Pour l’heure, on assiste à comme une veillée d’arme avec un calme relatif avant la tempête qui arrive.Tout laisse en effet à croire que les autorités libanaises s’apprêteraient à déclarer un état de défaut ce vendredi ou ce samedi, à l’issue d’un sommet économique qui se déroulera au Palais Présidentiel de Baabda. Seront présents, le Président de la République, le Général Michel Aoun, le Président de la Chambre Nabih Berri, le Premier Ministre Hassan Diab et différents responsables économiques.

Ainsi, le Liban pourrait ne pas honorer le paiement des 1.2 milliards d’Eurobonds arrivant à échéance le 9 mars prochain, ce qui pourra ouvrir la voie à des négociations pour une restructuration de l’importante dette publique qui atteint 166% du PIB, alors que le taux de croissance est désormais négatif. Ce dernier, alors que le Pays des Cèdres est en récession depuis 2018, pourrait encore même reculer de 10%.

Par ailleurs, en raison de la situation économique, la Livre Libanaise a atteint son plus bas niveau historique depuis les années 1990, avec un taux de change sur les marchés parallèles de 2 675 LL/USD hier.

Aucune solution n’aurait réellement émergée à part la mise en défaut pour honorer les 4.7 milliards de dollars que devrait débourser le Liban cette année seulement, soit un montant qui serait équivalent aux réserves monétaires nettes de la Banque du Liban alors que celle-ci assure aujourd’hui l’achat des produits de première nécessité à la population libanaise comme le blé, les médicaments ou l’essence. Le président de l’association des banques du Liban (ABL) a révélé que le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé a finalement accepté de communiquer au Président de la République, le Général Michel Aoun, le montant des réserves monétaires liquides ou nettes qu’il détient. Elles seraient ainsi inférieures aux chiffres officiels et insuffisantes pour tenir plus d’une année, indique Salim Sfeir.

Les responsables politiques comme le président de la chambre ont ainsi estimé qu’il serait inacceptable de payer ces obligations à échéance aujourd’hui, accusant par ailleurs les banques libanaises d’avoir comploté avec des fonds vautours comme Ashmore Group, sans le nommer publiquement, afin de faire pression sur l’état.

Cette décision de mettre le Liban en état de défaut est en effet controversée, les banques et certains fonds vautours ayant tenté de faire pression sur les autorités libanaise alors que le paiement de ces obligations pourrait amener à des troubles dans la rue, la population estimant nécessaire de réserver ces fonds à l’achat de produits de première nécessité au lieu de les voir être transférés à des établissements financiers.

Pour rappel, le ministère de la justice a ouvert une information judiciaire concernant les circonstances de la vente de plus de 300 millions de dollars d’Eurobonds arrivant à échéance le 9 mars à ce groupe qui a ainsi pu augmenter la part qu’il détient et donc le volume de vote à plus de 29% pour négocier avec l’état. Pour rappel, il faut que 75% des volumes de vote soient d’accord avec les propositions du gouvernement libanais pour que celui-ci entre en vigueur.

Ainsi, le Premier Ministre Hassan Diab et le Ministre des Finances Ghazi Wazni ont demandé aux banques libanaises de racheter les obligations qu’elles avaient précédemment vendu mais il n’est pas certain que les fonds vautours puissent être d’accord ou encore que les établissements financiers libanais, déjà confrontées à une demande de hausse de leurs fonds pour approvisionner une possible perte induite par une mise en défaut de l’état et à une crise de liquidité, acceptent.

Aussi les banques libanaises ont tenté également de faire pression sur les autorités, estimant qu’en cas de défaut, ce dernier devrait d’abord présenter un programme de réformes économiques et monétaires avant de négocier avec elles.

Pour l’heure, les informations disponibles laissent penser que cette annonce sera accompagnée par un plan de réformes économiques, fiscales et monétaires afin de convaincre les créanciers d’éviter de longues négociations ou encore le recours à la justice afin de rembourser les sommes qui leurs sont dues.

Cette annonce de mise en défaut pourrait être suivie par d’importants troubles à l’ordre public, notamment en raison des effets qu’elle pourrait avoir sur la parité entre livre libanaise et dollar. Certaines sources craignent ainsi un retour au blocage des routes et des incidents comme le Liban a connu depuis la nuit du 17 au 19 octobre 2010.

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