L’Arabie saoudite face aux pressions internationales
L’Arabie saoudite joue depuis plusieurs décennies un rôle clé dans la défense des droits palestiniens sur la scène internationale. Cette position repose sur des engagements historiques et religieux, mais elle est aujourd’hui mise à l’épreuve par des dynamiques géopolitiques complexes. Selon El Sharq (13 février 2025), Riyad subit des pressions croissantes de la part des États-Unis, qui espèrent convaincre le royaume de rejoindre pleinement le processus de normalisation avec Israël, à l’image des accords d’Abraham signés par d’autres pays arabes.
Le prince héritier Mohammed ben Salmane (MBS) a récemment réaffirmé, lors d’une rencontre avec des diplomates européens, que l’Arabie saoudite maintiendrait son soutien à une solution à deux États. Il a souligné que toute avancée dans les relations avec Israël dépendrait des progrès réalisés en faveur des Palestiniens. Cette déclaration contraste avec les efforts de l’administration américaine, qui cherche à renforcer les alliances au Moyen-Orient sans condition préalable sur la question palestinienne.
L’Arabie saoudite face aux pressions internationales
L’Arabie saoudite, bien qu’ancrée dans une longue tradition de soutien à la cause palestinienne, fait aujourd’hui face à des défis diplomatiques complexes qui pourraient redéfinir son rôle dans le processus de paix israélo-palestinien. Le royaume, traditionnellement perçu comme l’un des plus fervents défenseurs des droits palestiniens, subit des pressions croissantes, notamment de la part des États-Unis, pour entamer un rapprochement formel avec Israël. Ces pressions ont été particulièrement intenses après la normalisation des relations entre Israël et plusieurs autres pays arabes sous les Accords d’Abraham, signés en 2020, qui ont marqué un tournant historique dans la diplomatie du Moyen-Orient. Selon El Sharq (13 février 2025), la Maison Blanche a récemment intensifié ses appels à l’Arabie saoudite, cherchant à la convaincre de rejoindre le processus de normalisation et de signer un accord similaire à celui des Émirats arabes unis ou de Bahreïn. Cette pression se comprend dans le cadre de la vision stratégique des États-Unis, qui cherchent à bâtir une coalition de pays arabes modérés alignée sur leurs intérêts géopolitiques et sécuritaires, en particulier face à la menace croissante de l’Iran. Les États-Unis considèrent également que la normalisation complète des relations entre Israël et les pays arabes pourrait permettre une plus grande stabilité régionale, tout en réduisant l’influence iranienne dans la région.
Cependant, malgré ces pressions, l’Arabie saoudite demeure fermement attachée à sa position traditionnelle concernant la question palestinienne. Le prince héritier Mohammed ben Salmane (MBS), qui incarne la nouvelle génération de dirigeants saoudiens, a récemment rappelé que toute avancée dans les relations avec Israël devait être conditionnée par des progrès réels en faveur des Palestiniens. Selon Al Sharq Al Awsat (13 février 2025), MBS a mis en avant lors de discussions avec des diplomates européens que la paix au Moyen-Orient ne serait possible que si les droits des Palestiniens étaient respectés, avec en priorité la création d’un État palestinien souverain. Ce positionnement s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, il est ancré dans l’histoire et la légitimité du royaume, qui se présente comme le gardien des lieux saints de l’Islam et un acteur clé dans le monde musulman. Toute rupture avec la cause palestinienne pourrait être perçue comme une trahison, à la fois sur le plan interne, où la question palestinienne est extrêmement sensible, et au niveau régional, où l’Arabie saoudite est considérée comme le leader de l’islam sunnite. Une normalisation trop rapide et sans concession pour la Palestine pourrait également éroder la position de Riyad au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et parmi ses alliés arabes.
En outre, l’opinion publique en Arabie saoudite reste largement favorable à la cause palestinienne. Le soutien populaire au droit des Palestiniens est une donnée cruciale que le gouvernement saoudien doit prendre en compte dans ses décisions diplomatiques. L’évolution de cette situation met en lumière l’équilibre fragile entre les intérêts stratégiques de Riyad et son engagement envers la cause palestinienne.
Un soutien historique inscrit dans la diplomatie saoudienne
L’engagement de l’Arabie saoudite en faveur des Palestiniens n’est pas un phénomène récent. Depuis la fondation du royaume en 1932, les dirigeants saoudiens ont systématiquement soutenu les aspirations palestiniennes, tant sur le plan diplomatique que financier. Ce soutien repose sur plusieurs piliers, dont la solidarité religieuse, géopolitique et stratégique. Dès les premières heures de la création de l’État d’Israël en 1948, l’Arabie saoudite a soutenu les pays arabes dans leur opposition à l’occupation des terres palestiniennes et à la création d’Israël. Ce soutien s’est matérialisé par la participation aux guerres israélo-arabes, ainsi qu’en fournissant un soutien logistique et financier aux États arabes en guerre contre Israël.
Un tournant majeur dans l’engagement de l’Arabie saoudite pour la cause palestinienne est survenu en 2002, lors de la proposition de l’Initiative de paix arabe par le roi Abdallah. Ce plan proposait la normalisation des relations avec Israël en échange d’un retrait israélien des territoires occupés en 1967, ainsi que la création d’un État palestinien indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale. L’Initiative a été adoptée par l’ensemble des pays arabes, marquant un tournant dans la diplomatie arabe, mais elle n’a pas abouti à des résultats concrets, Israël n’ayant pas accepté les termes proposés.
Toutefois, malgré l’échec de cette initiative à être pleinement mise en œuvre, l’Arabie saoudite a continué de défendre ce cadre diplomatique. Selon Al Diyar (13 février 2025), le royaume considère cette proposition comme la référence principale pour toute négociation future entre Israël et les Palestiniens. Dans ses discours à l’ONU et lors des réunions de la Ligue arabe, l’Arabie saoudite n’a cessé de rappeler l’importance de respecter cette initiative, soulignant que la reconnaissance d’Israël par les pays arabes ne pourrait intervenir qu’à condition que les Palestiniens aient un État indépendant et viable.
Cet engagement n’est pas seulement diplomatique. L’Arabie saoudite a également soutenu financièrement les Palestiniens de manière constante, en étant l’un des principaux bailleurs de fonds pour l’Autorité palestinienne. Le royaume a financé des projets de développement en Cisjordanie et à Gaza, contribuant à la construction d’infrastructures, à l’amélioration des services de santé, ainsi qu’au financement de programmes d’éducation. Le Fonds saoudien pour le développement a alloué plusieurs milliards de dollars à ces initiatives, consolidant ainsi le rôle du royaume en tant que principal soutien financier des Palestiniens dans le monde arabe.
Un équilibre fragile entre intérêts stratégiques et engagement humanitaire
Si l’Arabie saoudite reste attachée à la défense des droits des Palestiniens, elle doit aujourd’hui jongler avec des intérêts stratégiques qui modifient progressivement ses relations avec Israël. Le royaume, en raison de sa situation géopolitique et de la montée des menaces régionales, notamment en provenance de l’Iran, est de plus en plus ouvert à des formes de coopération non officielles avec l’État hébreu. Selon Al Sharq Al Awsat (13 février 2025), Israël et l’Arabie saoudite partagent des préoccupations sécuritaires communes concernant l’expansion de l’influence iranienne au Moyen-Orient. L’Iran, par le biais de ses milices en Syrie, au Liban et en Irak, et de son soutien aux rebelles houthis au Yémen, représente une menace stratégique pour le royaume saoudien.
Ainsi, bien que Riyad continue de défendre publiquement la cause palestinienne, il est de plus en plus ouvert à une coopération sécuritaire discrète avec Israël pour contrer l’influence de Téhéran. Selon Al Diyar (13 février 2025), plusieurs entreprises israéliennes ont déjà accès aux marchés saoudiens, et des discussions informelles ont eu lieu entre des responsables israéliens et saoudiens sur des questions de cybersécurité et de partage de renseignements. Cependant, cette coopération demeure loin de la normalisation officielle et dépendra de l’évolution des événements régionaux et des changements dans les rapports de force.
Les autorités saoudiennes, conscientes des implications internes et régionales, évitent de franchir des étapes trop rapides dans leurs relations avec Israël. Un rapprochement trop prononcé sans avancées substantielles pour les Palestiniens pourrait entraîner une réaction négative tant sur le plan interne qu’externe. Le royaume cherche donc à maintenir un équilibre entre ses alliances stratégiques avec les États-Unis et Israël et son rôle traditionnel de défenseur des droits palestiniens.
Les perspectives d’évolution de la position saoudienne
L’Arabie saoudite pourrait voir sa position évoluer au fil du temps, en fonction des dynamiques régionales et internationales. Si Riyad reste attaché à la solution à deux États, il est possible que le royaume soit amené à modifier sa stratégie en réponse à l’évolution des rapports de force dans la région. Selon Al Joumhouria (13 février 2025), des discussions secrètes ont déjà eu lieu entre responsables saoudiens et israéliens, et des progrès ont été réalisés dans des domaines tels que la cybersécurité, les énergies renouvelables et l’agriculture.
L’un des facteurs déterminants pour l’évolution de la position saoudienne est le rôle des États-Unis. Sous l’administration actuelle de Joe Biden, Washington a cherché à promouvoir une approche plus équilibrée du dossier israélo-palestinien, tout en maintenant une pression constante sur Riyad pour qu’elle rejoigne officiellement les Accords d’Abraham. Toutefois, un éventuel retour de Donald Trump à la présidence américaine en 2025 pourrait modifier ces dynamiques. L’ancien président avait adopté une approche plus directe, mettant une forte pression sur les pays arabes pour qu’ils normalisent leurs relations avec Israël, sans réelle contrepartie pour les Palestiniens.
Si Trump revenait au pouvoir, il est probable qu’il chercherait à relancer cette dynamique, en exerçant des pressions encore plus fortes sur l’Arabie saoudite. Dans ce contexte, Riyad pourrait être amenée à revoir sa stratégie pour ne pas compromettre ses relations avec Washington. Toutefois, le royaume devra également prendre en compte les réactions de sa population et de l’opinion publique arabe, qui restent majoritairement opposées à une normalisation avec Israël sans avancées substantielles sur la question palestinienne.
Une normalisation progressive sous conditions ?
Si Riyad devait s’orienter vers une normalisation avec Israël, il est probable que ce processus se fasse de manière graduelle et conditionnée à des avancées concrètes en faveur des Palestiniens. Selon Al Sharq Al Awsat (13 février 2025), l’Arabie saoudite pourrait chercher à obtenir des engagements clairs de la part d’Israël concernant l’arrêt de la colonisation en Cisjordanie et la reconnaissance d’un État palestinien dans les frontières de 1967.
De plus, le royaume pourrait exiger des garanties internationales pour s’assurer qu’un tel accord ne soit pas vidé de son sens par des politiques expansionnistes israéliennes ultérieures. Cela pourrait inclure un rôle renforcé de l’ONU dans le processus de paix, ainsi qu’une implication plus active des puissances européennes et des pays arabes influents.
D’un autre côté, certains analystes estiment que l’Arabie saoudite pourrait se contenter d’une normalisation progressive, axée d’abord sur des accords économiques et technologiques avec Israël, sans reconnaissance politique immédiate. Une telle approche permettrait à Riyad de bénéficier des avantages d’une coopération avec Israël tout en maintenant son engagement diplomatique en faveur des Palestiniens.
Les conséquences possibles pour la région
Quel que soit le scénario retenu par Riyad, une évolution de la position saoudienne aura des répercussions majeures sur la région. Si l’Arabie saoudite normalise ses relations avec Israël, cela pourrait inciter d’autres pays arabes à suivre le même chemin, affaiblissant ainsi la position des Palestiniens dans les négociations futures.
À l’inverse, si Riyad reste ferme sur ses exigences concernant un État palestinien, elle pourrait renforcer la pression internationale sur Israël et relancer un processus de paix aujourd’hui au point mort. Cette position pourrait également lui permettre de conserver son leadership dans le monde arabe et musulman, en réaffirmant son rôle de protecteur des droits palestiniens.
Dans les deux cas, l’Arabie saoudite devra faire preuve d’une grande habileté diplomatique pour concilier ses intérêts stratégiques avec son engagement historique en faveur de la Palestine. La prochaine décennie sera déterminante pour observer l’orientation que prendra Riyad et son impact sur la question israélo-palestinienne.