Les derniers articles

Articles liés

Gaza, tampon humanitaire et guerre de communication : Israël redéfinit son théâtre d’opérations

- Advertisement -

Alors que le conflit à Gaza entre dans un nouveau cycle de violences, la stratégie militaire et diplomatique israélienne connaît une mutation notable. En s’orientant vers la création de zones tampons, en contrôlant de manière stricte l’acheminement de l’aide humanitaire, et en intensifiant sa guerre informationnelle, Israël semble mettre en place un dispositif inédit d’encerclement politique, humanitaire et médiatique. Le 17 avril 2025, plusieurs signaux convergents ont confirmé cette inflexion stratégique, renforçant l’hypothèse d’un changement profond dans la doctrine de sécurité appliquée à la bande de Gaza.

Zone tampon : du concept militaire à l’outil de gouvernance

Depuis plusieurs semaines, les autorités israéliennes affirment avoir consolidé leur contrôle sur environ 30 % du territoire de Gaza. Ces zones, qualifiées de « sécurisées », s’étendent principalement le long de la frontière avec Israël, mais s’enfoncent parfois jusqu’à cinq kilomètres à l’intérieur du territoire palestinien. Officiellement, il s’agit de garantir la sécurité des localités israéliennes limitrophes contre les tirs de roquettes et les incursions armées.

Dans les faits, ces zones sont vidées de leur population et quadrillées en permanence par des unités militaires israéliennes. Des checkpoints mobiles, des drones de surveillance et des capteurs au sol ont été déployés pour interdire tout retour des habitants déplacés. Cette stratégie de « gel démographique » vise à créer une bande neutre entre Gaza et Israël, mais également à redéfinir la topographie du conflit.

Des analystes militaires estiment que cette approche marque une rupture avec les cycles de frappes-pause-frappes observés depuis 2009. Il ne s’agit plus seulement d’affaiblir militairement le Hamas ou d’obtenir des concessions politiques, mais d’imposer une transformation physique, sociale et symbolique de Gaza comme territoire « problématique à contenir » plutôt qu’« entité à réintégrer dans un processus de paix ».

Contrôle humanitaire : la logistique comme levier de pression

Parallèlement à la structuration de ces zones tampons, Israël a durci son contrôle sur l’aide humanitaire destinée à la population de Gaza. Le ministre de la Défense a affirmé qu’aucun convoi ne sera autorisé à entrer sans que les otages israéliens ne soient libérés, et tant que le Hamas ne désarme pas. Cette conditionnalité fait de l’aide humanitaire un outil de pression, voire de chantage, ce que dénoncent plusieurs ONG et organismes internationaux.

Les couloirs humanitaires sont désormais ouverts de manière intermittente, sous contrôle total de l’armée israélienne. Les quantités de carburant, d’eau potable, de denrées alimentaires et de matériel médical autorisées sont réduites au strict minimum. Les organisations présentes sur le terrain évoquent une « gestion punitive des flux humanitaires », accusant Israël de manipuler les besoins vitaux comme instrument de guerre.

Des rapports rédigés par des experts en droit international mettent en doute la conformité de cette politique avec les Conventions de Genève. Selon eux, la transformation de l’aide en outil de pression viole les principes fondamentaux de distinction entre combat et assistance aux civils. L’État hébreu, de son côté, justifie sa position en invoquant la nécessité de garantir que l’aide ne profite pas à des groupes armés.

Guerre de l’image : encadrement narratif et diplomatie médiatique

L’un des aspects les plus marquants de la nouvelle approche israélienne est la gestion intensive de la communication. Depuis le début de cette nouvelle phase du conflit, l’armée israélienne diffuse en temps réel des images de ses opérations, des témoignages de soldats, des vidéos de tunnels détruits et de prises d’armes. Ce récit visuel est accompagné d’une stratégie de diffusion multicanale visant à saturer l’espace médiatique d’un narratif de légitimité défensive.

Dans le même temps, des restrictions sévères sont imposées aux journalistes étrangers souhaitant accéder à la bande de Gaza. Plusieurs reporters ont vu leur accréditation suspendue, d’autres se sont vu refuser l’entrée au poste frontière de Kerem Shalom. Le contrôle de l’image devient ainsi une dimension centrale du conflit.

Cette guerre de l’information ne vise pas seulement l’opinion publique internationale, mais aussi les capitales alliées. Israël tente de neutraliser les critiques européennes, américaines et onusiennes en affirmant que « tout est fait pour protéger les civils, mais que la guerre est rendue nécessaire par la stratégie du Hamas de se cacher parmi la population ».

Une doctrine de guerre totale ?

Certains analystes voient dans cette stratégie une évolution vers une forme de guerre totale, dans laquelle toutes les dimensions – militaire, logistique, humanitaire, narrative – sont mobilisées pour obtenir la reddition complète de l’adversaire, sans négociation ni compromis. La déclaration selon laquelle « aucune aide ne sera autorisée tant que les otages ne sont pas libérés » illustre cette doctrine.

La logique de blocus, déjà ancienne, prend ici une dimension renouvelée. Elle n’est plus seulement destinée à asphyxier l’adversaire, mais à redéfinir les modalités mêmes de son existence : où il peut se trouver, comment il peut se nourrir, à quelles informations il peut accéder. Cette architecture du contrôle, largement automatisée, redessine les frontières du pouvoir dans le conflit israélo-palestinien.

Certains observateurs mettent en garde contre les effets de long terme d’une telle stratégie : criminalisation croissante de l’aide humanitaire, perte de crédibilité des médiations, radicalisation des opinions publiques arabes, et affaiblissement durable du droit international humanitaire.

- Advertisement -
Newsdesk Libnanews
Newsdesk Libnanewshttps://libnanews.com
Libnanews est un site d'informations en français sur le Liban né d'une initiative citoyenne et présent sur la toile depuis 2006. Notre site est un média citoyen basé à l’étranger, et formé uniquement de jeunes bénévoles de divers horizons politiques, œuvrant ensemble pour la promotion d’une information factuelle neutre, refusant tout financement d’un parti quelconque, pour préserver sa crédibilité dans le secteur de l’information.