Un historique conflictuel et des tensions renouvelées
Les relations entre Israël et le Liban restent marquées par des décennies d’hostilité et de conflits successifs. Depuis le retrait israélien du sud du Liban en 2000, les affrontements sporadiques et les tensions frontalières n’ont cessé de rythmer les relations entre les deux pays. En octobre 2023, une offensive israélienne contre le Liban a dégénéré en guerre ouverte en septembre 2024, entraînant la mort de 4 115 personnes et plus de 16 900 blessés, principalement des civils.
Le cessez-le-feu instauré le 27 novembre 2024 sous l’égide des Nations unies et des puissances occidentales n’a pas mis fin aux tensions. Israël a violé plus de 1 000 fois cet accord, provoquant 86 nouvelles victimes et 285 blessés. L’armée israélienne maintient son emprise sur cinq positions stratégiques en territoire libanais, attisant les tensions et compliquant les négociations diplomatiques en cours.
Les groupes de travail diplomatiques et la tentative de dialogue
Face à l’impasse militaire, Washington et Paris ont poussé les deux parties à ouvrir des canaux de dialogue encadrés. Sous l’impulsion de l’envoyée américaine Morgan Ortagus, un processus diplomatique a été mis en place en mars 2025, structuré autour de trois groupes de travail.
Le premier groupe de travail est consacré aux violations du cessez-le-feu et à la question des frontières. Son objectif est de clarifier les incursions israéliennes sur le sol libanais et la présence de forces israéliennes sur les cinq positions occupées. Israël affirme que ces zones servent à prévenir toute attaque du Hezbollah, tandis que le Liban insiste sur leur évacuation immédiate.
Le deuxième groupe traite du dossier des prisonniers libanais détenus en Israël. Cinq prisonniers, dont un membre du Hezbollah, ont récemment été libérés par Israël. Cependant, sept autres sont toujours incarcérés, et leur libération reste une exigence majeure du Liban dans les négociations.
Le troisième groupe est consacré à l’application du cessez-le-feu et aux garanties sécuritaires. Israël exige un engagement du gouvernement libanais à empêcher toute action hostile du Hezbollah depuis le territoire libanais. Le Liban, de son côté, demande un engagement ferme d’Israël à cesser les violations de l’espace aérien et les incursions terrestres.
Les points occupés par Israël au sud du Liban et la stratégie libanaise pour les récupérer
Malgré l’accord de cessez-le-feu, Israël maintient une présence militaire dans cinq zones stratégiques du sud du Liban : Ras al-Naqoura, Mays al-Jabal, Marun al-Ras, les hauteurs d’Al-Adaysseh et une portion de la vallée du Wazzani.
Le Liban tente de faire pression par la voie diplomatique en s’appuyant sur l’ONU et la médiation américaine et française pour obtenir un retrait israélien progressif. Une requête officielle a été adressée au Conseil de sécurité des Nations unies, exigeant que Tel-Aviv respecte ses engagements internationaux.
Israël justifie son maintien dans ces territoires par la présence présumée d’infrastructures militaires du Hezbollah. Selon l’état-major israélien, un retrait sans garanties sécuritaires solides pourrait encourager le Hezbollah à réinvestir ces zones et à intensifier ses activités militaires contre Israël.
Le Hezbollah, un acteur central dans les tensions israélo-libanaises
Le Hezbollah, organisation politico-militaire chiite, reste farouchement opposé à toute normalisation avec Israël. Il considère toute négociation avec Tel-Aviv comme une trahison nationale, une position qui complique la marge de manœuvre du gouvernement libanais.
Depuis la trêve de novembre 2024, le Hezbollah a renforcé sa présence militaire dans le sud du Liban, multipliant les patrouilles et les exercices de mobilisation. Ces démonstrations de force visent à dissuader Israël d’une nouvelle offensive et à réaffirmer son contrôle sur le terrain.
Les tensions internes entre le Hezbollah et les institutions de l’État libanais se sont également accrues. Certains responsables politiques accusent le groupe d’affaiblir les efforts diplomatiques et de maintenir le pays sous tension permanente. Toutefois, dans le sud et la Bekaa, le Hezbollah conserve un large soutien populaire, en grande partie grâce à sa capacité à assurer une protection militaire contre Israël.
Les conséquences du conflit sur les réfugiés palestiniens au Liban
Le conflit israélo-libanais affecte aussi les 400 000 réfugiés palestiniens présents sur le territoire libanais, répartis dans des camps comme Ain al-Hilweh, Burj al-Barajneh et Rashidieh.
Depuis les derniers affrontements, la situation humanitaire des réfugiés s’est considérablement détériorée. L’accès aux soins médicaux est limité, les infrastructures sont détruites et l’UNRWA, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, alerte sur une pénurie alimentaire et un accès à l’eau potable réduit.
Par ailleurs, les tensions entre factions palestiniennes et forces de sécurité libanaises se sont intensifiées. Des rumeurs de collaboration entre certains groupes armés palestiniens et des opposants au Hezbollah ont conduit à un renforcement du contrôle sécuritaire dans les camps, accentuant le sentiment de marginalisation de ces populations.
Israël et sa stratégie de pression sur le Liban
Israël considère ces négociations comme un moyen de garantir sa sécurité à long terme tout en consolidant sa position dans la région. Le Premier ministre Benjamín Netanyahu a déclaré que ces discussions s’inscrivent dans un cadre plus large de stabilisation du Moyen-Orient, faisant écho aux Accords d’Abraham.
Tel-Aviv cherche à obtenir des engagements libanais stricts en matière de sécurité, tout en continuant à exercer des pressions via des survols de drones et des incursions militaires ponctuelles. Ces provocations israéliennes compliquent les efforts diplomatiques et maintiennent un climat de tension élevé.
Vers un apaisement ou une nouvelle escalade ?
Si un accord sur les frontières et les prisonniers pouvait ouvrir la voie à une réduction des tensions, plusieurs facteurs pourraient entraver la stabilisation. L’absence de consensus interne au Liban, le refus d’Israël d’évacuer immédiatement les territoires occupés, et les tensions liées au Hezbollah sont autant de menaces qui pourraient faire capoter les négociations et raviver le conflit.