Une attaque israélienne contre l’Iran aux objectifs multiples

- Advertisement -

Les récentes frappes israéliennes contre des infrastructures militaires en Iran, survenues dans la nuit du 25 au 26 octobre, s’inscrivent dans une stratégie de confrontation mesurée visant à affaiblir les capacités de l’Iran sans provoquer une escalade immédiate. En ciblant des installations sol-air et des usines d’armement, tout en évitant soigneusement les sites nucléaires et pétroliers, Israël démontre une approche stratégique qui cherche à atteindre des objectifs sécuritaires et politiques précis. Cette offensive s’inscrit dans un contexte de tensions régionales où les alliances géopolitiques, la compétition d’influence et les intérêts des grandes puissances jouent un rôle déterminant.

1. Contexte des opérations israéliennes contre l’Iran : Deux ans d’escalade et d’opérations ciblées

Au cours des deux dernières années, Israël a intensifié ses opérations militaires contre les intérêts iraniens au Moyen-Orient. Ce contexte d’escalade s’inscrit dans une stratégie visant à réduire la portée régionale de l’Iran et à démanteler progressivement ses infrastructures militaires et logistiques en Syrie, en Irak et, plus récemment, en Iran même.

L’un des épisodes les plus marquants de cette confrontation s’est déroulé en 2023, lorsqu’Israël a frappé des installations iraniennes stratégiques en Syrie, y compris le consulat iranien à Damas. Cet événement a souligné la volonté israélienne d’affaiblir les réseaux diplomatiques et militaires de Téhéran en Syrie, un pays considéré comme un corridor essentiel pour le transit de matériel militaire vers le Hezbollah au Liban. Le bombardement du consulat iranien a suscité de vives réactions de la part de la communauté internationale, certains accusant Israël d’avoir violé les règles internationales relatives à la protection des missions diplomatiques.

Par ailleurs, Israël a également mené une série d’assassinats ciblés de hauts responsables iraniens. Parmi les plus médiatisés, on note l’assassinat de Mohsen Fakhrizadeh en 2022, un scientifique de premier plan impliqué dans le programme nucléaire iranien, considéré par Israël comme une menace directe pour sa sécurité nationale. Cet assassinat, exécuté avec une technologie sophistiquée supposément déployée à distance, a été largement attribué aux services de renseignement israéliens, notamment le Mossad, bien que l’État hébreu n’ait jamais revendiqué officiellement l’opération. Depuis, d’autres assassinats ciblés de responsables militaires et de figures influentes au sein des Gardiens de la Révolution et du corps diplomatique iranien ont été signalés, alimentant les tensions.

2. Objectifs militaires ciblés et symbolique des sites épargnés par Israël

Israël a minutieusement choisi ses cibles militaires, visant des usines de fabrication de missiles et des batteries de missiles sol-air concentrées autour de Téhéran et dans des provinces limitrophes de l’Irak. Ces frappes visaient avant tout à réduire la capacité de riposte militaire de l’Iran. En revanche, Israël a évité les installations nucléaires iraniennes, un choix qui peut être interprété comme un message calculé. Le souvenir des frappes de missiles iraniens contre la base israélienne dans le désert du Néguev, à proximité de Dimona, aurait influencé la décision de Tel-Aviv.

Cette prudence israélienne souligne que le message envoyé par l’Iran concernant Dimona, le site nucléaire israélien, a été bien reçu. En frappant une base israélienne dans le Néguev, similaire en localisation stratégique à Dimona, l’Iran avait exprimé un avertissement symbolique, montrant qu’il considère tout site nucléaire, y compris Dimona, comme une cible potentielle. Cette implication a probablement contribué à la décision d’Israël d’épargner les sites nucléaires iraniens dans ses frappes, démontrant que la dissuasion mutuelle entre les deux puissances est prise en compte.

3. Les cibles militaires israéliennes : un affaiblissement ciblé des capacités iraniennes

L’attaque israélienne a spécifiquement ciblé des installations militaires stratégiques en Iran, y compris des sites de fabrication d’armement et des installations de défense sol-air. Ces sites, situés dans l’ouest de l’Iran et aux alentours de Téhéran, sont des infrastructures essentielles à la sécurité iranienne, particulièrement dans le contexte des tensions régionales. En choisissant ces cibles, Israël cherche à affaiblir les capacités défensives de l’Iran sans toutefois risquer d’escalade immédiate.

Les installations de défense sol-air visées par Israël jouent un rôle crucial dans le dispositif de protection iranien contre les attaques aériennes. Elles sont conçues pour détecter et intercepter des attaques, et en les ciblant, Israël diminue la capacité de réponse de l’Iran face à des offensives potentielles. Quant aux usines d’armement, elles permettent à l’Iran de maintenir un haut niveau de production de missiles et d’armement avancé, soutenant non seulement sa propre défense, mais aussi celle de ses alliés régionaux.

4. Israël en position de victime : une stratégie de communication

Israël souhaite souvent se présenter comme une victime, tout en ayant mené une guerre de l’ombre contre l’Iran depuis de nombreuses années. Cette dynamique inclut l’assassinat de scientifiques et de responsables iraniens par le Mossad, ainsi que des opérations spectaculaires comme l’assassinat de Haniyeh à Téhéran et le bombardement du consulat iranien. Ces actions, bien qu’elles soient stratégiques, contribuent à façonner la narrative d’Israël en tant qu’État agressé par l’Iran.

L’objectif de cette stratégie de communication est de rendre l’Iran responsable de toute attaque contre Israël, tout en masquant la réalité de l’engagement militaire israélien. En présentant l’Iran comme un agresseur, Israël cherche à justifier ses frappes et ses opérations de renseignement tout en consolidant son soutien international, notamment de la part des États-Unis.

5. Ce qu’Israël pourrait avoir obtenu en échange de la retenue sur les frappes

L’abstention israélienne de frapper les sites nucléaires et pétroliers iraniens pourrait être interprétée comme une contrepartie, permettant à Netanyahu de bénéficier d’un blanc-seing pour mener d’autres opérations stratégiques dans la région :

  1. Gaza : la poursuite de la guerre et de l’assistance américaine
    Israël pourrait avoir obtenu une liberté d’action plus large à Gaza. En ménageant ses frappes en Iran, Netanyahu aurait assuré un soutien continu de Washington, lui permettant de poursuivre les opérations militaires à Gaza sans trop de pressions internationales. Cette latitude pourrait être interprétée comme une carte blanche pour réprimer les factions hostiles, tout en consolidant son contrôle sur la région. Les États-Unis, en fournissant un soutien matériel et logistique, pourraient contribuer à la continuité de l’opération militaire israélienne.
  2. Liberté d’action au Sud-Liban et perspectives d’occupation
    Au-delà de Gaza, Netanyahu pourrait également avoir reçu des assurances concernant le Liban, en particulier le Sud où les tensions avec le Hezbollah sont constantes. Ce « feu vert » pourrait se traduire par une tolérance internationale pour une éventuelle intervention plus prolongée au Sud-Liban, sous prétexte de « libération » de la région des forces du Hezbollah. Cela inclurait l’occupation de portions du territoire libanais, ainsi qu’une exigence d’accès à l’espace aérien et terrestre libanais, facilitant une surveillance renforcée des activités du Hezbollah dans cette zone frontalière.
  3. Pressions américaines pour accélérer la normalisation avec l’Arabie saoudite malgré la médiation chinoise
    Netanyahu pourrait également compter sur des pressions américaines pour hâter la normalisation des relations israélo-saoudiennes, malgré les tentatives de médiation de la Chine visant à rapprocher Riyad et Téhéran. Washington, soucieux de renforcer son alliance avec Israël et de sécuriser davantage le Moyen-Orient, pourrait multiplier les démarches diplomatiques en faveur d’une normalisation officielle, offrant ainsi à Netanyahu un gain diplomatique majeur dans la région et l’absence de création un état palestinien. Cette normalisation pourrait inclure des accords économiques et sécuritaires bénéfiques pour Israël, en dépit de la réticence saoudienne à s’éloigner de ses liens récents avec l’Iran.
  4. Coopération militaire étendue et fourniture d’équipements stratégiques
    En contrepartie de frappes mesurées en Iran, Netanyahu pourrait espérer un accès renforcé aux systèmes de défense avancés tels que le THAAD, qui serait un atout majeur contre les menaces balistiques. La poursuite de la coopération avec les États-Unis comprend également la fourniture de bombes utilisées pour les opérations contre Gaza et le Liban. Alors que certaines voix réclamaient un moratoire américain sur ces munitions, cette question semble aujourd’hui disparue du débat, donnant à Israël une liberté d’action militaire accrue.

6. Minimiser les risques d’escalade internationale

En s’attaquant aux sites nucléaires ou pétroliers iraniens, Israël aurait franchi une ligne rouge susceptible de déclencher une réaction massive de la communauté internationale. Les sites nucléaires, surveillés de près par les Nations Unies et des organismes de surveillance nucléaire tels que l’AIEA, sont sous l’attention des grandes puissances, notamment des signataires de l’accord sur le nucléaire iranien. Une attaque contre ces installations serait perçue comme une menace directe à la non-prolifération nucléaire et risquerait d’entraîner une riposte diplomatique immédiate de la part de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels d’Israël.

Quant aux installations pétrolières, elles jouent un rôle central dans l’économie mondiale. L’Iran est un fournisseur clé pour des pays comme la Chine, principal importateur de pétrole iranien, qui s’oppose fermement à toute perturbation de l’approvisionnement énergétique. En épargnant ces sites, Israël réduit les risques de confrontations internationales et s’assure de ne pas provoquer de réaction de la part des grandes puissances économiques dépendantes des ressources énergétiques iraniennes.

7. Réduire les capacités de riposte immédiate de l’Iran

Les cibles choisies par Israël, principalement des installations de défense sol-air et des usines d’armement, affaiblissent directement la capacité de défense militaire de l’Iran. Ces infrastructures militaires sont essentielles pour maintenir la souveraineté de l’Iran et défendre son territoire contre des incursions ou frappes étrangères. En touchant ces installations, Israël limite l’efficacité de la défense anti-aérienne iranienne, ce qui pourrait freiner toute tentative de riposte directe en cas de nouvelles escalades.

En frappant les capacités de défense immédiate, Israël ne se contente pas de causer des dommages directs : il impose également une pression continue sur l’Iran, qui se voit contraint de réinvestir dans sa sécurité et de réorganiser son système de défense. Cette approche sert donc aussi de message dissuasif aux autorités iraniennes, les contraignant à reconsidérer toute réaction hâtive contre Israël.

8. Éviter des répercussions économiques et politiques en période électorale aux États-Unis

La période électorale américaine influence également les décisions stratégiques israéliennes. Toute perturbation significative des infrastructures pétrolières iraniennes aurait probablement déclenché une hausse mondiale des prix de l’énergie, un facteur politiquement sensible pour les électeurs américains. Une augmentation des prix de l’essence affecte directement le pouvoir d’achat des Américains, ce qui pourrait influencer leur choix lors des élections et compliquer la tâche de l’administration en place.

En choisissant des cibles militaires, Israël contribue indirectement à éviter un choc économique mondial, préservant ainsi ses relations diplomatiques avec les États-Unis. Cette approche s’avère d’autant plus stratégique si l’on considère l’éventualité d’un retour de Donald Trump au pouvoir, un scénario qui pourrait renforcer la politique de confrontation envers l’Iran. En limitant les répercussions économiques pour l’instant, Israël prépare un terrain favorable pour une escalade plus progressive, dans l’attente d’un contexte politique éventuellement plus propice à Washington.

9. Affaiblir les Alliés Régionaux de l’Iran

Les sites de production d’armement ciblés en Iran jouent un rôle clé dans le soutien que Téhéran apporte à ses alliés régionaux, tels que le Hezbollah au Liban et d’autres milices en Syrie et en Irak. En perturbant ces installations, Israël réduit indirectement les capacités de ces groupes soutenus par l’Iran à mener des actions hostiles ou déstabilisatrices dans la région. Cette approche permet de maintenir une pression sur l’ensemble de l’axe de résistance soutenu par l’Iran sans pour autant provoquer d’escalade globale qui inclurait des acteurs internationaux majeurs.

Cette méthode d’affaiblissement indirect sert aussi les intérêts d’Israël dans d’autres théâtres de conflit, comme le Sud-Liban, où le Hezbollah pourrait se retrouver affaibli par un manque de soutien logistique et militaire provenant de Téhéran. La réduction des capacités militaires iraniennes, même indirectement, est un moyen pour Israël d’assurer sa sécurité et d’étendre son influence sans engager de confrontations directes avec les acteurs de la région.

10. Maintenir une position de confrontation contrôlée

La sélection des cibles témoigne d’une volonté de maintenir une confrontation mesurée. En choisissant des installations militaires qui affaiblissent directement les capacités défensives de l’Iran, Israël évite les symboles de la souveraineté économique ou énergétique qui auraient entraîné une réponse plus large. Cette approche permet à Israël de rester dans une zone de confrontation gérable, d’où il peut poursuivre ses actions sans risquer une guerre de grande envergure.

11. Un contexte électoral américain favorable à Netanyahu

Actuellement, les États-Unis entrent dans une période électorale, ce qui complique davantage la politique étrangère. Les élus et candidats américains doivent naviguer entre des soutiens traditionnels à Israël et les préoccupations croissantes concernant les droits humains et la stabilité régionale. Netanyahu, de son côté, a souvent tenté de capitaliser sur ce contexte pour renforcer ses relations avec l’administration américaine, en plaidant pour une ligne plus agressive contre l’Iran et en cherchant à favoriser une coalition régionale entre Israël et les pays arabes.

Depuis 2016, Netanyahu a régulièrement affirmé que l’Iran représente une menace existentielle pour Israël et a exprimé son désir de voir les États-Unis adopter une position plus militante envers Téhéran. Dans ses discours, il a souvent mis en avant les accords d’Abraham, signés en 2020, comme un modèle de rapprochement entre Israël et ses voisins arabes, afin de contrer l’influence iranienne dans la région. En intégrant cette dynamique, Netanyahu espère obtenir non seulement un soutien militaire, mais aussi une coalition politique régionale contre l’Iran, notamment en cas de victoire de Donald Trump.

12. Les accords d’Abraham : un levier pour Netanyahu

Les accords d’Abraham, qui ont normalisé les relations entre Israël et plusieurs États arabes, comme les Émirats arabes unis et Bahreïn, ont été utilisés par Netanyahu comme un levier pour démontrer les bénéfices d’une alliance anti-iranienne. Netanyahu a affirmé à plusieurs reprises que ces accords montrent que les États arabes sont de plus en plus conscients de la menace iranienne et que cette coopération pourrait conduire à une coalition plus large contre Téhéran.

En 2021, il déclarait : « Les accords d’Abraham sont un changement radical dans la manière dont le monde arabe perçoit Israël. L’Iran est le véritable ennemi, et la coopération entre Israël et ses voisins arabes est essentielle pour la sécurité de la région. » Cette rhétorique vise à justifier une position plus agressive contre l’Iran tout en consolidant les relations diplomatiques avec les pays arabes, suggérant que l’opposition à l’Iran pourrait renforcer ces alliances.

13. Implications de la diplomatie américaine : une approche ambivalente

La diplomatie américaine dans la région reste complexe. D’une part, le soutien indéfectible à Israël continue d’être un pilier de la politique étrangère américaine, tandis que, d’autre part, il existe une volonté de traiter les préoccupations des pays arabes, notamment en ce qui concerne la situation au Liban. Le retour à des négociations sérieuses et la mise en œuvre de la résolution 1701 pourraient être perçus comme des efforts pour contenir les tensions, mais cela pourrait également créer des tensions avec Israël, qui voit d’un mauvais œil toute forme de désarmement du Hezbollah.

La nécessité pour les États-Unis d’équilibrer ces relations tout en maintenant leur influence dans la région souligne la difficulté de la politique étrangère américaine. La récente volonté de normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite, encouragée par les États-Unis, est perçue comme un moyen de contrer l’influence iranienne dans la région, mais cela pourrait également exacerber les tensions avec Téhéran.

Les frappes israéliennes contre l’Iran mettent en évidence un équilibre de dissuasion fragile, sous-tendu par des alliances stratégiques et des messages implicites. En évitant les sites nucléaires, Israël semble avoir pris en compte l’avertissement iranien à propos de Dimona, comprenant l’implication de cette zone stratégique dans les calculs de Téhéran. De fait, ces frappes et l’absence de cibles nucléaires envoient un message réciproque, rappelant l’incident antérieur où l’Iran avait ciblé une base israélienne dans le Néguev, similaire à Dimona.

En parallèle, l’influence de la Chine en tant que médiateur entre l’Arabie saoudite et l’Iran a imposé une retenue stratégique sur les infrastructures pétrolières, permettant d’éviter une crise énergétique mondiale. Ces frappes traduisent ainsi un jeu d’alliances et de dissuasions croisé, où chaque acteur cherche à préserver ses intérêts tout en évitant un conflit ouvert.

Dans ce contexte, l’équilibre des forces entre Israël et l’Iran, influencé par les pressions internationales et les dynamiques internes aux États-Unis, demeure précaire. Les ambitions de Netanyahu, renforcées par le contexte électoral américain, ainsi que les tensions croissantes entre l’Iran et ses voisins, pourraient remodeler le paysage géopolitique du Moyen-Orient pour les années à venir.

Enfin, l’Iran pourrait décider de répliquer ou de retenir sa réponse, un choix dépendant de ses propres calculs stratégiques. Une riposte pourrait renforcer sa posture de résistance, mais risquerait également de provoquer une escalade supplémentaire, rendant l’issue de cette confrontation encore plus incertaine. Cette riposte devrait également intervenir avant les élections américaines.

- Advertisement -
Newsdesk Libnanews
Newsdesk Libnanewshttps://libnanews.com
Libnanews est un site d'informations en français sur le Liban né d'une initiative citoyenne et présent sur la toile depuis 2006. Notre site est un média citoyen basé à l’étranger, et formé uniquement de jeunes bénévoles de divers horizons politiques, œuvrant ensemble pour la promotion d’une information factuelle neutre, refusant tout financement d’un parti quelconque, pour préserver sa crédibilité dans le secteur de l’information.