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Levée du secret bancaire : Marie-Claude Najm interpelle le gouvernement Nawaf Salam

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Un projet de loi relancé dans un contexte de crise

Alors que le Liban continue de sombrer dans une crise financière et politique inédite, la question de la levée du secret bancaire refait surface avec force. Le 5 mars 2020, le gouvernement libanais adoptait un projet de loi visant à lever cette protection pour les responsables publics. Quatre ans plus tard, alors que la situation économique du pays ne cesse de se détériorer, l’ancienne ministre de la Justice, Marie-Claude Najm, exhorte le nouveau gouvernement dirigé par Nawaf Salam à reprendre ce projet et à le faire adopter par le Parlement.

Dans une série de tweets publiés récemment, elle rappelle que cette réforme est un préalable indispensable à la lutte contre la corruption et à la reconstruction institutionnelle du pays. Son interpellation s’adresse directement au Premier ministre Nawaf Salam, connu pour ses positions en faveur de l’État de droit, et dont le gouvernement est attendu sur des réformes structurelles majeures.

https://twitter.com/MarieClaudeNajm/status/1892675248967057709
https://twitter.com/MarieClaudeNajm/status/1892679302069813456
https://twitter.com/MarieClaudeNajm/status/1892679530801672690

Pourquoi Marie-Claude Najm relance-t-elle ce débat ?

Marie-Claude Najm, ancienne ministre de la Justice entre 2020 et 2021, est une universitaire et juriste reconnue, doyenne de la Faculté de droit et de sciences politiques de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth. Son passage au gouvernement s’est inscrit dans une volonté de réforme judiciaire et de lutte contre l’impunité, dans un contexte marqué par l’explosion du port de Beyrouth et une crise économique catastrophique.

Dans son tweet, elle rappelle que dès l’accession de Joseph Aoun à la présidence en janvier 2025, ce dernier s’était engagé à renforcer la transparence financière en déclarant que « les banques ne devraient avoir aucun secret autre que celui du secret professionnel ». Elle souligne également que la première équipe ministérielle du mandat Aoun comptait des personnalités compétentes et réformistes, et que la transparence était alors une priorité affichée.

Son appel vise aujourd’hui le gouvernement de Nawaf Salam, fraîchement désigné, et qui bénéficie d’une certaine crédibilité auprès des partenaires internationaux et des institutions financières. Selon Najm, la relance de ce projet de loi constituerait un test majeur pour évaluer la volonté de réforme du nouveau cabinet et sa capacité à briser les mécanismes de protection de la classe politique.

Que prévoit le projet de loi sur la levée du secret bancaire ?

Adopté en Conseil des ministres en 2020, ce texte prévoyait de lever le secret bancaire sur l’ensemble des responsables publics, passés et présents, ainsi que sur leurs proches.

La liste des personnes concernées inclut :

  • Le Président de la République, les ministres et les parlementaires
  • Les juges, hauts fonctionnaires, officiers des forces de sécurité
  • Les dirigeants de fonds publics, d’organismes de régulation et de banques
  • Les responsables de partis politiques, d’associations et de médias bénéficiant de fonds publics
  • Les entreprises et individus ayant des contrats avec l’État

Cette levée du secret bancaire concerne non seulement les individus eux-mêmes, mais aussi leurs conjoints, enfants, gendres et proches jusqu’au quatrième degré. Elle s’appliquerait sans aucune exception liée à une immunité ou à une protection légale, empêchant ainsi les responsables politiques de se soustraire aux enquêtes judiciaires et fiscales.

Enfin, le projet de loi précise que toutes les institutions bancaires du Liban et les établissements financiers étrangers détenant des comptes liés à ces individus seraient tenus de coopérer avec les autorités judiciaires et de contrôle.

Un enjeu majeur pour le redressement économique

Le Liban est classé parmi les pays les plus corrompus au monde, selon Transparency International. Depuis le début de la crise financière en 2019, les soupçons se multiplient quant à la responsabilité des élites politiques et bancaires dans le détournement massif de fonds et la mauvaise gestion des finances publiques.

Avec ce projet de loi, les autorités libanaises cherchent à rétablir la confiance des investisseurs et des institutions financières internationales, notamment le Fonds monétaire international (FMI), qui conditionne toute aide financière à la mise en place de réformes structurelles solides.

Un obstacle politique et institutionnel de taille

Malgré l’urgence de la situation, la relance de ce projet de loi se heurte à des résistances majeures. Plusieurs parlementaires et figures politiques s’opposent à la levée du secret bancaire, invoquant un risque d’atteinte à la confidentialité bancaire, pourtant l’un des piliers du système financier libanais depuis des décennies.

D’autres critiquent une instrumentalisation politique de la loi, craignant qu’elle ne soit utilisée de manière sélective contre certains responsables, sans pour autant garantir une transparence généralisée.

Face à ces résistances, des amendements pourraient être introduits pour restreindre la levée du secret bancaire aux enquêtes judiciaires menées par un juge indépendant. Cette concession permettrait de répondre aux exigences de transparence, tout en rassurant une partie de la classe politique et économique.

Un test pour le gouvernement Nawaf Salam

La pression est désormais sur le gouvernement de Nawaf Salam, dont la crédibilité repose en grande partie sur sa capacité à mettre en œuvre des réformes économiques et institutionnelles. La relance de ce projet de loi serait un premier signal fort quant à sa volonté de rompre avec les pratiques du passé et d’instaurer une véritable transparence dans la gestion des finances publiques.

Les organisations de la société civile et les experts économiques insistent sur l’urgence d’adopter cette réforme. Comme l’a souligné Marie-Claude Najm dans son tweet, « les solutions existent, mais la volonté politique fait défaut ».

L’avenir du Liban dépendra en grande partie des choix faits par le gouvernement et le Parlement dans les semaines à venir. Soit ils optent pour la transparence et amorcent une réforme institutionnelle inédite, soit ils maintiennent l’opacité et prolongent la crise de confiance qui paralyse le pays.

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Newsdesk Libnanews
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