Un sommet stratégique à Riyad
Un sommet Golfe–États-Unis se tiendra à la mi-mai à Riyad, capitale de l’Arabie Saoudite, marquant la première visite de Donald Trump dans la région depuis le début de son second mandat présidentiel. L’événement, aux allures de show diplomatique, rappelle celui du 21 mai 2017, organisé lors de sa première présidence, au cours duquel avaient été signés pour plus de 400 milliards de dollars de contrats entre Washington et Riyad.
Tous les chefs d’État du Conseil de coopération du Golfe (CCG) sont attendus, à l’exception du roi Salman bin Abdelaziz, dont l’état de santé l’éloigne depuis longtemps de la scène publique. L’agenda du sommet est dense : sécurité régionale, intelligence artificielle, coopération nucléaire civile, levée des tarifs douaniers et méga-contrats d’investissement sont au cœur des discussions.
Une reconnaissance américaine de la Palestine ?
Mais c’est une possible annonce politique qui alimente les rumeurs les plus explosives. Selon une source diplomatique du Golfe, citée par The Media Line, Donald Trump s’apprêterait à reconnaître un État palestinien — en excluant le Hamas de la configuration institutionnelle. Il s’agirait, selon cette source anonyme, de « la déclaration la plus importante de la région depuis les Accords d’Oslo », susceptible de bouleverser les équilibres géopolitiques et d’ouvrir la voie à une expansion des Accords d’Abraham.
Le président américain aurait évoqué cette « annonce très importante » lors de sa rencontre avec le Premier ministre canadien Justin Trudeau, le 6 mai dernier à la Maison-Blanche.
En Israël, cette perspective a immédiatement provoqué une réaction musclée. Le Premier ministre Benyamin Netanyahu, cité par le Jerusalem Post, a averti que toute reconnaissance internationale unilatérale — en particulier par la France — de l’État de Palestine entraînerait une annexion rapide et définitive de la Cisjordanie par Israël.
Paris ciblé par les menaces israéliennes
La France, régulièrement mentionnée comme l’un des États européens les plus enclins à reconnaître la Palestine, se retrouve donc indirectement ciblée. La menace d’une annexion israélienne s’ajoute à un climat déjà tendu entre Paris et Tel-Aviv, sur fond de divergences croissantes sur Gaza, les colonies, et la politique américaine dans la région.
À Paris, l’Élysée ne confirme ni n’infirme un calendrier diplomatique autour de la Palestine, mais le Quai d’Orsay a récemment réaffirmé « la nécessité d’une solution à deux États viable, sans conditions imposées par la force ».
Des absences qui interrogent
L’ancien diplomate du Golfe Ahmed Al-Ibrahim se montre plus sceptique quant à la portée politique du sommet. Il note l’absence d’invitation faite au président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et au roi Abdallah II de Jordanie — deux figures traditionnellement incontournables dans tout processus lié à la cause palestinienne. Pour Al-Ibrahim, ces absences dénoteraient une priorité avant tout économique.
Il souligne que les relations bilatérales entre les États-Unis et les Émirats arabes unis, ainsi qu’avec le Qatar, sont appelées à se renforcer considérablement. Trump devrait se rendre dans ces deux pays à l’issue du sommet de Riyad. Les Émirats ont déjà annoncé pour plus de 1 000 milliards de dollars d’investissements aux États-Unis, et Riyad plus de 600 milliards.
Coopération nucléaire et appels à investir
Au cœur des discussions figure également un projet de coopération nucléaire civile entre Washington et Riyad. L’Arabie Saoudite, qui envisage la construction de son tout premier réacteur nucléaire pour la production d’électricité, a lancé des appels d’offres internationaux. Plusieurs entreprises sont en compétition pour la conception et la construction du site.
Le royaume cherche à rattraper son voisin émirati, qui dispose déjà du complexe nucléaire de Barakah, en partenariat avec une entreprise sud-coréenne. Pour les autorités saoudiennes, l’objectif est de diversifier les sources d’énergie tout en affirmant leur position stratégique dans la région.
L’analyste politique saoudien Ahmed Boushouki estime pour sa part que l’annonce évoquée par Trump pourrait davantage concerner des marchés boursiers. Il rappelle que le président américain a récemment exhorté les citoyens à « acheter des actions avant une grande annonce », laissant entendre que les retombées économiques seront massives.