Le secteur touristique libanais, autrefois considéré comme un pilier potentiel de croissance, connaît une crise structurelle profonde. Malgré des recettes de 8 milliards de dollars en 2019, les revenus attendus ont chuté à 5 milliards en 2023, pour atteindre seulement 2,5 milliards en 2025. Seulement 750 millions de dollars seront réellement injectés dans l’économie libanaise au final en raison des importations. Cette désaffection n’est pas uniquement la conséquence de tensions géopolitiques : elle traduit un déficit d’offres, de promotion et de stratégie, dans un marché où l’élasticité-prix est forte.
1. Coûts comparés d’un séjour d’une semaine (vol inclus)
En haute saison, le coût moyen d’un séjour de 7 jours au Liban s’élève à 1 880 € par personne (vol inclus). Ce tarif le place parmi les plus onéreux, sans bénéficier des infrastructures et services proposés ailleurs :
Destination | Total (vol inclus) |
---|---|
Liban | 1 880 € |
Israël | 1 820 € |
Italie | 1 263 € |
Grèce | 1 281 € |
Espagne | 1 202 € |
Chypre | 1 161 € |
Turquie | 1 088 € |
Égypte | 1 133 € |
Dubaï | 2 600 € |
Au Liban, la location de voiture (308 €), l’hébergement 3 étoiles (399 €) et les activités (98 €) restent chers, alors que les services associés (transports publics, billetterie, signalétique) sont inexistants ou défaillants.
2. Fréquentation et impact économique
Le Liban accueille 1 à 1,5 million de visiteurs par an, majoritairement des binationaux ; l’élasticité faible de cette clientèle maintient artificiellement la demande. Rapporté à la population (5,5 millions), le pays n’attire que 0,27 touriste par habitant, contre 1,7 pour l’Espagne ou 2,85 pour la Grèce.
Pays | Touristes/an | Pop. (M) | Touristes/habitant |
---|---|---|---|
Chypre | 4 M | 0,9 | ~4,4 |
Grèce | 30 M | 10,5 | ~2,85 |
Espagne | 80 M | 47 | ~1,7 |
Italie | 50 M | 59 | ~0,85 |
Liban | 1,5 M | 5,5 | ~0,27 |
Cette faible fréquentation limite les retombées économiques, concentrées sur quelques « hot spots » (Beyrouth, Byblos, Batroun).
3. Revenus touristiques par habitant
L’efficacité du secteur peut se mesurer au revenu généré par habitant :
Pays | Revenus (USD) | Pop. (M) | USD par habitant |
---|---|---|---|
Espagne | 85 md | 47 | ~1 808 |
Italie | 52 md | 59 | ~881 |
Grèce | 21 md | 10,5 | ~2 000 |
Chypre | 2,8 md | 0,9 | ~3 111 |
Liban | 2,5 md | 5,5 | ~455 |
Le Liban demeure très en deçà des standards méditerranéens, confirmant un secteur peu structurant.
4. Déficit d’image et fuite de la vie nocturne
Le pays ne dispose d’aucune politique de promotion à l’étranger, aucun ministère du tourisme opérationnel, et aucune présence sur les salons internationaux. Le déficit d’image est aggravé par la délocalisation de la vie nocturne (clubs, rooftop bars) vers des hubs plus stables comme Dubaï.
5. Élasticité de la demande et rentabilité
Le marché touristique est hautement élastique : une hausse des prix réduit significativement la demande internationale. Seuls les binationaux conservent une faible sensibilité-prix, par lien affectif, falsifiant les véritables dynamiques de marché.
6. Recommandations économiques
Pour redresser le secteur, il est urgent de : 1) créer une agence nationale du tourisme dotée de moyens concrets ; 2) professionnaliser l’hôtellerie et les circuits ; 3) investir dans la promotion internationale et les partenariats ; 4) réguler les tarifs pour réduire l’écart coût/prestation ; 5) développer le tourisme rural et culturel, en décentralisant les investissements.