Les derniers articles

Articles liés

Joseph Aoun relance la diplomatie du Golfe : reconstruction du Liban au cœur des priorités

- Advertisement -

Un accueil présidentiel qui consacre une réhabilitation politique

La visite officielle du président Joseph Aoun aux Émirats arabes unis a marqué un jalon décisif dans le retour diplomatique du Liban sur la scène régionale. Reçu à Abou Dhabi par le président Mohammed ben Zayed au palais présidentiel, Joseph Aoun a été honoré par une cérémonie militaire et un entretien bilatéral de haut niveau. Ce déplacement, préparé depuis plusieurs semaines, intervient dans un contexte où le Liban tente de repositionner sa diplomatie dans un axe arabophile, à rebours des années de mise à l’écart.

Cette rencontre, très médiatisée, n’a pas seulement une portée protocolaire. Elle entérine un virage stratégique, tant sur le plan des alliances régionales que dans la philosophie de gouvernance revendiquée par le nouveau président. La réouverture prochaine de l’ambassade des Émirats à Beyrouth, annoncée dans la foulée, consacre symboliquement la normalisation d’une relation longtemps fragilisée par les tensions politiques et les positionnements ambigus du Liban sur la scène moyen-orientale.

Un message de confiance aux expatriés libanais

Le président libanais a saisi l’occasion de ce déplacement pour adresser un message direct à la communauté libanaise des Émirats, forte de 190 000 personnes. Lors d’une rencontre avec des représentants de cette diaspora, il a déclaré que “le passé est derrière nous” et que “l’État libanais retrouve progressivement ses capacités”. Ce discours, soigneusement calibré, visait à restaurer la confiance et à encourager un retour des investissements privés.

En évoquant la “relance des institutions” et l’importance du “consensus national”, Joseph Aoun a esquissé les contours d’un contrat social renouvelé, fondé sur la compétence technocratique, l’unité nationale et la transparence dans la gestion des ressources. Il a également rappelé que le Liban n’a pas besoin de charité, mais d’opportunités d’investissement fondées sur des règles claires et stables.

La reconstruction : 14 milliards de dollars en jeu

Lors d’une interview télévisée depuis Abou Dhabi, le président a révélé que la Banque mondiale avait récemment estimé les dommages structurels subis par le Liban à hauteur de 14 milliards de dollars. Ce chiffre, fruit d’un audit conjoint avec plusieurs institutions financières internationales, concerne principalement les infrastructures énergétiques, le réseau éducatif et les établissements de santé.

Joseph Aoun a précisé que ces chiffres n’incluent pas les pertes du secteur privé ni les dommages non déclarés dans les zones informelles. La stratégie présidentielle repose donc sur un double pilier : mobiliser une aide internationale urgente, et conditionner son déblocage à l’adoption de réformes ciblées, techniquement précises et politiquement consensuelles.

Réformes en contrepartie : priorité aux secteurs structurants

La conditionnalité des financements attendus repose sur un socle de réformes structurantes. En premier lieu, le secteur bancaire, largement dysfonctionnel depuis 2019, doit faire l’objet d’une refonte totale. La politique monétaire, jusqu’ici dépendante de décisions improvisées, devrait s’articuler autour d’une nouvelle loi sur l’indépendance de la Banque du Liban, assortie d’un audit externe et d’une publication des bilans consolidés.

Le secteur éducatif est également une priorité : révision des programmes, contrôle renforcé des établissements privés, et création d’un fond de soutien aux universités publiques. Le président insiste sur l’importance d’une jeunesse formée localement, capable de reconstruire le pays sans s’exiler.

Enfin, le secteur énergétique, constamment déficitaire, sera soumis à une réforme en profondeur. Cela implique une redéfinition du rôle de l’Électricité du Liban, une ouverture à la concurrence régulée, et un plan de transition énergétique incluant les énergies renouvelables.

Une coordination multilatérale avec les fonds souverains du Golfe

La tournée diplomatique prévoit une étape prochaine au Koweït, où des négociations sont en cours pour mobiliser des prêts concessionnels à long terme. Ces fonds, attribués par le biais d’un mécanisme de coordination entre les banques centrales et les fonds souverains, pourraient être associés à des programmes de suivi mis en œuvre par des agences de développement du Golfe.

Ce nouveau type de financement rompt avec les logiques anciennes de dons ponctuels ou d’aide budgétaire sans contrôle. Il s’agit ici de mettre en place une architecture contractuelle, où les réformes à adopter sont inscrites dans un calendrier contraignant, avec des indicateurs de performance et des audits semestriels. Cette exigence de traçabilité constitue l’un des socles de la nouvelle confiance que tente d’instaurer la présidence libanaise.

L’enjeu diplomatique : repositionner le Liban dans l’ordre arabe

Au-delà des considérations financières, la visite du président Aoun vise à redéfinir l’image du Liban dans le monde arabe. Pendant une décennie, Beyrouth a souffert d’un isolement croissant, alimenté par ses ambiguïtés diplomatiques et ses crises internes. Le président entend rompre avec cette marginalisation en adoptant une posture claire : respect de la souveraineté nationale, neutralité diplomatique, et engagement à ne pas servir de plateforme pour des conflits extérieurs.

La relance des relations avec les Émirats, le Koweït et potentiellement l’Arabie saoudite, doit permettre au Liban de retrouver un rôle utile dans les équilibres régionaux. Cette politique s’appuie sur une diplomatie discrète mais active, centrée sur les convergences économiques et les intérêts partagés plutôt que sur les appartenances idéologiques.

Une communication présidentielle au service de la stabilité

Le président Joseph Aoun a déployé, depuis son élection, une stratégie de communication axée sur la restauration de la confiance. Cette posture s’est traduite par une présence régulière dans les médias régionaux, des entretiens ciblés avec des partenaires clés, et une volonté affichée de parler un langage de vérité, même au prix de l’impopularité.

Dans son discours à Abou Dhabi, il a insisté sur la nécessité d’un “État fort, capable de dire non comme de dire oui”. Il a aussi rappelé que la stabilité libanaise est une condition de la stabilité régionale, et que cette stabilité ne peut être obtenue sans une réforme interne profonde et irréversible.

Premiers retours positifs et perspectives

Le premier effet tangible de cette visite est l’annonce de la réouverture de l’ambassade des Émirats à Beyrouth. Cette décision symbolise une reconnaissance du changement de cap à la tête de l’État libanais. D’autres initiatives pourraient suivre : réactivation d’accords de coopération bilatérale, reprise des échanges commerciaux et création de commissions mixtes sectorielles.

À plus long terme, la diplomatie économique du Liban pourrait s’institutionnaliser autour d’un ministère de la planification stratégique, chargé de coordonner les partenariats régionaux. Cette proposition, évoquée de manière informelle dans l’entourage présidentiel, vise à éviter les chevauchements de compétences et à donner une lisibilité durable aux engagements pris.

- Advertisement -
Newsdesk Libnanews
Newsdesk Libnanewshttps://libnanews.com
Libnanews est un site d'informations en français sur le Liban né d'une initiative citoyenne et présent sur la toile depuis 2006. Notre site est un média citoyen basé à l’étranger, et formé uniquement de jeunes bénévoles de divers horizons politiques, œuvrant ensemble pour la promotion d’une information factuelle neutre, refusant tout financement d’un parti quelconque, pour préserver sa crédibilité dans le secteur de l’information.