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Le coût de la guerre israélo-libanaise estimée à 8 milliards de dollar pour le Liban (Banque Mondiale)

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Depuis le début du conflit au Liban, les coûts humains et matériels s’accumulent, exerçant une pression inédite sur l’économie et les infrastructures du pays. Selon le récent rapport de la Banque mondiale intitulé Lebanon Interim Damage and Loss Assessment (DaLA), le conflit a engendré des dommages matériels estimés à 3,4 milliards de dollars et des pertes économiques atteignant 5,1 milliards de dollars.

1. Vue d’ensemble des dommages et des pertes

Le conflit a causé des dommages significatifs aux infrastructures et aux entreprises à travers tout le Liban. Le rapport du DaLA distingue deux types d’impacts économiques : les dommages matériels, représentant les coûts de remplacement des infrastructures et des biens détruits, estimés à 3,4 milliards de dollars, et les pertes économiques, correspondant aux pertes de revenus et de production dues aux interruptions d’activités économiques, totalisant 5,1 milliards de dollars sur une période de 12 mois. Ces coûts sont répartis entre sept secteurs clés : l’agriculture, le commerce, l’environnement, la santé, le logement, le tourisme, et l’éducation. La répartition sectorielle des dommages et pertes économiques donne un aperçu des priorités pour la reconstruction et l’aide humanitaire. En outre, le rapport anticipe une aggravation de ces chiffres si le conflit se prolonge, puisque plusieurs secteurs non inclus dans cette évaluation, comme l’électricité et le transport, continuent de subir des impacts directs et indirects.

Type de dommageMontant total (USD)
Dommages matériels3,4 milliards
Pertes économiques5,1 milliards
Total (dommages + pertes)8,5 milliards

2. Détail des impacts sectoriels

Agriculture

Le secteur agricole libanais, déjà fragilisé par la crise économique de 2019, a subi des dommages évalués à 124 millions de dollars et des pertes de 1,1 milliard de dollars. Les zones de Bekaa, Nabatiyeh et le Sud, principales régions agricoles, ont particulièrement souffert de la destruction des cultures et de la perte du bétail. Avant le conflit, ces régions produisaient jusqu’à 80 % de la production agricole du pays, contribuant aux marchés locaux et internationaux, avec des cultures essentielles comme les agrumes, les bananes et les olives. La destruction des infrastructures agricoles, en particulier les systèmes d’irrigation et les équipements de transformation, a également contribué à ces pertes, en plus des cultures endommagées. L’impact du conflit sur ce secteur pourrait se faire sentir à long terme, affectant non seulement les revenus des agriculteurs, mais aussi la sécurité alimentaire du pays. Les pertes annuelles, estimées à 601 millions de dollars pour les cultures et 533 millions pour l’élevage, révèlent la fragilité d’un secteur vital pour l’économie locale et la population. Le secteur agricole pourrait nécessiter jusqu’à trois années de récupération, même si les conflits cessent.

SecteurDommages (USD)Pertes annuelles (USD)
Agriculture124 millions1,1 milliard

Commerce

Le commerce, qui représentait environ 33 % du PIB libanais avant le conflit, a subi des dommages à hauteur de 178 millions de dollars, tandis que les pertes annuelles sont estimées à 1,7 milliard de dollars. Le déplacement massif des travailleurs et des propriétaires d’entreprises dans les zones de Tyre, Saïda et Nabatiyeh a paralysé le secteur, réduisant considérablement l’activité économique. Environ 11 % des établissements commerciaux dans les zones touchées sont partiellement ou complètement détruits. La fermeture temporaire ou permanente de nombreux commerces a réduit l’accès aux biens essentiels, forçant les consommateurs à limiter leurs dépenses aux produits de première nécessité. Dans les zones moins touchées, les perturbations des chaînes d’approvisionnement ont également entraîné des ruptures de stock, affectant la capacité de reprise du secteur. Les changements dans les habitudes de consommation, avec une forte diminution des biens non essentiels, pourraient aussi provoquer un déclin durable des revenus dans ce secteur.

SecteurDommages (USD)Pertes annuelles (USD)
Commerce178 millions1,7 milliard

Environnement

Le conflit a causé des dommages environnementaux évalués à 221 millions de dollars et des pertes annuelles de 214 millions de dollars. Les forêts, prairies et écosystèmes riverains, essentiels à l’équilibre écologique et à la qualité de vie, ont été dévastés dans les gouvernorats du Sud, de Nabatiyeh et de la Bekaa. La dégradation de ces ressources naturelles entraîne des coûts supplémentaires pour la restauration de la biodiversité et des services écosystémiques. Environ 13 % des forêts, 16 % des prairies et 17 % des écosystèmes riverains sont affectés. Les pertes environnementales incluent la baisse des revenus provenant des services écosystémiques, comme la purification de l’eau et la fertilité des sols, estimée à 198 millions de dollars par an. La contamination des sols et des sources d’eau par des matériaux toxiques, en particulier dans les zones proches des lignes de front, pourrait nécessiter des décennies pour un retour à un état stable. À long terme, cela compromettrait les conditions de vie locales, augmenterait le risque de désertification et accroîtrait la vulnérabilité aux catastrophes naturelles.

SecteurDommages (USD)Pertes annuelles (USD)
Environnement221 millions214 millions

Santé

Le secteur de la santé, principalement composé d’institutions privées, a subi des dommages estimés à 74 millions de dollars, et les pertes économiques atteignent 338 millions de dollars. Le conflit a gravement affecté les infrastructures de santé, notamment dans le Sud et Nabatiyeh, où 66 % des hôpitaux et 36 % des centres de soins primaires sont endommagés ou hors service. Avec 31 hôpitaux et 26 centres de santé primaires endommagés, la crise sanitaire est devenue l’un des principaux défis pour le pays. Le manque de personnel médical et la destruction d’infrastructures de santé contribuent à une augmentation de la mortalité et des maladies, accentuant les inégalités en matière de soins. De plus, la perte de revenus des établissements de santé non opérationnels ou partiellement opérationnels contribue à une pression accrue sur le financement de la santé, limitant davantage l’accès aux soins pour les plus vulnérables.

SecteurDommages (USD)Pertes annuelles (USD)
Santé74 millions338 millions

Logement

Le secteur du logement est le plus touché, avec des dommages évalués à 2,8 milliards de dollars et des pertes économiques de 389 millions de dollars. Près de 100 000 unités de logement, soit environ 8 % du parc immobilier des régions concernées, ont été endommagées. Les gouvernorats du Sud, de Nabatiyeh et de la Bekaa concentrent 81 % des dégâts. L’ampleur des destructions laisse entrevoir une crise du logement à long terme, avec des répercussions profondes sur les conditions de vie de milliers de familles déplacées. Cette destruction du parc immobilier engendre également une baisse significative des recettes fiscales issues des propriétés et un ralentissement du marché immobilier dans les zones affectées. Par ailleurs, les coûts de reconstruction élevés pourraient dissuader les investissements futurs dans le secteur, accentuant les inégalités en matière de logement.

SecteurDommages (USD)Pertes annuelles (USD)
Logement2,8 milliards389 millions

Tourisme et hôtellerie

Le tourisme, pilier traditionnel de l’économie libanaise, a été fortement impacté. Les dommages sont estimés à 18 millions de dollars, tandis que les pertes annuelles s’élèvent à 1,1 milliard de dollars, causées par une baisse drastique des arrivées de touristes et du taux d’occupation des hôtels, qui chute à moins de 10 % en été 2024. La diminution des arrivées de touristes a impacté plusieurs sous-secteurs comme l’hébergement, la restauration et le commerce de détail, laissant une empreinte durable sur le secteur de l’hôtellerie et les revenus qui en découlent. Les évacuations et les restrictions de voyage recommandées par de nombreux pays ont aussi accentué cette crise. À long terme, la relance du tourisme dépendra de la stabilité politique et sécuritaire du pays, ainsi que de la capacité à regagner la confiance des visiteurs étrangers.

SecteurDommages (USD)Pertes annuelles (USD)
Tourisme18 millions1,1 milliard

3. Analyse macroéconomique et impact global sur le PIB

Selon le rapport de la Banque mondiale, le conflit devrait réduire la croissance du PIB libanais de 6,6 % pour l’année 2024. Cela s’ajoute à une contraction de plus de 34 % du PIB réel depuis 2019, une perte économique équivalente à 15 années de croissance. En 2023, la consommation privée représentait 134 % du PIB ; les perturbations économiques actuelles ont considérablement ralenti cette composante clé de la croissance. Le conflit a également affecté le commerce extérieur, notamment dans le secteur des services, avec une baisse des exportations de services due à l’effondrement du secteur touristique. La chute de la consommation privée, en raison des déplacements de population et de la perte de revenus, exacerbe le ralentissement économique, réduisant les perspectives de reprise dans un contexte de crise prolongée. L’effondrement de la consommation, provoqué par les pertes d’emplois et l’augmentation des prix des biens essentiels, alourdit l’impact global sur la croissance, renforçant le risque de récession.

AnnéeCroissance projetée du PIB en %
20230,9 (sans conflit)
2024-5,7

4. Crise humanitaire et déplacement de la population

Le conflit a provoqué un déplacement massif de la population, avec plus de 875 000 personnes déplacées à l’intérieur du pays. Cette situation a aggravé la crise humanitaire au Liban, augmentant la pression sur les services publics, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation, et de l’approvisionnement en eau et électricité. Environ 166 000 personnes ont perdu leur emploi, ce qui représente une perte de revenus annuels estimée à 168 millions de dollars. Les régions hôtes, telles que Beyrouth, doivent faire face à une demande accrue de services de base, ce qui représente un fardeau supplémentaire pour les autorités locales déjà sous pression. Les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes en situation de handicap sont les plus vulnérables face à ce déplacement massif. La demande croissante de logements d’urgence et de services de santé pour les déplacés met les infrastructures locales à rude épreuve, aggravant les tensions sociales et les défis logistiques.

5. Perspectives à long terme et besoins de reconstruction

Face à ces pertes cumulées, le Liban est confronté à des défis majeurs pour envisager une reconstruction durable. La Banque mondiale envisage de lancer une évaluation rapide des besoins (RDNA) une fois la situation stabilisée. Cette évaluation sera essentielle pour déterminer les priorités de financement pour la reconstruction des infrastructures et pour relancer les activités économiques. La Banque mondiale travaille actuellement à activer des plans de réponse d’urgence, visant à rediriger des ressources existantes pour répondre aux besoins immédiats des populations affectées. Cependant, les besoins pour une reconstruction complète et durable restent élevés, et nécessiteront une aide internationale et une coordination des acteurs publics et privés.

L’ampleur des dommages et des pertes causés par le conflit au Liban représente un frein significatif pour l’économie libanaise et les perspectives de relance. La destruction des infrastructures, les pertes humaines et économiques, et l’augmentation des besoins humanitaires et sociaux appellent à une réponse rapide et à un engagement soutenu pour la reconstruction. Le Liban devra également s’appuyer sur des solutions innovantes et durables pour renforcer sa résilience face aux crises futures. Ce rapport met en évidence la nécessité pour le pays de se préparer à une phase de reconstruction de longue haleine, appuyée par des financements internationaux et un renforcement des capacités de résilience des communautés locales.

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Newsdesk Libnanews
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