Le 21 mars 2025, le président de la République libanaise, le général Joseph Aoun, a présidé une réunion sécuritaire au palais de Baabda, en compagnie des principaux responsables des forces de sécurité du pays. Étaient présents le commandant en chef de l’armée, le général Rodolphe Haikal, le directeur général des Forces de sécurité intérieure, le général Raed Abdallah, le directeur général de la Sûreté générale, le général Hassan Choukair, et le directeur général de la Sécurité de l’État, le général de brigade Edgar Lawandos. Cette rencontre avait pour objectif d’évaluer la situation sécuritaire au Liban, marquée par des défis croissants, notamment à la frontière avec la Syrie, et de coordonner les efforts pour maintenir la stabilité nationale.
Les discussions ont porté sur un état des lieux des conditions sécuritaires dans différentes régions du pays. Selon l’Agence nationale d’information (NNA) le 21 mars 2025, les participants ont examiné les tensions persistantes au sud, où les violations israéliennes du cessez-le-feu continuent, ainsi que les menaces émergentes à la frontière syrienne, où des incidents récents ont alarmé les autorités. Aucun communiqué officiel détaillé n’a été publié à l’issue de la réunion, mais les responsables ont insisté sur la nécessité d’une coordination renforcée entre les institutions sécuritaires pour répondre aux multiples risques auxquels le Liban est confronté.
Le contexte actuel est particulièrement difficile. L’élection de Joseph Aoun à la présidence, le 9 janvier 2025, a été perçue comme une tentative de restaurer la confiance dans un État fragilisé par des crises successives. Ancien chef de l’armée, il a pris ses fonctions alors que le Liban s’efforce d’appliquer la résolution 1701 des Nations unies, qui exige un cessez-le-feu total au sud et le retrait des forces israéliennes des zones occupées depuis la guerre de 2024. Cependant, des violations répétées, signalées par le ministère libanais de la Défense dans un rapport officiel le 4 janvier 2025, compliquent cette mission. Parallèlement, les développements à la frontière syrienne ajoutent une pression supplémentaire sur les autorités.
Ces derniers jours, la frontière avec la Syrie, qui s’étend sur environ 375 kilomètres, est devenue une source majeure d’inquiétude. Le 17 mars 2025, des affrontements violents ont éclaté dans la région de Hermel, dans la Bekaa, impliquant des groupes armés locaux, majoritairement chiites et proches du Hezbollah, et des forces syriennes affiliées à Hayat Tahrir al-Cham (HTC), qui a pris le contrôle de Damas après la chute de Bachar el-Assad le 8 décembre 2024. Un communiqué officiel de l’armée libanaise, publié sur son site le 17 mars, a confirmé que des tirs en provenance de Syrie avaient atteint le territoire libanais, entraînant une riposte immédiate. Le ministère de la Santé a rapporté le lendemain, dans un bilan officiel, que ces heurts avaient fait sept morts et 52 blessés, dont une fillette de quatre ans, soulignant l’ampleur de la crise.
Les violences ont débuté lorsqu’un groupe armé syrien a tenté de s’infiltrer près d’Al-Qasr, dans le Hermel. Repoussés par des combattants locaux, les accrochages ont dégénéré en une escalade transfrontalière. Damas a accusé le Hezbollah d’avoir enlevé et exécuté trois de ses soldats, une allégation démentie par le parti chiite dans une déclaration diffusée par la chaîne Al-Mayadeen le 17 mars 2025. Les corps de trois individus retrouvés près de la frontière ont été remis aux autorités syriennes via le passage de Joussié, sous la supervision de l’armée libanaise, selon des informations relayées par l’Agence nationale d’information le même jour.
La frontière syro-libanaise, mal délimitée depuis la création du Liban en 1920 sous le mandat français, est un point de friction historique. La guerre civile syrienne, débutée en 2011, avait déjà exacerbé les tensions avec l’arrivée de 1,5 million de réfugiés syriens, selon les estimations officielles de l’UNHCR en 2024. La chute d’Assad et l’ascension de HTC ont toutefois transformé la donne. Le nouveau régime syrien cherche à sécuriser ses frontières pour lutter contre les trafics d’armes et de drogue, souvent attribués à des réseaux libanais. Un article du Monde daté du 10 février 2025 note que HTC a renforcé sa présence militaire près de Qousseir, face à Hermel, augmentant les risques d’incidents transfrontaliers.
En réponse, l’armée libanaise a intensifié ses mesures. Le 19 mars 2025, elle a annoncé, dans un communiqué publié sur son site officiel, la fermeture de plusieurs passages illégaux dans les secteurs de Qasr-Hermel et Macharih Al-Qaa, près de Baalbek, pour empêcher les infiltrations et la contrebande. Ces zones, situées dans la Bekaa, jouent un rôle clé dans les réseaux transfrontaliers. Cependant, ces efforts se heurtent à des contraintes logistiques majeures. Avec environ 80 000 soldats, l’armée reste le pilier de la stabilité, mais un rapport du Centre d’études stratégiques de Beyrouth, publié en février 2025, révèle que son budget a chuté de 60 % en termes réels depuis 2019, en raison de l’inflation et de la dévaluation de la livre libanaise, la rendant dépendante de l’aide internationale.
Les responsables réunis à Baabda ont également discuté des répercussions internes de ces tensions. Ils ont envisagé un renforcement des patrouilles dans les zones urbaines, comme Beyrouth et la Bekaa, où des incidents liés à des rivalités communautaires ou à des activités criminelles ont été signalés ces dernières semaines. Dans un environnement régional complexe, marqué par les conflits en Syrie et dans les territoires palestiniens occupés, le président Aoun a réitéré son engagement à préserver la neutralité du Liban. Une déclaration rapportée par Al-Nahar le 19 février 2025 le cite ainsi : « Le Liban ne doit pas devenir une plateforme pour des attaques contre des pays voisins », une position mise à l’épreuve par les provocations transfrontalières.
Au sud, la mise en œuvre de la résolution 1701 reste entravée par les incursions israéliennes. La Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), en collaboration avec l’armée libanaise, surveille la ligne bleue, mais les violations – bombardements et survols – signalées par le ministère de la Défense le 4 janvier 2025, persistent. Cette situation oblige les forces libanaises à gérer simultanément plusieurs fronts : le sud, la frontière syrienne et la sécurité intérieure, dans un contexte de ressources limitées.
Depuis son entrée en fonction, Joseph Aoun multiplie les initiatives sécuritaires. Le 7 mars 2025, il s’était entretenu avec le ministre de la Défense, Michel Murr, pour discuter du déploiement au sud, selon un compte rendu publié par le ministère. Le 21 février, une réunion avec les ministres de la Défense et de l’Intérieur avait également eu lieu, mettant l’accent sur la stabilisation. La rencontre du 21 mars s’inscrit dans cette continuité, avec une attention particulière portée aux menaces syriennes, qui ajoutent une dimension critique à la crise.
En conclusion, la réunion sécuritaire du 21 mars 2025 au palais de Baabda illustre les efforts du président Joseph Aoun pour naviguer dans une période de turbulences. Les tensions croissantes à la frontière syrienne, combinées aux défis au sud et à la crise économique, placent le Liban dans une situation précaire. La coordination entre les forces de sécurité et le renforcement des capacités militaires sont au cœur des priorités, mais les contraintes logistiques et le contexte régional tendu rendent cette tâche particulièrement ardue.