Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche le 20 janvier 2025 marque un tournant brutal dans la politique américaine au Moyen-Orient, rompant avec la diplomatie plus modérée de Joe Biden. Ce 28 février 2025, Washington intensifie son soutien à Israël et durcit sa position contre l’Iran et ses alliés régionaux, notamment le Hezbollah au Liban, à travers une augmentation des sanctions économiques et une coopération militaire renforcée avec Tel-Aviv. Lors d’un discours récent, Trump a déclaré que « l’axe Iran-Hezbollah-Hamas doit être neutralisé avant qu’il ne devienne une menace incontrôlable », une posture qui suscite des inquiétudes croissantes à Beyrouth. La classe politique libanaise, déjà fracturée, se divise entre ceux qui soutiennent cette approche – souvent proches de Riyad et de Washington – et ceux qui dénoncent une tentative d’isoler davantage le Liban sur la scène internationale.
Dans ce contexte, le gouvernement de Nawaf Salam, formé le 8 février 2025, doit naviguer entre ces tensions exacerbées par la politique trumpienne, tout en évitant une rupture totale avec Washington, acteur économique et diplomatique clé, et en préservant ses relations avec l’Iran, principal soutien du Hezbollah. Cette situation met le Liban sous une pression constante, d’autant que des pourparlers sont en cours avec le Fonds monétaire international (FMI) pour obtenir une aide financière vitale. Alors que le Moyen-Orient reste marqué par les séquelles des guerres de 2024 et une reconfiguration post-Assad, l’administration Trump redessine les dynamiques régionales, avec des implications majeures pour la stabilité et l’économie libanaises.
Une politique de « maximum pressure » revisitée
Le retour de Trump s’accompagne d’une résurrection de sa stratégie de « maximum pressure », qui avait caractérisé son premier mandat (2017-2021) avec un recours intensif aux sanctions économiques contre l’Iran et ses alliés. Ce 28 février 2025, cette approche se traduit par une nouvelle vague de mesures visant les responsables iraniens et leurs réseaux régionaux, y compris le Hezbollah. Ces sanctions ciblent non seulement les finances du groupe chiite mais aussi les institutions libanaises soupçonnées de liens avec lui, accentuant la crise économique d’un pays où les dépôts bancaires de 84 milliards de dollars restent gelés depuis 2019.
Cette politique rompt avec l’approche de Biden, qui, bien que ferme envers l’Iran, avait privilégié une diplomatie multilatérale et un soutien humanitaire limité au Liban après la guerre de 2024 avec Israël. Trump, en revanche, mise sur une coopération militaire renforcée avec Tel-Aviv, illustrée par la levée des restrictions sur les livraisons d’armes lourdes à Israël – suspendues sous Biden pour limiter les pertes civiles à Gaza – et une augmentation des exercices conjoints dans la région. Cette posture vise à neutraliser ce que Trump appelle « l’axe Iran-Hezbollah-Hamas », un trio qu’il perçoit comme une menace croissante depuis les frappes directes entre Israël et l’Iran en 2024 et la chute du régime Assad en décembre de la même année.
Au Liban, cette stratégie ravive les craintes d’un isolement international. Le Hezbollah, affaibli par la guerre de 2024 ayant décimé ses cadres et réduit son arsenal de plus de 100 000 roquettes, reste un acteur central de la politique libanaise, avec ses alliés dans la coalition de Salam. Les sanctions américaines, en ciblant ces réseaux, risquent de fragiliser davantage une économie où l’inflation a atteint 200 % en 2022 et où les transferts de la diaspora, passés de 6,8 milliards de dollars en 2022 à 6,7 milliards en 2023, continuent de décliner face à l’instabilité.
Le Liban entre pressions et divisions internes
Au cœur de cette tempête régionale, Nawaf Salam doit gérer une classe politique profondément divisée. Ce 28 février 2025, certains partis, proches de Riyad et de Washington, saluent la fermeté de Trump contre l’Iran et le Hezbollah, y voyant une opportunité de réduire l’influence de Téhéran au Liban. Ces factions, souvent sunnites ou chrétiennes anti-Hezbollah, espèrent un soutien accru des États-Unis pour renforcer leur position interne. D’autres, y compris les alliés chiites du Hezbollah et des groupes nationalistes, dénoncent une tentative d’isoler le Liban sur la scène internationale, craignant que les sanctions ne paralysent davantage une économie déjà exsangue.
Le cessez-le-feu signé avec Israël le 27 novembre 2024, bien que fragile avec cinq positions israéliennes maintenues au Sud-Liban, avait offert une lueur d’espoir pour stabiliser le pays. Cependant, la posture de Trump complique cette trêve. Les frappes israéliennes sporadiques, comme celle du 8 février 2025 à Janata ayant tué six personnes, et l’intensification des sanctions américaines renforcent le sentiment d’encerclement à Beyrouth. Salam, dans un discours le 23 février, plaidait pour éviter l’effondrement total, une ambition mise à rude épreuve par ces développements externes.
La crise des réfugiés syriens, avec plus d’un million encore présents en 2025, ajoute une couche de complexité. La chute d’Assad a permis plus de 200 000 retours spontanés depuis décembre 2024, mais Salam insiste sur un rapatriement progressif pour alléger le fardeau économique, une position qui heurte certains partenaires européens opposés aux expulsions forcées. Cette question, combinée aux sanctions de Trump, place le Liban dans une position délicate : maintenir des relations avec Washington, clé pour des négociations avec le FMI visant une aide financière vitale, tout en évitant une rupture avec l’Iran, principal soutien du Hezbollah.
L’ombre de Trump sur les négociations avec le FMI
Les pourparlers avec le FMI, en cours ce 28 février 2025, sont cruciaux pour un Liban dont les réserves de la Banque centrale ont chuté de 30 milliards de dollars en 2018 à 10,4 milliards mi-2024, malgré une parité artificielle fixée à 89 500 livres pour un dollar. Ces négociations, initiées sous le gouvernement intérimaire de Najib Mikati en 2022, visent à débloquer une aide estimée à 3 milliards de dollars, conditionnée à des réformes structurelles telles que la restructuration bancaire, la transparence fiscale et la réduction des subventions inefficaces. Sous Biden, Washington avait soutenu ces efforts avec une approche multilatérale, mais l’administration Trump adopte une ligne plus dure, liant son appui à un désengagement du Hezbollah des institutions étatiques.
Cette condition, alignée sur les exigences saoudiennes et émiraties exprimées ce 28 février 2025, met Salam dans une impasse. Répondre à ces attentes risque de fracturer sa coalition, qui inclut des alliés du Hezbollah ayant voté sa confiance le 26 février avec 95 voix. Ignorer ces pressions compromet l’aide du FMI, essentielle pour éviter une cessation de paiement totale, alors que les pertes de la guerre de 2024 – estimées entre 15 et 20 milliards de dollars – aggravent une situation où 80 % des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté.
Un Moyen-Orient redessiné par la rupture trumpienne
L’impact de l’administration Trump dépasse le Liban pour redessiner les dynamiques du Moyen-Orient. Son soutien accru à Israël, illustré par une coopération militaire renforcée et l’abandon des restrictions sur les livraisons d’armes lourdes, contraste avec la prudence de Biden face aux pertes civiles à Gaza et au Liban en 2024. Cette posture renforce Tel-Aviv dans sa lutte contre l’Iran et ses proxies, alors que la chute d’Assad a déjà affaibli l’axe Téhéran-Damas-Hezbollah. Cependant, elle complique les efforts de Salam pour stabiliser le Liban, pris entre les attentes de Washington et les réalités d’une coalition incluant le Hezbollah.
La région, marquée par les séquelles des guerres de 2024, voit les équilibres bouleversés. L’Iran, vulnérable après la perte de ses défenses aériennes lors des frappes israéliennes d’octobre 2024 et la chute de son allié syrien, fait face à une intensification des sanctions américaines visant à neutraliser son influence. Pourtant, cette stratégie de « maximum pressure » risque d’aggraver les tensions au Liban, où le Hezbollah reste un acteur incontournable malgré ses pertes – plus de 80 % de ses missiles détruits en 2024.
Le Liban à la croisée des chemins
Salam doit naviguer dans ce chaos diplomatique avec une économie au bord du gouffre et une société fracturée. Le 28 février 2025, alors que les pourparlers avec le FMI avancent péniblement, le durcissement de Trump contre l’Iran et le Hezbollah place Beyrouth dans une position intenable : céder aux pressions occidentales pour sécuriser une aide financière ou préserver une stabilité interne déjà fragile en évitant une rupture avec Téhéran. La guerre de 2024, avec ses 15 à 20 milliards de dollars de pertes, et la crise des réfugiés syriens – plus d’un million de personnes pesant sur des infrastructures en ruine – ne laissent aucune marge d’erreur.
Le Liban, historiquement un théâtre des rivalités régionales, risque de devenir un pion dans la stratégie de Trump pour remodeler le Moyen-Orient. Alors que certains partis locaux soutiennent cette fermeté contre l’Iran, d’autres craignent un isolement total, aggravant une crise où les besoins humanitaires rivalisent avec les impératifs politiques. Sans un équilibre entre ces tensions, le gouvernement Salam pourrait voir ses ambitions de réforme – et le pays lui-même – s’effondrer sous le poids des pressions externes et internes.