Malgré l’initiative du président français Emmanuel Macron, l’État est paralysé. « Rien ne bouge » comme l’a dit il y a peu le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.

Cette paralysie de l’État est causée par les partis à qui l’accord de Taëf a confié les pouvoirs exécutif (transféré de la Présidence de la République au gouvernement et à son chef) et législatif (détenu par le Parlement – qui ne peut plus réellement être dissout et qui peut même auto-prolonger son mandat – et son chef). 

Ces partis exacerbent le confessionalisme et nombre d’entre eux ont des allégeances étrangères régionales et internationales. Certains de leurs membres ont même des conflits d’intérêts avec les milieux d’affaires, financiers et bancaires. 

Pour toutes ces raisons, les réformes sur « la transparence, la régulation de l’électricité, la lutte contre la corruption, la réforme du système financier et bancaire » réclamées par Jean-Yves Le Drian et par une majorité d’entre nous sont bloquées.

En effet, la plupart d’entre nous souhaitons édifier un État-nation reposant sur la liberté, une identité citoyenne (avec l’unification du statut personnel dans le code civil), le droit et l’égalité (avec une justice agissant indépendamment du pouvoir des partis), la promotion sociale par le mérite, la sécurité (avec un État ayant le monopole des armes sur l’ensemble du territoire et contrôlant celui-ci et ses frontières) et la dignité ainsi que sur une neutralité positive et permanente reconnue et garantie internationalement et une loi électorale obligeant les députés à rendre des comptes à ceux qu’ils sont censés représentés (il y aurait ainsi autant de circonscriptions électorales que de députés afin que chacune n’élise qu’un seul député). 

Pour lutter contre la corruption et récupérer les fonds détournés, nous espérons que l’audit juricomptable (« forensic audit ») de la Banque Centrale du Liban (BDL) sera étendu à tous les ministères, aux organismes d’État créés après la guerre (le Conseil du Sud, la Caisse des déplacés, le Conseil pour le développement et la reconstruction – CDR – et le Haut Comité de secours), aux services de l’administration et aux banques. Pour obtenir de la transparence, il est nécessaire de passer à une gouvernance 2.0, c’est-à-dire un e-gouvernement et une e-administration. 

Mais tant que les partis contrôleront l’État, rien ne pourra être réalisé. 

C’est pourquoi, il faut impulser une « Révolution » par le bas, en prenant le pouvoir localement grâce à une décentralisation, principe inscrit dans la Constitution. La décentralisation c’est en effet un partage du pouvoir entre l’État d’une part et les collectivités locales (municipalités, cazas et mohafazats ou encore régions) et donc le transfert par l’État à celles-ci d’une partie de son pouvoir. C’est ce pouvoir local qu’il nous faut réclamer et prendre car c’est notre droit constitutionnel. 

L’accord de Taëf a prévu une « décentralisation administrative », ce qui est une bonne chose. Toutefois, il ne s’agit en fait que d’une « déconcentration administrative », c’est-à-dire une « décentralisation ratée » puisque le caïmacam et le mohafez sont nommés et non élus. Il faudrait à minima une véritable décentralisation administrative (avec des organes législatifs et exécutifs locaux élus et disposant de pouvoirs étendus) comme dans tous les pays démocratiques développés et si possible une décentralisation poussée : le régionalisme. 

Une telle décentralisation permettrait de pallier les carences et les défaillances de l’État (comme par exemple la collecte de la TVA et la vérification du paiement des factures d’électricité ainsi que le ramassage et le traitement des ordures). 

L’État est en situation de surendettement, de défaut de paiement et de faillite. Ce n’est pas le cas des municipalités, des cazas et des mohafazats. Avec la décentralisation, ces derniers pourraient d’une part emprunter auprès des organismes internationaux (comme la Banque mondiale), de l’Union Européenne et de pays qui le souhaitent peut-être à travers un Plan Marshall directement en leur faveur ; et, d’autre part résoudre plus rapidement les problèmes locaux et réaliser des projets locaux – liés à l’agriculture, la pêche, l’industrie, l’électricité, l’eau, l’écotourisme, le tourisme religieux, l’éducation locale permanente (y compris dans l’apprentissage des innovations et des nouvelles technologies, des langues, de l’artisanat, des arts comme la musique et de métiers), l’innovation technologique (y compris dans le digital et la robotique), l’environnement (y compris le ramassage et le traitement des ordures), le développement durable, l’assurance maladie et la santé – pouvant relancer l’économie, créer de l’emploi, développer le pays et freiner l’exode rural et l’émigration. 

Enfin, aux élections locales, nous pourrons demander des comptes aux élus locaux plus aisément qu’à nos députés, ministres et présidents.  

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