Al Liwa’ (20 mai 2025) fait mention d’une exposition en cours dans une galerie de Gemmayzeh consacrée à la photographie documentaire. Les œuvres présentées retracent la vie quotidienne dans les quartiers de Beyrouth entre 2020 et 2023, à travers le prisme de l’effondrement urbain. L’exposition, intitulée provisoirement « Éclats de ruines », rassemble des clichés de photographes indépendants libanais, sans soutien institutionnel.
Du côté musical, aucune annonce notable n’est relayée pour cette date. Les concerts sont rares, les festivals suspendus faute de financements. Toutefois, Nida’ Al Watan (20 mai 2025) publie un bref encart sur la diffusion prochaine d’un concert d’archives sur une chaîne culturelle privée, consacré à un enregistrement de Marcel Khalifé au théâtre al-Madina. Ce retour à des formats patrimoniaux illustre, selon le journal, la difficulté des programmations contemporaines.
Institutions culturelles en retrait et absence de politique publique
L’absence des ministères de tutelle est un leitmotiv dans plusieurs articles. Ad-Diyar (20 mai 2025) déplore le vide institutionnel dans la gestion des équipements culturels. Plusieurs maisons de la culture sont fermées ou inaccessibles, soit pour des raisons budgétaires, soit en raison de litiges fonciers non résolus. Le journal cite l’exemple d’un centre culturel à Zahlé dont les travaux de rénovation ont été interrompus après un désaccord avec la municipalité.
An-Nahar (20 mai 2025) souligne que les artistes et les associations culturelles se retrouvent dans une situation de « précarité extrême ». Faute de subventions, nombre de projets sont annulés. Les démarches administratives pour obtenir des autorisations d’événements sont perçues comme dissuasives, du fait de leur lenteur et du manque de transparence.
Le journal critique également l’absence de plan culturel national. Alors que certains pays voisins, comme la Jordanie ou le Qatar, ont mis en place des politiques de soutien aux industries culturelles dans le cadre de leur développement économique, le Liban reste selon An-Nahar « figé dans un modèle obsolète, fondé sur l’initiative privée et les réseaux personnels ».