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Le grand désarmement : l’armée libanaise face au Hezbollah et à Israël

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Une transition militaire discrète aux effets profonds

Depuis la fin de l’année 2024, un changement silencieux mais massif s’opère sur les hauteurs sud du Liban. Dans une zone historiquement instable, théâtre d’affrontements récurrents entre Israël et le Hezbollah, plus de 500 positions militaires de l’organisation chiite ont été méthodiquement démantelées. Ces opérations, tenues dans la plus grande discrétion, s’inscrivent dans l’application concrète d’un cessez-le-feu conclu après les hostilités de l’automne précédent.

Ce démantèlement, conduit sans confrontation armée, symbolise un tournant dans l’approche sécuritaire de l’État libanais. Il reflète une volonté de réaffirmation de l’autorité institutionnelle sur l’ensemble du territoire. Ce virage stratégique, incarné par la nouvelle présidence, se déploie sans tambour ni trompette, mais avec une constance remarquable.

Des opérations sous contrôle militaire étroit

Le dispositif mis en œuvre repose sur des unités régulières de l’armée libanaise, appuyées par des ingénieurs militaires spécialisés dans la neutralisation d’infrastructures tactiques. Il s’agit principalement de bunkers, de tunnels de communication, de postes d’observation et de dépôts logistiques dissimulés dans les zones rurales frontalières.

Chaque site fait l’objet d’un repérage préalable, suivi d’une phase de vérification sécuritaire avant destruction. Ce processus, souvent nocturne, est conçu pour éviter toute confrontation directe avec les éléments armés encore présents sur le terrain. Les forces engagées agissent avec des consignes de retenue stricte, dans un souci de stabilité locale.

La plupart des infrastructures ciblées étaient, selon des sources militaires, inactives ou faiblement occupées, ce qui a permis leur neutralisation sans incident majeur. Cette approche, graduelle et ciblée, contraste avec les logiques de confrontation du passé et témoigne d’un changement méthodologique dans la doctrine de sécurité nationale.

Une stratégie présidentielle assumée

Au sommet de l’État, cette opération marque l’empreinte d’un président déterminé à restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire. L’initiative présidentielle ne s’inscrit pas dans une logique d’affrontement avec le Hezbollah, mais dans une volonté de redéfinir les équilibres entre les forces militaires et les institutions civiles.

Le président a conditionné toute avancée future dans le processus de désarmement à un retrait israélien complet des zones encore occupées dans le sud du pays. Ce lien explicite entre la souveraineté territoriale et la sécurité nationale introduit une articulation nouvelle dans la politique de défense libanaise.

En revendiquant le contrôle de l’État sur les outils de la force légitime, le chef de l’État engage une recomposition des règles du jeu sécuritaire. Il entend affirmer une autorité civile sur les territoires où s’étaient imposées, depuis des décennies, des logiques paramilitaires tolérées de facto.

Une dynamique soutenue par le Conseil supérieur de défense

Le Conseil supérieur de défense, convoqué à Baabda dans ce contexte, se prépare à annoncer un virage stratégique majeur. Le choix des mots — “grand virage stratégique” — laisse présager une révision profonde de la doctrine de défense, possiblement fondée sur l’intégration de toutes les forces armées dans un seul commandement unifié.

Cette réunion devrait également aborder la sécurisation des camps palestiniens, la régulation des armes non déclarées et la coordination avec les forces internationales encore présentes au Sud. Elle s’inscrit dans une séquence institutionnelle inédite où le Conseil reprend un rôle moteur dans l’architecture sécuritaire du pays.

Les décisions attendues marqueront la fin d’une période d’ambiguïtés fonctionnelles entre l’armée nationale et les milices armées opérant sur le territoire. Cette clarification, bien que progressive, redéfinit les rapports entre l’État et ses partenaires armés non étatiques.

Les réactions internes : prudence et silence

Du côté des partis politiques, cette évolution est accueillie avec une prudence notable. Aucun mouvement politique majeur n’a ouvertement critiqué l’initiative présidentielle. Cette retenue peut être interprétée comme un acquiescement tacite à une orientation qui bénéficie d’un soutien populaire croissant.

Les forces de la majorité parlementaire préfèrent souligner l’importance de la “stabilité”, sans entrer dans le détail des opérations. Quant aux formations d’opposition, elles saluent “tout renforcement de la souveraineté nationale” tout en rappelant la nécessité d’un dialogue national inclusif.

Cette absence de polarisation publique suggère une convergence implicite sur les objectifs sécuritaires, même si les divergences demeurent sur les modalités.

Un impact régional soigneusement mesuré

Sur le plan régional, les partenaires arabes du Liban observent cette évolution avec intérêt. L’engagement du président dans une tournée diplomatique récente à Abou Dhabi a permis de réaffirmer la position libanaise en faveur d’une souveraineté intégrale. La réouverture annoncée de l’ambassade des Émirats à Beyrouth a valeur de signal politique.

Les Émirats arabes unis, en saluant l’engagement du président pour la reconstruction et la sécurité, ont implicitement validé la stratégie en cours. Ce soutien diplomatique renforce la légitimité du processus engagé et ouvre la voie à des appuis régionaux supplémentaires.

Cette normalisation progressive de la diplomatie libanaise repose sur une image renouvelée d’un État capable d’exercer son autorité sans recours à la confrontation, mais dans le respect des équilibres internes.

Les implications militaires de long terme

Le démantèlement de la logistique militaire du Hezbollah dans le sud redéfinit les marges de manœuvre de l’organisation sur le terrain. En réduisant sa capacité de projection dans certaines zones, il devient plus difficile pour elle de maintenir une présence offensive visible.

Cependant, cela ne signifie pas une disparition des capacités stratégiques. Le Hezbollah conserve des réseaux logistiques profonds, en particulier dans la vallée de la Bekaa. Ce repositionnement pourrait entraîner une redéfinition de ses priorités géographiques, voire une concentration de ses ressources sur des territoires moins exposés à l’intervention de l’État.

Le défi pour l’armée libanaise sera de maintenir un équilibre entre neutralisation de la menace, prévention de l’affrontement et reconstruction de la confiance civile.

Vers une nouvelle architecture sécuritaire ?

Les éléments disponibles suggèrent une volonté présidentielle de bâtir un nouveau modèle sécuritaire fondé sur la souveraineté, l’unité du commandement et la transparence opérationnelle. Cette architecture repose sur trois piliers : monopole de la violence légitime, restauration du maillage territorial, et coopération régionale.

Un tel modèle implique une redéfinition des fonctions de l’armée libanaise, appelées à devenir non seulement une force de dissuasion mais aussi un acteur de la reconstruction nationale. Cela suppose une réforme profonde du commandement militaire, une modernisation des équipements et un appui budgétaire stable.

Les discussions en cours avec les partenaires internationaux, notamment européens, devraient fournir les leviers nécessaires à cette mutation.

Une transition à risques maîtrisés

La stratégie présidentielle n’est pas sans risques. Elle suppose une cohésion interne forte, une communication discrète mais efficace, et un environnement régional relativement stable. La moindre erreur d’interprétation ou provocation pourrait raviver des tensions sous-jacentes.

Mais l’ampleur du démantèlement réalisé sans incident majeur est en soi un indicateur de la réussite de cette transition. Elle témoigne de la capacité de l’État à agir avec méthode, patience et autorité dans un environnement historiquement fragmenté.

Ce qui se joue aujourd’hui dans le sud du Liban, au-delà des considérations immédiates, est la redéfinition de la relation entre le pouvoir civil, la force armée, et la souveraineté effective.

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Newsdesk Libnanews
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