Le Liban se prépare à une étape décisive dans ses relations avec Israël, alors que les États-Unis intensifient leurs efforts pour imposer des négociations politiques directes entre les deux pays. Selon un rapport publié le 18 mars 2025, Steve Witkoff, envoyé spécial américain pour le Moyen-Orient, a critiqué la gestion par les responsables libanais de la question du Hezbollah, annonçant que le Liban serait bientôt appelé à engager des discussions face-à-face avec Israël. Parallèlement, un autre rapport du même jour révèle que les États-Unis, des pays occidentaux et la plupart des nations arabes conditionnent toute aide à la reconstruction des zones dévastées par la guerre à l’élimination des armes du Hezbollah, un enjeu central dans un pays au bord de l’effondrement.
Ces annonces interviennent moins de quatre mois après le cessez-le-feu du 27 novembre 2024, qui a mis fin à plus d’un an d’hostilités entre Israël et le Hezbollah. Avec des besoins de reconstruction estimés à 11 milliards de dollars, le Liban, sous la présidence de Joseph Aoun, fait face à une pression internationale croissante pour réformer son système politique et sécuritaire, dans un contexte économique déjà désastreux.
Une initiative américaine ferme
Lors d’une rencontre à Doha il y a quelques jours, Steve Witkoff a exprimé le mécontentement de son administration face à ce qu’il a qualifié de « performance des responsables libanais dans leur gestion du Hezbollah ». Selon un rapport publié le 18 mars 2025, relayant les propos d’une figure libanaise anonyme ayant assisté à cette réunion, Witkoff a dénoncé une approche de « manœuvres et tergiversations » qui, selon lui, n’a pas répondu aux attentes de Washington. Pour remédier à cette situation, il a déclaré que le Liban serait invité à entamer des négociations politiques directes avec Israël, une démarche qui impliquerait un représentant civil libanais et Ron Dermer, ministre israélien des Affaires stratégiques et proche de Benjamin Netanyahu.
Le rapport détaille plusieurs points soulevés par Witkoff. Tout d’abord, aucune reconstruction ne sera permise dans le sud du Liban, la Bekaa ou les banlieues sud de Beyrouth avant le lancement de ce processus avec Tel-Aviv. Les résidents des villes situées en première ligne seront également empêchés de retourner à leurs activités quotidiennes. Ensuite, Israël conservera le contrôle de cinq points stratégiques au Liban pendant environ un an, refusant de discuter des 13 points frontaliers disputés à moins que le plan américain ne soit respecté, bien qu’un retrait anticipé puisse précéder les prochaines élections législatives. Enfin, Witkoff a exigé que le Hezbollah soit interdit de conserver ses armes, non seulement au sud du Litani, mais également dans toutes ses zones d’implantation, y compris le nord du Litani et la Bekaa.
Un consensus international sur le désarmement
Un second rapport, également daté du 18 mars 2025, confirme cette position en élargissant le cadre international. Les États-Unis, des pays occidentaux influents et la plupart des nations arabes ont affirmé qu’aucun financement ne serait accordé pour reconstruire les zones détruites par Israël tant que des « armes hors du contrôle de l’État » subsisteraient, en référence explicite à l’arsenal du Hezbollah. Cette condition a été transmise à plusieurs responsables libanais, dont le président Joseph Aoun, qui ont été informés que l’aide à la reconstruction et à l’économie ne serait disponible que pour un État libanais capable d’étendre son autorité sur l’ensemble de son territoire.
Le coût de la guerre, qui s’est étendue du 8 octobre au 20 décembre 2024, est estimé à 11 milliards de dollars pour la reconstruction et le relèvement, selon un rapport officiel publié en 2025. Le coût économique total atteint 14 milliards de dollars, comprenant 6,8 milliards de dollars de dommages matériels et 7,2 milliards de dollars de pertes dues à une baisse de productivité, des revenus manquants et des coûts opérationnels. Le secteur immobilier a subi les pertes les plus lourdes, avec 4,6 milliards de dollars, suivi par le tourisme, qui a perdu 3,6 milliards de dollars.
Une économie dévastée
Le conflit a porté un coup sévère à une économie libanaise déjà en crise depuis 2019. Le PIB réel du pays a diminué de 7,1 % en 2024, contre une croissance prévue de 0,9 % sans guerre, selon des estimations officielles. Depuis 2019, le PIB cumulé a chuté de près de 40 %, un déclin qui combine les effets d’une crise financière antérieure et des récents affrontements. Avant même le début des hostilités, le Liban souffrait d’une dévaluation monétaire de plus de 95 % et d’une inflation galopante, rendant la vie quotidienne intenable pour beaucoup.
Les combats entre Israël et le Hezbollah, qui ont duré plus d’un an avec deux mois de guerre ouverte, ont ravagé les bastions du mouvement chiite dans le sud, la Bekaa et les banlieues sud de Beyrouth. Le cessez-le-feu du 27 novembre 2024 a mis fin aux hostilités, mais a laissé derrière lui un paysage de destruction et un Hezbollah affaibli, ce qui a facilité la fin d’un vide politique de deux ans avec l’élection de Joseph Aoun et la formation d’un nouveau gouvernement.
Les zones sinistrées en suspens
Les régions les plus affectées – le sud du Liban, la Bekaa et les banlieues sud de Beyrouth – restent dans l’attente. Le rapport de reconstruction met en évidence la destruction massive des logements, estimée à 4,6 milliards de dollars, dans ces zones densément peuplées. Le tourisme, autrefois un moteur économique, a perdu 3,6 milliards de dollars en raison de l’insécurité qui a vidé le pays de ses visiteurs. Selon Witkoff, aucun retour des habitants ni aucune reconstruction ne sera autorisé dans ces zones tant que les négociations avec Israël n’auront pas débuté, une mesure visant à maintenir la pression sur le gouvernement libanais.
Une exigence de désarmement total
L’interdiction des armes du Hezbollah, soulignée par Witkoff, s’étend au-delà du sud du Litani, une zone sous surveillance internationale depuis la résolution 1701 de 2006. Le rapport précise que cette interdiction inclut le nord du Litani et la Bekaa, des régions où le Hezbollah maintient une présence significative. Cette exigence reflète une volonté de démanteler complètement l’arsenal du mouvement, une tâche que les responsables libanais ont jusqu’ici évité, soit par manque de capacité, soit par crainte de représailles internes.
Le second rapport renforce cette position en indiquant que les États-Unis, des pays occidentaux et la plupart des nations arabes partagent cet objectif. Les messages adressés au président Joseph Aoun insistent sur la nécessité d’un État fort, capable de monopoliser l’usage de la force, une condition préalable à tout déblocage des 11 milliards de dollars nécessaires à la reconstruction.
Une occupation prolongée
Witkoff a également mentionné que les cinq points occupés par Israël, probablement des positions stratégiques le long de la frontière sud, resteront sous contrôle israélien pendant environ un an. Cette occupation, qui pourrait être levée avant les élections législatives si le Liban se conforme au plan américain, vise à garantir que les négociations avancent. Les 13 points frontaliers disputés, un différend historique entre les deux pays, ne seront pas abordés tant que les conditions américaines ne seront pas remplies, selon le rapport du 18 mars.
Une aide suspendue à des réformes
Les 11 milliards de dollars estimés pour la reconstruction représentent une bouée de sauvetage pour le Liban, mais leur obtention dépend de réformes majeures. Le coût économique total de 14 milliards de dollars, incluant les pertes indirectes, dépasse de loin les capacités d’un pays dont le PIB a chuté de 40 % depuis 2019. Les déclarations relayées le 18 mars indiquent que cette aide, promise par les États-Unis, des pays occidentaux et des nations arabes, ne sera débloquée qu’une fois le Hezbollah désarmé et l’autorité de l’État restaurée.