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Budget 2025 : austérité sans vision et fracture politique au Parlement

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Le projet de budget 2025, actuellement en discussion au Parlement, suscite de vives critiques. Plusieurs observateurs et députés dénoncent un document centré sur des ajustements comptables à court terme, dépourvu de toute ambition de relance ou de réforme structurelle. La priorité accordée à l’augmentation des recettes fiscales indirectes, couplée à la reconduction des dépenses rigides, alimente les soupçons d’un maintien des logiques d’austérité observées depuis plusieurs exercices.

Les grandes lignes du projet de budget 2025

Le projet repose sur un objectif de hausse des recettes fiscales d’environ 4 000 milliards de livres libanaises. Cette augmentation doit être obtenue par une série de mesures incluant l’élargissement de la TVA, l’augmentation des taxes sur les carburants et les droits de douane sur les produits de luxe. Ces hausses concernent essentiellement des postes à fort impact sur la consommation des ménages.

Le gouvernement justifie ces choix par la nécessité de combler un déficit budgétaire persistant, tout en affirmant vouloir éviter un effondrement des services essentiels. Les dépenses globales demeurent toutefois proches de celles des années précédentes, avec une faible réallocation entre postes. La part dédiée à l’investissement public reste inférieure à 3 %, un niveau historiquement bas, alors que les infrastructures publiques sont en délabrement avancé.

Le budget n’intègre pas de réforme fiscale progressive, ni d’effort de structuration des revenus publics. Il s’agit avant tout d’un ajustement technique destiné à répondre à des exigences de soutenabilité immédiate, sans orientation stratégique à moyen terme.

Des dépenses rigides et une austérité prolongée

Les choix budgétaires opérés dans ce projet reconduisent les priorités historiques, avec une forte rigidité dans les dépenses incompressibles. Les subventions résiduelles à l’EDL (Électricité du Liban) absorbent encore une part significative des transferts publics. Malgré la réduction progressive des aides directes à l’importation de carburants, l’entreprise publique continue de fonctionner à perte.

Le poste des pensions militaires conserve une part importante du budget, excédant celle consacrée à la santé publique. Le ratio entre dépenses sociales et dépenses sécuritaires demeure déséquilibré. Les allocations au secteur de la santé n’atteignent pas les niveaux nécessaires à une réhabilitation minimale des hôpitaux publics, confrontés à une crise chronique.

L’éducation publique reste également sous-dotée. Aucune ligne budgétaire nouvelle ne vient renforcer les établissements secondaires ou universitaires, malgré la perte continue de personnel enseignant et la dégradation des infrastructures.

Absence de stratégie économique structurante

Le projet de budget est critiqué pour sa logique purement comptable, qui ne s’accompagne d’aucune stratégie de croissance ou de transformation économique. La part allouée aux investissements productifs reste marginale, sans nouvelles mesures de relance. Aucun programme de soutien à l’innovation, au secteur agricole ou aux PME n’est annoncé.

Les déficits structurels majeurs ne sont pas abordés. Le projet ne prévoit pas de plan pour assainir les comptes de la Caisse nationale de la sécurité sociale (CNSS), dont la dette croît à un rythme insoutenable. Les pertes accumulées de la Banque du Liban (BDL) ne font l’objet d’aucun mécanisme de résolution. Aucun dispositif de consolidation ne figure pour la dette publique globale.

Le budget ne propose pas non plus de trajectoire de réduction du déficit dans le cadre d’un accord macroéconomique plus large. Il n’y a ni cadre pluriannuel, ni indicateurs de performance, ni plans sectoriels associés. Les décisions sont présentées sous forme de tableaux chiffrés sans projection économique ni articulation avec des objectifs de croissance ou d’emploi.

Les critiques parlementaires : lignes de fracture politique

Plusieurs députés, notamment issus du bloc qualifié de « souverainiste », ont exprimé leur opposition au projet en l’état. Ils reprochent au texte son absence de réforme du secteur public et son incapacité à réorienter les dépenses vers les services essentiels. Le député Elias Hankache a déclaré que le budget « maintient une administration pléthorique sans revaloriser les services essentiels », en prenant l’exemple de la santé et de l’éducation.

Ces critiques s’inscrivent dans une opposition plus large aux choix budgétaires du gouvernement, accusé de prolonger une gestion bureaucratique déconnectée des réalités sociales. Les lignes de fracture au Parlement se creusent autour de la question de l’efficience administrative et de la nécessité d’une rationalisation de la dépense publique. Le projet est perçu par une partie des élus comme une tentative de maintenir les équilibres anciens, au détriment d’une réforme d’envergure.

D’autres députés pointent le manque de transparence sur certains postes, notamment les contrats de gré à gré ou les affectations aux ministères sans justification détaillée. Le débat budgétaire donne lieu à des demandes de ventilation plus fine des crédits, notamment dans les secteurs sensibles comme l’énergie, la défense et la justice.

Blocage international et isolement financier

Le ministre des Finances, interrogé sur la portée du projet, a reconnu que « les marges de manœuvre sont étroites dans un contexte de blocage des aides internationales ». Le Liban n’a toujours pas conclu d’accord avec le Fonds monétaire international (FMI), condition jugée indispensable par plusieurs partenaires pour tout soutien financier structurant.

Le budget 2025 n’intègre aucune perspective de financement extérieur. Il ne table pas sur de nouvelles ressources issues d’aides multilatérales, ni sur une rééchelonnement de la dette extérieure. Cette absence de perspective d’ancrage international renforce l’impression d’un isolement du Liban sur le plan financier, doublé d’une gestion budgétaire en vase clos.

Plusieurs observateurs notent que ce projet ne présente pas les garanties exigées par les bailleurs internationaux en matière de transparence, de lutte contre la corruption et de discipline budgétaire. L’absence de réformes fiscales progressives ou de restructuration bancaire limite la crédibilité de la trajectoire financière proposée.

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