samedi, novembre 15, 2025

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« Trop, c’est trop ! » : les Libanais face au choc fiscal de 2025

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Un budget sous pression : la nécessité de nouvelles sources de revenus

Le projet de budget 2025 du gouvernement libanais s’inscrit dans un contexte économique critique où les finances publiques sont en grande difficulté. Après plusieurs années de crise, le Liban cherche désespérément à stabiliser ses comptes en augmentant ses recettes fiscales. Cette tentative de redressement passe par l’imposition de nouvelles taxes et l’augmentation de certains impôts existants, un choix qui suscite de vives tensions au sein de la société et des milieux économiques​.

Depuis l’effondrement du système financier en 2019, l’État peine à financer ses dépenses publiques et à assurer les services de base, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé et des infrastructures. Le gouvernement actuel, sous pression des bailleurs de fonds internationaux, cherche à élargir la base fiscale en ciblant de nouvelles catégories de contribuables, notamment les professionnels indépendants, les entreprises opérant en devises et les propriétaires immobiliers.

L’une des mesures les plus controversées du budget 2025 concerne l’augmentation de la TVA sur certains biens et services, qui devrait passer de 11 % à 15 % sur plusieurs produits de consommation courante. Cette décision est justifiée par la nécessité d’aligner la fiscalité libanaise sur les standards internationaux et de compenser les pertes budgétaires liées à la diminution des exportations et à la baisse des entrées de devises​.

En parallèle, les droits de douane sur les importations sont revus à la hausse, ce qui impacte directement le prix des produits importés, notamment les denrées alimentaires et les équipements électroniques. Le gouvernement espère ainsi réduire le déficit commercial tout en générant des revenus supplémentaires, mais cette mesure risque surtout de faire grimper encore davantage le coût de la vie.

Parmi les nouvelles taxes introduites, on trouve également une taxation accrue des transactions immobilières, qui vise à limiter la spéculation foncière et à encourager les investissements productifs dans d’autres secteurs. Cependant, cette décision freine aussi l’activité du marché immobilier, déjà en difficulté, et suscite l’inquiétude des promoteurs et des investisseurs​.

D’un point de vue macroéconomique, les autorités libanaises estiment que ces réformes sont indispensables pour rétablir la confiance des marchés et relancer les discussions avec le Fonds monétaire international (FMI). L’institution financière internationale conditionne son soutien à la mise en place d’une fiscalité plus efficace et à l’augmentation des recettes publiques afin de garantir la soutenabilité de la dette​.

Cependant, de nombreux économistes et analystes critiquent la mise en place de ces taxes sans contrepartie sociale adéquate. Pour eux, le gouvernement devrait d’abord s’attaquer à la corruption et à l’évasion fiscale, qui privent l’État de plusieurs milliards de dollars chaque année, au lieu de pénaliser directement les citoyens et les entreprises déjà éprouvés par la crise​.

Malgré ces critiques, les autorités restent déterminées à mettre en œuvre ces réformes fiscales, affirmant qu’elles sont essentielles pour éviter une faillite totale du pays. Mais cette politique risque de provoquer une contestation sociale majeure, dans un pays où la défiance envers les institutions est déjà profonde​.

Des taxes qui frappent de plein fouet la population

L’impact des nouvelles taxes annoncées dans le cadre du budget 2025 se fait déjà sentir sur l’ensemble de la population libanaise. Dans un contexte où l’inflation a déjà réduit drastiquement le pouvoir d’achat des ménages, l’augmentation des impôts et des droits de douane risque d’aggraver encore davantage la situation économique. Les travailleurs, les retraités et les familles à revenus modestes sont particulièrement touchés par ces réformes fiscales, qui affectent de nombreux produits et services essentiels​.

L’un des changements les plus critiqués concerne l’augmentation de la TVA sur les produits de première nécessité. Alors que de nombreux Libanais luttent déjà pour subvenir à leurs besoins de base, cette mesure entraîne une hausse immédiate des prix de l’alimentation, de l’énergie et des transports. Les produits importés, qui constituent une grande partie de la consommation nationale, voient leurs prix s’envoler en raison de la combinaison de la TVA plus élevée et de l’augmentation des droits de douane​.

Dans les supermarchés et les marchés populaires, les commerçants font face à des marges réduites et à une baisse de la demande, car les consommateurs réduisent leurs achats au strict nécessaire. Certains produits alimentaires de base, comme le pain, les produits laitiers et les huiles végétales, enregistrent des augmentations de prix de 15 à 20 % en quelques semaines, rendant l’accès à une alimentation équilibrée encore plus difficile pour les familles les plus précaires​.

Les effets de ces mesures ne se limitent pas aux produits de consommation courante. Le secteur du logement est également fortement impacté par les nouvelles taxes immobilières, qui rendent l’accès à la propriété plus coûteux. De nombreux acheteurs potentiels se retrouvent dans l’incapacité de finaliser leurs transactions, tandis que les propriétaires fonciers répercutent ces coûts sur les loyers. Les jeunes générations, déjà pénalisées par le chômage élevé et la stagnation des salaires, voient ainsi leur rêve d’accession à la propriété s’éloigner encore un peu plus​.

Le secteur automobile est un autre domaine durement touché par ces nouvelles taxes. L’augmentation des droits de douane sur les véhicules importés, couplée à la hausse des prix du carburant et des assurances, rend l’achat et l’entretien d’un véhicule presque inabordable pour une grande partie de la populationLes chauffeurs de taxis et les travailleurs du transport public dénoncent une politique fiscale qui les pousse à l’endettement ou à l’abandon de leur activité​.

Par ailleurs, les nouvelles taxes sur les revenus et les entreprises en devises étrangères sont perçues comme une attaque directe contre la classe moyenne et les travailleurs expatriés, qui envoient régulièrement des fonds à leurs familles restées au Liban. Certains salariés, qui touchaient leur salaire en dollars, sont désormais soumis à des taux d’imposition plus élevés, réduisant considérablement leur pouvoir d’achat​.

Les travailleurs indépendants et les petits entrepreneurs sont également en difficulté face à ces nouvelles obligations fiscales. Beaucoup d’entre eux, déjà fragilisés par la crise économique, considèrent ces mesures comme un coup fatal à leurs activitésCertains envisagent de fermer boutique ou de quitter le pays, aggravant ainsi l’exode des compétences et des capitaux vers l’étranger​.

Cette pression fiscale accrue, couplée à l’absence de services publics de qualité en retour, alimente un sentiment d’injustice généraliséLes citoyens estiment payer de plus en plus sans bénéficier d’améliorations concrètes dans leur quotidien, que ce soit en termes d’éducation, de santé ou d’infrastructures​.

Malgré ces critiques, le gouvernement affirme que ces réformes sont indispensables pour rétablir les finances publiques et relancer l’économie. Toutefois, les experts économiques soulignent que sans une lutte effective contre la corruption et l’évasion fiscale, ces nouvelles taxes ne feront qu’aggraver les inégalités et la précarité​.

La grogne sociale et les mobilisations contre la fiscalité

Face à l’augmentation de la pression fiscale, la colère monte au sein de la population libanaise. Les nouvelles taxes imposées par le gouvernement ont déclenché une vague de contestation, notamment parmi les travailleurs, les fonctionnaires et les commerçants, qui estiment être les premières victimes de ces réformes. Dans un pays où le pouvoir d’achat s’est effondré et où les salaires ne suivent plus l’inflation, ces nouvelles mesures sont perçues comme une injustice supplémentaire​.

Depuis l’annonce du budget 2025, les syndicats et les organisations de la société civile multiplient les appels à la mobilisationDes manifestations ont éclaté à Beyrouth, Tripoli et Saïda, où des milliers de travailleurs sont descendus dans les rues pour protester contre la hausse des impôts et l’absence de compensations sociales. Ces mouvements de contestation rappellent ceux qui avaient marqué le pays en 2019, avec la même revendication centrale : un système fiscal plus juste et une redistribution équitable des richesses​.

L’un des acteurs majeurs de cette contestation est l’Union générale des travailleurs au Liban, dont le président, Béchara Al-Asmar, a vivement critiqué la politique fiscale du gouvernement. Selon lui, l’État impose de nouvelles taxes sans offrir de solutions pour soutenir les ménages les plus fragiles. Il insiste notamment sur la nécessité d’une indemnité de cherté de vie de 9 millions de livres libanaises pour compenser l’impact de ces mesures fiscales, jugeant que l’augmentation du salaire minimum à 18 millions de livres reste insuffisante pour couvrir l’explosion du coût de la vie​.

« Nous ne pouvons pas accepter une fiscalité qui écrase les travailleurs sans toucher les grands bénéficiaires du système. Où sont les réformes contre la corruption ? Où sont les mesures pour récupérer l’argent volé ? » a-t-il déclaré lors d’un rassemblement à Beyrouth​.

Cette indignation se traduit également par des grèves dans plusieurs secteurs clés, notamment l’éducation, les transports et la santé. Les enseignants du secteur public, dont les salaires ont été largement dévalorisés par la crise, ont suspendu les cours à plusieurs reprises pour exiger des ajustements salariaux prenant en compte l’inflation et la montée des taxes​.

Dans le secteur des transports, les chauffeurs de taxis et de bus dénoncent une hausse des coûts qui rend leur activité de plus en plus difficile. L’augmentation du prix du carburant, combinée à de nouvelles taxes sur l’entretien des véhicules et les assurances, réduit leur marge de profit à un niveau critique. Certains ont menacé de paralyser le pays en bloquant les routes principales, une stratégie déjà utilisée dans les mouvements de protestation précédents​.

Dans les hôpitaux publics, la situation est tout aussi tendue. Le personnel médical, confronté à une charge de travail accrue et à des conditions de plus en plus précaires, manifeste contre un gouvernement qu’il accuse de ne pas respecter ses engagements en matière de financement du secteur de la santéL’augmentation des coûts des équipements et des médicaments, liée aux nouvelles taxes sur les importations, affecte directement la capacité des hôpitaux à fournir des soins de qualité, ce qui risque d’aggraver encore davantage la crise sanitaire​.

Ces manifestations et mouvements de grève traduisent une exaspération généralisée face à une politique fiscale perçue comme injuste et inefficaceDe nombreux manifestants exigent un véritable plan de relance économique et non une simple multiplication des impôts, qui, selon eux, ne fera qu’aggraver la récession et pousser encore plus de Libanais à l’exil​.

Les tensions ne se limitent pas aux travailleurs. Des commerçants et des chefs d’entreprise s’inquiètent de l’effet des nouvelles taxes sur l’activité économique, arguant que ces mesures vont réduire la consommation et freiner la reprise. Certains estiment que le gouvernement aurait dû privilégier des réformes structurelles, notamment la lutte contre l’évasion fiscale et la récupération des fonds détournés, avant d’imposer de nouvelles taxes​.

« Pourquoi toujours taxer les travailleurs et les classes moyennes alors que les grandes fortunes et les politiciens corrompus continuent de prospérer ? Nous voulons des réformes qui s’attaquent aux vrais problèmes du pays ! », s’est indigné un commerçant interrogé lors d’une manifestation à Tripoli​.

Face à cette montée de la colère populaire, le gouvernement tente de temporiser en promettant des ajustements et des compensations, notamment des aides ciblées pour les familles les plus démunies et des exonérations partielles pour certaines catégories de travailleurs. Cependant, ces annonces restent floues et ne semblent pas convaincre une population qui a perdu toute confiance dans les promesses politiques​.

Le climat social devient de plus en plus explosif, et certains experts redoutent une amplification des mobilisations dans les semaines à venir, voire une nouvelle crise politique majeure si le gouvernement ne parvient pas à désamorcer les tensions​.

Une politique fiscale en quête d’équilibre : défis et alternatives pour le gouvernement

Malgré la contestation grandissante, le gouvernement libanais défend ses réformes fiscales en arguant qu’elles sont indispensables pour éviter l’effondrement complet des finances publiques. Selon les autorités, les nouvelles taxes sont le seul moyen de réduire le déficit budgétaire, qui continue de peser lourdement sur l’économie nationale​.

Le Premier ministre et le ministre des Finances ont tenté de justifier ces mesures en expliquant que le pays n’a plus d’autre choix que d’augmenter ses recettes fiscales, faute de ressources alternativesIls mettent en avant la nécessité d’un accord avec le Fonds monétaire international (FMI), qui exige des réformes budgétaires avant d’accorder tout programme d’aide au Liban​.

Cependant, plusieurs experts et économistes remettent en question cette approche, estimant que l’augmentation des impôts et des taxes, en pleine crise économique, risque d’accentuer la récession et d’affaiblir encore davantage la consommation et l’investissement. Une fiscalité trop lourde pourrait, selon eux, décourager les initiatives économiques et inciter encore plus d’entreprises et d’individus à quitter le pays​.

L’un des principaux reproches faits au gouvernement concerne son incapacité à lutter efficacement contre l’évasion fiscale et la corruption, qui privent l’État de ressources bien plus importantes que celles générées par les nouvelles taxes. Selon certaines estimations, la fraude fiscale et les détournements de fonds coûtent au Liban plusieurs milliards de dollars chaque année, une somme bien supérieure aux recettes espérées par l’augmentation de la TVA et des impôts directs​.

Un économiste a ainsi déclaré :

« Pourquoi imposer davantage de taxes sur les travailleurs et les petites entreprises alors que les grandes fortunes et les sociétés influentes continuent d’échapper à l’impôt ? Tant que la corruption reste endémique, toute réforme fiscale sera perçue comme injuste et inefficace. »​.

Les alternatives proposées par les experts comprennent une meilleure gestion des ressources publiques, la réduction des dépenses inutiles et la récupération des fonds détournés par les élites politiques. Certains prônent également une réforme progressive de l’impôt sur les grandes fortunes et les transactions financières, permettant de rééquilibrer la charge fiscale sans alourdir le fardeau des classes populaires et moyennes​.

En réponse à ces critiques, le gouvernement a annoncé plusieurs ajustements possibles, notamment des exonérations fiscales pour certaines catégories de travailleurs à faibles revenus et des aides ciblées pour compenser la hausse des prix. Toutefois, ces mesures restent floues et largement insuffisantes pour calmer la colère de la rue​.

Le débat sur les réformes fiscales s’inscrit également dans une lutte politique plus large entre les différentes factions du pouvoir, où certains partis cherchent à tirer profit de la situation pour renforcer leur influence. L’opposition accuse le gouvernement d’utiliser ces nouvelles taxes comme un levier politique, plutôt que comme une solution réellement efficace pour stabiliser l’économie​.

Un responsable de l’opposition a déclaré :

« Ces réformes ne sont pas conçues pour sauver l’économie, mais pour permettre aux dirigeants de maintenir leur contrôle sur les finances publiques et de favoriser leurs propres intérêts. »​.

Avec un pays déjà au bord de l’explosion sociale, certains analystes estiment que le gouvernement devra tôt ou tard revoir sa copie et proposer des solutions alternativesLa pression populaire et syndicale pourrait contraindre les autorités à négocier un allègement des mesures les plus impopulaires, voire à envisager une réforme plus équitable du système fiscal​.

Le gouvernement se trouve donc dans une impasse où chaque décision risque de provoquer de nouvelles tensionsS’il maintient les taxes, il pourrait faire face à une crise sociale majeure. S’il recule, il risque de compromettre les négociations avec le FMI et de perdre toute crédibilité auprès des créanciers internationaux​.

L’avenir de ces réformes reste donc incertain, et leur succès dépendra de la capacité du gouvernement à convaincre la population de leur nécessité tout en mettant en place des mécanismes de compensation efficacesSi aucune solution équilibrée n’est trouvée, le pays pourrait être confronté à une nouvelle vague de protestations et d’instabilité politique dans les mois à venir​.

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