mercredi, avril 30, 2025

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Trump, inflation, taux : Powell navigue dans l’incertitude

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Le 19 mars 2025, Jerome Powell, président de la Réserve fédérale des États-Unis (Fed), s’est exprimé lors d’une conférence de presse à la suite de la réunion du Federal Open Market Committee (FOMC). Ses déclarations sur la croissance économique, l’inflation et les taux d’intérêt ont capté l’attention des marchés mondiaux, des investisseurs et des décideurs politiques, dans un contexte marqué par une incertitude accrue sous l’administration Trump, réélue en janvier. En ce 20 mars 2025, alors que les échos de ce discours résonnent encore, ses propos offrent un aperçu des orientations monétaires américaines et de leurs répercussions potentielles, notamment sur les économies émergentes. Que dit Powell sur l’état de l’économie ? Et comment ses prévisions influencent-elles les dynamiques globales ?

Une économie solide, mais sous pression

Powell a ouvert son intervention en soulignant la résilience de l’économie américaine. « L’économie est forte », a-t-il affirmé, mettant en avant un marché du travail équilibré, avec un taux de chômage stable autour de 4,1 %. Cette stabilité, maintenue malgré les turbulences mondiales, reflète une croissance soutenue par une consommation robuste et une productivité en hausse. Cependant, le FOMC a révisé à la baisse ses prévisions de croissance pour 2025, passant de 2,1 % à 1,7 %, un ajustement qui trahit des inquiétudes sur les vents contraires à venir. Cette décélération attendue s’accompagne d’une légère hausse du chômage projetée d’ici la fin de l’année, signe que l’économie pourrait ralentir sous l’effet de politiques commerciales et fiscales incertaines.

Le président de la Fed a reconnu que « l’incertitude est inhabituellement élevée » en raison des récentes initiatives de l’administration Trump, notamment des propositions de tarifs douaniers massifs sur les importations. Ces mesures, si mises en œuvre, pourraient perturber les chaînes d’approvisionnement et peser sur la croissance, tout en compliquant les prévisions économiques. Powell a toutefois refusé de spéculer sur leur ampleur exacte, déclarant : « Il sera difficile de savoir quelle sera l’ampleur de l’inflation due aux tarifs douaniers. » Cette prudence reflète une volonté de ne pas anticiper des scénarios hypothétiques, mais elle souligne aussi les limites actuelles de la Fed face à des facteurs exogènes imprévisibles.

L’inflation : un défi persistant

Sur le front de l’inflation, Powell a maintenu un ton mesuré mais vigilant. « L’inflation reste légèrement élevée », a-t-il noté, précisant que le chemin vers l’objectif de 2 % demeure semé d’embûches. Les données récentes montrent une inflation annualisée autour de 2,6 % en février 2025, en baisse par rapport aux pics de 2022, mais toujours au-dessus de la cible de la Fed. Cette persistance s’explique par des pressions sur les prix des services et une remontée des coûts énergétiques, exacerbée par les tensions géopolitiques au Moyen-Orient et la guerre en Ukraine.

Le FOMC a ajusté ses projections d’inflation à la hausse pour 2025, anticipant un niveau plus élevé que prévu il y a trois mois. Cette révision coïncide avec la décision de maintenir les taux d’intérêt inchangés lors de cette réunion, à un niveau compris entre 4,25 % et 4,5 %, après une série de hausses graduelles en 2024. Powell a signalé que deux baisses de taux de 0,25 % étaient envisagées d’ici la fin de l’année, un rythme inchangé par rapport aux prévisions de décembre 2024. « Nous n’avons pas besoin d’être pressés. Nous attendrons plus de clarté », a-t-il insisté, suggérant que la Fed privilégie une approche patiente face aux incertitudes macroéconomiques.

Cette stratégie contraste avec les attentes antérieures d’un assouplissement plus rapide. Les marchés, qui tablaient sur une baisse dès mars, ont dû recalibrer leurs anticipations, ce qui reflète la crédibilité de la Fed à maintenir une politique restrictive tant que l’inflation ne converge pas durablement vers 2 %. Mais cette fermeté pourrait aussi répondre à un contexte politique où Trump exerce une pression croissante pour des taux plus bas, une tension que Powell a éludée avec habileté.

Taux d’intérêt : une stabilité prudente

La décision de laisser les taux inchangés n’a surpris personne, mais les commentaires de Powell sur leur trajectoire future ont clarifié les intentions de la Fed. Les deux baisses prévues pour 2025 – probablement en septembre et décembre – visent à accompagner une économie en ralentissement sans relâcher trop vite la bride sur l’inflation. Cette approche graduelle, qualifiée de « pragmatisme agile » par certains analystes, tranche avec les hausses agressives de 2022-2023, lorsque la Fed avait relevé les taux de 475 points de base pour juguler une inflation galopante.

Powell a défendu cette stabilité en insistant sur la nécessité d’observer les données entrantes. « Nous ajusterons notre politique en fonction des faits, pas des spéculations », a-t-il déclaré, une allusion aux incertitudes liées aux tarifs douaniers et à la volatilité des marchés. Cette posture renforce la crédibilité de la Fed, mais elle expose aussi ses limites : face à des chocs externes, comme une guerre commerciale ou une flambée des prix de l’énergie, les taux seuls ne suffiront pas à tout stabiliser.

Impact sur les marchés mondiaux

Les déclarations de Powell ont eu un effet immédiat sur les marchés. Après la réunion du FOMC, Wall Street a clôturé en légère baisse, le Dow Jones cédant 0,8 % et le S&P 500 1,2 %, reflétant une déception face à l’absence de signal d’assouplissement imminent. Les rendements des bons du Trésor à 10 ans ont grimpé à 4,3 %, signe que les investisseurs anticipent des taux élevés plus longtemps que prévu. Le dollar s’est apprécié face à l’euro et au yen, atteignant son plus haut niveau depuis novembre 2024, ce qui traduit une confiance dans la fermeté de la politique monétaire américaine.

À l’échelle mondiale, cette prudence de la Fed a des répercussions en chaîne. Les marchés asiatiques, sensibles aux variations du dollar, ont ouvert en baisse le 20 mars, avec le Nikkei perdant 1,5 % et le Hang Seng 2 %. Les prix des matières premières, comme le pétrole Brent, ont oscillé autour de 85 dollars le baril, tiraillés entre les craintes d’une croissance ralentie et les tensions géopolitiques. Pour les investisseurs, les propos de Powell confirment que la Fed reste un pivot central : toute inflexion de sa politique peut provoquer des vagues de volatilité, des ajustements de portefeuilles et une redistribution des flux de capitaux.

Les économies émergentes sous tension

Pour les économies émergentes, les prévisions de Powell sont une arme à double tranchant. D’un côté, la stabilité des taux américains et la pause dans les frappes énergétiques en Ukraine – négociée par Trump avec Poutine – pourraient alléger les pressions inflationnistes importées via les prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Une inflation mondiale projetée à 4,2 % en 2025, selon le FMI, reste élevée, mais les baisses prévues des taux US d’ici la fin de l’année offriraient un répit aux pays endettés en dollars, comme l’Argentine ou la Turquie, en réduisant leurs coûts d’emprunt.

D’un autre côté, un dollar fort et des taux élevés prolongés pèsent lourd. Les sorties de capitaux des marchés émergents, déjà amorcées en février, pourraient s’accélérer si les investisseurs privilégient les obligations américaines, jugées plus sûres. En Inde, la roupie a chuté de 1 % face au dollar le 20 mars, tandis que le real brésilien perdait 0,8 %. Ces dépréciations forcent les banques centrales locales à relever leurs propres taux pour défendre leurs monnaies, au risque de freiner leur croissance. Powell a reconnu ces « retombées » indirectes, mais il a maintenu que la Fed se concentre sur son mandat domestique, laissant les émergents naviguer seuls dans ces eaux troubles.

Un équilibre délicat

Les propos de Jerome Powell traduisent une Fed en mode attentiste, consciente de la solidité de l’économie américaine mais prudente face à des risques croissants. La croissance ralentie, une inflation tenace et des taux stables jusqu’à nouvel ordre dessinent un paysage où la politique monétaire doit jongler entre discipline et flexibilité. Pour les marchés mondiaux, cette posture renforce la prééminence du dollar, mais elle alimente aussi l’incertitude. Pour les économies émergentes, elle offre un sursis limité, vite éclipsé par les défis d’un environnement financier tendu. En ce 20 mars 2025, une certitude émerge : les prévisions de Powell ne résolvent pas les dilemmes du monde, elles les reflètent.

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Newsdesk Libnanews
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