En 2024, le secteur immobilier libanais a enregistré une hausse spectaculaire de 79 % des transactions par rapport à l’année précédente, atteignant un total de 67 125 opérations pour une valeur de 8,4 milliards de dollars. Ce dynamisme s’explique par la dollarisation croissante du marché et la perception de l’immobilier comme un refuge face à la crise économique. Toutefois, cette flambée soulève des inquiétudes croissantes quant à la formation d’une bulle immobilière, alimentée par la spéculation et l’absence de régulation.
l’immobilier : un refuge face à la crise économique
Depuis l’effondrement de la livre libanaise, l’immobilier est perçu comme l’un des rares actifs stables dans une économie en pleine débâcle. Les transactions sont majoritairement effectuées en dollars américains, offrant une protection contre la volatilité monétaire et l’inflation galopante.
En 2024, la valeur totale des transactions a presque doublé par rapport à 2023, illustrant cette dynamique. Les ménages ayant accès à des liquidités en devises étrangères, notamment grâce à des transferts de la diaspora, privilégient l’achat de biens immobiliers pour préserver leur pouvoir d’achat.
Année | Nombre de transactions | Valeur totale ($, en milliards) |
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2022 | 25 000 | 3,6 |
2023 | 37 500 | 4,7 |
2024 | 67 125 | 8,4 |
la réouverture des registres fonciers : un catalyseur clé
La réouverture des registres fonciers début 2024, après plusieurs mois de fermeture partielle en 2023, a contribué à débloquer un volume important de transactions en attente. Ces registres, essentiels à la transparence et à la sécurité des transactions, avaient été paralysés par des grèves administratives et un manque de ressources. Leur réouverture a non seulement permis d’accélérer les processus, mais a également renforcé la confiance des investisseurs.
Des efforts pour numériser les registres fonciers ont également été entrepris, bien que leur impact reste limité pour l’instant. Cette initiative vise à réduire les délais et les erreurs administratives, tout en augmentant la transparence des transactions.
une bulle immobilière en formation ?
Si la hausse des transactions témoigne d’un regain d’activité dans un secteur clé, elle suscite également des préoccupations. Plusieurs signes pointent vers une bulle immobilière :
- Spéculation excessive : La demande est largement alimentée par des investisseurs cherchant à spéculer sur la hausse des prix, plutôt que par des besoins résidentiels réels.
- Accessibilité limitée : Les prix des biens immobiliers ont augmenté de 22 % en moyenne en 2024, rendant l’accès à la propriété hors de portée pour une grande partie de la population, dont les revenus restent en livres libanaises.
- Dépendance aux devises étrangères : Le marché immobilier repose presque exclusivement sur les dollars, ce qui le rend vulnérable à tout changement dans les flux de devises ou la réglementation internationale.
Indicateur | Variation en 2024 (%) |
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Prix moyen des logements | +22 |
Part des transactions en $ | 95 |
Participation étrangère | +100 |
un marché polarisé
Le marché immobilier au Liban est désormais divisé en deux segments :
- Les zones premium, comme Beyrouth et le Mont Liban, qui concentrent 63 % des transactions et attirent principalement les investisseurs étrangers et la diaspora. Ces régions voient les prix grimper en raison de la spéculation.
- Les régions moins dynamiques, comme le Sud et la Bekaa, où les transactions restent modestes, mais qui bénéficient d’une hausse des achats de terrains agricoles ou résidentiels par les expatriés.
La part des investisseurs étrangers, principalement issus de la diaspora libanaise, a doublé en 2024, passant de 9 % à 18 % des transactions. Cet afflux contribue à maintenir la demande, mais accentue également la pression sur les prix.
impact sur l’économie : entre bénéfices et risques
Le secteur immobilier est l’un des rares moteurs économiques encore fonctionnels au Liban. En 2024, il a généré 18 % des recettes fiscales de l’État, principalement à travers les taxes foncières et les droits de mutation. Cependant, cette dynamique comporte des risques :
- Instabilité sociale : La hausse des prix immobiliers exacerbe les inégalités et prive les ménages locaux de l’accès à la propriété.
- Vulnérabilité économique : Une bulle immobilière pourrait éclater en cas de baisse de la demande ou de restrictions sur les flux de devises étrangères.